• 50 expressions insupportables - Le blog de Bernard Gensane
    http://bernard-gensane.over-blog.com/2017/01/50-expressions-insupportables.html

    Le monde professionnel a bien des spécificités, dont celui d’être un formidable outil de création d’expressions ridicules qui ont la particularité de se répandre comme une trainée de poudre, et de se reproduire comme des Aliens.
     
    La vie pro est telle qu’elle réussit néanmoins à nous imposer l’utilisation de ce sabir grotesque, que nous finissons par parler couramment, et avec le plus grand naturel, nous rendant à notre tour passablement risible.
     
    Force est de constater que si vous n’entrez pas dans le moule en baragouinant vous aussi la prolangue « qui va bien » (hérissement de poils momentané), vous serez certainement moins prise au sérieux que votre concurrent à l’embauche.

    #novlangue

    • @philippe_de_jonckheere intéressant, j’ai pris ta liste et j’ai sélectionné des trucs que j’ai fait, parfois consciemment, parfois sans m’en rendre compte, parfois simplement « entrainé par le groupe » (genre tu le fais parce que si tu le fais pas t’es tricard).

      Essentiellement pendant ma période onusiene (en anglais donc, mais les expressions et les intentions sont les même sauf l’effet snobisme en moins puisque les expressions son anglaises) et au Diplo pour une occurence :

      – revenir vers quelqu’un
      – faire une propal
      – traiter le sujet
      – communiquer
      – être full ou être overbooked
      – Faire une prèse
      – Insérer des slides
      – Attendre un retour
      – Bypasser ou over rule
      – Forwarder un mèl 
      – Reporter directement à Untel
      – Envoyer un Scud
      – Etre multi-tâches (ou multi-cartes dans mon cas)
      – Gérer
      – Etre le point focal
      – Checker mes mèls
      – Avoir un réseau personnel
      – Prioritiser
      – Déléguer
      – Synthétiser
      – Elargir la recherche
      – Généraliser
      – Prendre Untel à part
      – être positif (au contraire d’être négatif et pourrir l’ambiance, ce que tu es et fait quand tu te permets d’avoir des « réserves » sur certaines « décisions managériales » douteuses)

      Tout cela est important pour une discussion sur #travail #emploi et plus généralement comment on met les gens dans certaines conditions au boulot.

    • Et une de mes perles préférées aura été celle d’un responsable de domaine (je crois que l’on appelle cela un manager ) déclarer : « je n’ai pas de sujet avec ce sujet ».

      Ces derniers temps j’ai travaillé à un roman qui se passe en open space et je pensais de prime abord faire l’impossible pour intégrer le plus possible cette nove langue dans le récit pour comprendre qu’il était en fait bien plus puissant, au contraire, d’écrire les choses en bon françaispour faire entendre comment c’est étrange quand les choses sont correctement exprimées, et, par déduction logique, comment elles sont abominables dans la nove langue.

    • @reka en fait ce roman sur lequel je suis en train de travailler s’intitule Elever des chèvres en Ardèche, je t’en copie colle un extrait :

      Dernièrement j’avais eu un petit différend avec mon directeur fonctionnel, comme on dit, je l’avais trouvé dans son bureau pour lui expliquer que s’agissant de sa dernière demande d’étude de faisabilité d’installation d’une application d’enregistrement des sessions de nos prestataires ― je m’excuse pour le remarquable enchâssement de génitifs, fréquent dans l’informatique et dans le langage de l’entreprise, un mouchard sur le PC des intérimaires , si vous préférez, n’hésitez pas à m’interrompre quand certains détails techniques de la conversation vous donnent de la difficulté, une question n’est jamais stupide, il vaut mieux passer pour un idiot cinq minutes que de rester un idiot toute sa vie, il n’y a pas de tabou entre nous, pas de sujets non plus ― j’avais un problème, un sujet , comme on dit, pour ne pas dire problème , que je n’avais pas hésité de qualifier de philosophique , je voulais surtout éviter le mot politique ― même sujet politique ne serait pas bien passé ―, tant je trouvais que sa demande n’était pas très respectueuse de l’intimité des personnes pour lesquelles cette application serait installée. Il a beaucoup tiqué, me demandant si j’étais sérieux, puis se rendant compte, on ne sait jamais avec moi paraît-il, que je l’étais, tout ce qu’il y a de plus sérieux, il s’est d’abord, avec une belle constance que je dois lui reconnaître, employé à m’expliquer qu’il y avait dans cette demande d’étude des enjeux financiers pour la Très Grande Entreprise, cliente de la Très Grande Entreprise qui m’employait encore au début de l’année, que de déroger à cette étude de conception risquerait surtout de m’attirer des ennuis. Il devenait contrarié quand je lui faisais remarquer qu’en fait je préférais avoir des ennuis que de devoir contribuer, d’une façon ou d’une autre, à ce que je commençais à appeler par son nom, c’est-à-dire une saloperie, une vraie saloperie ai-je dit finalement ― me retenant, in extremis , de dire ce que je pensais vraiment, une putain de saloperie . Un peu à court d’arguments mon patron m’a signifié qu’il me trouvait irréaliste, qu’il ne me prenait pas au sérieux et qu’il fallait vivre ― qu’il fallait donc réfléchir aux conditions d’installation d’un programme qui permettrait d’enregistrer de fond en comble toutes les actions, clics, copies d’écran et saisies des prestataires ― et que sinon il y avait élever des chèvres en Ardèche. Pour nous détourner de mon sujet, de mon problème philosophique, des fois j’exagère, je lui ai promis que lors de mes prochaines vacances dans les Cévennes, je ne manquerai pas de lui rapporter un pélardon de la Cezarenque. « Un quoi ? » a-t-il demandé.

    • Vous le savez sans doute, mais sachez que ce genre de logiciel existe, pour Windows, et que ce n’est pas bien cher en plus, et que ça s’installe à distance, dès qu’on a les droits sur le réseau. Et que vraiment ça enregistre tout.
      Mais que ça n’est opposable juridiquement qu’à la condition que l’enregistré en ait été prévenu, par exemple en lui faisant signer une charte informatique (de 50 pages en caractères 6pt, qu’il n’aura probablement pas lues, mais ce n’est pas important, il faut juste qu’il la signe).

    • en avance de phase
      capitaliser des savoirs, du code, etc.
      escalader
      monter en compétence
      sortir de sa zone de confort : injonction pour t’envoyer au front prendre tous les risques : « faut que tu sortes de ta zone de confort ! »
      valoriser un savoir-faire, une expérience, même pourrie, c’est la raconter de manière positive, pour pouvoir mieux la vendre

    • @intempestive Une fuite en Egypte sort le premier mars, tu penses bien que je ferai de la #shameless_autopromo ici. Elever des chèvres en Ardèche n’est pas tout à fait fini, il faut encore que j’en harmonise ses trois parties et en plus il y en quatre ou cinq (romans) qui doivent passer avant a priori.

      @reka Merci ! (fidèle lecteur), je dois tenter d’aller relever tes légendes du Bahaus demain, j’aimerais bien y parvenir pour être quitte de tant d’encouragements.

      @biggrizzly Je sais bien que ces saloperies existent, je ne le sais que trop hélas. Apparemment le projet a été abandonné il sembe qu’une certaine montée au créneau (comme on dit en nov langue ) des syndicats ait été entendue. Du toute façon j’avais finalement dit que je refusais catégoriquement de travailler là-dessus.

      En revanche sur ton commentaire à propos de la nov langue , je pense que si l’on n’a pas d’ambition on peut très bien y résister, et du coup courir sans cesse le risque de ne pas être compris (ce que j’aime bien).

      @tetue, oui je les connais bien aussi celles-là surtout la fameuse confort zone (parce que @simplicissimus a raison, pas vraiment inventée ici toutes ces saloperies)

    • On m’a offert une fois un roman pour m’aider à supporter la vie en entreprise (j’t’jure), L’Open space m’a tuer… dont je n’ai jamais réussi à finir la lecture, tant ça me rappelait des situations vécues. Comme si c’était à nous de nous adapter à ce monde de merde ! Nan mais zut quoi.

    • Dans ma région, est apparu le concept de « Loire Valley », sûrement le pendant de la « Silicon Valley » version « french tech ».

      L’autre jour à la télé sur ARTE dans 28 minutes où il était question de la fermeture de Fessenheim et de transition énergétique, j’ai entendu le mot « target » dans une phrase pour dire « cible ». Le jeune « manager » d’EDF s’est corrigé immédiatement car il devait s’être rappelé qu’il était à l’antenne pour un public et non dans une réunion de travail.

      @reka : qui dit « trop bien », je suggère « too much » mais c’est peut-être déjà un peu « has been » ...

      Désolé mais aujourd’hui, je dois prendre ma douche avant 9 heures, « deadline »

      #jargon

    • Quand je bossais encore en salarié j’ai récolté dans la collection #langage_commercial un « les enfants sont notre cœur de cible »
      @philippe_de_jonckheere merci pour l’éclat de rire, j’ai hâte également !
      Il y a un Godard où les personnages se rassemblent avec un verre à la main et insèrent dans toutes les phrases qu’ils échangent des versets publicitaires, je compte sur vous pour me dire lequel !

  • La langue des maîtres et sa fabrique
    http://lmsi.net/La-langue-des-maitres-et-sa

    Après dix ans de travail critique au sein du collectif Les mots sont importants, si l’on doit caractériser à grand traits la langue des maîtres, on peut dire qu’elle repose sur une logique binaire au fond très ancienne, déjà à l’œuvre dans la novlangue totalitaire ou coloniale décrite par Orwell : euphémisation de la violence des dominants (État, patronat, pression sociale masculiniste, hétérosexiste et blanco-centriste), et hyperbolisation de la violence des dominé-e-s... (...) Source : Les mots sont importants

  • Les perles du langage professionnel #rhetorique #jargon #ideologie #management
    http://www.lesechos.fr/economie-politique/france/document/0201000688949-les-perles-du-langage-professionnel.htm

    Les perles envoyées par les internautes (mises à jour le 03/01/2010)

    –« Tu me fais un print de la PR ? » (Peux-tu m’imprimer la présentation pour le client ?)

    –« LMK » (à la fin d’un mail, pour « Let me know » : tiens-moi au courant)

    – « Maile-moi les bullet points pour la conf’ call sur le MoU. » (Envoie-moi par mail une liste des idées principales pour la conférence téléphonique sur le contrat, MoU signifiant ici « memorandum of understanding »)

    –« Qui a la planche du support du Copil ? Je dois faire un CR, pour hier ! » (Qui a la présentation PowerPoint du comité de pilotage ? Je dois en faire un compte rendu et je suis en retard !)

    –« C’est plutôt tricky comme approche, je préfère prend le lead sur la propale. » (C’est ardu, je préfère apparaître en première ligne pour cette proposition commerciale)

    –« Tu envoies un meeting request pour le prochain call ? » (Peux-tu envoyer une invitation pour la prochaine conférence téléphonique ?)

    –« C’est un porteur de projet qui est très business oriented, mais c’est pas un go and getter. En revanche, il a une stratégie de build up intéressante. » (C’est un dirigeant d’entreprise qui a une bonne connaissance du marché, mais il n’en veut pas assez. En revanche il a une stratégie de croissance par acquisition intéressante).

    –« T’es NAF en ce moment ? » (NAF = non affecté, lorsque l’on n’est pas affecté sur un projet ou chez un client, par exemple)

    –« L’ERP a été dégradé sur cette mission et on aura moins de fees. Il faudrait donc que vous chargiez moins dans GT&E (global time and expenses) et que vous restiez collés au staffing de retain. Sinon on ne targetera pas le budget de fiscaly year 2010 . » (La rentabilité de la mission a été dégradée et les profits réalisés seront moindres. Il faudrait donc que vous diminuiez le nombre d’heures que vous avez imputées sur le projet dans votre rapport hebdomadaire et que vous mettiez le nombre d’heures qui ont été prévues dans l’outil de gestion des plans de charge. Sinon on n’arrivera pas à atteindre le budget prévu pour l’année fiscale 2010)

    –« J’attends votre feedback pour vendredi EOB. » (End Of Business = fin de journée)

    –« On va faire des workshops pour avancer sur ce sujet. » (workshop = réunion de travail)

    –« Il faut absolument rester focus » (Il faut que nous restions concentrés sur le sujet )

    –« On a fait une war room... » (On s’est réunis dans une salle pour une réunion de crise)

    –« Il faut qu’on fasse du ice broken avec le client... » (qu’on brise la glace, qu’on améliore les relations)

    – « Pitcher un target » (faire une présentation auprès d’un client potentiel)

    – « Mauvais drafting, mauvais wording » (mauvaise ébauche, mauvaise formulation)

    – « C’est une CP » (pour « condition precedent », ou condition suspensive)

    – « C’est pas market practice » (ça ne correspond pas aux pratiques du marché)

    – « Il faut préparer un draft du process » (un brouillon du schéma résumant le processus de décision).

    – « On crée une VM et on la met en DMZ » (en informatique : on crée une machine virtuelle et on la met en zone « démilitarisée » ; autrement dit, on consacre un ordinateur à une activité spécifique, et on le place dans une portion du réseau accessible à tous les utilisateurs ».)

    – « Dans l’output de l’analyse, peut-on avoir le split par région et aussi les market shares ? » (dans le relevé d’analyse, peut-on avoir une idée du découpage par région et des données sur les parts de marché)

    – « Mon travail consiste à pricer des bonds » (à estimer le prix d’une obligation)

    – « Dans le media schedule, pourrais-tu rajouter le reach par target ? » (dans le plan media, pourrais-tu rajouter le taux d’impact par catégorie de cible ? )

    – « Tu fit dans le moule » (tu colles à la culture d’entreprise)

    – « Je checke si j’ai noté ça sur ma to-do list » (je vérifie si je l’ai noté dans ma liste de choses à faire).

    – « Il y a un fort effet tunnel entre ces deux milestones » (On a peu d’informations sur l’avancement du projet entre ces deux étapes)

    – « Si on continue à ne pas adresser les issues, on sera incapables de comiter » (A force de ne pas traiter les problèmes, on ne pourra plus prendre d’engagement)

    – « Il est sur un bon trend » (sur la bonne tendance)

    – « T’as fait ton signing » ? (As-tu signé, par exemple un contrat…)

    – « Non, je n’ai pas uploadé l’artwork sur le réseau » (non, je n’ai pas téléchargé les graphiques et illustrations)

    – « Je te call asap pour te donner un feedback » (je te rappelle dès que possible pour te donner mon avis)

    – « Y’a-t-il un risque client à mutualiser la ressource ? Non, pour lui c’est transparent ! » (Le client verrait-il un inconvénient à ce que nous utilisions la même ressource pour quelqu’un d’autre ? Non, il n’aura aucun moyen de le savoir ! »

    – « On a brainstormé sur la propal » (On a réfléchi tous ensemble sur la base de la proposition commerciale)

    – « Je reviens vers toi pour valider le MoM » (Je te recontacterai pour vérifier le contenu du compte rendu de réunion -Minute of Meeting)

    – « C’est une win-win situation » (c’est une situation gagnant-gagnant)

    – « On a pris l’action, c’est dans le pipe » (On s’en occupe, on attend le résultat)

    – « Peux-tu me définir l’AS IS et le to be de la future orga ASAP, STP ? ! » (Pourrais-tu me réaliser l’analyse de l’existant puis définir les modalités de la future organisation aussi vite que possible s’il te plaît ?)

    Les perles relevées par « Les Echos »

    − « Je te forwarde le feedback du client pour updater le pitch avant le call. » (Je te fais suivre la réaction du client afin de mettre à jour la présentation avant la conférence téléphonique)

    − « Tu me draftes une réponse ? » (Tu me réponds même sous forme de brouillon ?)

    − « La deadline est demain ? OK je te le drafte ASAP, mais ce sera quick and dirty. » (Ah, c’est demain la date limite ? D’accord, je t’envoie quelque chose dès que possible mais je te préviens ce sera brut de fonderie)

    − « Pas le temps, j’ai un kick off meeting. » (J’ai une réunion pour le lancement d’un projet)

    − « Les juniors se limitent à faire du box ticking, mais ça coûte tout de même cher au client. » (Les débutants se contentent de cocher des cases...)

    − « Cruncher » (Compiler et analyser des tableaux de données)

    − « Google-le pour en savoir un peu plus... » (Va chercher des information sur lui sur Google)

    − « C’est quick win ! » (C’est facile avec des résultats rapides !)

    − « Le wording » (La formulation d’une idée)

    − « Avec ce niveau de spread, c’est vraiment mal pricé pour ce rating, mais on va tout de même closer le deal. » (Avec ce niveau de volatilité, c’est mal évalué mais on fera quand même l’opération)

    − « Lui, c’est un fax partner ! » (Un associé d’un cabinet international d’avocats ou d’audit qui, au lieu de « chasser » le client, se contente de traiter les dossiers que lui transmet son réseau international)

    − « Tu « m’set » un meeting pour la semaine pro ? » (Tu me planifies une réunion pour la semaine prochaine ?)

    − « T’as le numéro des facilities ? » (services généraux)

    − « Je te le forwarde, mais... delete ! » (Je te le fais suivre mais…détruis tout ensuite !)

    − « Ils ont lu la propale, on devrait bientôt implémenter. » (Ils ont lu la proposition commerciale, on va passer à la mise en oeuvre.)

    − « Ok, c’est dans le pipe » (c’est en cours)

    − A la lecture de la messagerie : « Son « OOF » (« out of the office ») dit qu’il est « out » (absent) cette semaine. »

    Pour les promotions et les rémunérations

    − « T’as fait ton annual review ? » (entretien annuel avec un supérieur hiérarchique)

    − « Mon n+ 1 me reproche de ne pas assez délivrer. » (Mon supérieur hiérarchique direct me trouve insuffisamment productif.)

    − « Cette année, quel que soit le « ratin », y’a pas d’augmentation ! » (Le rating est une note attribuée en fin d’année.)

    − « Dans mon équipe, je n’ai que des « FA », mais je ne peux pas les récompenser... » (La note FA « fully achiever » correspond à un salarié très performant.)