Adèle, la Palme et le sexisme

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  • La société française et ses institutions rétropédalent dans la semoule du puritanisme

    La Vie d’Adèle interdit : « La connerie avance à grand pas » - L’Express
    http://www.lexpress.fr/culture/cinema/la-vie-d-adele-interdit-la-connerie-avance-a-grand-pas_1744278.html

    La Palme d’or 2013, La Vie d’Adèle d’Adellatif Kechiche, n’a plus droit, à ce jour, d’être diffusé sur grand écran. A l’origine de cette décision, une plainte de l’association Promouvoir, qui a obtenu gain de cause devant la Cour administrative de Paris : le visa d’exploitation du film est annulé, alors qu’il n’était jusque-là qu’interdit aux moins de 12 ans avec avertissement.

    Palmarès des succès passés de l’association"Promouvoir", grande défenseure des valeurs de la civilisation « judéo-chrétienne » :
    http://www.timeout.fr/paris/le-blog/top-5-des-prochains-films-attaques-par-lassociation-promouvoir-080515

    #réaction #obscurantisme

    • Abdellatif Kechiche : “Qu’on n’utilise pas mon film pour se faire passer pour des défenseurs de la liberté d’expression”
      http://www.lesinrocks.com/2015/12/18/cinema/entretien-avec-abdellatif-kechiche-11794298

      La Cour administrative d’appel a annulé le visa d’exploitation de la Vie d’Adèle, donnant raison à l’association Promouvoir. A la surprise générale, tu as exprimé ton accord avec cette décision, regrettant que le ministère de la Culture aille en Cassation.
      Abdellatif Kechiche – J’aurais voulu rester en dehors de tout ça, qu’on m’oublie avec La Vie d’Adèle. Je veux tourner mon prochain film et surtout pas qu’on me remette à “l’honneur” (rires)…
      Cette décision n’est-elle pas absurde trois ans après que le film a été diffusé en salles, en dvd, que son public l’a vu et sait de quoi il retourne ?
      Les procès, c’est toujours long. Je n’ai pas suivi cette procédure et c’est récemment que j’ai appris qu’il y avait des polémiques et que certains ont pris la “défense” de mon film, ce qui m’est insupportable. On ose parler au nom de mon film, on crée encore de la discorde, comme au moment de sa sortie. L’association Promouvoir n’a pas créé la discorde et n’est pas responsable de la décision de la justice.
      C’est quand même cette association qui a saisi la justice et qui est à l’origine de cette affaire !
      Mais elle est en droit de saisir la justice, et les juges sont en droit de rendre un verdict, et on est en droit de le respecter.

      #paywall, mais on lit ailleurs

      « Entre Sarkozy et Marine Le Pen, je préfère Le Pen »

      https://twitter.com/TurcanMarie/status/677877228059779072

      alors qu’il a aussi soutenu Estrosi pour faire barrage au FN...

      http://www.lemonde.fr/cinema/article/2015/12/10/le-visa-d-exploitation-de-la-vie-d-adele-annule_4828806_3476.html

      « Je n’ai jamais pensé que mon film pouvait être vu par des gamins de 12 ans, et je déconseille personnellement à ma fille de le voir avant qu’elle ait 14 ou 15 ans. » Aussi l’interdiction aux moins de 16 ans ne le « dérangerait pas », a-t-il déclaré au Monde. Cette histoire d’amour n’a-t-elle pas pour héroïne une lycéenne ? « Mes films touchent à l’adolescence, mais s’adressent plutôt à ceux qui ont une nostalgie de l’adolescence. Ça a plus d’intérêt pour les adultes que pour les adolescents qui n’ont pas encore vécu la douleur d’une rupture. C’est avant tout un film sur la rupture », analyse le réalisateur.

    • « Entre Sarkozy et Marine Le Pen, je préfère Le Pen »

      Bizarre qu’il se sente obligé de choisir l’une ou l’autre ...

      Son opinion quant à la censure de son film est également bien étrange : pourquoi ne s’est-il pas positionné clairement sur cette question d’âge à la sortie du film ?

  • Festival de Cannes : le cinéma (presque) sans les femmes - Terriennes
    http://www.tv5.org/cms/chaine-francophone/Terriennes/Dossiers/p-25412-Festival-de-Cannes-le-cinema-presque-sans-les-femmes.htm

    Qu’écrit donc de si terrible Manohla Dargis dans son compte-rendu de La vie d’Adèle : " Cette extravagance indisciplinée de 2h59 suit l’éducation sentimentale de son héroïne Adèle, entre ses 15 et 20 ans et le changement de sa vie opérée par son amour avec une autre femme. (.../...) Une heure et demi après le début du film, les deux se retrouvent au lit - et même si je n’ai pas chronométré, cela m’a semblé aussi interminable que pour ce confrère qui s’est plaint d’avoir du regardé sans sa montre. (.../...) Cette intimité est censée nous faire approcher au plus près de la conscience d’Adèle. En réalité, avec la caméra pointée sur sa bouche ouverte et son corps offert, même lorsqu’elle dort et que son joli derrière est si bien cadré, le film dit bien plus bien plus sur les désirs de Kechiche que sur quoi que ce soit d’autre. Il est décevant que Mr Kechiche, dont l’oeuvre englobe « La graine et le mulet » et « Vénus noire » - un autre exercice de voyeurisme - (Venus noire est un film sur une femme exhibée lors des expositions coloniales en France, ndlr), semble si loin ou si peu intéressé par les questions des représentations du corps féminin que les féministes posent depuis des décennies. Aussi sympathiques que sont les personnages et la quantité prodigieuse de larmes produites par Adèle Exarchopoulos (l’actrice principale, ndlr) lors de quelques moments poignants, Mr Kechiche s’inscrit comme ignorant des femmes. Il est aussi nul que ces mâles qui papotent à l’infini sur le mystique orgasme féminin et l’art, inconscient des barrières que les artistes femmes rencontrent ou pourquoi ces barrières pourraient expliquer la nature de l’art produit qui durant des siècles a défiguré la nudité des femmes. « Les hommes regardent les femmes », écrivait le critique d’art John berger en 1972, « et les femmes se regardent ainsi regardées ».

    Et le point de vue de Julie Maroh, auteure de la BD dont est tiré le film :

    Le bleu d’Adèle
    http://www.juliemaroh.com/2013/05/27/le-bleu-dadele

    Je ne connais pas les sources d’information du réalisateur et des actrices (qui jusqu’à preuve du contraire sont tous hétéros), et je n’ai pas été consultée en amont. Peut-être y’a t’il eu quelqu’un pour leur mimer grossièrement avec les mains les positions possibles, et/ou pour leur visionner un porn dit lesbien (malheureusement il est rarement à l’attention des lesbiennes). Parce que – excepté quelques passages – c’est ce que ça m’évoque : un étalage brutal et chirurgical, démonstratif et froid de sexe dit lesbien, qui tourne au porn, et qui m’a mise très mal à l’aise. Surtout quand, au milieu d’une salle de cinéma, tout le monde pouffe de rire. Les hérétonormé-e-s parce qu’ils/elles ne comprennent pas et trouvent la scène ridicule. Les homos et autres transidentités parce que ça n’est pas crédible et qu’ils/elles trouvent tout autant la scène ridicule. Les seuls qu’on n’entend pas rire ce sont les éventuels mecs qui sont trop occupés à se rincer l’œil devant l’incarnation de l’un de leurs fantasmes.
    Je comprends l’intention de Kechiche de filmer la jouissance. Sa manière de filmer ces scènes est à mon sens directement liée à une autre, où plusieurs personnages discutent du mythe de l’orgasme féminin, qui… serait mystique et bien supérieur à celui de l’homme. Mais voilà, sacraliser encore une fois la femme d’une telle manière je trouve cela dangereux.
    En tant que spectatrice féministe et lesbienne, je ne peux donc pas suivre la direction prise par Kechiche sur ces sujets.
    Mais j’attends aussi de voir ce que d’autres femmes en penseront, ce n’est ici que ma position toute personnelle.

    #femmes #cinéma #Cannes #féminisme #homosexualité