de nombreuses personnes en Grande-Bretagne étaient liées à la traite ; mais très peu de gens en comprenaient le fonctionnement. Les abolitionnistes pensaient donc qu’il fallait la rendre concrète pour les gens. Comment rendre réelle la traite des esclaves ? Ils ont trouvé une solution géniale : ils ont envoyé l’un des leurs à Liverpool, afin de prendre les mesures d’un négrier qui s’appelait le Brooks, puis ils ont dessiné un schéma, dans lequel les corps des Africains asservis étaient disposés symétriquement, pour communiquer ce que pouvait être l’horreur de tous ces gens comprimés dans un espace aussi petit.
William Wilberforce a dit : « Le monde n’a jamais connu autant de misères dans un espace aussi petit ». En faisant circuler cette image d’une personne à une autre, les abolitionnistes ont réussi à éveiller un sentiment d’opposition, un sentiment d’indignation, le sentiment que c’était moralement injuste, que c’était une tragédie humaine.
Cette image est devenue un élément très important de leur campagne victorieuse. N’oublions pas, non plus, que la plupart des abolitionnistes était des gens de la classe moyenne ou supérieure. Même eux ne savaient pas exactement comment fonctionnait la traite. Thomas Clarkson, qui joue un rôle très important dans mon livre, est allé à Bristol et à Liverpool. Il a parcouru les quais pour récolter des informations auprès de marins ayant travaillé dans la traite des esclaves.