• Pièces et Main d’Oeuvre ou quand le déni de leurs propres privilèges engendre des monstres.

    La dernière et pachydermique bouffée délirante de PMO, plaisamment intitulée « ceci n’est pas une femme », repose d’un bout à l’autre sur ce seul point : que l’hégémonie hétérosexiste n’existe pas, qu’il n’y a pas de rapports sociaux de domination de genre.
    Qu’il n’y a jamais à l’oeuvre, en fait de luttes de dominé-e-s, femmes, lesbiennes, homosexuelles, trans... que technolâtrie et haine de la nature, au service de la société industrielle. C’est le présupposé méprisant exposé il y a treize ans par Kacsinsky dans La Nef de Fous, poussé à son extrême.
    Kaczinsky, en effet, se contentait de hiérarchiser aliénations et dominations.
    PMO, plus conséquent, les nie purement et simplement.

    PMO donne ainsi naïvement à contempler à quoi ressemble le monde que l’on peut voir, une fois qu"on le regarde au travers du prisme négationniste des dominants.
    Il faut reconnaître que ça fait peur ! On dirait vraiment du Bruckner. Les comportements de lutte et revendication des infériorisé-e-s divers-e-s y deviennent immanquablement des monstruosités rivalisant de déraison.
    Chez PMO, les luttes des infériorisé-e-s ne peuvent jamais exister que sous cette seule forme.

    Mais aussi, il faudrait que ces mêmes dominé-e-s acceptent de débattre avec eux - sans doute pour discuter démocratiquement des termes avec lesquels PMO envisage de falsifier plus avant leurs luttes.

    Je ne résiste pas à vous proposer tout de suite, illustrant les conséquences de cette peur, de ce sanglot de l’homme blanc, quelques morceaux choisis :

    – de la pensée tellement non-essentialiste et non-homophobe estampillée PMO :

    Devenir homme ou femme est donc un fait socioculturel, un apprentissage suivant les règles du comportementalisme et peut faire l’objet d’un choix personnel. Ainsi devient-on homme ou femme (y compris dans les couples homosexuels), à force de « faire l’homme » ou de « faire la femme ». « Priez, la foi viendra. » « C’est en forgeant qu’on devient forgeron. » etc.

    – de citation par PMO, à l’appui de leurs thèses, ne témoignant d’aucun déni méprisant des violences masculines envers les femmes, d’aucune non-comprenance complaisante, d’aucun essentialisme crasse :

    Cependant Nancy Huston contredit Simone de Beauvoir. « Dans Le Deuxième Sexe (1949), Beauvoir réussit ce tour de passe-passe impressionnant : affirmer qu’on ne naît pas femme mais qu’on le devient, qu’au fond la femme n’existe pas mais a été construite par l’homme en tant que son autre radical… tout en prouvant le contraire à longueur de page, montrant chapitre après chapitre, que l’oppression des femmes est due à leur corps (donc à quelque chose avec quoi elles sont nées) : règles, hormones, grossesses, maternités… Si les femmes n’ont vraiment rien de particulier, le moins qu’on puisse dire est que cette bonne nouvelle devrait être plus largement propagée – auprès, notamment, des publics suivants : les guerriers sadiques et autres éventreurs qui les violent, les proxénètes qui les vendent, les clients qui les achètent, les conjoints et compagnons qui les battent… Pourquoi s’acharnent-ils sur les seules détentrices d’utérus ? C’est incompréhensible ! Il faudrait patiemment leur expliquer : un homme ferait tout aussi bien l’affaire !

    – de capacité à ne pas verser dans la mecsplication : à PMO quant on t’explique Simone de Beauvoir, qu’on a mieux compris que toutes les femmes qui l’ont lue, ce n’est pas du mépris ni de l’arrogance, c’est tout le contraire : c’est du service à la clientèle :

    La formule de Simone de Beauvoir relève également de l’art.
    Il s’agit d’une figure de style appelée hyperbole qui force le trait afin de mieux se faire entendre.
    Simone de Beauvoir n’a jamais dit ni pensé que les humains naissaient asexués biologiquement. Elle a signifié dans le contexte de l’après-guerre qu’il n’existait nul destin fondé en nature vouant les femmes au foyer, ni à être subordonnées aux hommes dans quelque domaine que ce soit. Rien de plus et c’est la moindre des choses. La banalité du propos éclate si l’on rappelle que les humains, ces animaux politiques, ne naissent jamais humains : ils le deviennent. C’est-à-dire qu’ils sont d’abord des corps

    Quel professionnalisme ! En un tour de main, PMO vide avec soin de sens le propos de Beauvoir, et ne te cache pas longtemps ses raisons de le faire. La phrase suivante te rappelle à l’ordre avec une économie de mots où l’on sent bien le métier : « regarde ton corps, on voit bien que tu es une gonzesse ».

    – de résistance héroïque à ne pas céder à la facilité de la falsification et d’amalgame, résistance héroïque qui demeure la recette favorite de PMO

    [...] imposer le délire en nouvelle norme sociale, ou à se débarrasser du corps, ce qui est l’objectif ultime des transhumanistes et des cyberféministes, héritiers contemporains du dualisme manichéen

    - admirez combien sont arc-boutées les deux virgules qui encadrent « ou à se débarrasser du corps », avec quel savoir-faire ils ont été parfaitement ajustés !

    Vous avez bien lu.

    Critiquer le caractère socialisé de l’appréhension du monde par la pensée, de l’appréhension du corps par le corps, pour PMO, c’est « imposer le délire en norme sociale », c’est « se débarrasser du corps », et cela range irrémédiablement qui ose le faire parmi les transhumanistes. De même, tenir des propos féministes sur internet, c’est.... argh... du cyber féminisme ! : on voit bien que les féministes sont des alliées des machines !
    Ce sont du moins les version auxquelles semble parvenir à accéder la compréhension du ou des bas de plafond volontaire-s qui signe-nt « Pièces et main d’oeuvres », c’est aussi la version à laquelle PMO souhaiterait que nous nous en tenions.

    Je passe sur le désopilant long développement où ils essaient, sans rire, de sauver leur essentialisme en expliquant que « le matérialisme est fondé en nature », dans un irrésistible sommet d’idéalisme non-comprenant.

    Et avec ça, il voudraient qu’on ne se paie pas leur tête ?

    Ils voudraient que leur ridicule ne soit pas nommé ?

    Ils voudraient qu’on ne leur mette pas sous le nez la navrante similitude de l’essentialisme à la sauce PMO avec l’essentialisme façon Manif Pour Tous, que l’on ne mette pas en rapport l’agressif virilisme de leurs propos avec d’autres qui ont fait leurs preuves ?

    Mais nous n’avons pas encore tous des google glass sur le nez. Nous avons encore des yeux pour voir, et pour lire PMO. Même quand nous sommes d’affreux cyber-je-ne-sais-quoi qui accèdons au texte sous format pdf.

    Le problème de PMO, c’est qu’il existe des luttes féministes, lesbiennes, homosexuelles, trans, des luttes décoloniales autonomes. Des luttes qui élaborent leur discours depuis des points de vue particuliers assumés. Des luttes qui renvoient l’homme blanc hétéro à l’arrogance et au mépris que contient le discours dominant, qui est encore le sien, même lorsqu’il autorise le mariage aux couples de même sexe.

    PMO a choisi de se poser en PME, en prestataire de service sur le marché de l’émancipation.
    Si l’émancipation doit être l’oeuvre des opprimé-e-s elleux mêmes, il est à craindre que, quoi qu’elle produise, cette petite entreprise (qui semble vendre désormais des cartes postales pour la manif pour tous : quelle provoc désopilante !) n’ait jamais aucune pièce et main d’oeuvre à facturer à personne.

    Si vous en voulez plus :

    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=539

    #homophobie
    #hétérosexisme
    #privilège_masculin
    #Ceci_n'est_pas_une_femme
    #PiècesetmaindOeuvre
    #PMO
    #mecsplication
    #déni
    #positiondominante
    #patriarcat
    #rapports_sociaux_de_domination
    #non-comprenants
    #cyberféminisme
    #essentialisme
    #naturalisme
    #masculinisme
    #Nancy_Huston
    #Simone_de_Beauvoir
    #féminisme
    #manif_pour_tous
    #sanglot_de_l_homme_blanc

    • merci pour ce travail argumenté.
      C’est intéressant et riche, même si de mon côté je me sens plutôt en phase avec le féminisme de Nancy Huston en général (je considère que la culture accentue les stéréotypes issus de la nature, que la réalité n’est ni 100% culturelle, ni 100% essentialiste, mais entre les deux).
      Dans le cas présent, si comme PMO je pense parfois que certains queers « ne supportent pas plus que les Catholiques du XIXe siècle, l’idée d’avoir eu des singes pour ancêtres, simplement ils mettent la Société à la place de Dieu ou de l’évolution. », je trouve le ton de PMO abject, homophobe, condescendant et réac.
      Je ne me reconnais pas du tout dans leur démarche qui une fois encore veut pourfendre le féminisme à cause de sa prétendue rivalité avec la lutte des classes...
      Voilà pour ma position générale.

      Je réagis spécifiquement à ce passage ici :

      de capacité à ne pas verser dans la mecsplication : à PMO quant on t’explique Simone de Beauvoir, qu’on a mieux compris que toutes les femmes qui l’ont lue

      ,
      Autant je suis d’accord pour être vigilant sur les phénomène de mecsplication en général, je peux moi-même m’y adonner parfois et je suis content qu’on me le signale, mais là il me semble que l’argument est infondé : si en tant que commentateur masculin on ne peut plus aborder et critiquer les thèses de Simone de Beauvoir cela me met vraiment mal à l’aise (je parle de la forme du débat, sur le fond je ne suis pas trop d’accord avec PMO). J’ai l’impression qu’on tombe là dans une forme d’effacement sexiste, de « galanterie » condescendante /infantilisante pour les femmes, un peu comme quand je demande à mon ainé de se taire pour laisser parler mon plus jeune fils afin que ce dernier comble son retard en communication.
      Je ne dis pas ça par esprit de polémique, mais vraiment parce que ça me semble important pour maintenir un débat de qualité.
      C’est ma perception, je peux me tromper.

    • Le problème n’est pas de pouvoir, ou non, critiquer Simone de Beauvoir, mais bien de voir ce que contient ladite critique.

      A moi aussi, il m’arrive de mecspliquer. Mais quand on me le dit, je la ferme, et j’écoute.

      Chez PMO, c’est depuis longtemps une autre histoire.

    • Extraits de cet humoristique pamphlet

      Notre destin sexuel est tranché dès la fécondation.

      Le besoin de se rassurer à ce point sur la nature biologique de son sexe, et surtout sur son destin, est risible, je préfère croire à une bonne névrose qu’à une position philosophique, voire politique, c’est indigeste de prétention et d’erreurs. La peur de la castration, cette terreur psychotique au commande du schéma social traditionaliste occulte toute capacité à modifier leur vision figé du monde. Ils en arrivent à affirmer vraiment n’importe quoi. Il n’y a pas si longtemps, Sarkozy sortait le même type d’inepties en affirmant que l’homosexualité était innée, mais bon, lui au moins on savait que c’était un crétin.

      Il est normal que « la mode », aux mains de l’élite gay et lesbienne promeuve les morphologies qui flattent ses désirs, et auxquelles la masse des clients et suiveurs hétérosexuels s’empressent de se conformer. Il est non moins normal que ses objectifs fusionnent avec ceux de la chirurgie esthétique, des biotechnologies et de « l’augmentation » technologique qui permettent la fabrication et la vente de ces « morphologies idéales ».

      Quant à X, le chromosome femelle, il n’a cessé au contraire de se renforcer grâce aux doubles X des « individus femelles », qui « ont conservé la possibilité de se recombiner entre eux – et de s’autoréparer. » Il « comporte de nombreux gènes essentiels à la spermatogenèse : un rôle qu’on n’attendait pas forcément de ce chromosome. (...) Ainsi le X humain compte 340 gènes uniquement actifs dans le testicule. » Et la généticienne Jenny Graves d’en conclure « que le Y n’est plus indispensable pour assurer ces fonctions « mâles ». » Bon débarras, tiens !... Et prends ça dans les couilles, vieux chromosome patriarcal hétéronormé !

      #complexe_de_castration #masculinisme

      @aude_v revient vite ! J’arrête là ma lecture parce que c’est vraiment trop lamentable, poubelle hop.

    • @Mona

      merci pour ce rappel.
      Il est bien cruel pour PMO de se voir cité, ou de voir ainsi précisé sur quel genre de sources ses ébouriffantes « enquêtes » à charge reposent.

      Je me suis donc plongé un peu plus dans la version PMO de « Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus ».

      Il est impressionnant, et navra,nt aussi, de voir ce qui fut quand même une entreprise de production de critique anti-industrielle, basculer cul par dessus tête dans le plus arrogant délire masculiniste.

      Il y avait Zemmour, Soral, Finklielkraut, Bruckner, la manif pour tous...

      Ils ne sont plus seuls à affronter courageusement la conspiration de la théorie du gender ourdie par le lobby Queer, la cinquième colonne des cyberféministes et des gays et lesbiennes, la haine de la nature, de la normalité et des hommes blancs hétérosexuels, et l’abolition des différences au service de la domination et du merchandising industriel, etc.

      Ils ont maintenant ouvertement le soutien « libertaire » de PMO.

      #Les_hommes_viennent_de_Mars_les_femmes_viennent_de_Vénus

    • Oui @mona, ça fait très mal de voir Nancy Huston sombrer ainsi dans le vieil archaïsme de vénus et mars. Il faut dire que pour « sexes et races » son co-écrivain est capable de nous expliquer le #gène_du_hlm !

      00:04:00:00

      Les enfants de personnes qui vivent en HLM en général ils vont vivre en HLM, les enfants de personne qui vivent dans des chateaux en général ils vivent dans des chateaux. Donc le type d’habitation est aussi héritable.

      On pourrait éventuellement l’entendre si il parlait du poids du déterminisme social, mais non, pas du tout, c’est dans une conférence qui se targue d’expliquer « La sélection naturelle » !

      http://pedago.ac-clermont.fr/video/2009_svt/svt_09_8_raymond.html

    • @aude_v Mon point de vue et qu’il vaut mieux s’encourager à dénoncer ce genre de discours plutôt que rester seul·e à se désespérer de la bêtise. À propos de PMO, ils ont perdu leur crédit depuis déjà plusieurs années à force de se croire unique et géniaux et à chier sur leurs soutiens, ça n’empêche pas de considérer le pavé de questions qu’ils ont lancé contre la techno et les nanos comme plus que nécessaire, mais apparemment ils ne sont pas bons sur tous les sujets …

    • J’ai lu aussi ce texte de PMO (enfin, une partie parce que c’est atrocement long). La première chose qui m’a marquée, c’est que c’est pratiquement incompréhensible. A force de faire de l’ironie systématique, on finit par perdre totalement son intelligibilité. En tout cas, je passais tout mon temps à essayer de départager ironie et sérieux sans y arriver. C’est d’ailleurs ce qui m’a fait arrêter de lire.

      Mais je pense aussi qu’ils feraient mieux de s’en tenir à la lutte contre les nanotechnologies, les puces RFID et le nucléaire. Quand ils commencent à s’attaquer au genre et aux questions qui gravitent autour, ils sont consternants.

      J’ai écrit pour PMO il y a quelques années (j’en suis d’ailleurs assez fière) donc je les connais un peu « en vrai ». Je ne les reconnais pas dans ce texte ; à mes yeux c’est incompréhensible.

    • @Philomenne

      j’ai eu l’occasion de côtoyer quelques futurs PMO avant qu’ils ne fassent PMO, autour de questions anti-industrielles.
      Bien qu’ils n’aient tenu que ces toutes dernières années à surenchérir dans l’inacceptable parmi leurs publications, je dois dire que j’y ai alors retrouvé, certes en bien pire, un virilisme et une forme de suffisance autoritaire qu’il m’avait déjà été pénible d’y rencontrer il y a plus de dix ans, et qui avaient déjà suffi à faire tourner court toute perspective d’action commune.

      A croire que depuis 2012, la mise en scène politicienne autour du mariage pour tous a pu provoquer chez certains le brusque mûrissement d’un vieil abcès masculiniste.

      J’ai essayé il y a un mois de proposer quelques pistes pour comprendre cela, et pour en retirer quelque chose aussi :
      http://seenthis.net/messages/299787

      Le sujet me semble amplement mériter d’être discuté.

      Je ne pense pas que la moindre espèce de complaisance naturaliste - de celle où se répand PMO sitôt que la question du genre est abordée - puisse fournir une quelconque assise à la plus modeste ambition de critique de la « société industrielle ».
      (mais je ne cache pas que je suis plus que réservé sur la possible pertinence d’un concept aussi inséparable d’un affligeant fond de naturalisme que celui d’ « artifice » et d’ « artificiel » - qui suppose qu’une part de nos actes, produits, comportements et réalisations seraient ou pourraient être qualifiés de"naturels")

    • Sans vouloir troller la discussion, permettez moi de compléter la boutade de @touti sur Raymond.

      Oui compte tenu de notre contexte de civilisation, parler de la couleur de peau des humains pour enseigner la génétique est au pire provocateur au mieux maladroit. Dans l’absolu la teneur biologique en mélamine ne devrait pas conduire notre cerveau à y associer le spectre terrifiant de la hiérarchisation des « races », mais comme beaucoup j’ai ce réflexe.

      Pour avoir déjà lu attentivement sa tribune dans le Monde avec N.Huston et re-mentionné par @Mona, je comprends sa position, je le pense de bonne foi, et je partage son point de vue philosophique (cf discussions seenthis antérieures), que je résume en disant qu’il est préférable de ne pas instrumentaliser la science au profit d’une cause philosophique et réciproquement, aussi bien pour construire des discours que pour imposer des tabous.

      Je comprends qu’un généticien regrette qu’on lui interdise de manipuler le concept de « race » pour les humains, à cause des catastrophes sociales qui y sont liées, tout comme on pourrait interdire au physicien de nommer les atomes des métaux lourds radioactifs au motif que ça a conduit à Hiroshima.

      Pour ce qui est de sa conférence mise en lien, à part cette illustration peu inspirée sur la mélamine, je ne vois pas pour le reste ce qui est choquant ou risible.
      Il ne parle bien sûr pas du gène du hlm.
      Il évoque cette image simpliste du logement pour expliquer les mécanismes d’évolution. Il n’est pas là pour causer de sociologie, il parle juste de
      « un caractère culturel héritable »
      pour expliquer que « les caractères culturels peuvent aussi évoluer »

      Ensuite dans la suite de la conférence, il évoque d’autres sujets qui peuvent intéresser les lecteurs de seenthis
      – la résistance des moustiques aux insecticides sur la cote languedocienne
      – la résistance des bactéries aux antibiotiques
      – la tolérance au lactose chez les humains

      Je tenais donc à donner un autre son de cloche que celui de Touti parce que je n’ai pas du tout la même interprétation et je trouve injuste qu’il soit discrédité de cette façon. Pas facile de rester jusqu’au bout de la conférence tant son élocution est laborieuse et sa toux désagréable, mais sauf erreur de compréhension de ma part, son travail est respectable.

    • @petit-écran_de_fumée

      Il me semble qu’il ne s’agit pas « d’interdire » l’usage du mot race à cause des catastrophes passées",

      Mais de comprendre comment l’idée de race, qui est, comme toute idée un produit de consciences humaines, et non une donnée immédiate qui nous aurait précédé dans le monde, attendant que nous l’y découvrions, participe pleinement d’un système de rapports sociaux de domination « de races ». Un système institutionnel, dans lequel nous sommes tous pris, et qui fournit une structure « spontanée » de pensée à tous.
      Ce qui est navrant, c’est de lire des imbécilités, assénées avec l’aplomb qui va avec les imbécilités, comme dans l’article de N. Huston : « Sexes et races, deux réalités ». Ce sont la les propos de personnes qui, à un moment ou un autre, ne se posent pas de questions à propos des mots avec lesquels elles pensent, ne s’interrogent pas sur la provenance de la matière même de leur propre pensée.
      Il y a là une forme de superficialité, de fumisterie intellectuelle ; au mieux, une forme de candeur innocente qui pourrait être touchante, si ces personnes ne se trouvaient pas investies de prestige et d’autorité, et si les mots en question ne se trouvaient pas au coeur de rapports sociaux de domination bien présents.
      Le problème du mot race n’est pas qu’il pourrait être employé par « un raciste », qu’il constituerait un danger potentiel : un tel concept, un tel mot est à la fois le produit et le promoteur, la justification en nature, l’essentialisation de rapports sociaux de domination existants, réèls, actuels.
      Si les rapports de domination de race ou de sexe n’ont rien d’hypothétique, il n’ont rien de naturel non plus.

      Sinon, on peut aller lire sur ce sujet des gens passionnants, patients et pédagogues

      comme Odile Fillod, et son blog Allodoxia
      http://allodoxia.blog.lemonde.fr/tag/sexe-genre

      ou le blog « Uneheurede peine » :
      http://uneheuredepeine.blogspot.fr/2013/05/la-volonte-de-parler-tout-prix-de-race.html

      Quand les adversaires d’un ensemble de travaux scientifiques portent leur polémique en dehors du monde scientifique, il y a toujours de quoi s’inquiéter. Pas d’exception pour les travaux sur le genre, avec un nouvel exemple avec une tribune de Nancy Huston et Michel Raymond dans le Monde visant à affirmer la pertinence des races et des sexes. Sans surprise, il apparaît clairement que les auteurs ont d’autres choses en tête que le simple questionnement scientifique qu’ils prétendent affirmer. Pourquoi ? Parce que sur le plan strictement logique, leur argumentation ne tient pas : si « sexes » et « races » désignent des classes logiques, ce n’est pas ce qu’ils montrent ici.

      Tenez, PMO aurait mieux fait d’aller lire un peu ces deux excellents auteurs :

      Qu’on le veuille ou non, s’il y a des femmes avec des pénis et des hommes avec des vagins, ce n’est pas parce qu’ils « refusent » la réalité biologique, c’est parce que nous tous n’utilisons pas cette « réalité biologique » comme la réalité pertinente pour savoir ce qu’est un homme ou une femme. Et nous avons bien raison : nous ne sommes pas tous des médecins en train de soigner des utérus, et nous avons bien d’autres problèmes à régler. Et c’est pour cela que, dans nos interactions quotidiennes, nous utilisons le genre et non le sexe... Les scientifiques n’ont fait que poser le mot « genre » sur quelque chose que les individus utilisent depuis toujours lorsqu’ils sont pris conscience que cette chose était bien différente des chromosomes des personnes ;

      Mais faut-il en comprendre que Huston et Raymond suggèrent que c’est la même chose pour les « races » ? Que les différences biologiques entre des sous-groupes qu’ils se gardent bien de désigner expliquent les différences de positions sociales ? C’est finalement peut-être cela qui est en jeu. C’est peut-être ce qui se cache derrière leurs formules creuses comme « Il est temps de passer outre ces réponses simplistes à des questions infiniment difficiles, car si nous continuons à ignorer et à maltraiter le monde, nous risquons de compromettre nos chances de survie »... C’est peut-être ce qui se cache derrière des imbécilités comme l’assimilation des travaux sur le genre (idéologiquement renommés « théorie du genre ») à la formule « on décide de notre propre sort », remarque aberrante pour des travaux qui s’intéressent à la question de la domination... C’est peut-être ce qui se cache derrière cette volonté de parler à tout prix de « race ».

      ça leur aurait pris moins de temps, et ça leur aurait épargné l’embarras durable d’avoir signé de leur nom les imbécilités navrantes, délirantes, agressives et hostiles aux femmes, lesbiennes, trans et homos, publiées sous le titre « Ceci n’est pas une femme »

      #Odile_Fillod
      #Allodoxia
      #Uneheuredepeine

    • Sexe, race et réalité : réponse à Nancy Huston et Michel Raymond
      Christine DETREZ sociologue, maître de conférences à l’Ecole normale supérieure de Lyon et Régis MEYRAN anthropologue, chercheur associé au Lirces (Nice-Sophia antipolis)
      http://www.liberation.fr/culture/2013/05/27/sexe-race-et-realite-reponse-a-nancy-huston-et-michel-raymond_906078

      Enfin, dans les colloques scientifiques qui ont jalonné le XXe siècle, personne n’est jamais arrivé à un quelconque consensus sur la notion de race, laquelle a été régulièrement remise en question par les esprits les plus éminents, de Paul Topinard (1891) à Henri Neuville (1936) en passant par Franz Boas (1911).

      Stephen Jay Gould affirmait dès 1977 : « Quelle preuve directe avons-nous que le comportement social humain est sous le contrôle des gènes ? Pour le moment, la réponse est : aucune. »

    • A force de faire de l’ironie systématique, on finit par perdre totalement son intelligibilité.

      @philomenne Carrément ! Tu mets là un doigt sur un truc que j’ai ressenti aussi et que je n’arrivais pas à mettre à jour. Un livre entier ou une brochure entière avec presque que de l’ironie, des sortes de « private jokes » entrecoupées de citations, c’est incompréhensible. C’est pas de l’argumentation, c’est pas de la rhétorique, ça ne percute plus du tout comme du boulot « journalistique » qu’ils ont pu faire sur d’autres sujets, quand bien même il y avait des piques insérées dedans.

    • Ce qui est le plus désolant dans cette histoire, c’est que quand j’ai croisé PMO à Lyon, lui expliquait qu’illes bossaient à deux et pas dans un collectif plus large pour pouvoir aller à leur rythme, vite et fort. Personne « sur la banquette arrière ». Ben maintenant la signature au (masculin) singulier profite de la réputation due à un impeccable travail de doc et d’écriture à deux ou plus pour diffuser cette merde.

      @ Aude V : Tu confirmes donc ce que je pensais. Quand je les ai rencontrés à Quimper, ils étaient deux. J’ai demandé combien il y avait de membres chez PMO et ils ont refusé de répondre. J’ai illico soupçonné qu’ils n’étaient en réalité que deux (Monsieur et Madame, en couple, en fait). Je me demande si le problème ne serait pas tout simplement qu’il y a eu rupture entre les deux et que Monsieur aurait eu la garde de la signature PMO ou quelque chose comme ça. Je peux me tromper mais intuitivement, c’est l’impression que ça me donne.

      Je suis d’accord pour dire que ça ne mérite même pas une lecture exhaustive et encore moins une réponse.

      @ RastaPopoulos et Koldobika : Oui, ils écrivent pour eux, c’est aussi ma sensation. Pour eux ou pour un « entre soi », c’est-à-dire des gens qui penseraient déjà comme eux. D’où cette accumulation de sous-entendus, d’allusions et l’ironie systématique. Mais ça n’a plus rien à voir avec l’exercice de journaliste critique qu’ils pratiquaient avant. (Ce qui étaye l’intuition dont je parlais précédemment, puisque des deux, c’est Madame qui était journaliste.)

      Pour moi, à moins qu’ils ne se ressaisissent très vite, PMO signe sa fin. Et ça me rend triste parce qu’il n’y a pas beaucoup de gens pour faire le travail qu’ils faisaient. Si j’ai souvent tiqué sur le style, j’ai beaucoup apprécié le fond. Ma déception est à la hauteur de l’estime que j’avais pour eux avant.

    • Haha @philomenne, pour l’histoire de couple j’ai pensé mot pour mot à la même chose, mais je me suis dit que ça ne se faisait pas d’insinuer des trucs comme ça… :)

      Je me rappelle que c’est un point qu’a évoqué Michéa dans plusieurs de ses livres et interviews, le fait qu’un certain nombre de militant⋅e ont des positions extrêmes influencées par leurs névroses personnelles. Mais bon, on ne peut pas trop expliquer là sans savoir…

      Sinon oui : « Ma déception est à la hauteur de l’estime que j’avais pour eux avant. »

    • Je ne comprends toujours pas comment on peut « estimer » (ou avoir estimé) PMO... (et pas non plus en quoi le #réac Michéa peut aider)

      – Responsabilité et autonomie dans le catéchisme antitechnologie
      http://rougemecanique.noblogs.org/post/2013/01/11/responsabilite-et-autonomie-dans-le-catechisme-antitechnolog

      Faire la morale au nom de « la nature », c’est bien de ça qu’il est question non ?

      La Nature humaine : une illusion occidentale, Marshall Sahlins
      Réflexions sur l’histoire des concepts de hiérarchie et d’égalité, sur la sublimation de l’anarchie en Occident, et essais de comparaison avec d’autres conceptions de la condition humaine
      http://www.lyber-eclat.net/lyber/sahlins/nature1.html

    • Retour sur le passage d’Alexis Escudero à Paris et son livre « la reproduction artificielle de l’humain »

      http://paris-luttes.info/alexis-escudero-masculiniste-et#nh3

      Mardi 28 octobre, Alexis Escudero, proche du groupe Pièce et Main d’Oeuvre (PMO), était de passage à Paris, à la librairie le Monte-en-l’air pour présenter son livre La reproduction artificielle de l’humain. Sur un mur attenant à la librairie, un tag était fraîchement écrit : « PMO homophobe dégage » .

    • Par contre à la fin :

      revendiquent aujourd’hui l’accès à la PMA (qui rappelons le est un don de sperme)

      Ben non, carrément pas. C’est pas juste ça « la PMA » (LES en vérité). Et c’est bien pour ça qu’il y a effectivement des critiques à faire de certaines PMA (une bonne partie en fait, car seulement une petite partie pourrait être « autonomisé »).

      Ça me dérange que certains tracts ou articles sur internet qui critiquent le livre, font eux aussi des amalgames, des mauvaises citations. Enfin, ça me dérange quand ce sont des gens avec qui je pourrais être d’accord (càd pas les libérales, libéraux, mais celleux qui ont aussi en parallèle une approche de critique techno).

  • A propos du Cauchemar de Don Quichotte, sur l’impuissance de la jeunesse d’aujourd’hui, de Mathieu #Amiech et Julien Mattern, republié sous le titre « Cauchemar de Don Quichotte. Retraites, productivisme et impuissance populaire », vanté ici http://seenthis.net/messages/211776 :

    Prenons l’un des objets d’horrification favori d’Amiech et Mattern  : le téléphone portable. Nous serions tous partie prenante d’une résistance au portable, et encore plus d’une lutte collective contre lui, en tant que dispositif de traçabilité des individus. Pour le reste, chacun a sa sensibilité… Concernant ce gadget en tant que moyen de communication, qui est le seul aspect sous lequel Amiech et Mattern l’exècrent, quelques-uns (minoritaires) parmi nous pourraient reprendre ce propos de Giorgio Agamben  : «  Vivant (…) dans un pays où les gestes et les comportements des individus ont été refaçonnés de fond en comble par les téléphones portables, j’ai fini par nourrir une haine implacable pour ce dispositif qui a rendu les rapports entre les personnes encore plus abstraits.  » (4) Mais, à part l’évident mais dérisoire refus d’en posséder un, que faire  ? Agamben poursuit comme ceci  :  «   Même si je me suis surpris à me demander plusieurs fois comment détruire ou désactiver les téléphones portables, je ne crois pas qu’on puisse trouver là la bonne solution.  » Nous ne le croyons pas non plus, du moins pour l’instant. Compte tenu du fait que le procédé technique qui permet aux portables de communiquer entre eux est aussi celui qui permet de les localiser, nous nous surprenons parfois à nous dire que dans le cadre (qu’on excuse cet horrible mot) d’une guerre révolutionnaire il faudra peut-être se poser la question en ces termes. Mais nous n’en sommes pas là. Si l’on s’effraie de l’abstraction que produit le portable, on ne peut aujourd’hui que s’efforcer d’imaginer quelle véritable résistance pourrait lui être opposée. Le Cauchemar de Don Quichotte n’est d’aucune aide, mais Agamben non plus. Il explique que ce ne pourrait être un usage nouveau du portable, et il cherche lequel ce pourrait être en méditant sur la notion de profanation. C’est très intéressant, mais n’étant pas plus avancés que lui dans l’imagination de ce que serait une profanation du portable, ceux qui parmi nous supportent mal l’abstraction des rapports personnels que selon eux il induit en restent à ne pas l’utiliser, et à tenir autant que possible leur perception éveillée pour repérer d’éventuelles profanations qu’inventeraient des gens plus imaginatifs qu’eux. Voilà  ! Tirez-en s’il vous plaît la conclusion qu’en ce qui concerne au moins le portable nous ne sommes pas tous modernistes. Mais, surtout, comprenez pourquoi nous ne faisons des éventuelles sensibilités antimodernistes des uns ou des autres ni l’occasion d’un jugement moral, ni le principe du choix de nos alliés ou de nos ennemis politiques.
    Libre à vous de penser que nous sommes donc tous en fait d’affreux modernistes, puisque les plus antimodernistes d’entre nous ne le sont, et reconnaissent ne l’être, que par goût. Et alors  ? Que vous importe le degré d’authenticité ou d’intensité de notre antimodernisme pour mener un combat politique avec nous  ? Admettons que celle qui ne mange pas de viandes uniquement parce qu’il se trouve qu’aucune n’est à son goût n’est pas une authentique végétarienne  : est-ce une raison pour ne pas s’asseoir à sa table  ? Le combat, pour revenir à l’exemple des portables, contre le contrôle par traçabilité ne mériterait-il pas quelque compromission avec des modernistes tels que nous  ? Si ce genre de compromission est au-delà de vos forces, dans quelles luttes allez-vous lutter ? Que dites-vous des luttes qui mettent en mouvement des gens qui ont dans leur vie ordinaire de tout autres goûts ou dégoûts que les vôtres  ? Il n’y en a d’ailleurs pas d’autres – à moins de croire qu’on lutte en fréquentant les bars alternatifs et les épiceries bio.

    http://rougemecanique.noblogs.org/post/2013/01/12/les-mauvais-reves-des-antitech

    #moralistes #technocentrisme #dépolitisation

    • Le Cauchemar de Don Quichotte est très parcimonieux en faits précis concernant des problèmes particuliers, et singulièrement en faits précis se rapportant aux problèmes particuliers posés par la #lutte qui lui donna son impulsion  : la lutte de 2003 contre la loi Fillon. Il est vrai qu’Amiech et Mattern n’ont aucune raison d’utiliser l’#arme que Roy tient pour la plus efficace dans la lutte, puisqu’ils ne s’inscrivent plus dans cette lutte  : ils adoptent au contraire une posture de juges, extérieurs et supérieurs à elle et à ses acteurs et actrices, en posant non pas la question de comment la poursuivre minoritairement alors qu’elle est en reflux, mais celle des raisons de son échec présumé définitif. Pour eux, d’ailleurs, les problèmes ne sont pas posés par la lutte, mais à l’occasion de la lutte   ; on ne saurait s’étonner alors que celle-ci soit présentée comme la rencontre par une subjectivité encline aux vastes questions existentielles d’un événement qui la porte à réactiver l’interrogation socratique sur la valeur des différents genres de vie  : « Pour tous ceux qui (…) n’entendent pas se résoudre à une soumission complète, ce conflit était à nouveau l’occasion de poser un certain nombre de problèmes fondamentaux, au premier rang desquels celui de savoir quelle sorte de vie nous voulons mener  » (p.14).

      Mais ce qui m’intéresse, c’est, je dirais, l’esprit dans lequel cette démonstration est faite. Kropotkine défend fermement la thèse de son «  école  », l’une de ces «  vingt écoles différentes (…) qui répondent à des manières particulières de concevoir l’étendue, la portée, le devoir de la révolution  ». C’est donc, si vous voulez, l’exposition d’un programme, en ce sens que c’est ce que cette école conçoit quant à ce que la #révolution devra faire. Dans le cas de l’école anarchiste, sa manière particulière de concevoir est que nul n’est mieux en situation de définir ses «  devoirs  » que le peuple insurgé lui-même. Ce n’est donc un programme qu’au sens où c’est ce pour quoi les anarchistes agiront, ce qu’ils soutiendront dans les «  clubs  improvisés discutant des affaires publiques ». Ce ne l’est pas au sens où ce serait ce pour quoi ils intrigueraient dans les instances substitutives du pouvoir déchu. Mais d’autres écoles pourraient écrire d’autres livres dans le même esprit  : je n’ai pris qu’un exemple. Roy est d’une autre école, elle écrit cependant dans un esprit semblable  : poser des questions et diffuser un savoir qui ont été produits par un mouvement. La Conquête du pain est bien autre chose que le programme d’action qu’une élite éclairée définit selon sa philosophie du «  devoir de la révolution  ». Elle est l’un des produits actuels d’un mouvement – en l’occurrence  : le mouvement ouvrier – au sein d’une certaine école qui en fait partie. Elle est avant tout l’un des moyens par lesquels cette école met en circulation le savoir et l’intelligence du mouvement qui sont les siens. Savoir et intelligence du mouvement : au sens où ce sont une intelligence et un savoir que le mouvement produit, chez Roy comme chez Kropotkine, mais aussi, chez ce dernier, au sens où ils ont ce même mouvement comme objet. Cela en prévision des questions qu’il se posera. Ces questions, l’école anarchiste suppose qu’elles seront – dans une certaine conjoncture prévisible justement grâce à l’expérience et à l’intelligence des luttes antérieures – des questions relatives à la conquête du pain  : d’où la nécessité pour elle d’écrire La Conquête du pain .

      http://rougemecanique.noblogs.org/post/2013/01/11/a-quoi-ce-cauchemar-pourrait-il-bien-servir

    • Des humains nous parlent, et nous disent qu’ils veulent se libérer de l’emprise technologique, des techniques, pour être libres. Comme ça, abstraitement, idéalement. Libres. Pour que le Contrôle sur les humains, en tout cas sur certains, n’agisse plus. Comme s’il était extérieur à nous, comme si le seul outil de liaison entre le contrôle et nous était l’action de vouloir ou non s’y soustraire.

      Mais les caméras, par exemple, ne sont pas un diable mécanique auquel on pourrait être libre de croire ou pas, que l’on choisi de vénérer ou de craindre. Les caméras sont des yeux en plus sur la planète ; elles sont les outils de vision potentiels d’autres humains avides de micros-panoramas, soucieux de remplir la tâche qu’on leur alloue avec toujours plus d’efficacité. Elles sont en quelques sorte des morceaux d’humains, qui souhaitent exploiter d’autres humains. Elles ne sont pas des organes extérieurs à nous, elles sont des orbites oculaires aveugles tant qu’un corps n’est pas posté derrière, systématiquement braquées sur nous, pour voir et être vu. Oui, comme les yeux animaux, leur rôle dans le corps de la société est bien de voir autant que de signifier qu’elles possèdent ce don naturel, la vue, pour rassurer ou intimider, en pure interaction.
      La force de ce monde est de nous retenir prisonnier, quoi qu’il arrive. Sans espoir d’évasion, sans remise de peine possible.

      http://nonsstops.noblogs.org/?p=25

  • Homo Numericus
    http://terrainsdeluttes.ouvaton.org/?p=2297

    L’un des thèmes les plus à la mode de la vulgate idéologique actuelle, c’est celui de la mutation psychique que l’irruption massive des techniques informatiques et numériques dans la vie quotidienne aurait d’ores et déjà entraînée sur le plan des structures de l’entendement et de la sensibilité. La « culture de …

    #Blogs #La_chronique_d'Alain_Accardo #internet #numérique #technologie

    • J’avoue ne pas trop voir la raison de traiter tout rétif à Internet du nom de cet infâme personnage qu’est « Finkielkraut », ou de réactionnaire. C’est un nouveau point Godwin ?

      En l’occurrence, la critique d’Accardo (un coup de gueule, effectivement) fait toujours du bien dans le ron-ron que les thuriféraires de la technique se confectionnent sur le net en claironnant que c’est l’espace de discussion le plus ouvert qu’il ait jamais existé.

      Cette question sur le sujet est tout à fait entendable d’un point de vue émancipateur (je suis pas d’accord d’ailleurs), et même centrale pour celles et ceux dont l’horizon révolutionnaire – qui rêvent d’un monde un peu meilleur – ne s’arrête pas à leur(s) écran(s), au dernier gadget numérique ou robotique.

      Pourquoi serais-je un, quand je peux être innombrable, pourquoi resterais-je coincé en un lieu, en une classe, en un camp, en un serment, puisque grâce au virtuel je peux être partout, vivre et penser une chose et puis son contraire, ici et ailleurs, sans me soucier de logique, sans me préoccuper de synthèse, de constance ni de fidélité ?

      Questions qui recoupent par exemple celles publiées, il y a quelques années, dans un excellent journal (papier) autonome lyonnais, reproduites ici :
      http://rebellyon.info/Le-web-2-0-ou-l-ere-du-vide.html

      Une ques­tion plane au dessus de n’importe quel post sur twit­ter : « what are you doing now ? », « mais putain, qu’est ce que je suis en train de faire là ? ». C’est quoi JE, quelle FACE à JE, ça serait quoi MON ESPACE. On sent monter une pointe d’angoisse. Ce que racontent bien les faux débats où on peut à peu près tout raconter, les embrouilles bizar­res sur les forums, les ren­contres ambi­guës depuis Meetic, c’est qu’Internet a pro­duit cette curieuse pos­si­bi­lité d’une com­mu­ni­ca­tion sans la pré­sence. Le web : Utopie démo­cra­ti­que, mais également Utopie du Capital. Comme si cette grosse machine à briser les liens (…) avait finit par secré­ter un monde à son tour, mais un monde vir­tuel : où les liens n’enga­gent pas vrai­ment, où les corps sont absents, où les désirs tour­nent tris­te­ment à vide sur l’écran.

      Peut-il y avoir une critique du net sur le net ? Peut-être que non, de la même manière qu’il n’y a jamais pu y avoir de critique de la télévision à la télévision.

    • @Ari Sur la référence à Finkielkraut. Il y a pourtant bien des points communs. Pas uniquement le fait de critiquer l’Internet. La frime, tout d’abord, avec les citations répétées de vieux mâles blancs européens. Le refus du pluralisme (non, dit l’auteur, il n’y a pas plusieurs points de vue valables, juste le Vrai). La référence au monde occidental comme seul capable de pensée rationnelle. L’absence de perspective, enfin. Il y a des différences avec Finkielkraut ? Oui, la mention du capitalisme comme étant méchant. C’est mince.

      Sur le « Peut-on critiquer l’Internet sur l’Internet ? » Je pense qu’on peut puisque c’est souvent fait. Mais je différencie la critique, qui essaie d’analyser, de comprendre et, éventuellement, de réformer, voire de combattre, de la récrimination qui confond tout (l’Internet avec le Web, le Web avec Facebook, les GAFA avec Wikipédia et SeenThis), et ne se soucie pas d’analyser et encore moins de convaincre, juste d’aligner des grands mots prétentieux. On voit bien ce que l’auteur attaque, pas ce qu’il défend. Comparons avec l’agriculture : il est évidemment souhaitable de critiquer la façon dont elle se fait, productionniste et dangereuse pour la planète. Des tas de gens font ça. Mais ils proposent tous quelque chose (typiquement, une agriculture bio, plus respectueuse de la nature). Si quelqu’un partait des défauts (bien réels) de l’agriculture pour prôner le retour à la chasse et à la cueillette, je crois que cela ne serait pas exagéré de le qualifier de réactionnaire !

    • @bortzmeyer : mince les discussions se croisent. cf. http://seenthis.net/messages/211209 En ce qui concerne les camarades qui critiquent le net comme outil d’émancipation, ils proposent réellement d’autres modes de relation, d’expression et d’organisation. Je ne crois pas qu’on puisse reprocher à ces personnes de faire une critique généralisante, c’est plus à celles et ceux qu’Internet intéresse de produire une pensée plus précise et mesurée qui prenne en compte ces critiques. Merci de l’échange en tout cas.

    • A propos de l’idéologie #anti-tech et de son voisinage avec le #moralisme de Finkelkraut, on pourra lire :
      Les mauvais rêves des antitech. Lecture critique du livre Le Cauchemar de Don Quichotte, sur l’impuissance de la jeunesse d’aujourd’hui de Matthieu #Amiech et Julien Mattern, Editions Climats.
      http://rougemecanique.noblogs.org/post/2013/01/12/les-mauvais-reves-des-antitech

      C’est leur appartenance sociale à la classe des travailleurs pauvres qui leur interdit quelque chose – ou du moins, mais c’est manifestement une litote, elle ne les aide pas  : elle les empêche de sortir d’un rapport de dominés avec leurs professeurs et avec le savoir. Leur apathie s’explique par cette domination. Pourquoi être contraint au travail salarié fait-il de son rapport avec le savoir un «  rapport de dominé à dominant  »  ? Pourquoi être dans un rapport de dominé avec le savoir entraîne-t-il l’apathie  ? Est-ce parce que tout rapport de dominé à dominant entraîne nécessairement l’apathie  ? Amiech et Mattern s’attendent curieusement à ce que nous comprenions sans avoir besoin d’explications supplémentaires, puisqu’ils n’en donnent pas. L’explication s’arrête là. Nous sommes censés admettre comme allant de soi que si nous maîtrisons le savoir universitaire, nous avons de trop bonnes raisons de nous complaire dans l’#apathie pour, sauf héroïsme moral rare, ne pas y céder  ; et que si nous ne le maîtrisons pas, nous sommes ipso facto plongés dans une apathie dont, encore une fois, seule une grâce exceptionnelle pourrait nous faire sortir. Il faut remarquer que les deux branches de la tenaille dans laquelle nous coince ce raisonnement n’exercent pas une contrainte de même nature  : pour s’en dégager, dans le premier cas il suffirait de décider de ne pas céder à des raison s  ; mais dans le second nous n’avons aucune raison d’être apathiques  : nous le sommes au moins autant, mais nous le sommes pour des causes . Bref  : aux bourgeois le libre arbitre, aux prolétaires le déterminisme social. Amiech et Mattern se proclament dans leur avant-propos «  plus ‘‘sociologues’’  » que le «  sociologue [sans guillemets, cette fois] bourdieusien engagé  » Alain Accardo (pp. 9 et 8), mais ils ne nous offrent qu’un superbe exemple de ce que Bourdieu – excusez la référence – appelait une sociologie qui néglige la sociologie de sa sociologie. Ils s’annoncent aussi (dans la même phrase) «  plus ‘‘matérialistes’’  »  ; on aimerait leur demander dans quel passage. Ils affirment que « pour ceux-là [les étudiants travailleurs précaires] – et plus généralement pour la majorité des étudiants, préoccupés avant tout par les échéances scolaires et l’obtention des diplômes –, la focalisation sur les considérations matérielles rejette [NB  : ce ne sont pas les étudiants, c’est la focalisation qui rejette] le plus souvent les questions politiques du côté des préoccupations ‘‘intellectuelles’’ et du ‘‘militantisme’’, qui sont dénigrés  » (p. 78 toujours  : cette phrase suit immédiatement celle sur les étudiants travailleurs dominés par les profs et le savoir). Leur matérialisme consiste-t-il à poser en axiome qu’un sujet qui a de préoccupantes «  considérations matérielles  » va nécessairement «  dénigrer  » tout ce qui est intellectuel  ? Et que s’il dénigre l’intellectuel il est nécessairement soumis  ? Aux bourgeois l’idéalisme tempéré par la carrière, aux prolos le matérialisme vulgaire intempérant  : est-ce là le slogan de leur matérialisme subtil  ? On les asticotait gentiment sur leur mépris d’une classe d’âge, dont nous nous contrefoutons  ; mais sur le mépris de classe social, nous sommes tentés de passer à l’insulte. La suite (p.79) ne pouvant nous apaiser – «  On atteint sans doute le comble de l’absurdité avec ces individus si désireux de paraître ‘‘dans le coup’’ qu’ils en viennent à se restreindre considérablement dans certains domaines vitaux (nourriture, logement, santé) pour pouvoir suivre le rythme insensé de la surenchère consommatrice, et que l’on retrouve régulièrement habillés à la dernière mode, équipés des toutes dernières trouvailles technologiques  » –, donnons la parole à quelqu’un qui sait garder son calme, Jacques Rancière : «  Il n’y a pas à s’étonner que les représentants de la passion consommatrice qui excitent la plus grande fureur de nos #idéologues soient en général ceux dont la capacité de consommer est la plus limitée  » (8) : il n’y a pas à s’en étonner, car les idéologues dont il parle (Finkielkraut et autres) sont des conservateurs de droite. Mais on peut s’étonner que des conservateurs révolutionnaires de gauche ne s’en distinguent pas sur ce point.

    • Huhu @aude_v, je pense que je dois beaucoup à Amiech en références à lire, aussi bien par sa lecture, que par sa rencontre à Bayonne il y a quelques années, invité par #Txetx (ouais, j’ai inauguré ce lien l’autre jour, pour les locaux :D). Il m’avait gentillement envoyé un numéro traduit de Los amigos de Ludd.

      Je pense que j’aurais du mal à le critiquer (enfin en tout cas à le critiquer méchamment, comme le fond les méchants rouge mécanique — qui question jargonneux font largement mieux qu’Accardo !). :)