/Assommons_les_pauvres_

  • Assommons les pauvres ! - Wikisource
    https://fr.wikisource.org/wiki/Assommons_les_pauvres_ !

    Immédiatement, je sautai sur mon mendiant. D’un seul coup de poing, je lui bouchai un œil, qui devint, en une seconde, gros comme une balle. Je cassai un de mes ongles à lui briser deux dents, et comme je ne me sentais pas assez fort, étant né délicat et m’étant peu exercé à la boxe, pour assommer rapidement ce vieillard, je le saisis d’une main par le collet de son habit, de l’autre, je l’empoignai à la gorge, et je me mis à lui secouer vigoureusement la tête contre un mur. Je dois avouer que j’avais préalablement inspecté les environs d’un coup d’œil, et que j’avais vérifié que dans cette banlieue déserte je me trouvais, pour un assez long temps, hors de la portée de tout agent de police.

    Ayant ensuite, par un coup de pied lancé dans le dos, assez énergique pour briser les omoplates, terrassé ce sexagénaire affaibli, je me saisis d’une grosse branche d’arbre qui traînait à terre, et je le battis avec l’énergie obstinée des cuisiniers qui veulent attendrir un beefteack.

    Tout à coup, — ô miracle ! ô jouissance du philosophe qui vérifie l’excellence de sa théorie ! — je vis cette antique carcasse se retourner, se redresser avec une énergie que je n’aurais jamais soupçonnée dans une machine si singulièrement détraquée, et, avec un regard de haine qui me parut de bon augure, le malandrin décrépit se jeta sur moi, me pocha les deux yeux, me cassa quatre dents, et avec la même branche d’arbre me battit dru comme plâtre. — Par mon énergique médication, je lui avais donc rendu l’orgueil et la vie.

    #baudelaire (sûrement sous teuchi) #boxe

  • Variation sur un petit poème en prose
    Assommons les pauvres ! - Les blogs du Diplo
    http://blog.mondediplo.net/2013-06-10-Assommons-les-pauvres
    https://fr.wikisource.org/wiki/Assommons_les_pauvres_ !

    « Assommons les pauvres ! », enjoignait cruellement Charles Baudelaire dans Le Spleen de Paris (1869). Dans cette fable grotesque composée entre 1864 et 1865, il ne proposait pas de les assommer pour s’en débarrasser, mais pour les sauver. Son personnage, « revenu des promesses » d’une période optimiste, se met à rouer de coups un vieux mendiant au lieu de lui faire l’aumône. Surprise ! « L’antique carcasse » se rebelle, et rend alors les coups de manière si convaincante que l’agresseur partage alors volontiers son bien. Baudelaire nous a-t-il indiqué la meilleure voie pour sortir de la misère ?

    #poésie #idéologie #inégalités

    Sur les inégalités :
    http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2013-05-14-Inegalites