Farida et l’article 49

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  • Farida et l’article 49
    LE MONDE | 07.06.2014 à 08h39 • Mis à jour le 07.06.2014 à 10h47
    Par Benoît Hopquin
    « Je vous informe qu’après avoir procédé à un nouvel examen de votre dossier, j’ai décidé, en application de l’article 49 du décret n° 93.1362 du 30 décembre 1993, de maintenir cette décision de rejet. » Douze ans que Farida Belamri essuie les refus de naturalisation.
    Pendant ce temps, Farida Belamri attend d’être française. Mais que faut-il bien faire pour devenir française ? Dans ses moments de découragement, elle s’interroge. Elle a quitté l’Algérie en 1976, à 20 ans. Depuis, elle vit et travaille en France, à Toulouse. Elle repasse, balaye, lave, essuie, sert, range. Elle fut femme de ménage, aide à domicile, serveuse dans une cantine, assistante du troisième âge.

    Des petits salaires, des pleins-temps, des mi-temps. « Je veux vivre de mon travail. » Avec ce chiche argent, elle a élevé seule quatre enfants. « Pas un n’est connu des services de police », dit-elle, usant d’un langage tout droit sorti de la télévision. Ils sont installés, ils font leur vie, leur vie de Français. Farida Belamri est aujourd’hui grand-mère. Un pareil parcours, une telle vie exemplaire, vaut bien brevet de citoyenneté, avec mention honorable.

    Pas pour l’administration. Douze ans que Farida Belamri essuie les refus de naturalisation. Douze ans que la boîte aux lettres livre, l’une derrière l’autre, les mêmes lettres pète-sec.

    « Je vous informe qu’après avoir procédé à un nouvel examen de votre dossier, j’ai décidé, en application de l’article 49 du décret n° 93.1362 du 30 décembre 1993, de maintenir cette décision de rejet. »
    Plus loin, il est indiqué que la récipiendaire peut contester ce rejet devant un tribunal administratif, requête assortie de 35 euros de timbres fiscaux. La justice… « J’ai tout fait pour que mes enfants n’aient jamais affaire à elle », assure Farida Belamri. Ce n’est pas pour se retrouver soi-même devant un juge, fût-il administratif.

    « LA FRANCE, MON PAYS »

    Et puis un procès intitulé « Farida Belamri contre Etat français », ce serait un comble. La France, elle est pour, pas contre. Elle l’a écrit, d’ailleurs, dans une de ses lettres à l’administration. « Je considère la France comme le pays qui m’a recueillie, qui m’a offert de vivre une vie meilleure, la France, mon pays. »

    source : http://www.lemonde.fr/idees/article/2014/06/07/farida-et-l-article-49_4434015_3232.html