• La filière nucléaire suspendue aux progrès de la forge du Creusot

    http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/04/01/la-filiere-nucleaire-suspendue-aux-progres-de-la-forge-du-creusot_5104120_32

    De nouvelles révélations jettent un doute supplémentaire sur la sûreté des produits issus du site industriel Creusot Forge.

    L’avenir de la filière nucléaire française se joue peut-être dans l’usine Creusot Forge d’Areva. Depuis 2015, le site de Saône-et-Loire est l’objet d’audits approfondis menés par Areva, EDF et par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), mais aussi par des experts indépendants venus de cinq pays (Etats-Unis, Canada, Royaume-Uni, Chine, Finlande). Objectif : s’assurer que ce maillon essentiel de la chaîne nucléaire répond à tous les standards internationaux. Et ils jugent que le compte n’y est pas encore. Areva a transmis à l’ASN, vendredi 31 mars, le dernier état des modifications du site, afin qu’il puisse reprendre cet été la fourniture de composants aux centrales françaises et britanniques d’EDF, suspendue depuis avril 2015.

    Las, de nouveaux éléments sont venus alourdir le dossier « Creusot Forge ». Selon des révélations de France Inter et France Info vendredi, des défaillances industrielles avaient été pointées du doigt par l’ASN dès la fin de 2005. Dans deux lettres de décembre 2005 et mai 2006, citées par les deux radios, le gendarme du nucléaire mettait en garde EDF contre ce fournisseur, soit un peu avant que l’électricien ne lui confie le forgeage de grosses pièces – notamment la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche).

    Alors patron de l’ASN, André-Claude Lacoste était descendu au Creusot et en était revenu « effondré », affirment France Inter et France Info : l’usine, alors détenue par Sfarsteel, ne répondait pas aux standards de qualité requis dans l’industrie nucléaire. Il avait demandé qu’EDF change d’équipementier ou qu’Areva l’acquière pour le remettre à niveau. Ce dernier s’était exécuté pour 170 millions d’euros.

    200 millions investis

    Pourquoi Creusot Forge a-t-il été retenu pour forger les gros composants de l’EPR ? Le feu vert pour la construction de ce réacteur de troisième génération à Flamanville a été donné par le gouvernement Raffarin en avril 2004, notamment pour maintenir les compétences de la filière nucléaire. Ses grands composants devront être made in France, alors que la cuve de l’EPR construit par Areva en Finlande a été faite au Japon. « Ce qui a justifié le rachat de Sfarsteel, c’est la volonté du groupe de maîtriser la fourniture des pièces forgées essentielles au développement de la flotte nucléaire mondiale, confirme au Monde David Emond, directeur des usines de composants d’Areva (Le Creusot, Chalon/Saint-Marcel, Jeumont…). Nous connaissions la situation au Creusot et dès 2006, Areva a mis en œuvre des actions pour amener‎ l’usine aux standards du groupe et de l’industrie nucléaire. » En dix ans, il y a doublé les effectifs et a investi 200 millions d’euros.

    De son côté, l’ASN a-t-elle failli à sa mission, comme le lui reproche l’Observatoire du nucléaire ? « Elle est gravement fautive puisqu’elle n’a rien vu, ou pire rien dit, pendant de longues années, dénonce-t-il aujourd’hui. Lorsqu’elle a autorisé en décembre 2013 l’installation de la cuve dans l’EPR en construction, elle était déjà parfaitement informée des déboires de fabrication de cette cuve. » Pour l’association antinucléaire, « il est désormais avéré que la décision concernant la cuve de l’EPR ne peut et ne doit en aucun cas être prise par l’ASN ». Michèle Rivasi, députée européenne (Europe Ecologie-Les Verts), juge pour sa part qu’« une commission d’enquête parlementaire est indispensable ».

    L’ASN a confirmé, vendredi, qu’elle rendrait un premier avis cet été sur la sûreté de la cuve de Flamanville. En avril 2015, le gendarme du nucléaire avait annoncé que l’acier du couvercle et du fond de cet élément ultrasensible de l’îlot nucléaire présentait une trop forte teneur en carbone, qui pourrait amoindrir sa résistance aux fortes contraintes qu’elle devra subir.

    Pas de plan B

    Le gendarme du nucléaire se défend de laxisme, a fortiori de dissimulation. Son directeur général adjoint, Julien Collet, joint par Le Monde, dissocie deux dossiers. Le premier est celui des « difficultés techniques » de Creusot Forge. « Dans les années 2005-2006, dit-il, nous avons constaté des problèmes au niveau de la fabrication des pièces et des anomalies en termes d’assurance qualité. » A la suite d’inspections, plusieurs courriers ont été adressés à EDF, qui pointaient « de nombreux écarts » et des « incidents récurrents » dans la fabrication des équipements sous pression nucléaire. EDF a été sommée de « surveiller » plus étroitement son fournisseur. L’ASN a mis en ligne vendredi sur son site l’historique de ses échanges avec EDF et Areva depuis 2005.

    Le second dossier, celui de l’excès de carbone dans l’acier de la cuve de l’EPR de Flamanville, est distinct, selon M. Collet. « A la suite de l’arrêté du 12 décembre 2005 modifiant la réglementation sur les équipements sous pression nucléaire, précise-t-il, nous avons demandé à Areva, dès août 2006, de démontrer la qualification technique de la calotte supérieure de la cuve, c’est-à-dire son homogénéité. » Sans avoir d’« inquiétude particulière à ce moment-là », reconnaît-il. Ce n’est qu’« en octobre 2014 » qu’Areva informera l’ASN de la non-conformité des résultats de nouveaux essais. Une grave anomalie rendue publique par l’ASN en avril 2015. Et une preuve, selon elle, de sa « transparence ». L’historique des échanges de courriers entre l’ASN et Areva semble confirmer cette chronologie.

    Un enjeu vital

    Dans les prochains mois, toute l’attention se concentrera sur l’ASN : elle s’est donné jusqu’en septembre pour dire si la cuve de l’EPR est « bonne pour le service », comme l’assurent EDF et Areva, en s’appuyant sur leurs propres tests menés en 2016. Les dirigeants du groupe d’électricité sont si confiants qu’ils assurent n’avoir « pas de plan B » en cas d’avis négatif de l’ASN, qui leur a pourtant réclamé un tel « plan B ».

    L’enjeu est vital pour EDF. Un refus l’obligerait à se priver d’un réacteur qui doit entrer en service début 2019. A moins de forger une nouvelle cuve – sans doute au Japon – entraînant plusieurs années de retard et des surcoûts faramineux pour une centrale dont le budget initial a déjà triplé en dix ans (10,5 milliards). Stopper Flamanville compromettrait aussi l’image déjà ternie du nucléaire français. Et EDF ne pourrait plus racheter Areva NP (filiale réacteurs et services d’Areva), puisque la Commission européenne a fait de la validation de la cuve par l’ASN une condition pour autoriser l’Etat français à injecter 4,5 milliards dans le groupe nucléaire en grande difficulté. C’est toute la filière française qui plongerait dans l’inconnu.

    Les cuves des deux EPR d’Hinkley Point en Angleterre doivent sortir du site du Creusot. Et le gendarme nucléaire britannique suit de près la remise d’équerre de l’usine bourguignonne.

    • Dans les prochains mois, toute l’attention se concentrera sur l’ASN : elle s’est donné jusqu’en septembre pour dire si la cuve de l’EPR est « bonne pour le service », comme l’assurent EDF et Areva, en s’appuyant sur leurs propres tests menés en 2016. Les dirigeants du groupe d’électricité sont si confiants qu’ils assurent n’avoir « pas de plan B » en cas d’avis négatif de l’ASN

      et sur http://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/info-franceinfo-defauts-sur-la-cuve-de-lepr-de-flamanville-l-autorite-d :

      L’ASN doit se prononcer en septembre sur la cuve de l’EPR et dire si, malgré ses défauts, la pièce est bonne pour le service. Une décision aux conséquences multiples qui ne laisse guère de choix à l’Autorité, selon Cyrille Cormier, de Greenpeace. « Aujourd’hui, on dit à l’ASN : à vous de valider ou non l’utilisation de la cuve de l’EPR. Mais on lui dit : attention, si vous ne validez pas la cuve, c’est le chantier de l’EPR de Flamanville qui prend des années de retard et donc des milliards d’euros supplémentaires. C’est sans doute la construction d’un nouvel EPR à Hinkley Point en Angleterre qui tombe. Et c’est le chantier de Taishan en Chine qui s’arrête. » Cyrille Cormier va plus loin : « C’est le sauvetage d’Areva par l’Etat qui est menacé. C’est tout le projet d’une industrie nucléaire française, le renouveau du nucléaire, qui tombe à l’eau. Evidemment on sait ce qui va se passer : personne ne peut résister à une telle pression. »

      #chantage_à_l'emploi #roulette_russe

  • INFO FRANCEINFO. Défauts sur la cuve de l’EPR de Flamanville : l’Autorité de sûreté nucléaire avait alerté EDF dès 2005 de dysfonctionnements chez le fabricant
    http://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/info-franceinfo-defauts-sur-la-cuve-de-lepr-de-flamanville-l-autorite-d

    #EDF, puis #Areva, avaient été alertés avant la fabrication de la cuve de l’#EPR de #Flamanville (Manche) que l’usine Creusot Forge connaissait de sérieux problèmes de qualité. Les deux industriels semblent avoir ignoré les avertissements de l’Autorité de sûreté #nucléaire (#ASN) et installé la cuve dans le bâtiment réacteur en 2014, en dépit de ces mises en garde. Cet élément-clé de l’EPR attend toujours d’être validé par le gendarme du nucléaire en raison d’une teneur en carbone trop importante.

    #malfaçon

    • et pendant ce temps les Anglais commencent à s’inquièter:
      http://www.reuters.com/article/areva-safety-creusot-idUSL5N1H1546
      The ONR report said after an inspection in late 2016, an international team from France, Canada, the United States, China, Finland and Britain had concluded that the nuclear safety culture at Areva’s Creusot Forge foundry fell short of what regulators expect from a major supplier of nuclear equipment.

      Donc en gros les mêmes conclusions que celles de l’ASN 12 ans plus tôt...
      Il y a effectivement de quoi s’inquiéter!
      #nucléaire

  • Et pendant ce temps, il arrose ses copains d’Areva...

    http://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/l-elysee-travaille-au-remplacement-des-vieilles-centrales-nucleaires-pa

    Pour parvenir à tenir sa promesse de campagne, François Hollande compte sur un mécanisme exposé par Henry Proglio, le patron d’EDF : en 2025, avec six millions d’habitants supplémentaires et des nouvelles technologies gourmandes en électricité, le parc énergétique français ne produira que 60% des besoins du pays, le nucléaire en assumant bien 50%, comme promis.

    #enfumage
    #hollande
    #nucleaire

  • Comment de l’acide s’est échappé de la centrale de Cattenom, en Moselle
    http://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/comment-de-l-acide-s-est-echappe-d-une-centrale-nucleaire-de-moselle_39

    Dormez tranquille braves gens.

    Il a fallu quinze jours pour que l’incident soit révélé. Près de soixante mètres cube d’acide chlorhydrique se sont déversés, fin juillet, dans le sol de la centrale nucléaire de Cattenom, une ville située près de la frontière luxembourgeoise.

    Le 23 juillet, l’exploitant de la centrale a décidé d’évacuer l’acide recueilli vers le réfrigérant atmosphérique du réacteur n°3 via une tuyauterie utilisée habituellement pour l’évacuation des purges des égouttures et des eaux pluviales. Six jours pus tard, l’exploitant a constaté qu’il manquait le tronçon final de cette tuyauterie.

    Quand il y a une fuite, ’l’exploitant’ utilise le tuyau d’eaux pluviales qui est cassé… top !

    #nucléaire #pollution

    • Je trouve fort sympathique de la part de Reuters de s’aligner sur le communiqué de presse officiel :
      – en utilisant l’unité du communiqué, le mètre-cube ; 58m3 d’acide, ça ne parle pas à grand monde, alors qu’on pourrait aussi dire « 60 tonnes d’acide », et je trouve que ça ne donne pas du tout le même effet ;
      – aucune mention ni curiosité quant à la concentration de l’acide qui s’est « déversé » (10% comme à la maison, ou plus de 30% à usage industriel) ?

    • C’est parce qu’ils veulent rassurer les ménagères ou parce qu’ils n’ont pas trouvé l’étiquette qu’ils écrivent

      L’acide chlorhydrique est un produit corrosif non toxique utilisé notamment pour le traitement anti-tartre du réfrigérant atmosphérique du réacteur n°3

       ?

      Aidons l’ASN à lire les étiquettes !

      Provoque des brûlures. Irritant pour les voies respiratoires.
      En cas de contact avec les yeux, laver immédiatement et abondamment avec de l’eau et consulter un spécialiste. Porter un vêtement de protection approprié, des gants et un appareil de protection des yeux/du visage. En cas d’accident ou de malaise consulter immédiatement un médecin (si possible lui montrer l’étiquette).

      Informations toxicologiques

      Toxicité aiguë : CL50 ( par inhalation , rat ) = 3124 ppm(V) / 1 h.

      Extrait de Acide chlorhydrique : Informations
      http://www.ac-nancy-metz.fr/enseign/physique/chim/fds/fds01.htm

    • Pour la question de l’unité utilisée, le mètre cube, c’est assez parlant quand on sait que cela fait 58 000 L mais il faut se souvenir de la conversion. Pour ce qui est de la masse, on atteint même 68,4 tonnes.
      Quand à la toxicité, c’est vrai que c’est un peu étonnant mais effectivement, cela ne touche pas la radioprotection au contraire de la simple sûreté.

    • Merci seenthis, j’apprends les modes de calculs de la #toxicité d’un produit, par exemple CL50 signifie Concentration Létale aboutissant à la mort pour 50% des sujets… les sujets étant des rats ou des souris.

      http://www.cchst.ca/oshanswers/chemicals/ld50.html

      Lorsqu’une valeur de CL50 est signalée, on doit aussi mentionner le type d’animal utilisé et la durée de l’exposition, ex. : CL50 (rat) – 1000 ppm/4 h ou CL50 (souris) – 5 mg/m³/2 h. l’exposition, ex. : CL50 (rat) – 1000 ppm/4 h ou CL50 (souris) – 5 mg/m³/2 h.

      En 1927, J.W. Trevan a tenté de trouver un moyen d’estimer la capacité d’intoxication relative des médicaments utilisés à l’époque. Il a élaboré la DL50, parce que l’utilisation de la mort comme « réponse » permet la comparaison de produits chimiques qui empoisonnent l’organisme de différentes façons. Depuis les premiers travaux de Trevan, d’autres scientifiques ont élaboré différentes méthodes plus rapides et plus directes de mesure de la DL50.

      #beurk