Veillée de guerre au Moyen-Orient

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  • Veillée de guerre au Moyen-Orient
    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2013/09/06/moyen-orient-paysage-avant-la-bataille_3470784_3232.html
    désolé pour le paywall : je supose http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/09/06/moyen-orient-paysage-avant-la-bataille_3470784_3232.html devrait fonctionner ?

    A la suite de la tribune de Gille Kepel, on trouve un encadré séparé du texte principal, non signé, (et regroupant deux paragraphes sans liens très clairs) qui apparaît comme sa conclusion. Alors que ce texte principal manque précise de définir une position, cet adendum - un effet des ciseaux de l’éditeur - se prononce au contraire clairement contre la position française officielle d’une intervention en Syrie, et accessoirement, semble régler des comptes avec JP Filiu, le promoteur d’une Guerre d’Espagne en Syrie ?

    France : la morale ne fait pas une politique

    Au moment où le monde arabe est en gésine, la France est en peine de trouver les mots adéquats pour dire sa politique. Ce malaise est d’autant plus préoccupant que notre pays compte plusieurs millions de ressortissants et de résidents d’origine arabe, dont les liens avec le Maghreb et le Moyen Orient sont étroits. Et que l’option d’une frappe contre Damas serait à l’agenda.

    François Hollande a prononcé en juillet devant l’Assemblée constituante tunisienne une phrase qui a suscité la perplexité : « La France sait que l’Islam et la démocratie sont compatibles. » En effet, pour la République laïque, il ne saurait exister d’entité « Islam » en soi – idem pour « christianisme », « judaïsme » ou « hindouisme » – dont elle prononcerait la compatibilité ou non avec la démocratie. Cette question est l’affaire des musulmans. Des millions d’entre eux ont manifesté du Caire à Damas que l’établissement d’un régime démocratique était leur seconde libération après qu’ils eussent subi depuis l’indépendance des décennies d’autoritarisme.

    D’autres, comme les oulémas saoudiens, rejoints par les salafistes en pleine expansion, n’ont cure de la « souveraineté du peuple », déviation coupable selon eux de la « souveraineté d’Allah » qui doit se réaliser dans l’application de la charia. On comprend que, prononcée en contexte, cette phrase valait pour les bons sentiments qu’elle exprimait à une assemblée dominée par le parti Ennahda – qui l’applaudit unanimement. Un peu plus tard, Mohamed Brahmi, député laïc de Sidi Bouzid, berceau des révolutions arabes, fut assassiné. Le meurtrier présumé s’avéra un djihadiste, franco-tunisien du groupe Ansar al charia, né à Paris et éduqué à l’école communale des Buttes-Chaumont.

    TRAUMATISME DES IMAGES

    La volonté de « punir » Damas après le traumatisme des images épouvantables de civils, et notamment d’enfants, gazés, est l’expression d’une conscience morale. Suffit-elle pour autant à définir une politique pour la France telle qu’elle est aujourd’hui, puissance moyenne qui lierait son destin à celui des Etats-Unis à travers les nouvelles lignes de faille de l’Orient compliqué ? Les idées simplistes de ceux qui verraient dans la Syrie notre nouvelle guerre d’Espagne ne sauraient guider l’action du chef des armées.

    On ne saurait assez s’inquiéter du divorce aujourd’hui patent entre la technostructure politique et une université française dont les études sur le monde arabe furent encore récemment l’une des gloires, et dont la destruction se poursuit dans l’indifférence. Pourtant, l’allié américain a payé le prix fort, avec la catastrophe irakienne, de la substitution des apprentis-sorciers néo-conservateurs aux universitaires arabisants expérimentés.