ZONES

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  • Sur l’absence de limites et la perte de sens, les liens entre science et irrationnalité, la barbarie

    entretiens avec Jacques Ellul
    http://www.dailymotion.com/video/x4dwrz_jacques-ellul_tech


    [à partir 6:05] Ce monde #technique est sûrement celui de l’insignifiance, où tout est équivalent à tout, en même temps que celui de la puissance. Les deux choses sont liées. Quand vous arrivez à une #puissance extrême, ce que vous faites n’a plus de sens [...] Quand vous pouvez tout faire, vous avez éliminé les #valeurs. Quand un Etat arrive, comme l’Etat hitlérien, au sommet du « tout est possible », ça veut dire que rien n’a plus de sens.
    [...]
    L’Etat hitlérien a été une réussite assez exceptionnelle, une crise de fièvre qui heureusement n’a pas été au delà (mais nous en sommes toujours menacés). C’est bien plus qu’une dictature, c’est la combinason d’une #rationalité technicienne absolument rigoureuse et de l’utilisation de l’irrationnel de l’homme qui est intégré dans le système. C’est ça qui me paraît être la réussite effroyable des hitlériens.
    [...]
    La technique militaire à permis d’éliminer l’hitlérisme, mais d’un autre côté quand on voit l’utilisation de la torture et le développement des camps de concentration et de tous les systèmes bureaucratiques et aussi la croissance du pouvoir de l’Etat, on est bien obligé de dire que le système hitléren a influencé notre société, et combien. Alors on a des réserves morales, c’est bien gentil mais pour le fond du problème nous sommes mal engagés à sa suite.

    conf de Miguel Benasayag
    https://www.youtube.com/watch?v=8LHPR9uawrI


    [à partir de 6:58] Tout se passe comme si des processus techniques très rationnels étaient capturés par un irrationnel très fou. Tout à coup ce désir de non-limite devient aujourd’hui envisageable scientifiquement, dans une vision du monde sans #limites. Des processus tout à fait rationnels sont hantés par un désir absolument irrationnel d’absence de limites. Problème : ce sont en grande partie des fanatiques ou des obscurantistes ou des moralistes qui nous disent « il y a des limites », et on a vite fait de les qualifier de technophobes ayant peur de choses nouvelles qu’ils ne comprennent pas. La réponse « des valeurs, oui, même irrationnelles » n’est pas satisfaisante, et en même temps tout se passe comme s’il y avait d’un côté une « sagesse » fanatique et de l’autre un irrationnnel technico-scientifique. La question est comment pouvons-nous introduire dans notre modèle de pensée, d’agir, de recherche, des limites qui disent que tout n’est pas possible, car si on postule que tout est possible rien n’est réel.
    Il existe certains invariants biologiques, par exemple le fait que le vivant fonctionne en perte permanente de son matériel. Si cette perte ne peut plus avoir lieu le vivant disparaît. L’identité du vivant existe au prix de la perte matérielle. L’idée irrationnelle du « toujours plus » est dangereuse et idéologique.
    Actuellement nous vivons peut-être l’équivalent d’une transition de phase, pendant laquelle une partie des processus ne sont pas codifiables et modélisables, ne peuvent pas être compris par les outils conceptuels de la technologie dominante. Le danger vient d’une information et d’une modélisation trop virtualisées, qui font que ce « toujours plus » est en pure perte de substance et de sens, et qu’on peut louper et piétiner sans s’en rendre compte des choses essentielles.
    Il est important d’éviter cette contamination idéologique du « toujours plus », de l’absolu qui du religieux est aujourd’hui passé dans le scientisme. La #culture doit recoloniser la technique et l’économie.
    L’absence de limites, au niveau individuel ça correspond à la psychose, au niveau biologique c’est le cancer, et au niveau social c’est la #barbarie ou le #néolibéralisme.

    (au passage merci @Mona et @bug_in par qui j’ai découvert il y a quelques années Miguel Benasayag et Jacques Ellul)

    • Dommage que Benasayag en reste a l’idée de réintroduction des valeurs, qui sont d’ailleurs plus une question d’établissement de sens, de justice, que de limite (la limite est donné par le sens, les objectifs qui apparaissent grace a lui).
      A chaque fois que je reparle du transhumanisme et des idées de ce genre, il est clair pour moi que c’est une question de justice, de ce qu’entraine des dépendances.
      On aura tjs des dépendances, c’est comme ça, on est vulnérable (comme disent les partisans du care), mais c’est une vulnérabilité qui doit être pensée, rationalisée, questionné au niveau de ce que les diverses possibilité de dépendances entrainent.
      A partir de la il y a tout un tas de critères intéressant, comme la possibilité de réparer soi même ou en petit groupe (sans dépendre d’entreprises et de diplome, ou certificat), que ce soit avec des éléments rennouvellables disponible localement etc...
      Je pense que l’angle de benasayag, même s’il n’est pas faux, sur la question de la nécessité d’acceptation d’une perte pour avancer et venir critiquer le tjs plus, ainsi que sur l’importance du lien plutôt que les parties, risque de perdre les auditeurs et surtout de nous mettre sur un terrain trop peu politique et trop culturel. Un terrain malheureusement établi par Illich et d’autres :/

    • salut Florian
      je passais de temps en temps sur le forum de decroissance.info de fin 2004 (zecc « organisons-nous » à l’époque) à 2007

      sur le fait d’accepter la perte comme faisant partie du vivant ça me rappelle aussi ce qu’en disait Harold Morowitz (cité par Augustin Berque) :

      Toute chose vivante est une structure dissipative, c’est-à-dire qu’elle ne dure pas en soi, mais seulement en tant que résultat du flux continuel de l’énergie dans le système. De ce point de vue, la réalité des individus pose problème parce qu’ils n’existent pas [en eux-mêmes] mais seulement comme des perturbations locales dans ce flux d’énergie universel.

      Je pense que c’est un peu aussi à ça que Benasayag fait référence. C’est une vision de l’individu que j’aime bien.

      oui les sauts béarnais et les sauts basques sont en fait les mêmes, c’est juste la langue qui les accompagne qui change :-)

    • Je ne remet pas en cause sinon, les propositions de benasayag sur l’individu qu’on trouve notamment dans ses livres, que j’avais bien aimé (le mythe de l’individu). Mais j’ai peur qu’il reste au niveau psy - qui est son domaine - alors qu’il y a d’autres éléments politiques sur lesquels on a tous droit de s’exprimer qui peuvent être recherché.

      Pour les sauts, pas tout a fait ! (je connais quand même un peu :p ) D’abord il semble qu’il y a des sauts basques qui n’ont pas d’équivalent béarnais, ensuite la manière dont on termine le pas du « simple » par ex. ou d’autres est différente. Sans oublier évidemment les particularité selon les vallées, mais ça c’est autre chose.

    • oui possible qu’il s’attache surtout au niveau psy, je ne saurais trop le dire. pour ma part j’aime bien l’approche sorcière http://www.editions-zones.fr/spip.php?page=lyberplayer&id_article=59#chapitre4 (sans pour autant que ça en exclue d’autres)

      je n’ai pas regardé les sauts béarnais d’assez près alors :-), la fois où j’en avais vu j’étais surtout frappé par leur ressemblance avec les nôtres.
      l’histoire et la romanisation partielle des Pyrnénées ont fait diverger certains détails, mais le fond est commun.