• Faut-il réviser l’histoire de l’antifascisme ?
    http://www.monde-diplomatique.fr/1994/06/AGULHON/7178

    Au moment où s’élance la machine commémorative, de trouble s amalgames banalisent, au nom de l’antitotalitarisme, ce mal absolu que fut le nazisme. Occultant la nature de la « grande coalition » antifasciste qui l’emporta il y a cinquante ans, et tirant parti du caractère devenu flottant de certains concepts historiques, une nouvelle bourse des valeurs voudrait assimiler aux « perversions du communisme » la doctrine national-socialiste qui fit de la race son élément constitutif, alors que des ministres néofascistes font leur entrée à Rome.. Source : Le Monde diplomatique, juin 1994

    • Cette notion du #fascisme, pourtant, ne devait pas survivre bien longtemps à la victoire qui, en 1945, l’avait apparemment ratifiée. Pourquoi ? Pour nous limiter à la France, on entrevoit trois raisons. La première est que la science historique et la science #politique n’ont pas entériné cette analyse. Dans l’Université, il n’y eut guère que les marxistes pour garder les conventions de #vocabulaire qui faisaient du « fascisme » une catégorie, alors que les principales autorités ont proposé des classements plus fins, et tendu à rejeter le mot de « fascisme » dans la rubrique d’un vocabulaire partisan et daté.

      Ensuite, le « fascisme » ayant surtout désigné des régimes vaincus et disqualifiés par la guerre, le mot a tendu à devenir infamant, et a pu donc être considéré comme diffamatoire par tout homme qui, assimilable à un fasciste par la théorie pure, n’avait pourtant pas agi en collaborateur des occupants. Un procès remarqué, à Paris, en 1983, a procuré un exemple bien réel de cette difficulté (8).

      La troisième enfin est que, la guerre froide aidant, l’opinion occidentale a été amenée à abandonner ces notions de « fascisme » et d’"antifascisme" que les démocraties libérales avaient eu en commun avec les staliniens au temps où les vainqueurs étaient alliés. Ce dont le « monde libre » avait besoin après 1947, c’était d’une conceptualisation capable de diaboliser les communistes aussi bien que les hitlériens. Ce fut, on le sait, la notion de « #totalitarisme » qui apparut au-devant de la scène, pour mettre l’accent sur ce que l’antilibéralisme de droite (le fascisme) et l’antilibéralisme de gauche (le bolchevisme) avaient en commun.

      On n’entreprendra pas ici le commentaire des avancées scientifiques que la notion de « totalitarisme » aura permises. Nous voulions seulement montrer à quel point la désignation du mal sous les formes successives du « fascisme » et du « totalitarisme » portait au moins autant la marque de la conjoncture politique que celle de l’exigence réflexive. Il y a bien là une difficulté propre à l’histoire, et peut-être à la politologie, de nature à rendre fragile leur statut scientifique.

    • Ma question est plutôt : que recouvre la notion de « démocratie libérale » ? Parce que derrière le mot « libéral » se cache parfois le loup du « libéralisme économique » qui est rarement très libertaire et qui revêt pour ceux qui ne s’accommodent pas de sa manière entraver le droit à l’existence des plus fragiles d’entre nous une tonalité bien peu humaniste et encore moins démocratique.
      Il y a toujours une confusion de sens entre « libéral » de chez nous (Genre Madelin) et « libéral » des USA (plutôt gros gauchiste, d’après mon beau-frère américain).