Blog d’information participatif | Mediapart

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  • Quatre figures actuelles du brouillage idéologique : Laurent Bouvet, Jean-Claude Michéa, Eric Zemmour, Alain Soral | Université Populaire de LYON
    http://unipoplyon.fr/articles/cours/trois-figures-actuelles-du-brouillage-ideologique-laurent-bouvet-jean-cla
    http://unipoplyon.fr/core/wp-content/uploads/2014/02/corcuff_18-02-14.mp3

    #Xénophobie, #antisémitisme, #islamophobie, #racisme anti-noir, #machisme, #homophobie... cette #idéologie néoconservatrice a deux principaux pôles émetteurs : l’un au cœur du paysage médiatique, habitué à caricaturer musulmans et Noirs, l’autre dans l’underground très actif d’internet, préférant s’en prendre au « suprématisme juif » (selon l’expression d’Alain Soral dans son ouvrage avec Éric Naulleau, Dialogues désaccordés, Blanche/Hugo & Cie, 2013). Le héraut du premier pôle est Zemmour, le héros du second Soral.
    Par-delà les divergences réelles entre les deux pôles, on repère un bricolage de thèmes communs. Et puis ils ont hérité de leur bouc émissaire préféré, BHL, quelques traits contribuant à la désintellectualisation en cours du débat public : l’enfilage de lieux communs plutôt que l’enquête au plus près des complications du réel, le marketing des idées vagues plutôt que le patient travail des concepts, l’arrogance rhétorique plutôt que l’argumentation raisonnée. Les marionnettes de l’anticonformisme ressemblent, dans leur absence de rigueur et leur goût pour la mise en spectacle, aux marionnettes du #conformisme qu’elles dénoncent.

  • Impasse Michéa
    http://www.revuedeslivres.fr/impasse-michea-par-frederic-lordon

    des détestations communes ne font pas une pensée commune. Ni une politique. On peut facilement partager avec Michéa sa vacherie sarcastique à propos des plus ridicules manifestations de la branchitude mondialisée, mais pas grand-chose de plus. Ne reconnaît-on pas les convergences de rencontre au fait qu’on peut se rendre en leur foyer depuis des directions très différentes ? Voire très opposées. C’est le cas ici, car la vision du monde qui soutient les sarcasmes partageables de Michéa n’est pas (...)

    • Lien avec http://seenthis.net/messages/154210

      #Michéa #Jean-Claude-Michéa #Frédéric-Lordon #progressisme #Progrès #gauche #socialisme

      Et la réponse de Michéa à Corcuff sur Mediapart, qui contient plusieurs paragraphes répondant directement à Lordon :
      http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/020813/en-reponse-corcuff

      Lorsque, dans le Complexe d’Orphée, j’écris que « ce n’est donc pas tant par leur prétendue “nature” que les classes populaires sont encore relativement protégées de l’égoïsme libéral. C’est bien plutôt par le maintien d’un certain type de tissu social capable de tenir quotidiennement à distance les formes les plus envahissantes de l’individualisme possessif » (« tissu social » dont j’ajoutai immédiatement que le développement de l’urbanisme libéral était en passe de l’éroder, au risque d’engendrer ainsi une « lumpenisation » d’une partie des classes populaires), ce passage devient aussitôt, sous la plume avertie de Frédéric Lordon : « Michéa s’interdit de voir que le peuple ne doit qu’à des conditions sociales extérieures (et pas du tout à son “essence” de “peuple”) de ne pas choir dans l’indecency »

      [...]

      Il est vrai que Frédéric Lordon a réussi le tour de force de dénoncer la « faiblesse conceptuelle » de ma théorie de la #common-decency_ tout en dissimulant constamment à ses lecteurs (et cela, pendant onze pages !) ce qui en constituait justement le _pilier central, à savoir l’usage que je fais de l’œuvre de #Marcel-Mauss [#Mauss] et de ses héritiers (Serge Latouche, Alain Caillé, Philippe Chanial, Paul Jorion, Jacques Godbout, etc.) afin d’en déduire une interprétation moderne et socialiste.

    • Le fait est que l’aggressivité et le mépris de Lordon sont assez étonnants. Il s’en prend à Orwell avec brutalité, et contredit Michéa avec un contresens...
      Mais cela n’est sans doute que la marque non pas de Zorro, mais du Monde Diplomatique...
      http://seenthis.net/messages/167708

      Car il faut bien admettre que la « common decency » est bien séduisante : comme s’il était possible, humainement, simplement, de se soustraire à la folie de tous ces « trucs ».

      Cette simple possibilité semble ulcérer le prescripteur. Il est vrai qu’il a des lettres.

      La sociologie (science)

       : il est bien connu que la sociologie a le statut de science. La certitude de ses conclusions est sans appel.

      la sociologie-mécanisme

       : qui se charge de (etc) : de la même manière que la sociologie comme mécanisme imparable et prouvé s’active avec ses grands pieds à nous pousser tous autant que nous sommes, dans le dos.

      Car, comme Bourdieu l’a abondamment montré, le comble de la domination...

      Et nous y voilà ! La sociologie comme science et mécanisme se trouve toute nichée dans une démonstration sur laquelle on ne peut revenir, du fait qu’elle est, bien sur, de Bour-Dieu.

      Il se trouve pourtant que pas mal de gens et pas des moindres, ne voient en Bourdieu qu’un prophète holiste dont les conceptions essentialistes n’ont qu’une valeur génerationnelle. Remâcher des ressentiments de parvenu ne fait pas une science au siècle de Popper et de Boudon.
      Qu’on dise au moins qu’il est contesté, au lieu d’en faire une évidence coranique, qui plus est agressive !

      Bon, je me suis bien défoulé...

      Pourtant, l’article s’adoucit sur la fin.
      J’irais même jusqu’à être profondément d’accord avec :

      On pourrait même estimer que c’est l’un des chantiers intellectuels les plus décisifs de la gauche critique, à savoir : comment imaginer des solutions non régressives de régulation des désirs dans une société individualiste.

      Qui est très précisément ce que Michéa met sur la table.

      Mais hélas la question finalement posée par Lordon :

      Comment penser un nouveau régime historique de la limite, propre à notre époque, c’est peut-être la seule manière de poser la question qui nous fasse échapper à l’alternative du michéisme et du libéralisme-libertaire.

      se termine par un taux d’imposition à 100% « décapitatoire », et finalement, je dirais bien sur, par la nécessité de « structures », que l’on voudrait bien lui laisser organiser, vu son élévation d’âme.

      Ma conclusion sera : vive la liberté et « fuck your morals ».

  • Michea : le meilleur, le bizarre et le pire, par Frederic Lordon | RdL La Revue des Livres
    http://www.revuedeslivres.fr/michea-le-meilleur-le-bizarre-et-le-pire-par-frederic-lordon

    pour @rastapopoulos

    En accompagnement de l’excellent « Impasse Michéa » publié par Frédéric Lordon dans la RdL n° 13 (juillet-août 2013) à propos de publications récentes de Jean-Claude Michéa, voici quelques éléments de contextualisation supplémentaires et un florilège de citations.

    • Peut-on lire « Impasse Michéa » en ligne ? En passant évoquer Clouscard comme devancier de Michéa se justifie peut-être mais il ne me semble pas que celui-là se revendique de celui-ci (plutôt de Debord et de l’Encyclopédie des Nuisances pour les références modernes). Par contre, le renouveau d’attention portée à l’oeuvre de Clouscard vient au moins en partie de Soral, qui lui s’en revendique ouvertement.

    • Halimi, Lordon et Corcuff contre Michéa : retour sur la controverse
      http://ragemag.fr/michea-retour-sur-la-controverse-37310

      on saura gré à l’auteur de recenser les occurrences de #common_decency dans les livres de Michéa. Sans que le concept en soit vraiment éclairé, sinon comme une sorte d’éthique/morale transcendantale. Il est bien question d’un ensemble de #valeurs pour une #vie bonne, mais tout se complique dès qu’il s’agit de le déterminer. A vrai dire ce n’est jamais le cas.

      Lordon avance en outre qu’il n’en existe aucune « définition tant soi peu consistante » dans l’œuvre de Michéa. Au risque d’être fastidieux, en voici quelques unes.

      Orwell, anarchiste tory (1995) : Michéa la caractérise comme suit : « Sens commun qui nous avertit qu’il y a des choses qui ne se font pas. »

      L’Enseignement de l’ignorance (1999) : « Ensemble de dispositions à la bienveillance et à la droiture qui constitue selon lui [Orwell] l’indispensable infrastructure morale de toute société juste. » Ou, plus loin : « Mixte, historiquement constitué, de civilités traditionnelles et de dispositions modernes qui ont jusqu’ici permis de neutraliser une grande partie de l’horreur économique. »

      Impasse Adam Smith (2002) : « L’une des ressources principales dont dispose encore le peuple d’en bas (comme le nommait déjà Jack London) pour avoir une chance d’abolir un jour les privilèges de classe […] et d’édifier une société d’individus libres et égaux, reposant autant qu’il est possible sur le don, l’entraide et la civilité. » Ou, plus loin : « Vertus quotidiennes des gens ordinaires. »

      Orwell éducateur (2003) : Michéa rapproche la common decency d’une sentence de Spinoza, visant à mettre en avant la « pratique effective de la « justice et de la charité » » — à condition d’entendre le terme de charité comme l’esprit du don.

      L’Empire du moindre mal (2007) : « Valeurs partagées et solidarité collective effectivement pratiquée. »

      La double pensée (2008) : « Vertus humaines élémentaires que sont, par exemple, la loyauté, l’honnêteté, la bienveillance ou la générosité. Or ces vertus, qui s’enracinent depuis des millénaires dans ce que Mauss nommait la logique du don, ne sauraient être confondues avec les constructions métaphysiques des fanatiques du « Bien » — que ces dernières trouvent leur principe officiel dans la volonté divine, l’ordre naturel ou le sens de l’Histoire. »

      Le Complexe d’Orphée (2011) : Michéa rappelle derechef qu’elle s’oppose aux idéologies morales et aux catéchismes moralisants et puritains en tous genres. La common decency « prend clairement appui, au contraire, sur ces vertus de base que l’humanité a toujours reconnues et valorisées, et qui ont acquis, à ce titre, un statut transversal par rapport à toute construction idéologique possible. »

    • Dans un autre entretien, donné en 2013, il confirme son analyse et réfute, par avance, le réquisitoire de Lordon (« la négligence conceptuelle » de Michéa conduisant à « l’essentialisation du peuple bon », sans prendre en considération les « conditions sociales extérieures ») :

      « Évidemment, même dans les classes populaires, les comportements égoïstes peuvent exister mais, globalement, […] les rapports d’entraide existent beaucoup plus […]. Ce n’est pas que l’homme des quartiers populaires serait par nature, au sens rousseauiste du terme, un être idéal — c’est un être complexe, capable du meilleur que comme du pire —, mais il reste dans les quartiers populaires des structures de vie commune, fondées sur l’anthropologie du don, qui, même si elles sont sérieusement attaqués par la société moderne, rendent encore possible, entre voisins, des rapports d’échanges symboliques. […] Tandis que quand vous devenez riche et puissant, ma grande théorie — qui est celle de tout l’anarchisme —, c’est que la richesse et le pouvoir nous coupent de nos semblables. […] Il est beaucoup plus difficile à un homme riche et à un homme puissant de conserver ce bon sens et cette common decency, qui sont encouragés, non pas par leur nature, mais par leurs conditions d’existence ».

      Autrement dit c’est le mode de vie concret des gens (pas leur éducation « morale ») qui déterminerait en grande partie leur aptitude à cette décence. On est quand même loin de l’essentialisme.

      Et la réponse de Michéa à Corcuff (entre autre) :
      http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/020813/en-reponse-corcuff

    • Oui, dans ce même entretien il disait aussi En général quand quelqu’un vient vous demander de lui prêter votre échelle votre premier réflexe n’est pas lui dire « pour deux heures ça fera 20 euros », il y a encore cette structure.

      En février dernier dans le 19/20 de France 3 il y avait un reportage montrant un trentenaire qui utilisait le lave-linge de sa voisine, moyennant finance. Le reportage disait en substance que quantifier et monnayer l’entraide de voisinage ça devient un phénomène de société concernant la moitié des gens, et il y avait un sociologue qui qualifiait de « pratiques alternatives » "issues des militants de la décroissance" cette insertion de la valeur argent dans les rapports de voisinages, entre gens pourtant ni riches ni puissants.

      Les structures de vie commune dont parle Michéa, pour le coup elles étaient loin.
      J’avais même l’impression que cet aspect objectivé et monnayé de l’entraide ne choquait personne, que tout le monde autant dans les interviewés que dans l’équipe de journalistes trouvait ça normal, et n’envisageait même pas un autre mode de s’échanger des services, qui ne fasse pas l’objet d’une comptabilité.

    • Il est vrai que Frédéric Lordon a réussi le tour de force de dénoncer la « faiblesse conceptuelle » de ma théorie de la common decency tout en dissimulant constamment à ses lecteurs (et cela, pendant onze pages !) ce qui en constituait justement le pilier central, à savoir l’usage que je fais de l’œuvre de Marcel Mauss et de ses héritiers (Serge Latouche, Alain Caillé, Philippe Chanial, Paul Jorion, Jacques Godbout, etc.) afin d’en déduire une interprétation moderne et socialiste.

      Et tout à fait d’accord @koldobika, pour les liens non marchands, poussés à devenir de plus en plus comptables. Je me suis accroché là-dessus avec père et sœur pas plus tard qu’il y a deux jours, à propos du covoiturage et du stop.

    • Moi ça dépend des fois. Je suis pas fan de l’idéalisation du don contre-don. Mais concernant par ex. le co-voiturage, quand je vais loin avec une autre personne et qu’on a prévu a l’avance, on partage les frais, et ça me semble normal.
      D’autres fois, je fais un peu moins de trajet (mais quand même ça p.ê 1h), mais les personnes qui m’ammène savent que j’ai peu d’argent, et que elles, elles ont un salaire correct (pas gros, juste le smic ou au-dessus) et elle ne me font pas payer.

    • Je suis globalement d’accord avec toi. :)

      Je pense que moi aussi j’ai des choses à redire sur plusieurs points abordés par Michéa, mais pas ceux sur lesquels les critiques portent en ce moment.

      La seule critique vraiment intéressante (et bienveillante) que j’avais lu, c’était celle d’Anselm Jappe (que Michéa a remercié récemment, il me semble, pour lui avoir fait découvrir Robert Kurz).

      Pour la critique du DIY « à tout prix » je te suis à 100%, et pour ce qui est des SEL, ce que tu dis rejoins le numéro 2 de Sortir de l’économie (@bug_in y a participé je crois, je ne sais plus :D) où se trouve un article sur le même thème.

      Bref, c’est bien de temps en temps de trouver des gens avec lesquels on est d’accord. :)

    • @aude_v ça tombe le même weekend qu’Alternatiba http://www.bizimugi.eu/fr/alternatiba/programme-complet, dommage pour ceux qui auraient aimé être aux deux.
      Pour ce qui est des SEL, je pense que leur fonctionnement est plus lié à la culture des gens y prenant part qu’à leurs règles formelles. Dans celui que je connais un peu ça peut évoluer vite vers des spirales de don où personne ne fait strictement gaffe aux équivalences entre ce qui est donné et reçu, ni au fait de toujours recevoir quelque-chose en échange de ce qu’on laisse.