• Une lettre extraordinaire de Germaine Tillion à la Gestapo

    http://www.slate.fr/france/86193/germaine-tillion-gestapo-lettre-resistance

    J’ai pourtant l’habitude des requêtes les plus extraordinaires, car, comme vous le savez, j’ai vécu seule, en Afrique, pendant des années, en compagnie de tribus dites sauvages : des femmes mariées à des démons m’ont demandé de les divorcer ; un vieux bonhomme (pire que Barbe-Bleue) qui avait, m’a-t-il dit, mangé ses huit premières épouses, m’a demandé une recette pour ne pas manger la neuvième ; des tribus en guerre m’ont chargé d’un commun accord de leur tracer une frontière ; j’ai vu des paiements de prix du sang, des jemaâ secrètes, des sorciers dansant une fois par an sur une montagne sacrée… Je ne parle pas de ceux qui, en transe, avalent des charbons rouges et jouent avec des vipères, la chose étant trop banale. Malgré ces compétences variées, je déclare formellement que, si ces messieurs de la police allemande ont réellement perdu leur innocence, je suis incapable de la leur rendre. Toutefois, s’ils tiennent à la retrouver, ils ne doivent pas désespérer. […] Je ne puis que conseiller à mon commissaire un pèlerinage sur les rives de ce fleuve fameux, d’où il nous reviendra, espérons-le, paré des grâces de Parsifal, mais je souhaite vivement qu’on n’attende pas cet heureux événement pour me dire que signifie cette histoire et en quoi elle me regarde.