« Philosophie », par André Comte-Sponville • Les idées, André Comte-Sponville, philosophie, Savoir, Kant • Philosophie magazine

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  • « Philosophie », par André Comte-Sponville • Les idées, André Comte-Sponville, philosophie, Savoir, Kant • Philosophie magazine
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    « Philosophie », par André Comte-Sponville
    En partenariat avec les Presses universitaires de France, Philosophie magazine propose chaque jour une entrée du « Dictionnaire philosophique » d’André Comte-Sponville. Aujourd’hui : « Philosophie ».

    Une pratique théorique (mais non scientifique), qui a le tout pour objet, la raison pour moyen, et la sagesse pour but. Il s’agit de penser mieux, pour vivre mieux.
    La philosophie n’est pas une science, ni même une connaissance (ce n’est pas un savoir de plus, c’est une réflexion sur les savoirs disponibles), et c’est pourquoi, comme disait Kant, on ne peut apprendre la philosophie : on ne peut apprendre qu’à philosopher. Le même, dans un texte fameux, ramenait le domaine de la philosophie à quatre questions : Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m’est-il permis d’espérer ? Qu’est-ce que l’homme ? Les trois premières « se rapportent à la dernière », remarquait-il (Logique, Introd., III). Mais elles débouchent toutes les quatre, ajouterai-je, sur une cinquième, qui est donc la question principale de la philosophie, au point qu’elle pourrait presque suffire à la définir : Comment vivre ? Dès qu’on essaie de répondre intelligemment à cette question, on fait de la philosophie, peu ou prou, bien ou mal. Et comme on ne peut éviter de se la poser, il faut en conclure qu’on n’échappe à la philosophie que par bêtise ou obscurantisme.
    Il m’est arrivé de définir la philosophie, ou l’acte de philosopher, encore plus simplement : Philosopher, c’est penser sa vie et vivre sa pensée. Non, certes, qu’il faille se contenter de l’introspection ou de l’égocentrisme ! Penser sa vie, c’est la penser où elle est : ici et maintenant, certes, mais aussi dans la société, dans l’histoire, dans le monde. Et vivre sa pensée, c’est agir, autant qu’on peut, autant qu’on doit, puisqu’on ne pourrait autrement que subir ou rêver. Ainsi, la philosophie est une activité dans la pensée, qui débouche, du moins en principe, sur une vie plus active, plus heureuse, plus lucide, plus libre – plus sage. Notons pourtant que le bonheur, s’il est l’un des buts traditionnels de la philosophie, ne saurait être sa norme. En tant que pratique théorique (discursive, raisonnable, conceptuelle), la philosophie ne doit se soumettre qu’à ce qui paraît vrai. À nous d’en faire, si nous pouvons, un bonheur. Mais c’est la vérité qui prime. Mieux vaut une vraie tristesse qu’une fausse joie.

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