France | Mediapart

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  • Le Goncourt de poésie Jean-Michel Maulpoix condamné pour avoir frappé sa femme | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/270224/le-goncourt-de-poesie-jean-michel-maulpoix-condamne-pour-avoir-frappe-sa-f

    « J’ai« J’ai traité des centaines de dossiers de violences conjugales. Mais les photos qu’on voit dans le dossier, là, pour moi, c’est la première fois. » Au tribunal judiciaire de Strasbourg, mardi 13 février, le procureur s’est ému des nombreux clichés pris entre 2017 et 2022 par Laure Helms avec son téléphone. Un œil au beurre noir, des hématomes sur ses épaules, ses bras, ses cuisses, ses fesses, son thorax. « Ce sont des traces de coups de poing », conclura le magistrat. Les photos prises par la femme de ce poète qui a obtenu le prix Goncourt en 2022 pour l’ensemble de son œuvre montrent aussi des touffes de cheveux arrachées, un lobe meurtri par une boucle d’oreille violemment tirée, des vêtements déchirés.

    • Mise en garde Cet article fait état de violences conjugales [et contient des photos de multiples hématomes.]
      [...]
      Entre 2017 et 2022, elle fera constater à plusieurs reprises ses blessures par des médecins et déposera quatre mains courantes évoquant des coups de pied, de poing ou encore des « étranglements », versés à l’enquête judiciaire dont Mediapart a pu consulter le contenu. Sans jamais « réussir » à déposer plainte – « J’ai honte d’être ici, j’ai peur de changer le quotidien de mes enfants », dit-elle à une policière qui essaye de la convaincre en 2017.
      [...]
      Malgré les hurlements fréquents, les voisins ne sont jamais intervenus. Auditionnés par la police, certains qualifient simplement le couple de « gueulards », notamment l’épouse, que plusieurs d’entre eux affirment avoir souvent entendue crier sur ses enfants ou son mari.

      https://justpaste.it/4c7gl

      #VSS

    • « Les violences de la part de ma femme sont au moins aussi nombreuses et aussi dures. Surtout depuis que j’ai été diagnostiqué parkinsonien, elle m’a traité comme un sous-homme. »

      Pour un « sous-homme » atteint de Parkinson, il a encore la main leste, dis donc ...
      (Consternant)

  • Le Sénat rejette l’instauration d’un congé menstruel
    https://www.mediapart.fr/journal/france/150224/le-senat-rejette-l-instauration-d-un-conge-menstruel

    Jeudi, en séance publique, la proposition de loi socialiste a été rejetée par 213 voix contre et 115 pour.

    publicsenat

    Le Sénat reste une assemblée très majoritairement masculine, avec 230 hommes (66 %) contre 118 femmes (34 %) à l’issue du dernier renouvellement.

    Je souhaite à tous les sénateurs une prostate qui se durcit douloureusement tout les mois, jusqu’à se tordre par terre, de 13 ans à 90.

  • Santé mentale des jeunes filles : il y a urgence | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/130224/sante-mentale-des-jeunes-filles-il-y-urgence

    La hausse affolante des tentatives de suicide des jeunes filles, dès l’âge de 10 ans, ne peut plus s’expliquer par la crise du Covid. Face à l’urgence, les annonces de Gabriel Attal, comme l’offre de soin, sont très insuffisantes, estiment les psychiatres.
    [...]
    Les derniers chiffres de la Direction des études, de l’évaluation, des statistiques et la recherche du ministère de la santé (Drees) sont affolants : en 2022, 75 803 personnes de 10 ans ou plus ont été hospitalisées pour un geste auto-infligé, soit des scarifications ou des tentatives de suicide. Si le niveau est comparable à celui d’avant la crise sanitaire, détaille la Drees, de « brutales augmentations sont observées chez les filles et les jeunes femmes » entre 2021 et 2022 : + 63 % chez les filles de 10 à 14 ans ; + 42 % parmi les adolescentes de 15 à 19 ans ; + 32 % de jeunes femmes âgées de 20 à 24 ans.
    [...]
    Les rapports s’empilent, comme celui de la Cour des comptes en 2023 qui estime que « 13 % environ des enfants et adolescents présentent au moins un trouble psychique ». Pour les prendre en charge, il ne reste plus que 597 pédopsychiatres, dont la moyenne d’âge est de 65 ans. Leur nombre est en chute libre, en baisse de 34 % entre 2010 et 2022.
    [...]
    Le Dr Blanchard explique ainsi la hausse si forte du passage à l’acte suicidaire chez les jeunes filles : « Des études montrent qu’il y a une corrélation entre les gestes auto-infligés et la fréquentation des réseaux sociaux. Ils créent un cadre très normatif de la féminité, encouragent les comparaisons permanentes, abîment l’identité et l’estime de soi. Les adolescentes que je vois en consultation portent un regard sur elles impitoyable, elles sont dans un processus d’autodénigrement insupportable. L’exigence de la performance scolaire pèse aussi : je vois des refus scolaires anxieux par des ados rongées par l’angoisse. Elles ne dorment plus, se lèvent à 4 heures du matin pour réviser, elles se consument littéralement. »

    Mais le psychiatre se dit plus inquiet encore pour les garçons : « Ils s’isolent, en s’enfermant dans les jeux en ligne. Ils vivent la nuit, consomment beaucoup de stupéfiants. Ils sont dans un déni, c’est difficile de mettre en place avec eux un projet de soins. » Chez les filles, les passages à l’acte, souvent « très visibles », sont au contraire un appel à l’aide qui permet une entrée plus aisée dans les soins.
    Selon la professeure Ouss, les enfants et les adolescents passent d’autant plus à l’acte qu’ils vivent dans « un contexte économique et social très précaire. Les situations sont de plus en plus inextricables. La jeunesse est très déboussolée, l’ensemble de la société et l’ensemble des institutions, l’Éducation nationale, l’hôpital sont fragilisés ». Elle assure voir aussi « des éléments optimistes et réjouissants, des jeunes qui inventent des modes de vie alternatifs ».
    [...]
    Autre fait inquiétant : la consommation de psychotropes ne cesse d’augmenter. Dans un livre qui vient de paraître, Le Silence des symptômes – Enquête sur la santé et le soin des enfants (Champ social Éditions), trois membres du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge documentent l’augmentation de la consommation de médicaments psychotropes par les enfants et les adolescent·es entre 2014 et 2021 : + 48,54 % pour les antipsychotiques, + 62,58 % pour les antidépresseurs, + 78,07 % pour les psychostimulants, + 155,48 % pour les hypnotiques et sédatifs, etc.
    [...]

    https://jpst.it/3Awh_

  • Des expertes de l’ONU s’inquiètent du « harcèlement » de Rokhaya Diallo en France | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/110224/des-expertes-de-l-onu-s-inquietent-du-harcelement-de-rokhaya-diallo-en-fra

    [...]
    Le 1er février, l’experte irlandaise des Nations unies, habituée à prendre la plume pour défendre des personnalités attaquées par des régimes non démocratiques, s’est inquiétée du sort d’une personnalité française : la journaliste, essayiste et militante antiraciste Rokhaya Diallo, cofondatrice du podcast « Kiffe ta race » et de feu l’association Les Indivisibles, chroniqueuse sur la chaîne Arte mais aussi pour le Guardian et le Washington Post, et chercheuse en résidence à l’université états-unienne de Georgetown.
    « Vive inquiétude »

    Dans une communication cosignée par d’autres expertes des Nations unies, et publiée le 1er février sur sa page officielle des Nations unies, Mary Lawlor exprime sa « vive inquiétude face aux poursuites judiciaires, [à] la surveillance, [aux] intimidations et diffamations signalées contre Mme Diallo », cible fréquente, notamment sur les réseaux sociaux, de personnalités d’extrême droite et de la mouvance laïciste du Printemps républicain.


    Rokhaya Diallo a été chroniqueuse pour plusieurs chaînes de télévision et radios. © Slown

    « Ces différentes attaques semblent être directement liées à son travail légitime en faveur des droits de l’homme, notamment les droits des femmes, des personnes d’ascendance africaine et [à] l’exercice de son droit à la liberté d’expression », estiment les cosignataires, parmi lesquels figurent le groupe de travail de l’ONU sur les personnes d’ascendance africaine et les trois rapporteuses spéciales des Nations unies chargées de la protection de la liberté d’expression, des discriminations raciales et des violences faites aux femmes.

    « Dans un pays comme la France, il est inquiétant de voir qu’une journaliste comme Mme Diallo [...] [fait] l’objet depuis des années de si fréquents incidents de diffamation, de procédures judiciaires ou d’intimidation », commente Mary Lawlor, interrogée par Mediapart.

    « Les défenseurs des droits humains comme Mme Diallo doivent être publiquement reconnus afin d’éviter de telles attaques et intimidations. Dans le cas de Mme Diallo, nous espérons que cette lettre va contribuer à sa visibilité et à sa reconnaissance en tant qu’une personnalité clé de la promotion et de la protection des droits humains en France. »
    [...]

    https://jpst.it/3Ap03

  • Fin du droit du sol à Mayotte : une rupture fondamentale | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/110224/fin-du-droit-du-sol-mayotte-une-rupture-fondamentale

    En annonçant vouloir réviser la Constitution pour mettre fin au droit du sol à Mayotte, Emmanuel Macron prend une décision contraire à notre histoire, dangereuse pour nous tous et inefficace au regard de son objectif de limiter l’immigration irrégulière.

    Carine Fouteau

    11 février 2024 à 21h12

    [...]

    Comme l’anticipait Patrick Weil dans un entretien à Mediapart en 2008, on reviendrait à un « régime colonial » à Mayotte, où le droit de la métropole ne s’appliquerait plus aux outre-mer. « Faire un droit différencié – dans une partie du territoire donnée – en matière de nationalité, c’est tout à fait exceptionnel en République, régime fondé sur l’égalité des citoyens et l’unité du territoire. Mayotte a un statut de département, c’est une rupture très importante que de lui appliquer un statut différent », s’alarme aujourd’hui l’historien auprès l’AFP, tout en doutant de l’efficacité de la mesure.

    « Il faudrait qu’il [Gérald Darmanin – ndlr] prouve aux parlementaires et aux Français que cela va avoir des effets, indique-t-il. Aujourd’hui, quand une femme comorienne arrive et accouche à Mayotte, son enfant n’est pas français. Est-ce qu’une telle mesure la dissuadera de venir ? […] J’en doute et il ne le démontre absolument pas. Vu le différentiel de richesses entre Mayotte et les Comores, les gens viendront […]. Ce sont les conditions de vie qui les attirent. C’est le devoir du président de la République, garant de l’indivisibilité de la République et de son unité, que de chercher d’abord d’autres solutions pour répondre à la crise migratoire qui touche Mayotte. »

    Une brèche dans le droit de la nationalité

    Le danger est peut-être plus grave encore : en touchant au droit du sol à Mayotte, Emmanuel Macron ouvre une brèche dans l’ensemble du droit de la nationalité, tant on sait que les départements et territoires d’outre-Mer servent de laboratoire à des politiques générales.

    De fait, il ne faut pas regarder bien loin pour trouver un autre coin que l’exécutif cherche à enfoncer. Lors du débat sur la loi immigration, cet hiver, les parlementaires ont en effet tenté de mettre fin à l’automaticité de l’accès à la nationalité pour l’ensemble des mineur·es né·es en France de parents étrangers (lire notre article). Cette disposition ayant été rejetée par le Conseil constitutionnel, sans doute qu’une réforme de la Constitution pourrait y remédier.

    Là encore, il s’agissait de limiter l’immigration, car, on l’observe depuis plusieurs années, la question de l’immigration a envahi celle de la nationalité française. L’exposé des motifs de l’amendement concerné était explicite, estimant que le régime de l’automaticité, jugé trop favorable, pouvait « constituer un facteur d’attractivité pour les étrangers et contribuer à l’augmentation des flux migratoires ». Et les débats auxquels ce texte a donné lieu dans l’hémicycle sont édifiants.

    « Un veau qui naît dans une écurie ne fera jamais de lui un cheval », a par exemple déclaré le sénateur Reconquête des Bouches-du-Rhône Stéphane Ravier. Cette sortie raciste lui a valu un rappel au règlement, mais elle a eu le mérite de dire tout haut ce que nombre d’élu·es de la droite, et désormais peut-être de la Macronie, pensent tout bas : la nécessité de privilégier la filiation, soit le droit du sang, pour transmettre la nationalité.

    À Mayotte, comme partout en France, l’idée est de faire le tri entre les jeunes, en les renvoyant à leurs origines et à leur ascendance. Et l’on voit revenir en pleine lumière l’idéologie du « grand remplacement », selon laquelle l’augmentation du nombre d’immigré·es dans la population française remet en cause l’« identité nationale ». Marine Le Pen, qui, dans son programme présidentiel, a inscrit et la fin du droit du sol à Mayotte, et la fin de l’automaticité de l’accès à la nationalité, le formule sans barguigner : « La nationalité française s’hérite ou se mérite. »

    Les principes d’égalité des droits et d’unicité du territoire n’ont pourtant pas été inventés pour rien. Il est grand temps de dénoncer les relents de xénophobie et de racisme découlant de leur mise en cause et de prendre conscience des risques que de tels accrocs font prendre à notre République, qui en plus d’être indivisible est plurielle, rappelons-le. Et, ce faisant, du danger qu’ils nous font prendre à nous tous et toutes en tant que citoyens et citoyennes.

    Carine Fouteau

    https://jpst.it/3AobK

    • Droit du sol à Mayotte : « Il faut le supprimer dans toute la France », s’insurge Éric Zemmour
      https://www.lefigaro.fr/politique/droit-du-sol-a-mayotte-il-faut-le-supprimer-dans-toute-la-france-s-insurge-

      [...]
      « Mayotte c’est le miroir grossissant et en accéléré de la France métropolitaine », a réagi Éric Zemmour sur France 2 ce lundi matin. « Quand vous avez la moitié de la population qui est étrangère on peut parler d’invasion », a avancé le président de Reconquête ! qui prédit le même sort à la métropole « dans dix ans, quinze ans ». Celui qui a fait de l’immigration son cheval de bataille depuis son entrée en politique juge l’annonce du locataire de Beauvau insuffisante. « Il parle beaucoup et il n’agit pas beaucoup », a-t-il fustigé. Et de marteler sa promesse de campagne de 2022 : « Il faut le (le droit du sol) supprimer dans toute la France. » Pour l’ancien candidat à la présidentielle, le droit du sol est devenu « une arme majeure de l’invasion » qui « détruit la France ».

    • Suppression du droit du sol : « À force de dérogations, Mayotte n’aura plus grand-chose de français »

      https://www.mediapart.fr/journal/france/110224/suppression-du-droit-du-sol-force-de-derogations-mayotte-n-aura-plus-grand

      Le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin a annoncé samedi à Mayotte une réforme constitutionnelle à venir pour sanctuariser la suppression du droit du sol. Marjane Ghaem, avocate spécialiste du droit des étrangers, pointe les travers d’une réponse qu’elle juge inefficace et contraire au principe d’égalité devant la loi.

      [...]

      À force de dérogations, Mayotte n’aura plus grand-chose de français. Les exceptions sont tellement nombreuses qu’on est ici en dehors de la République. Voilà ce qui me fait peur. Ici, la lutte contre l’immigration passe avant tous les principes, les libertés fondamentales, l’égalité devant la loi. Quelle que soit la réforme, on arrivera toujours à l’enrober pour y trouver une portée constitutionnelle. On essaie de mettre un vernis de légalité sur des pratiques fascistes. La loi dérogatoire permet déjà, par exemple, un déplacement forcé de population à Mayotte : on peut contrôler des populations entières, sans avoir à apporter la moindre justification, et on peut les expulser sans laissez-passer consulaire. Théoriquement, l’État peut mener de véritables rafles ici. Si on y ajoute la volonté annoncée de doubler ou tripler les forces de sécurité sur place, on entre dans une dimension d’opération militaire qui m’inquiète.

      [...]

      https://jpst.it/3Ap2-

  • #Santé Publique France coupe les fonds au suivi des #cancers de l’amiante
    https://www.revolutionpermanente.fr/Sante-Publique-France-coupe-les-fonds-au-suivi-des-cancers-de-l


    La politique pas de thermomètre = pas de fièvre continue.

    Une épidémie qui fait encore rage, comme le montrent les plus de 1000 nouveaux cas reconnus chaque année, et les 4000 décès annuels relevés, mais qui n’empêche pas Santé Publique France de cesser son suivi. Comme le relève le magazine Santé et Travail, « Dans un mail adressé le 21 décembre à une trentaine de spécialistes du #mésothéliome, Santé publique France a annoncé « se résoudre à interrompre » le Programme national de surveillance des mésothéliomes (PNSM) et renonce au déploiement du Dispositif national de surveillance des mésothéliomes (DNSM) qui devait le remplacer. » La clôture de ce programme est justifiée par un manque de moyens, et n’a encore fait l’objet d’aucune annonce officielle.

    Cette fermeture impactera lourdement la surveillance du nombre de cas et invisibilisera cette épidémie massive de cancers, tout en véhiculant le message que l’époque des cancers de l’#amiante est close. De plus, elle réduira la possibilité pour les malades de faire reconnaître leur maladie comme une maladie professionnelle indemnisable, et de faire reconnaitre la responsabilité de leur patron dans la maladie qui brise leur vie. En effet, l’institut de recherche et d’expertise Mesopath, qui réalise des diagnostiques ouvrant la voie à une reconnaissance en maladie professionnelle et étudie des traitements, dépend financièrement pour un tiers du programme stoppé.

    C’est donc une attaque frontale contre les malades, qui participe à couvrir les responsables en col blanc de ce « crime industriel » pour reprendre la formulation de la sociologue de la santé Annie Thébaud-Mony. Selon elle, « Leur responsabilité est double. Tout d’abord, alors que tout était connu des dangers de l’amiante depuis le début du 20e siècle, ils ont développé un marché mondial de cette fibre qu’ils savaient mortelle. Et, pour ce faire, ils ont, au sein du cartel mondial de l’amiante, construit une stratégie de désinformation et de mystification. »

    • Cancer de l’amiante : le dispositif de suivi sur la sellette
      https://www.mediapart.fr/journal/france/090324/cancer-de-l-amiante-le-dispositif-de-suivi-sur-la-sellette

      La nouvelle, parvenue quelques jours avant Noël, a surpris la communauté scientifique autant qu’elle a scandalisé les victimes et leurs proches. « Tout se passe comme si on avait choisi de casser le thermomètre pour soigner la fièvre. C’est inacceptable », a réagi l’Association nationale des victimes de l’amiante (#Andeva) après avoir pris connaissance d’un courriel, consulté par Mediapart, dans lequel Santé publique France annonce à une poignée d’expert·es la fin du dispositif national de suivi des mésothéliomes (DNSM), les cancers de l’amiante.

      « Cette décision est extrêmement difficile mais l’agence ne dispose plus des ressources suffisantes pour [le] piloter sur le long terme », reconnaît Santé publique France dans cette missive, envoyée le 21 décembre dernier et consultée par Mediapart. Elle évoque notamment des contraintes « financières et humaines ».

      « Une décision prise sans concertation ni débat public, dénonce l’Andeva, tout en insistant sur l’importance de ce dispositif. Son abandon « priverait les soignants, les chercheurs et les victimes de l’amiante d’un outil utile pour mieux connaître cette terrible maladie et mieux la combattre en faisant avancer la recherche nécessaire à l’amélioration des traitements ». Selon son secrétaire national, Alain Bobbio, cet abandon accrédite aussi « auprès du grand public que la page amiante se tourne. Mais les gens qui sonnent à la porte de nos permanences sont toujours là ».

      Fin janvier, l’Andeva a dénoncé dans un courrier destiné à la ministre de la santé, Christine Vautrin, une décision « inacceptable », lui demandant de faire marche arrière. « Nous n’avons reçu aucune réponse », indiquait début mars Alain Bobbio, secrétaire national d’Andeva.

      Au même moment, Didier Le Gac, député Renaissance et président du groupe d’étude amiante à l’Assemblée nationale, qui avait lui aussi alerté il y a plusieurs semaines le gouvernement, affirmait avoir reçu l’assurance du gouvernement que ce dispositif ne serait pas supprimé.

      « Compte tenu de la priorité accordée au risque amiante, le ministère a d’ores et déjà demandé à l’agence que la surveillance nationale du mésothéliome soit poursuivie », a indiqué le cabinet de Christine Vautrin dans un message envoyé au député. Contacté, le ministère de la santé n’a pas répondu à nos sollicitations. De son côté, Santé publique France affirme finalement auprès de Mediapart « maintenir » un dispositif de surveillance visant à « suivre le nombre de cas de cancers » et à caractériser les expositions.

      « On ne peut pas uniquement dire merci, notre souci est d’obtenir des garanties sur la nature de cette surveillance », a aussitôt réagi Alain Bobbio, secrétaire national de l’Andeva, insistant notamment sur le fait que le dispositif doit inclure le suivi des procédures d’indemnisation et des expositions.

      L’histoire du dispositif de surveillance du mésothéliome commence il y a plus de vingt ans, lorsque la France décide d’interdire, en 1997, l’usage de l’amiante, un matériau qui a contaminé pendant des décennies les ouvriers des usines et des chantiers navals. La France prend alors conscience de l’étendue de la catastrophe sanitaire. C’est pourquoi, l’année suivante, un Programme national de surveillance du mésothéliome pleural (PNSM), une maladie spécifique de l’amiante, voit le jour dans 21 départements qui représentent 30 % de la population.

      Cette surveillance vise alors à mieux documenter les cas, les expositions professionnelles, et à permettre aux malades de saisir le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva). « Un dispositif unique au monde », fait valoir Alain Bobbio.

      Le mésothéliome est une maladie rare qui continue de toucher, chaque année, environ 1 100 personnes, dont un quart de femmes (27 %). C’est une pathologie presque toujours mortelle, la survie à cinq ans ne dépassant pas les 10 %. Vingt ans de surveillance ont permis de montrer que cette maladie peut survenir après une exposition à l’amiante extrêmement faible et se déclenche en moyenne trente-cinq ans après l’exposition. 90 % des hommes atteints ont été exposés dans un cadre professionnel. Quant à l’indemnisation, le taux de non-recours au Fiva est moins élevé dans les départements concernés par le PNSM. 

      En 2017, un groupe d’expert·es se prononce donc pour étendre le PNSM au niveau national. Quatre ans plus tard, un nouveau dispositif est lancé, le dispositif national de suivi des mésothéliomes. Celui-ci a pour ambition de tendre à un recueil exhaustif de tous les cas de mésothéliomes (pleural, péritoine et péricarde) sur l’ensemble du territoire national. Santé publique France entend alors « moderniser », « optimiser » la surveillance et mieux prendre en compte les expositions, notamment environnementales.

      À l’époque, l’agence insiste sur le fait que « l’amiante est et restera encore pendant plusieurs décennies un sujet majeur de santé publique, de santé au travail et de santé environnementale ». D’autant plus que les cas évoluent. Les femmes sont de plus en plus concernées et de nouvelles contaminations professionnelles apparaissent, notamment dans le secteur de l’enseignement, comme l’a récemment montré une enquête de l’émission « Vert de rage ».

      En lançant ce DNSM, Santé publique France a notamment le projet de créer une plateforme afin de rassembler les données recueillies par différentes structures comme le réseau de chercheurs et chercheuses Mesopath et celles provenant de la déclaration obligatoire qui impose depuis 2012 aux médecins de signaler aux agences régionales de santé les cas de mésothéliomes. Un projet qui semble appartenir au passé, Santé publique France estimant qu’il ne répond plus « aux exigences de sécurisation des données de santé ».

      La fin de cette surveillance pourrait d’ailleurs impacter le travail effectué par le réseau Mesopath. Cette équipe de 17 anatomopathologistes – au moins un·e par région – a pour mission de dresser des diagnostics à partir de l’étude de tissus, cellules et organes. Une fois étudiés en région par un premier expert, les échantillons sont envoyés à Lyon, au Centre Léon-Bérard, centre national de référence, où ils sont de nouveau analysés par deux autres experts.

      « Si tout le monde est d’accord sur le diagnostic, on dresse un compte rendu définitif. Il sert de base à la prise en charge des patients et à l’instruction des dossiers d’indemnisation », explique Sylvie Lantuejoul, responsable de Mesopath. Ce diagnostic est aussi enregistré dans une base de données baptisée Mesobank et communiqué à Santé publique France pour déclencher des enquêtes sur l’exposition des malades à l’amiante ou à d’autres carcinogènes.

      Jusqu’à présent, le réseau était financé par Santé publique France à hauteur de 25 %, affirme-t-elle. « Cette année, on va tomber à 12 % pour la collecte des données sur 2023. En 2025, le financement de Santé publique France s’arrête. » Si cette coupe budgétaire ne signe pas la fin du réseau Mesopath, elle risque bien d’affecter son fonctionnement. « On ne pourra peut-être plus analyser tous les cas, les délais de compte rendu vont peut-être s’allonger et ce sera un frein à l’innovation technologique et au financement d’analyses moléculaires complexes qui permettent de mieux diagnostiquer ces tumeurs rares », détaille Sylvie Lantuejoul.

      Ce fonctionnement « en mode dégradé » serait d’autant plus préjudiciable pour les malades que Mesopath possède, jusqu’à présent, la base de données « la plus complète », explique Sylvie Lantuejoul, la déclaration obligatoire gérée par l’ARS étant non exhaustive. Dans sa réponse envoyée au député Didier Le Gac, le ministère évoque d’ailleurs l’enjeu de « renforcer » la déclaration obligatoire des mésothéliomes.

    • « Il est logique de reconnaître aux Maires la possibilité d’exiger des devoirs en contrepartie de droits, le respect de son pays et des morts pour la France en fait partie. »

      Le front de l’air est vraiment putride.
      Bientot le RSA conditionné à la présence lors des commemoration de Pétain et Maurras. La CAF à condition de dire notre fierté pour Depardieu....
      Bientôt tu pourra crever la dalle si t’es pas Charlie

    • Le tribunal administratif de Toulon a (...) validé le 26 janvier 2024, cette décision du maire, adoptée en septembre 2022, par la majorité des élus de #droite. Cette mesure avait été cependant contestée par la suite par la préfecture qui dénonçait : "une ingérence dans les libertés d’association et de conscience".

      Le tribunal administratif de Toulon a estimé que cette dernière favorisait "l’engagement des associations lors d’événements ayant un intérêt public local" sans enfreindre "le principe de neutralité".

      #Associations #subventions

      Droits et devoirs : la rupture Macron
      https://www.mediapart.fr/journal/france/250322/droits-et-devoirs-la-rupture-macron

      Pour le président-candidat, « les devoirs valent avant les droits ». Cette logique, qui va à l’encontre des principes fondamentaux de l’État social et l’#État_de_droit, irrigue l’ensemble de son projet de réélection. En distinguant les bons et les mauvais citoyens.
      Romaric Godin et Ellen Salvi
      25 mars 2022


      EmmanuelEmmanuel Macron a rarement parlé de « droits » sans y accoler le mot « devoirs ». En 2017 déjà, il présentait les contours de sa future réforme de l’assurance-chômage, en expliquant vouloir « un système exigeant de droits et de devoirs ». Deux ans plus tard, au démarrage du « grand débat national », pensé comme une campagne de mi-mandat pour endiguer la crise des « gilets jaunes », il déplorait l’usage de l’expression « cahier de doléances », lui préférant celle de « cahiers de droits et de devoirs » [le droit de se plaindre, et surtout le devoir de la fermer et d’obéir, ndc]..
      À l’époque, le chef de l’État prenait encore soin, au moins dans son expression, de maintenir un semblant d’équilibre. Mais celui-ci a volé en éclats au printemps 2021, en marge d’un déplacement à Nevers (Nièvre). Interpellé par un homme sans papiers, le président de la République avait déclaré : « Vous avez des devoirs, avant d’avoir des droits. On n’arrive pas en disant : “On doit être considéré, on a des droits.” » Avant d’ajouter, sans l’ombre d’une ambiguïté : « Les choses ne sont pas données. »

      Jeudi 17 mars, le président-candidat a de nouveau invoqué la question des devoirs en abordant le volet régalien de son projet. Rappelant son engagement à accueillir des familles ukrainiennes fuyant la guerre, il a immédiatement prévenu vouloir « changer les modes d’accès aux titres de séjour » et notamment les titres de séjour longs, qui seront désormais accordés « dans des conditions beaucoup plus restrictives ». Parce que non, définitivement, « les choses ne sont pas données ».
      Cette rhétorique du donnant-donnant irrigue aujourd’hui l’ensemble du programme d’Emmanuel Macron. Elle s’impose ainsi dans le volet économique de celui-ci. La mesure la plus représentative en la matière étant sans doute la mise sous condition de travail ou de formation du revenu de solidarité active (#RSA). Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a d’ailleurs explicitement indiqué que cette proposition s’inscrivait dans cette « logique de droits et devoirs » proposée par le candidat.
      Une logique, ou plus exactement une précédence, que le chef de l’État a lentement installée, l’étendant des sans-papiers à tous les citoyens et citoyennes. « Être #citoyen, ce n’est pas demander toujours des droits supplémentaires, c’est veiller d’abord à tenir ses devoirs à l’égard de la nation », avait-il lancé en août 2021. « Être un citoyen libre et toujours être un citoyen responsable pour soi et pour autrui ; les devoirs valent avant les droits », insistait-il en décembre, à destination des personnes non vaccinées.

      Une vision digne de l’Ancien Régime

      Emmanuel Macron a balayé, en l’espace de quelques mois, l’héritage émancipateur de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Pour les rédacteurs de cette dernière, rappelait l’avocat Henri Leclerc dans ce texte, « les droits qu’ils énoncent sont affaire de principe, ils découlent de la nature de l’homme, et c’est pourquoi ils sont imprescriptibles ; les devoirs eux sont les conséquences du contrat social qui détermine les bornes de la liberté, par la loi, expression de la volonté générale ».
      « Ce sont les sociétés totalitaires qui reposent d’abord sur l’#obéissance à des impératifs non négociables qui, en fait, ne sont pas des devoirs auxquels chacun devrait subordonner librement ses actes, écrivait-il en guise de conclusion. Les sociétés démocratiques reposent sur l’existence de droits égaux de citoyens libres qui constituent le peuple d’où émane la souveraineté. Chacun y a des devoirs qui, sans qu’il soit nécessaire de les préciser autrement, répondent à ses droits universels. »
      Début 2022, face aux critiques – Jean-Luc Mélenchon avait notamment tweeté : « Les devoirs avant les droits, c’est la monarchie féodale et ses sujets. Le respect des droits créant le devoir, c’est la République et la citoyenneté » –, Gabriel Attal avait assuré un nouveau service après-vente. Dans Le Parisien, le porte-parole du gouvernement avait expliqué vouloir « poursuivre la redéfinition de notre contrat social, avec des devoirs qui passent avant les droits, du respect de l’autorité aux prestations sociales ».

      La conception conservatrice du « bon sens »

      Cette « redéfinition de notre contrat social » se traduit par plusieurs mesures du projet présidentiel : le RSA donc, mais aussi l’augmentation des salaires du corps enseignant contre de nouvelles tâches – « C’est difficile de dire : on va mieux payer tout le monde, y compris celles et ceux qui ne sont pas prêts à davantage s’engager ou à faire plus d’efforts », a justifié Emmanuel Macron [avant d’introduire la notion de #salaire_au_mérite dans la fonction publique, ndc]–, ou même la réforme des retraites qui soumet ce droit devenu fondamental à des exigences économiques et financières.
      Cette vision s’appuie sur une conception conservatrice du « bon sens », qui conditionne l’accès aux droits liés aux prestations sociales à certains comportements méritants. Elle va à l’encontre total des principes qui fondent l’État social. Ce dernier, tel qu’il a été conçu en France par le Conseil national de la Résistance, repose en effet sur l’idée que le capitalisme fait porter sur les travailleurs et travailleuses un certain nombre de risques contre lesquels il faut se prémunir.

      Ce ne sont pas alors d’hypothétiques « devoirs » qui fondent les droits, c’est le statut même du salarié, qui est en première ligne de la production de valeur et qui en essuie les modalités par les conditions de travail, le chômage, la pénibilité, la faiblesse de la rémunération. Des conditions à l’accès aux droits furent toutefois posées d’emblée, l’État social relevant d’un compromis avec les forces économiques qui ne pouvaient accepter que le risque du chômage, et sa force disciplinaire centrale, ne disparaisse totalement.
      Mais ces conditions ne peuvent prendre la forme de devoirs économiques, qui relèvent, eux, d’une logique différente. Cette logique prévoit des contreparties concrètes aux aides sociales ou à la rémunération décente de certains fonctionnaires. Et ce, alors même que chacun, y compris Emmanuel Macron, convient de la dévalorisation du métier d’enseignant. Elle conduit à modifier profondément la conception de l’aide sociale et du traitement des fonctionnaires. À trois niveaux.
      Le premier est celui de la définition même des « devoirs ». Devoirs envers qui ou envers quoi ? Répondre à cette question, c’est révéler les fondements philosophiques conservateurs du macronisme. Un bénéficiaire du RSA aurait des devoirs envers un État et une société qui lui demandent de vivre avec un peu plus de 500 euros par mois ? Il aurait en quelque sorte des « contreparties » à payer à sa propre survie.
      Si ces contreparties prenaient la forme d’un travail pour le secteur privé, celui-ci deviendrait la source du paiement de l’allocation. C’est alors tout le centre de gravité de l’État social qui évoluerait, passant du travail au capital. En créant la richesse et en payant l’allocation, les entreprises seraient en droit de demander, en contrepartie, du travail aux allocataires au RSA, lesquels deviendraient forcément des « chômeurs volontaires » puisque le travail serait disponible.

      Les allocataires du RSA devront choisir leur camp

      Ce chômage volontaire serait une forme de comportement antisocial qui ferait perdre à la société sa seule véritable richesse : celle de produire du profit. On perçoit, dès lors, le retournement. La notion de « devoirs » place l’allocataire du RSA dans le rôle de #coupable, là où le RMI, certes imaginé par Michel Rocard dans une logique d’insertion assez ambiguë, avait été pensé pour compléter l’assurance-chômage, qui laissait de côté de plus en plus de personnes touchées par le chômage de longue durée.

      Ce retournement a une fonction simple : #discipliner le monde du travail par trois mouvements. Le premier, c’est celui qui veut lui faire croire qu’il doit tout au capital et qu’il doit donc accepter ses règles. Le second conduit à une forme de #criminalisation de la #pauvreté qui renforce la peur de cette dernière au sein du salariat – un usage central au XIXe siècle. Le dernier divise le monde du travail entre les « bons » citoyens qui seraient insérés et les « mauvais » qui seraient parasitaires.
      C’est le retour, déjà visible avec les « gilets jaunes », à l’idée que déployait Adolphe Thiers dans son discours du 24 mai 1850, en distinguant la « vile multitude » et le « vrai peuple », « le pauvre qui travaille » et le « vagabond ». Bientôt, les allocataires du RSA devront choisir leur camp. Ce qui mène à la deuxième rupture de cette logique de « devoirs ». Le devoir suprême, selon le projet d’Emmanuel Macron, est de travailler. Autrement dit de produire de la valeur pour le capital.

      Individualisation croissante

      C’est le non-dit de ces discours où se retrouvent la « valeur #travail », les « devoirs générateurs de droits » et le « #mérite ». Désormais, ce qui produit des droits, c’est une capacité concrète à produire cette valeur. Il y a, dans cette démarche, une logique marchande, là où l’État social traditionnel voyait dans la protection sociale une fenêtre de démarchandisation – c’est parce qu’on devenait improductif qu’on devait être protégé. À présent, chacun, y compris les plus fragiles, doit faire preuve de sa capacité constante de production pour justifier son droit à survivre.

      Cette #marchandisation va de pair avec une individualisation croissante. Dans le modèle traditionnel, la pensée est systémique : le capitalisme produit des risques sociaux globaux dont il faut protéger tous les travailleurs et travailleuses. Dans le modèle des contreparties, chacun est mis face à l’injonction de devoir justifier individuellement ses droits par une mise à l’épreuve du marché qui est le juge de paix final. On comprend dès lors pourquoi Christophe Castaner prétend que l’allocation sans contrepartie est « la réponse des lâches ».
      Car ce choix laisserait les individus sans obligations devant le marché. Or, pour les partisans d’Emmanuel Macron, comme pour Friedrich Hayek, la seule façon de reconnaître un mérite, c’est de se confronter au marché qui donne à chacun ce à quoi il a droit. La vraie justice est donc celle qui permet d’être compétitif. C’est la vision qu’a d’ailleurs défendue le président-candidat le 22 mars, sur France Bleu, en expliquant que la « vraie inégalité » résidait dans « les inégalités de départ ». L’inégalité de résultat, elle, n’est pas remise en cause. [voir L’égalité des chances contre l’égalité http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4443]

      Le dernier point d’inflexion concerne l’État. Dans la logique initiale de la Sécurité sociale, la protection contre les risques induits par le capitalisme excluait l’État. De 1946 à 1967, seuls les salariés géraient la Sécu. Pour une raison simple : toutes et tous étaient les victimes du système économique et les bénéficiaires de l’assurance contre ces risques. Le patronat cotisait en tant qu’origine des risques, mais ne pouvait décider des protections contre ceux qu’il causait. Ce système a été progressivement détruit, notamment en s’étatisant.
      Le phénomène fut loin d’être anecdotique puisqu’il a modifié le modèle initial et changé la nature profonde de l’État : désormais, le monde du travail est redevable à celui-ci et au patronat de ses allocations. Ces deux entités – qui en réalité n’en forment qu’une – exigent des contreparties aux allocataires pour compenser le prix de leur prise en charge. L’État étant lui-même soumis à des choix de rentabilité, l’allocataire doit devenir davantage rentable. Dans cet état d’esprit, cette « #rentabilité » est synonyme « d’#intérêt_général ».
      Les propositions sur le RSA et le corps enseignant entrent dans la même logique. Emmanuel Macron agit en capitaliste pur. Derrière sa rhétorique des droits et des devoirs se profilent les vieilles lunes néolibérales : marchandisation avancée de la société, discipline du monde du travail et, enfin, idée selon laquelle l’État serait une entreprise comme les autres. Le rideau de fumée de la morale, tiré par un candidat qui ose parler de « dignité », cache mal le conservatisme social de son système de pensée.

      Romaric Godin et Ellen Salvi

      #subventions #associations #contrepartie #droits #devoirs #égalité #inégalité

  • Julien Grenet : « L’école privée sera majoritaire à Paris dans dix ans »
    https://www.mediapart.fr/journal/france/070224/julien-grenet-l-ecole-privee-sera-majoritaire-paris-dans-dix-ans

    Il n’y a pas une augmentation du nombre d’élèves inscrits dans le privé, c’est davantage lié à la baisse démographique très forte, amorcée depuis 2010, que connaît la capitale. Entre 2010 et 2023, on est passé de 30 000 à 20 000 naissances par an à Paris. Cette très forte baisse se répercute déjà dans le nombre d’élèves inscrits dans les écoles, avec un peu de décalage sur l’entrée en sixième. Et cette baisse se répercute quasi intégralement sur l’enseignement public. Le privé parvient, lui, à maintenir ses effectifs.

    Combien d’élèves le privé à Paris scolarise-t-il aujourd’hui par rapport au public ?

    En pourcentage, Paris est déjà à un taux de privé sous contrat très élevé. Cela s’accentue encore depuis 2023 : la part du privé en élémentaire, c’est 27 %, au collège, 37 % et dans les lycées, 40 %. On est très loin de la répartition d’usage, qui tourne autour de 80 % pour le public et 20 % pour le privé. Le taux d’élèves scolarisés à Paris est deux fois plus élevé que la moyenne en France.

    Pendant longtemps, tout cela était stable, mais la tendance est à une augmentation très forte si l’on regarde l’entrée en CP et en sixième. En sixième, la part augmente d’un point par an. En 2020, on était à 35 %, trois ans plus tard, presque à 39 %. Chaque année, cela augmente au même rythme.

    Et dans dix ans ?

    Ce taux va continuer à augmenter si l’on ne décide pas de fermer des classes dans le privé. Dans le scénario, réaliste, qui est celui d’un maintien des effectifs du public, on sera en 2034 à 51 % d’élèves scolarisés au collège dans le privé. Le privé sous contrat deviendrait donc majoritaire. Pourquoi c’est un problème ? La conséquence d’un tel laisser-faire se traduirait par un niveau insupportable de ségrégation sociale dans le système scolaire parisien.

    Car le privé ne recrute pas n’importe quel type d’élèves…

    S’il maintient ses effectifs en période de baisse démographique, c’est qu’il y a plus de demandes que de places. La baisse démographique permet d’avoir un accès encore plus facile au privé, et d’aller encore moins dans le public. Aujourd’hui, 55 % des familles scolaires les plus favorisées font le choix du privé. Le cap a été franchi cette année. Dans dix ans, on sera à 76 %. Seuls 6% des enfants d’ouvriers ou dont les parents sont sans activité professionnelle seront inscrits dans le privé*. On peut vraiment parler d’une école à deux vitesses.

    Vous avez présenté ces travaux aux élu·es parisien·nes à l’hôtel de ville. Quelle a été leur réaction et quels sont les leviers disponibles, selon vous ?

    Il y a toujours une forme de fatalisme, mais qui tend à diminuer. On peut et on doit faire quelque chose : le premier levier, c’est cette règle du 80-20 dans l’allocation des postes enseignants. Le ministère doit réduire le nombre de postes attribués dans le privé dans l’académie de Paris, c’est une nécessité. À la rentrée 2023, rien ne s’est passé, on a maintenu le même nombre d’élèves que l’an passé, alors qu’on ferme des classes dans le public. Cette demande doit être formulée par le rectorat et par la ville. Avec 30 % d’élèves en moins au total en raison de la baisse démographique, il faut des fermetures de classes, c’est incontournable, mais pourquoi seul le public est-il concerné ?

    Le deuxième levier, c’est le contrôle : il me semblerait parfaitement légitime que soit mise en place une plateforme obligatoire pour recenser les inscriptions dans l’enseignement privé. Pas pour réguler, pas encore, mais au moins pour savoir qui candidate et qui est retenu. L’article 1 de la loi Debré est parfaitement clair : l’enseignement placé sous le régime du contrat est soumis au contrôle de l’État, et tous les enfants sans distinction d’origine, de croyance, ou sociale doivent y avoir accès.

    Qui le vérifie aujourd’hui ? Si l’enseignement privé n’accueille que 3 % des élèves les moins favorisés, est-ce parce que 3 % seulement postulent ou parce que les autres sont recalés ? Ce serait un outil très puissant pour ensuite négocier fermement avec le secteur sous contrat. Cela éviterait les questionnaires d’entrée délirants comme à Stanislas, où l’on demande aux familles si les enfants sont baptisés ou ont fait leur communion...

    Il faut aussi un contrôle pédagogique et financier accru, ce que demande la Cour des comptes, et moduler les financements publics en fonction de critères sociaux. La Haute-Garonne l’a fait, même si ce n’est que sur le forfait éducatif, une toute petite part du financement. Paris a voté un vœu en ce sens, il faut passer aux actes.

    On pourrait vous opposer qu’en le rendant encore plus accessible, on va jeter encore plus de monde dans les bras du privé, même si c’est à des fins, louables, de mixité sociale.

    Oui, j’ai bien conscience que cela comporte des risques. Mais si l’on regarde froidement les chiffres, on est déjà dans un système de ségrégation. Soit on prend acte et on contrôle mieux la part de l’enseignement privé, en essayant de faire en sorte qu’il prenne sa part socialement, soit on choisit le statu quo.

    Bien sûr, on peut ensuite aller plus loin et mettre fin à cette exception très française qui octroie plus de 76 % de son financement à un système scolaire tout en le laissant maître de son recrutement. Il faudra à terme des critères et des quotas.

    • A Paris, la perspective d’un enseignement privé majoritaire à l’entrée au collège, source de nouvelles tensions politiques
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/03/04/a-paris-la-perspective-d-un-enseignement-prive-majoritaire-a-l-entree-au-col

      Le bouleversement des équilibres entre public et privé tient surtout à la baisse démographique considérable que connaît la capitale et qui, faute d’action ministérielle jusqu’à présent, n’affecte pas le privé et le public dans les mêmes proportions. En 2023, 21 700 naissances ont été enregistrées à Paris, soit 10 000 de moins qu’en 2010. Cette diminution se répercute quelques années plus tard dans les établissements scolaires et est essentiellement absorbée par l’enseignement public.

      Les écoles publiques parisiennes ont ainsi connu une chute de près d’un quart de leurs effectifs de CP depuis 2016, quand ceux des écoles privées sous contrat n’ont baissé que de 4,5 %. Le choc démographique atteint désormais le collège et se traduit par une diminution de 13 % du nombre d’élèves entrant en 6e dans le public depuis 2020, mais il n’a pour l’heure presque aucune incidence sur le nombre d’élèves scolarisés dans le privé. Même si ce dernier n’augmente pas, le poids du privé s’alourdit ainsi mécaniquement.

      [...]

      Comme pour le public, c’est en effet au ministère de l’éducation nationale d’attribuer les postes d’enseignants pour le privé et de décider des ouvertures et des fermetures de classes. Au niveau national, la Rue de Grenelle attribue les moyens en fonction de la proportion d’élèves dans chaque système (20 % des moyens du public attribué au privé). Mais, « à l’échelle d’une académie, il n’y a pas nécessairement de symétrie entre les évolutions de moyens du privé et du public », reconnaît la direction des affaires financières, qui gère les moyens de l’enseignement privé. En 2023, le ministère a ainsi décidé de 337 suppressions de postes d’enseignants dans le public, mais seulement 17 dans le privé.

      « Pour maintenir les équilibres actuels, il faut une action extrêmement volontariste : pour deux classes fermées dans le public, une classe fermée dans le privé », affirme Julien Grenet, pour qui ces projections posent à nouveau l’enjeu de « la régulation d’un secteur subventionné aux trois quarts par l’argent public ». Selon les scénarios qu’il a établis, pour maintenir le statu quo, avec un peu moins de 40 % des élèves de 6e scolarisés dans le privé dans la capitale dans dix ans, il faudrait fermer des classes du privé sous contrat à un rythme de 2,6 % par an.

  • L’affaire Bitcoin : comment un agent de la DGSI a détourné l’argent du service secret | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/060224/l-affaire-bitcoin-comment-un-agent-de-la-dgsi-detourne-l-argent-du-service

    L’affaire Bitcoin : comment un agent de la DGSI a détourné l’argent du service secret

    En pleine période des attentats de 2015, un agent de la DGSI a détourné des fonds destinés à rémunérer des hackers qui infiltraient les réseaux djihadistes. Si l’affaire a été jugée, les services se sont bien gardés de révéler cette histoire embarrassante.

    Fabrice, acupuncteur au cœur de l’Auvergne, ne comprend pas quand, en janvier 2021, ses anciens collègues de la DGSI viennent le chercher pour le placer en garde à vue, sept ans après qu’il a quitté le service de renseignement intérieur. Ils veulent l’entendre dans une affaire pour laquelle il sera finalement mis hors de cause. En attendant, lors de sa cinquième audition, Fabrice confie la raison de son incrédulité : « Je ne savais pas pourquoi [les policiers] se déplaçaient car j’ai déjà témoigné deux fois dans une affaire de détournement de fonds publics et faux et usage de faux [...], un ancien collègue ayant détourné au moins 1,5 million d’euros. » 

    Ce simple commentaire lève le voile sur « l’affaire Bitcoin » que révèlent conjointement Mediapart et BFMTV, une affaire tellement embarrassante que la DGSI a cherché à l’étouffer durant des années et que son auteur a été jugé en catimini fin 2022 par une procédure de plaider-coupable. En 2015, un agent de la DGSI, chargé de gérer des hackers infiltrant notamment les réseaux djihadistes, a volé l’argent destiné à payer ses sources et a ensuite utilisé différents moyens du service de renseignement pour faire fructifier le produit de son vol…

    L’affaire Bitcoin débute au dixième étage du siège de la DGSI à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), là où se trouvent les bureaux de la direction technique (DT) et notamment la section chargée du « backstopping » (c’est-à-dire la fourniture du matériel démarqué pour conduire des actions d’espionnage sans que rien ne permette de remonter au service), mais aussi de traiter des sources humaines dans le milieu technique (en l’espèce des hackers capables d’infiltrer n’importe quel système informatique, sans que l’on puisse impliquer la DGSI).

    Durant des années, les agents de la DT doivent se débrouiller avec très peu de moyens financiers. Jusqu’à ce que les attentats de 2015 amènent les gouvernements successifs à financer les services de renseignement. « Il y avait tellement de pognon qu’on ne savait plus quoi en faire », confie un ancien de la DT. Par exemple, deux de ces achats anonymisés de la DGSI s’élèvent à 95 000 dollars pour l’un, à 104 852 euros pour l’autre.

    C’est aussi l’époque où le service s’intéresse au bitcoin, cette monnaie numérique n’ayant cours que sur Internet. « On s’est dit : on va se lancer à fond dans le bitcoin pour acheter ce dont avait besoin le service et s’assurer que nos achats restent intraçables », continue la même source. Fabrice, le futur acupuncteur, et Xavier Julie, un brigadier, étudient la manière de procéder et se spécialisent peu à peu.

    Parallèlement, ledit Xavier Julie gère des « sources techniques », autrement dit des hackers de très haut niveau. « Des punks à chien avec le QI d’Einstein, résume un autre ancien du service. Des hackers capables de craquer des sites djihadistes, par exemple. » Ces hackers, notamment quand il s’agissait d’opérer sur lesdits sites djihadistes, n’étaient pas très bien rémunérés, quelques milliers d’euros.

    Mais, d’après une source ayant eu à connaître des fonds spéciaux des services de renseignement, cela pouvait monter à 100 000 euros pour acheter des vulnérabilités sur des sites de grandes entreprises ou d’administrations d’autres États.

    Le brigadier et sa femme prospectaient pour acquérir divers biens immobiliers estimés entre 700 000 et 1,4 million d’euros.

    Et justement, parmi les sources qu’il a gérées, Xavier Julie a « un diamant », dixit le premier ancien de la DT cité. Un hacker français très convoité, qui travaillait pour plusieurs services de renseignement. Tellement doué que la DGSI lui avait demandé de tester la sécurité informatique de l’Otan. En une trentaine de minutes, le « diamant » aurait réussi à pirater tous les mots de passe… Et donc Xavier Julie rémunère ces hackers qu’il a en portefeuille et, à côté, paye en cryptomonnaie le matériel demandé par sa direction. Jusqu’ici tout va bien, ou presque.

    Un capitaine explique avoir eu plusieurs accrochages avec le brigadier Julie qui avait, selon lui, du mal à honorer ses tâches administratives avec rigueur. Un commandant le décrit comme « un collègue de travail atypique et talentueux », excellent technicien, « toujours agréable mais peu rigoureux dans les tâches administratives ». Un troisième collègue soulignera son « comportement solitaire » mais insiste sur le fait que Xavier Julie était « très doué pour rapporter de l’information ».

    Sur son temps libre, Xavier Julie mine du bitcoin. Il a voulu en offrir un à deux collègues qui ont refusé. Rien de grave. Rien en tout cas qui n’alarme en interne.

    Un magot de cryptomonnaies

    Mediapart n’a pas pu déterminer avec certitude les faits à l’origine de l’enquête qui va entraîner la chute de Xavier Julie. Un agent aurait dénoncé des dérives au sein de la direction technique. Un audit mené sur les fonds spéciaux utilisés par l’ensemble de la DT aurait révélé des incohérences dans les chiffres de la section backstopping, une section qui comptait moins de cinq agents.

    Un voyage aurait également attiré l’attention de l’IGSI, la police des polices du service de renseignement intérieur. Avec un collègue de sa section, Xavier Julie s’est rendu en Suisse pour remettre une somme d’argent à un informateur. Durant le court séjour, il avise une montre qui lui plaît beaucoup. Mais le seul moyen de paiement en sa possession ce jour-là est une carte bancaire du service. La tentation est trop forte pour Julie qui, à son retour, rembourse le coût de la montre. Ce comportement, contraire à tous les protocoles de sécurité, interroge l’IGSI.
     
    Ses agents vont découvrir que le brigadier Xavier Julie a utilisé un jeu de faux papiers à disposition de sa section, utilisés en temps normal pour acquérir du matériel d’espionnage qui ne pourra pas être attribuer à la DGSI. Lui s’en sert pour acheter des bitcoins avec l’argent qu’il a volé aux hackers rémunérés par la DGSI, voire détourné des propres avoirs de son service.

    Fabrice, l’acupuncteur, évoque sur procès-verbal un détournement de fonds publics d’« au moins 1,5 million euros ». Une de nos sources évoque le même montant. Interrogée en 2023, la DGSI confirme le détournement mais conteste une somme supérieure au million, tout en refusant de donner le montant précis de l’escroquerie dont elle a été victime.

    Selon nos informations, l’IGSI établit que Xavier Julie a détourné près de 92 949 euros de fonds publics entre 2009 et 2016. Au minimum. Pour les autres opérations qui ont été détectées comme suspectes, l’IGSI ne peut que déplorer dans un rapport de synthèse « les opérations d’anonymisation très élaborées » de Xavier Julie qui l’empêchent d’investiguer, mais prend tout de même le soin d’écrire que malgré l’absence de réponse des opérateurs de cryptomonnaies – Julie traitait avec au moins sept sociétés basées à Hong Kong ou en Écosse –, « les détournements semblent probables compte tenu du fait de l’absence, sur ses comptes bancaires, d’un investissement initial ».

    Ce montant, qui n’a pu être établi judiciairement, devient vertigineux. Dans un fichier, rédigé en langue anglaise, Xavier Julie se vante de pouvoir convertir 120 bitcoins dans le but d’acheter un bien immobilier. Et l’IGSI de relever que le brigadier et sa femme prospectaient en 2020 pour acquérir divers biens immobiliers estimés entre 700 000 et 1,4 million d’euros. Alors qu’à ce jour, écrivent les « bœufs-carottes » du service secret, « les sommes qui auraient permis cet investissement n’ont pu être découvertes… ».

    Contactée, la DGSI répond que l’enquête judiciaire a été déclenchée « à son initiative et au terme de procédures de contrôle interne qu’elle mène de manière régulière en son sein », précise que « ledit agent a par ailleurs été révoqué de ses fonctions depuis » et qu’elle « procède de manière constante à des contrôles de ses propres services et adapte en permanence ses structures et pratiques pour corriger les dysfonctionnements constatés ».

    Trois ans de prison dont six mois ferme, interdiction définitive d’exercer le métier de policier et une amende de… 1 000 euros.

    Pour maximiser ses gains, le brigadier utilisait un robot comparant les taux des bitcoins pour acheter et vendre quand c’était le plus profitable. Il se serait ensuite rendu dans un pays d’Europe de l’Est pour convertir en euros sonnants et trébuchants son magot numérique, perdant, selon une source, la moitié de ses profits dans la transaction.

    Fin juin 2020, Xavier Julie est mis en examen pour « faux et usage de faux et détournement de fonds publics ». Le 1er juillet, il est incarcéré, en détention provisoire, dans le quartier VIP à la maison d’arrêt de la Santé durant huit mois, où il a hérité de la cellule occupée par Patrick Balkany. 

    Une fois l’enquête close, la justice va pour une fois aller très vite. Extrêmement vite. Le 9 novembre 2022, le parquet de Nanterre rend son réquisitoire définitif, dans lequel le procureur de la République demande une comparution sur reconnaissance de culpabilité (la procédure de plaider-coupable). Deux semaines plus tard, le juge d’instruction renvoie Xavier Julie devant le procureur de la République.

    Le 30 novembre, un magistrat homologue la peine négociée : trois ans de prison dont six mois ferme couvrant la détention provisoire, l’interdiction définitive d’exercer le métier de policier et une amende de… 1 000 euros. Pour rappel, il était accusé d’avoir détourné 92 000 euros, même si les soupçons portent sur plus d’un million d’euros,.

    Aujourd’hui libre, ce père de famille est désormais « entrepreneur individuel » spécialisé « dans le secteur des activités de design », peut-on lire sur divers registres. Sur son profil sur X, fermé depuis la semaine dernière, il se définissait comme « touche-à-tout en informatique et crypto-enthousiaste depuis 2012 ».

    Contacté via diverses adresses mails et par l’entremise de son avocat, Xavier Julie nous a répondu lundi 5 février : « Vous m’interpellez sur une affaire qui a été définitivement jugée et qui par conséquent est close. Je ne souhaite pas y revenir. Par ailleurs, je ne peux ni infirmer ni confirmer vos informations relatives à mes fonctions passées en raison de leurs natures classifiées qui m’interdisent de les évoquer. »

    Un élu de la République connaissant ces problématiques confie à Mediapart qu’il y a eu ces dernières années plusieurs cas de fraude comme celle développée par Xavier Julie. « Les services n’osent pas le dire. Ils ont du mal à le reconnaître. Parfois, c’est un autre service qui dénonce le problème chez son partenaire… »

    L’affaire n’a pas fini d’avoir des conséquences au sein de la DGSI. Quatre de ses collègues ont été un temps suspectés d’être les complices du brigadier. Ils ont été placés en garde à vue avant d’être tous blanchis. Une procédure judiciaire a été lancée à l’égard d’un capitaine parce qu’il utilisait un iPhone ainsi que deux ordinateurs portables MacBook du service pour son usage personnel, et parce qu’il avait offert un téléphone portable de la DGSI à sa fille. 

    Au-delà des détournements de fonds spéciaux, la DGSI n’a pas été épargnée par les affaires ces dernières années. Il y a eu « Doumé », un agent impliqué, comme l’a révélé RTL, dans un meurtre commis dans le cadre de l’affaire « Légendes ». Lors de la perquisition de son domicile, a été retrouvé du matériel informatique destiné, explique Doumé, à « créer de la cryptomonnaie par minage ». 

    Il y a surtout eu l’affaire « Haurus », d’après le pseudonyme utilisé par un agent du service pour vendre sur le darknet des données confidentielles. Un policier et un douanier, écroués avec Haurus, ont confié sur PV avoir recueilli ses confidences et notamment la façon dont il aurait « sécurisé ses bitcoins en plusieurs coffres [numériques] que la police ne trouvera jamais ».

    Lors de ses auditions, le commandant qui était le supérieur hiérarchique de Xavier Julie a juré tout ignorer des détournements de son subalterne, ajoutant que, de toute façon, il n’était pas capable de les connaître, arguant que ses effectifs avaient des connaissances techniques bien supérieures aux siennes. Il a toutefois précisé que les procédures en vigueur aujourd’hui étaient bien plus rigoureuses qu’auparavant.

    Matthieu Suc

    https://seenthis.net/messages/1038563#message1040344

  • l’OFPRA pense jaune, essuie une vague de cailloux et change d’accent

    https://www.mediapart.fr/journal/france/050224/refugies-l-ofpra-enterre-un-rapport-critique-sur-la-politique-du-chiffre

    Pour cette mission, trois cabinets de conseil, Wavestone, Think Yellow et Accenture, ont été sollicités pour un montant total de près de 500 000 euros. Au sein de l’Office, cette mission est mal vécue. « C’était le cliché du cabinet qui ne connaît rien à notre métier. Ils étaient dans une logique de performance plutôt que de qualité de service rendu », s’agace Joshua*. Après une phase de diagnostic débutée en septembre 2021, les agent·es de quatre sections pilotes sont régulièrement convié·es à des réunions animées par les consultants pour coconstruire des solutions. Mais les méthodes propres du consulting ne convainquent pas les agent·es.

    Invité·es à exprimer leurs « irritants » en accrochant des post-it sur une grande fresque murale, certain·es ont l’impression de perdre du temps. « J’ai déjà vécu ça dans le privé. Ce qui était assez affligeant, c’est que c’étaient les mêmes méthodes qui étaient utilisées. Quand on critiquait leur méthode, ils nous sortaient que leur indicateur montrait que ça marchait », raconte Joshua. Sollicités, Think Yellow et Wavestone ont refusé de répondre à nos questions. Accenture ne nous a pas répondu non plus.

    • si tout se passe comme (sans doute) prévu, l’OFPRA va avoir droit à sa « simplification des règles » pour répondre aux « demandes des grévistes » :-)

  • Piéton tué par la #BRAV-M : des policiers avaient alerté sur la #dangerosité des motards

    « Devons-nous attendre un accident mortel pour réagir ? » Deux mois avant la mort d’un piéton en décembre dernier à Paris, une quinzaine de policiers de cette unité décriée avaient dénoncé, en vain, la dangerosité de leurs #motards dans des rapports accablants. Depuis plusieurs années, les blessés s’accumulent.

    À la préfecture de police de Paris, l’annonce, le 12 décembre, de la mort d’un homme de 84 ans, percuté par une moto de la brigade de répression de l’action violente motorisée (BRAV-M) alors qu’il traversait un passage piéton dans le XIXe arrondissement de Paris, n’a pas surpris tout le monde. Notamment dans les rangs des compagnies d’intervention (CI), mobilisées à tour de rôle pour grimper à l’arrière des motos au sein de ces équipages décriés pour leur violence depuis leur création, en 2019, en plein mouvement des « gilets jaunes ».

    Casque blanc à l’avant pour le pilote, noir à l’arrière pour son passager, vêtements sombres, motos de sport banalisées : les BRAV-M sont déployées au coup par coup pour des missions de maintien de l’ordre à Paris, et de « sécurisation » dans les quartiers réputés difficiles en banlieue.

    Le 7 octobre 2023, soit un peu plus de deux mois avant la mort du piéton − qui fait l’objet d’une enquête judiciaire pour « homicide involontaire » −, une quinzaine de policiers passagers des BRAV-M avaient transmis à leur hiérarchie des rapports pointant du doigt la dangerosité et l’illégalité de la conduite de leurs collègues.

    Dans ces écrits, consignés au terme d’une journée particulièrement chaotique, ils signifiaient également leur refus de continuer de monter derrière des pilotes décrits comme hors de contrôle, évoquant une accumulation d’accidents et de blessés et des alertes émises auprès de responsables de la DOPC (direction de l’ordre public et de la circulation) de la préfecture de police depuis « des mois voire des années ». Vitesse folle, prise de risques inconsidérée et injustifiée, absence de contrôle hiérarchique : le contenu de ces rapports, consultés par Mediapart, est effarant.

    Ce samedi 7 octobre, des équipages de la BRAV-M, dont la devise est « Born to ride » (« Né pour rouler », en anglais), sont affectés à plusieurs missions de sécurisation un peu partout à Paris. Certaines motos sont stationnées au stade Charléty, dans le sud de la capitale, où le Paris Football Club doit affronter l’AJ Auxerre pour un match de ligue 2. D’autres patrouillent place de la Bastille ou boulevard Magenta, près de la place de la République.

    En fin d’après-midi, une des unités voit un scooter brûler un feu rouge rue de Bagnolet, dans l’Est parisien. Les policiers tentent d’interpeller le conducteur, qui ne s’arrête pas. L’annonce de ce « refus d’obtempérer » circule sur les ondes et, sans attendre aucun ordre, des motards, même ceux du stade Charléty (à une dizaine de kilomètres de là), décident de se joindre à la course-poursuite.

    Le scooter pris en chasse s’engage sur le périphérique saturé, puis sur l’autoroute, où il finit par chuter au niveau de Bobigny, en Seine-Saint-Denis. Pendant ce temps, les motos de la BRAV-M convergent d’un peu partout dans Paris, à très grande vitesse.
    Plus de 180 kilomètres-heure

    Dans leurs rapports, les policiers passagers racontent : « Les motards ont décidé de partir à très vive allure, roulant à plus de 100 km/h en ville et slalomant entre les véhicules. Ils ont continué leur progression en interfile à 145 km/h sur un périphérique saturé. C’est inadmissible. Les motards ne sont pas conscients des risques qu’ils prennent pour leur propre vie, celles de leurs passagers, et celles des citoyens. D’autant plus que le Code de la route est complètement bafoué », écrit l’un d’entre eux, qui conclut : « Devons-nous attendre qu’il y ait un accident mortel pour réagir ? »

    Un autre relate que le pilote « a dépassé les 180 km/h [...] après avoir pris tous les risques possibles tout en étant conscient qu’à tout moment la moindre collision s’avérerait mortelle ». « Nous arrivons bien évidemment après l’intervention », ajoute-t-il. « Certains pilotes sont partis tellement vite qu’ils ont laissé leur passager sur place, avec le casque d’un passager encore attaché à la moto », précise encore le rapport.

    L’un des policiers passagers, équipé pour les opérations de maintien de l’ordre, explique s’être senti particulièrement vulnérable alors que la moto « slalomait entre les différents véhicules à vive allure ». « Après avoir fait part à un motocycliste du danger que représente la prise au vent [d’]un bouclier à de telles vitesses, celui-ci me répondra qu’à ma place il l’aurait lâché », relate-t-il. Un des fonctionnaires explique aussi avoir perdu une grenade goupillée place de la Bastille, et que le pilote aurait refusé de s’arrêter pour qu’il la ramasse…

    Plus grave encore, les policiers passagers des BRAV-M insistent sur le fait que ces comportements, à l’origine de « nombreuses blessures », ont été signalés à la hiérarchie de la DOPC à plusieurs reprises, et ce depuis des années. Sans, visiblement, que les motards aient fait l’objet d’un rappel à l’ordre.

    « Il ne se passe pas une vacation sans qu’il n’y ait une chute fortuite, et malgré de nombreuses discussions, rien ne semble changer », se plaint un fonctionnaire. « Il existe depuis de longs mois voire des années des griefs par rapport à leur conduite », explique un autre, évoquant une réunion en juin 2023 provoquée par « des accidents à répétition ». « Malgré de nombreuses blessures en service ainsi que de multiples discussions, il semblerait que les problèmes de comportement persistent et que les risques encourus ne cessent d’augmenter semaine après semaine », dit un troisième.

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    Les BRAV-M, des unités uniques en France

    La première intervention officielle des BRAV-M (brigades de répression de l’action violente motorisées) dans les manifestations parisiennes date du 23 mars 2019, en plein mouvement des « gilets jaunes », sous la houlette du tout nouveau préfet de police de l’époque, Didier Lallement – remplacé par Laurent Nuñez à l’été 2022. Mais ces unités étaient déjà en gestation. Dès décembre 2018, sur décision du ministre de l’intérieur Christophe Castaner et du préfet Michel Delpuech, des binômes de policiers motorisés, interdits depuis la mort de Malik Oussekine en 1986, refont leur apparition dans les rues de Paris.

    Au départ, ce sont essentiellement des agents des brigades anticriminalité (BAC), non formés au maintien de l’ordre, qui sont mobilisés au sein de ces équipages. Car la particularité de la BRAV-M est qu’elle n’est pas une unité à proprement parler : depuis 2020, elle est composée d’agents appartenant aux compagnies d’intervention (CI) de la préfecture de police de Paris, mobilisés ponctuellement pour grimper à l’arrière des motos comme passagers. À l’avant, les motards, 150 policiers environ, appartiennent eux aussi à une compagnie d’intervention, « la 24 ».

    Déployées au coup par coup en fonction des événements prévus dans la capitale, les BRAV-M sont réparties en équipages de 18 motos organisées en trinômes. Elles sont devenues le symbole ambulant de ce que les manifestant·es reprochent aux forces de l’ordre françaises : une violence imprévisible, indiscriminée et gratuite.

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    Pourquoi ces alertes et ces rapports sont-ils restés sans suite pendant des mois ? Selon nos informations, les écrits envoyés par les policiers le 7 octobre n’ont pas été enregistrés par la hiérarchie de la DOPC dans le système de courrier de la préfecture de police, baptisé « Alice », comme le veut la procédure.

    Les fonctionnaires auteurs des rapports n’ont été convoqués qu’à la mi-janvier, soit plus de trois mois après les incidents signalés, dans le cadre d’une « procédure d’enquête administrative ». Des convocations tombées, donc, quelques semaines après l’accident qui a causé la mort du piéton dans le XIXe arrondissement.

    Selon les informations de Mediapart, les procès-verbaux de convocation à ces auditions sont en effet datés du mois d’octobre, mais ne comportent aucune référence « Alice », ce qui interroge sur la réalité de la temporalité de la procédure.
    Le préfet de police pas informé

    Un autre détail pose question : l’enquête administrative chargée de faire la lumière sur les incidents du 7 octobre a été confiée à Patrick Lunel, qui n’est autre que… le responsable des motards de la BRAV-M mise en cause par leurs collègues. Patrick Lunel est par ailleurs connu pour avoir été commandant de la CSI 93, la compagnie de sécurisation et d’intervention de la Seine-Saint-Denis, quand elle s’est retrouvée au cœur d’une retentissante série de scandales.

    Une vingtaine d’enquêtes judiciaires avaient été ouvertes en 2019 et 2020 par le parquet de Bobigny pour des faits de vols, violences et faux en écriture publique. La majorité ont été classées faute de preuves, selon une source judiciaire, mais plusieurs des policiers de la CSI 93 ont été renvoyés devant la justice, et certains condamnés à de la prison ferme.

    Sollicité via la préfecture de police, Patrick Lunel n’a pas répondu à nos questions.

    Interrogée sur le contenu de ces rapports et l’absence de suites, la préfecture de police nous a indiqué que « les rapports des agents, transmis par mail un dimanche, ont été portés sans délai à la connaissance de l’ensemble de la chaîne hiérarchique, l’absence d’enregistrement par numéro ALICE n’ayant aucune incidence sur la remontée et la prise en compte d’information ».

    « Le délai de trois mois entre le déclenchement de l’enquête administrative et les premières auditions se justifie par la nécessité d’instruire l’ensemble des rapports, les contraintes opérationnelles, et la programmation de plusieurs actes s’agissant d’une affaire dans laquelle aucun blessé n’est à déplorer et alors même que le préfet de police, dès le 11 octobre, avait reçu l’ensemble de l’encadrement de la BRAV-M pour rappeler les règles de déontologie, notamment la nécessité de circuler à allure normale hors cas d’intervention d’urgence », a-t-elle justifié.

    « Le préfet de police tient à préciser que toute la lumière sera faite sur cette enquête administrative sur des faits qui se déroulaient dans le cadre initial d’un refus d’obtempérer commis par un individu finalement interpellé dans un secteur sensible de Seine-Saint-Denis où ont eu lieu de nombreuses prises à partie d’effectifs et nécessitant l’envoi de renforts dans les meilleurs délais », nous a encore précisé la préfecture.

    La hiérarchie de la DOPC a-t-elle dissimulé au préfet la colère qui montait dans les rangs des BRAV-M ? « Le préfet de police a été informé des crispations liées à la vitesse (c’est à ce titre qu’il reçoit les encadrants le 11 octobre), sans être informé précisément du fait du 7 octobre », nous a-t-on répondu.

    Autre interrogation : alors que les rapports du 7 octobre font état de « nombreux blessés en service », combien de policiers ont été blessés dans des accidents causés par les motards de la BRAV-M ? « À ce jour, la direction de l’ordre public et de la circulation recense contre les pilotes de la BRAV-M quatre cas de faute lourde de pilotage, avec blessé. Des enquêtes ont été ouvertes pour chacun des cas », indique la préfecture.

    Au moins un de ces accidents a eu des conséquences dramatiques. Selon nos informations, une jeune gardienne de la paix affectée dans une compagnie d’intervention a été grièvement blessée en juin 2022 dans un carambolage sur le périphérique parisien au niveau de la porte de la Villette alors qu’elle était passagère dans un équipage de la BRAV-M, accident dont elle conserve de graves séquelles.

    À ce sujet, la préfecture de police nous a indiqué que cet accident a fait « l’objet d’une enquête administrative, dont les conclusions ont été rendues : un conseil de discipline doit avoir lieu en mars 2024 ». « Dans l’attente, l’agent en cause a changé d’affectation et n’exerce plus sur la voie publique. L’enquête judiciaire est toujours en cours, elle est effectuée par l’IGPN [Inspection générale de la police nationale – ndlr] », a-t-elle précisé.
    « Roues arrière sur le périph’ »

    « Le grave accident dont a été victime la jeune policière aurait pourtant dû susciter un électrochoc, souffle un commissaire de la préfecture de police de Paris. Mais ça n’a rien changé, les motards de la BRAV-M continuent de faire des roues arrière sur le périph’ ! » « Ils sortent leur béquille sur l’autoroute pour faire des étincelles. Ils font les kékés, ça les amuse », renchérit un policier, lui aussi en poste à la préfecture.

    « Au fil des années, à force d’une série de petits renoncements, un laisser-aller s’est installé, poursuit ce fonctionnaire. Les motards de la BRAV-M, c’est un État dans l’État, il y a un gros sentiment d’impunité. » « Beaucoup sont jeunes, manquent de maturité. Ils sont portés aux nues par leur hiérarchie, et se sentent autorisés à tout faire », confirme le commissaire.

    Ni l’accident de la jeune policière ni les rapports du 7 octobre n’ont donc changé quoi que ce soit : le 12 décembre, à proximité de la « base » des motards, porte de la Villette, un de leurs équipages a percuté un passant. Cet homme de 84 ans a été grièvement blessé, souffrant notamment d’un traumatisme crânien. Transporté aux urgences, il est mort le lendemain. Le parquet de Paris avait précisé que l’accident avait eu lieu « vers 16 heures » et que le piéton traversait « au feu vert pour les piétons » tandis que les deux motos de la BRAV-M franchissaient un feu rouge.

    Selon les éléments recueillis par Mediapart, la particularité des BRAV-M est qu’elles peuvent décider de leur mobilisation sans consulter les autorités hiérarchiques de la direction de l’ordre public de la préfecture, dont elles dépendent, comme le démontrent les récits relatés dans les rapports du 7 octobre. Avec un objectif assumé : interpeller.

    Depuis le déploiement de cette unité unique en France, créée en 2019 pour intervenir quand les conditions habituelles du maintien de l’ordre sont dépassées − les précédentes brigades motorisées ont été interdites après le décès de Malik Oussekine en 1986 −, la BRAV-M est régulièrement décriée pour ses actions violentes.

    Ces binômes de policiers motorisés sont visés par plusieurs enquêtes judiciaires, notamment pour avoir agressé gratuitement un étudiant de 22 ans, ou encore pour avoir, pendant le mouvement contre la réforme des retraites, en mars 2023, roué de coups un jeune homme, Souleymane, 23 ans, tout en proférant des insultes racistes à son égard. Dernière affaire en date : des violences exercées sur un jeune réfugié en décembre, qui font l’objet d’une enquête administrative ouverte par le préfet de police, Laurent Nuñez.

    Dans un rapport publié en avril 2023, l’Observatoire parisien des libertés publiques (OPLP), créé à l’initiative de la Ligue des droits de l’homme (LDH) et du Syndicat des avocats de France (SAF), avait étrillé ces brigades, décrites comme « violentes et dangereuses, promptes à faire dégénérer les situations ». « La BRAV-M a développé un style qui puise dans les répertoires de la chasse, du film d’action, du virilisme et de l’intimidation », pouvait-on y lire.

    La mort du piéton en décembre et l’affaire des rapports sur la conduite « très accidentogène » des pilotes deux mois plus tôt viennent une nouvelle fois éclabousser la DOPC, chargée de la sécurisation de l’ensemble des événements et manifestations à Paris et en petite couronne. Elle sera donc sollicitée pour les cérémonies des Jeux olympiques de Paris, qui auront lieu dans six mois.

    La DOPC avait déjà été décapitée par l’affaire Benalla, qui avait emporté avec elle plusieurs des pontes de la préfecture. Jérôme Foucaud, un haut gradé sans expérience du maintien de l’ordre, avait alors été propulsé à la tête de cette direction. C’est lui qui avait été responsable du maintien de l’ordre pendant les manifestations des « gilets jaunes », et lui aussi qui avait signé le « télégramme » entérinant le dispositif de sécurisation de la finale de la Ligue des champions en mai 2022, restée dans les mémoires comme un fiasco d’ampleur internationale.

    Selon nos informations, le directeur de l’ordre public avait connaissance, depuis des mois, de la colère qui montait en interne contre les motards de la BRAV-M, sujet qui avait été évoqué au cours de plusieurs réunions. Interrogé à ce sujet via la préfecture de police, Jérôme Foucaud ne nous a pas répondu.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/310124/pieton-tue-par-la-brav-m-des-policiers-avaient-alerte-sur-la-dangerosite-d
    #forces_de_l'ordre #France #piétons #compagnies_d’intervention (#CI) #violence #violences_policières #banlieue #maintien_de_l'ordre #homicide_involontaire #rapport #Born_to_ride #vitesse #témoignage #DOPC #enquête_administrative #Patrick_Lunel #CSI_93 #vols #faux_en_écriture_publique #accidents #impunité

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    ajouté à la #métaliste de #témoignages de #forces_de_l'ordre, #CRS, #gardes-frontière, qui témoignent de leur métier. Pour dénoncer ce qu’ils/elles font et leurs collègues font, ou pas :
    https://seenthis.net/messages/723573

  • Amélie Oudéa-Castéra provoque la démission du recteur de Paris | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/020224/amelie-oudea-castera-provoque-la-demission-du-recteur-de-paris

    Morceaux choisis...

    Pour Amélie Oudéa-Castéra, le symbole est catastrophique. Vendredi matin, le recteur de l’académie de Paris a claqué la porte et annoncé sa démission « surprise », à l’issue d’un bras de fer de trente-six heures avec la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, contrainte de « prendre acte », dans un post sur X.

    En poste depuis trois ans et demi, Christophe Kerrero n’a pas admis qu’Amélie Oudéa-Castéra annonce soudainement aux syndicats, mercredi 31 janvier, sans même l’en avertir au préalable, un moratoire sur la réorganisation des classes préparatoires de la capitale qu’il avait actée depuis des semaines déjà, et qu’il présentait comme un outil de « mixité sociale ».

    Alors que la ministre s’efforce, depuis des jours, de convaincre qu’elle peut piloter l’Éducation nationale malgré les polémiques, ses mensonges et ses conflits d’intérêts, ce coup de tonnerre déclenché par un haut fonctionnaire « Macron-compatible », qui fut le directeur de cabinet de Jean-Michel Blanquer jusqu’en 2020, vient plomber – encore un peu plus – sa crédibilité.

    Pire : la rupture survient sur le thème de la « mixité sociale », un champ de mines pour Amélie Oudéa-Castéra depuis que Mediapart a dévoilé son choix d’inscrire ses enfants à Stanislas, établissement catholique champion de l’endogamie sociale. Et révélé que son fils aîné avait bénéficié d’un système de contournement de Parcoursup pour intégrer une classe préparatoire HEC dans ce lycée privé sous contrat.

    Cette démission est « une bombe », affirme un ancien ministre, qui rappelle que le recteur de Paris est « primus inter pares », détenteur du poste le plus prisé de l’Éducation nationale. « C’est l’administration qui lâche sa ministre. »

    Dans une lettre ouverte adressée vendredi matin à tous les personnels de l’académie, Christophe Kerrero écrit qu’il « reste plus que jamais attaché au service public d’éducation et […] aux côtés de ceux qui la font ». Mais d’Amélie Oudéa-Castéra, plus question. Et le haut fonctionnaire de clamer : « Croire en chaque [élève], n’exclure personne est une ardente obligation pour faire société. »

    (...)

    Le projet de trois « prépas » plus « sociales »

    L’affaire débute mercredi après-midi. À la veille d’une grève nationale, Amélie Oudéa-Castéra annonce tout à trac, lors d’un conseil supérieur de l’éducation (CSE), qu’elle annule la fermeture de quatre classes préparatoires à Paris, planifiée pour la rentrée 2024 et validée par le cabinet de Gabriel Attal quand il était encore Rue de Grenelle. Ces suppressions, le recteur les avait décidées et imposées contre l’avis des syndicats et des associations de professeur·es de « prépa », avec un objectif affiché : redistribuer ces moyens-là et ouvrir trois « prépas » plus « sociales », notamment à destination de bachelières et bacheliers issus de la filière professionnelle.

    (...)

    Il semble y avoir une issue toute « simple », qui permettrait de sortir par le haut en n’humiliant personne : confirmer l’annonce d’Amélie Oudéa-Castéra et financer, en même temps, les ouvertures prévues par le recteur. Sur le devenir de celles-ci, la ministre s’était bien gardée de préciser quoi que ce soit, mercredi, devant les syndicats...

    De toute façon, les nouvelles « prépas » imaginées par le recteur sont d’ores et déjà proposées aux lycéen·nes sur Parcoursup pour la rentrée 2024 ; et les enveloppes bel et bien annoncées, depuis quelques jours, aux chefs d’établissement concernés.

    C’est donc tranché, y compris par Matignon. Au prix d’une dizaine de postes d’enseignant·es supplémentaires, dont on ne sait précisément, à ce jour, sur quelle enveloppe ils seront financés.
    Désaveu

    Mais pour Christophe Kerrero, cette « solution » n’en est pas une. Lui qui a dû annoncer, cette année, des centaines de suppressions de postes dans les premier et second degrés, refuse d’assumer la décision d’épargner les classes préparatoires, au public déjà favorisé. Son équipe craint aussi que ce recul gèle toute velléité de réforme à Paris pour des années. Malgré quelques gestes venus du cabinet d’Amélie Oudéa-Castéra, sa décision est prise.
    (...)

    L’incapacité d’Amélie Oudéa-Castéra à l’anticiper dit beaucoup de son manque d’antennes dans la haute administration, comme d’expertise en matière d’éducation. « C’est juste hallucinant, un tel amateurisme », déclare aussi Ketty Valcke, co-secrétaire générale du syndicat Snes-FSU à Paris, mobilisé ces derniers mois contre les fermetures et toujours aussi remonté contre certains « arguments fallacieux » du rectorat. « Cette démission dit aussi le mal-être dans toute l’institution, à tous les niveaux, les chefs d’établissement et maintenant le recteur... »

    Depuis vendredi midi, Christophe Kerrero, en tous cas, reçoit une vague de soutiens. Pourtant proche d’Amélie Oudéa-Castéra, Valérie Pécresse (Les Républicains), présidente du conseil régional d’Île-de-France, regrette sur X « une très grande perte pour la région ». « Cette démission est un symbole », réagissent par ailleurs les sénateurs socialistes, dans un communiqué, affirmant que « la mixité sociale est le ferment de l’école républicaine ».

    Le syndicat SNPDEN-Unsa, qui représente les personnels de direction, s’est également fendu d’une lettre ouverte, estimant que cette décision était « malheureusement l’illustration d’un malaise grandissant et d’une fracture entre les acteurs de terrain que nous sommes, et la nouvelle gouvernance de l’éducation nationale ».

    Serait-ce l’affaire de trop pour Amélie Oudéa-Castéra ? Peut-être. Vendredi, son cabinet voulait voir dans cet épisode la preuve que « la question de la mixité sociale […] fait partie des priorités de la ministre ».

    Mais de plus en plus de voix au sein du camp présidentiel se disent persuadées qu’elle vit ses derniers jours Rue de Grenelle, alors qu’une nouvelle grève est annoncée pour mardi 6 février. Si tel devait être le cas, la nouvelle vague de nominations gouvernementales, prévue en début de semaine prochaine, constituerait l’occasion parfaite d’exfiltrer une ministre devenue inaudible.

  • Faute d’action de l’État, l’#habitat_indigne perdure

    Plus d’un million de personnes vivent dans un logement indigne, relève la #Fondation_Abbé_Pierre dans son #rapport annuel publié mercredi 31 janvier. Malgré les conséquences délétères sur la santé et la sécurité des occupants, les pouvoirs publics s’y intéressent peu, regrette l’organisme.

    Les pages des journaux égrènent les noms des victimes de l’habitat indigne. Pas plus tard qu’il y a deux jours, un enfant de 7 ans est décédé dans la nuit du 29 au 30 janvier à Marseille (15e arrondissement) à la suite d’un incendie dans la cité dégradée Parc-Kallisté.

    Sans s’avancer sur les causes de ce feu, la Fondation Abbé Pierre a pointé la vétusté de ces bâtiments, connue de longue date. Du reste, la ville a durablement été traumatisée par l’effondrement de la rue d’Aubagne en 2018, triste illustration des dangers de l’habitat indigne. Marseille n’est pas la seule ville concernée, tant s’en faut. Lille, Stains ou Paris ont aussi vécu effondrements et incendies mortels.

    Mais ces drames ne doivent pas occulter le fait que plus d’un million de personnes vivent au quotidien dans des habitats indignes.

    C’est pour cette raison que la Fondation Abbé Pierre a choisi de mettre en lumière ce phénomène dans un volet spécifique, intitulé « L’éternel retour de l’habitat indigne », dans son 29e rapport annuel, publié mercredi 31 janvier. Cela afin de montrer à quel point la situation s’enkyste, faute d’une réponse politique à la hauteur.

    Sa définition est simple : « Constituent un habitat indigne les locaux ou les installations utilisés aux fins d’habitation et impropres par nature à cet usage. » Sans oublier les autres types d’habitats précaires, alternatifs au logement pour les plus modestes comme les chambres aménagées dans des garages, les caves, les cabanons de jardin, des locaux commerciaux ou agricoles, bidonvilles ou squats dans des bâtiments en ruine…

    Malgré la difficulté à les quantifier avec précision, la Fondation Abbé Pierre estime à environ 600 000 le nombre de logements indignes en France métropolitaine et outre-mer, résultat de ses propres croisements de données.

    La prolifération de l’habitat indigne est due à la dégradation du bâti et à l’absence d’entretien des bâtiments. Des dynamiques économiques favorisent aussi le délaissement de certains centres-villes au profit de la périphérie, tout comme la perte d’attractivité du territoire, comme à Aubervilliers, Roubaix, Mulhouse, Saint-Étienne...

    Les occupant·es de l’habitat indigne révèlent des profils assez disparates et ne sont pas uniquement locataires. Par exemple, il existe « les propriétaires occupants ancrés » vivant dans un logement de plus en plus dégradé au fil des ans, que ce soit en milieu rural ou urbain. Les « accédants en échec » sont souvent des jeunes couples qui ont sous-estimé le coût des travaux et les charges liés à l’achat d’un logement. Certain·es n’arrivent plus à faire face aux dépenses après un imprévu de la vie comme une maladie, une séparation ou une perte d’emploi.

    Quant aux locataires, il s’agit souvent de ménages démunis, contraints de louer ces biens insalubres, victimes de bailleurs indélicats. Souvent, ils ont effectué une demande de logement social en parallèle et imaginent leur situation comme transitoire.

    De l’autre côté de la chaîne se trouvent les propriétaires. Avec la démocratisation de l’accession à la propriété, la figure du « petit propriétaire » est née, retrace le rapport de la Fondation Abbé Pierre. Mais « du fait de capacités financières limitées, ou d’intérêts centrés sur un rendement locatif à court terme, les investissements des propriétaires pour entretenir leur bien immobilier dans la durée peuvent s’en trouver amoindris ».

    La majorité des propriétaires d’habitat indigne sont aussi des ménages aux ressources limitées qui n’ont pas anticipé le coût de l’entretien de leur bien et non pas seulement des marchands de sommeil, démystifie encore la Fondation Abbé Pierre.

    Dans ces cas-là, les copropriétés ne se révèlent souvent d’aucune utilité. Certains des syndics, promoteurs immobiliers, administrateurs judiciaires et agences immobilières ne jouent pas leur rôle et, souvent, n’empêchent pas la dégradation de la copropriété, peut-on lire dans ce rapport. Globalement, la réponse des pouvoirs publics est insuffisante voire absente, regrette la fondation.

    Les situations sont certes diverses mais vivre dans de tels lieux a des conséquences sur la santé et la sécurité des occupant·es (intoxication au monoxyde de carbone, saturnisme, moisissures, installations électriques ou gazières défectueuses). Les maux liés à l’humidité et aux moisissures dans le logement sont établis par plusieurs études épidémiologiques, tout comme les conséquences sur la santé mentale et psychique des habitant·es en grande souffrance.
    L’incurie des pouvoirs publics

    Ce constat, relève la Fondation Abbé Pierre, n’est pas considéré à la hauteur de sa gravité. Les chiffres sont éloquents à cet égard. Par exemple, pour ces 600 000 logements privés indignes, l’Agence nationale de l’habitat (Anah), établissement public administratif de l’État, a attribué ces dernières années entre 13 000 et 15 000 subventions par an au titre de la lutte contre l’habitat indigne.

    Seuls 13 752 arrêtés d’insalubrité étaient en vigueur en 2021, 578 travaux d’office ont été conduits par le préfet ou par la commune en 2022, et 2 216 arrêtés de mise en sécurité sont recensés en 2022, précise ce rapport.

    Les plaintes des locataires sont aussi rares, par peur, mais aussi par manque d’énergie à injecter dans une bataille administrative complexe et infinie.

    Des politiques publiques nourrissent aussi le phénomène, « notamment en raison des incohérences ou des insuffisances de certaines politiques sectorielles ».

    Les politiques migratoires, par exemple, maintiennent une partie de la population dans la précarité et « alimentent un marché parallèle du logement ». Le renouvellement urbain a aussi participé à faire disparaître une partie des logements à bas prix, renvoyant ainsi les plus modestes vers des solutions précaires.

    La faible construction de logements sociaux, par ailleurs, ne contribue pas davantage à corriger le déficit structurel de logements abordables et dignes. La suppression depuis 2018 (sauf dans les outre-mer) de l’allocation logement (APL accession) pour le financement de travaux par les propriétaires occupants accédants aux revenus modestes sonne comme une décision « incohérente » de plus.

    La Fondation Abbé Pierre identifie un autre obstacle dans la résorption de l’habitat indigne. Il est toujours abordé sous l’angle du bâti pur, et la seule réponse apportée est technique, par le biais de la rénovation. Tout le versant social est ignoré, regrette encore la fondation.

    Or la lutte contre l’habitat indigne est « complexe ». Elle doit mobiliser différents acteurs aux champs d’intervention et compétences divers (action sociale, politiques sanitaires, justice, architecture et ingénierie de la construction, politiques urbaines...). Ces différentes parties œuvrent sous le patronage d’un pôle départemental de lutte contre l’habitat indigne (PDLHI) lui-même sous l’autorité du préfet. Sans une collaboration étroite, impossible d’endiguer ce problème, rappelle l’association.

    Pour renforcer la lutte contre l’habitat indigne, la Fondation Abbé Pierre plaide pour que l’État débloque davantage de moyens financiers et humains. Notamment pour pouvoir accompagner les occupant·es de logements insalubres en leur assurant un relogement.

    Ou en donnant les moyens financiers aux propriétaires (occupants modestes ou propriétaires bailleurs) « de bonne foi » pour réaliser les travaux de mise en conformité nécessaire et en facilitant la régularisation foncière dans les territoires d’outre-mer. Le rapport propose aussi un soutien de l’État aux élu·es « dans l’exercice de leurs responsabilités en leur donnant notamment les moyens d’agir et la capacité de mener des travaux d’office ».

    Enfin, la rénovation du parc social reste un préalable indispensable à la disparition de l’habitat indigne.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/310124/faute-d-action-de-l-etat-l-habitat-indigne-perdure
    #habitat #logement #indignité #mal-logement

  • #Binet, #Toubon, #Zeniter : trois voix contre la #loi_immigration

    Inspirée de propositions d’extrême droite, la loi sur l’immigration a été votée le 19 décembre. 201 personnalités appellent à manifester partout en France dimanche. Dans « À l’air libre », #Sophie_Binet (CGT), #Jacques_Toubon (ancien Défenseur des droits), l’écrivaine #Alice_Zeniter et Edwy Plenel expliquent pourquoi ils en seront.

    EnEn décembre, la loi immigration votée par l’Assemblée nationale a provoqué un séisme politique. C’est surtout un choc moral car plusieurs de ses dispositions ont été inspirées par la droite dure et l’extrême droite. Le Conseil constitutionnel doit se prononcer le 25 janvier, il est probable que certains éléments de cette loi soient censurés. La loi sera ensuite promulguée par le président de la République.

    Dimanche 14 janvier, 400 collectifs de sans-papiers, syndicats, et partis politiques ont marché contre la loi partout en France pour dénoncer un texte « xénophobe » et « dangereux ». Et dimanche 21, 201 personnalités de tous horizons appellent à de nouvelles manifestations à la suite d’un appel publié sur Mediapart et dans L’Humanité. Les mobilisations partout en France sont à retrouver sur le site 21janvier.fr.

    Dans une émission spéciale de « À l’air libre », quatre personnalités nous disent pourquoi ils et elles iront manifester.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/180124/binet-toubon-zeniter-trois-voix-contre-la-loi-immigration

  • #Stanislas : face aux #mensonges de la direction, de nouveaux témoignages

    Homophobie, sexisme, absence d’éducation à la sexualité ou cours religieux obligatoires... Depuis la publication du rapport d’inspection, le directeur de cet établissement privé conteste toute dérive. D’anciens élèves rencontrés par Mediapart répondent.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/270124/stanislas-face-aux-mensonges-de-la-direction-de-nouveaux-temoignages
    #lycée #sexisme #homophobie #témoignages #Amélie_Oudéa-Castéra #non-mixité #Frédéric_Gauthier #autoritarisme #catéchisme #rapport #rapport_d'inspection #Philippe_Ariño #homosexualité #manif_pour_tous #thérapie_de_conversion #avortement #anti-avortement #catholicisme #préjugés_sexistes #éducation_à_la_sexualité #contraception #catéchèse #prosélytisme

  • Que veulent les agriculteurices dévoré·es par la FNSEA ?

    Les revendications qui font rêver
    1/ Un assouplissement sur les pesticides et donc pouvoir polluer tranquille
    2/ Abandon des plans Ecophyto et donc pouvoir polluer tranquille
    3/ Pouvoir cultiver les terres en jachère et donc pouvoir polluer tranquille
    4/ Ne pas vendre en-dessous du coût de revient (ok, mais comme les points 1 2 et 3 vous ont été accordés, on verra plus tard pour celui-là)

  • Réarmement démographique : « L’État veut produire de la chair à canon »
    https://reporterre.net/Rearmement-demographique-L-Etat-veut-produire-de-la-chair-a-canon

    En évoquant le réarmement démographique, M. Macron rajoute aux discours natalistes « classiques » une « connotation guerrière insupportable », dit l’éditrice féministe Isabelle Cambourakis. « On nage en pleine dystopie. »
    [...]
    Le corps des femmes n’est pas une arme de guerre. Associer cette terminologie martiale à la politique nataliste me glace le sang. Cela donne l’impression que le gouvernement veut produire de la chair à canon. Ce n’est pas simplement un discours nataliste comme il y en a eu tant d’autres dans l’histoire. S’y ajoute en plus cette connotation guerrière insupportable, alors même que les conflits se multiplient dans le monde. On se demande quel est l’objectif visé concrètement par le gouvernement. Quelle politique le réarmement démographique va-t-il entraîner ? Est-ce seulement un élément de communication militariste ou non ? On reste dans l’expectative mais l’usage de ces mots est sidérant, rien que dans l’image que cela crée. Emmanuel Macron s’impose comme un chef autoritaire et martial qui veut avoir la main sur tout, un petit père du peuple, un pater familias qui irait jusqu’à gérer la reproduction de sa population.

    « On nage en pleine dystopie »

    J’ai l’impression d’assister à une vaste opération d’embrigadement des corps et des personnes pour les besoins d’une hypothétique guerre à venir, pour l’économie et la production ou pour faire face aux futures crises climatiques. On instrumentalise la jeunesse pour tenter de répondre aux catastrophes. Cela fait écho à de nombreux romans d’anticipation comme La Servante écarlate de Margaret Atwood ou le livre que j’ai édité, Viendra le temps du feu (2021) de Wendy Delorme. Dans ce livre, l’État oblige à la procréation et met en place des contrôles sanitaires pour surveiller la fertilité de sa population. Exactement comme les annonces d’Emmanuel Macron avec les tests de fertilité à 25 ans… On nage en pleine dystopie. Le discours du chef de l’État emprunte autant au pétainisme qui vante « la régénération du pays » qu’à la science-fiction.

    [...]

    Cela n’a pas d’influence sur les pratiques de procréation. Ce n’est pas parce que Macron appelle à un réarmement démographique que les gens vont tout d’un coup décider de faire des enfants ! Ces discours n’ont aucun effet, c’est une simple adresse envoyée aux conservateurs.

    … qui arrive un mois après l’adoption de la loi immigration.

    Cela va de pair. Pour que « la France reste la France », selon la formule d’Emmanuel Macron reprise à l’extrême droite, il faut à la fois limiter l’immigration et soutenir la reproduction des femmes blanches et des familles hétérosexuelles françaises.

    [...]

  • Mohamed Mbougar Sarr. « Loi immigration, la centrale du tri »
    "... une loi immigration dont la dureté et l’injustice contre les immigrés n’envient rien aux propositions de l’extrême droite française, laquelle a d’ailleurs vu dans cette décision, dont elle s’est félicitée qu’elle fût adoptée, « une victoire idéologique ».

    Cette revendication seule eût pu suffire à en signer la honte et à embarrasser la majorité. Mais nous n’en sommes plus là : plus aucune haine documentée, plus aucun passé d’indignité, plus aucune peste n’est infréquentable politiquement. Il serait aisé, peut-être trop, d’accabler le seul espace politique. C’est aussi dans la société, dans ses profondeurs, que les digues anciennes ont peu à peu reculé avant de rompre totalement. Mais le monde politique a accepté, accéléré, institutionnalisé ce mouvement en lui donnant une légitimité, en l’embra(s)sant au lieu de le combattre. Que s’est-il produit, pour que les vieux loups bruns passent aujourd’hui pour des agneaux blancs ? Qui porte la responsabilité de cette déchéance-là ?"

    https://www.mediapart.fr/journal/france/250124/mohamed-mbougar-sarr-loi-immigration-la-centrale-du-tri#at_medium=custom7&

    #loi_immigration #immigration

  • [Exclusif] À Brest, le sous-préfet sucre la subvention d’une télé associative au nom de la loi séparatisme - Splann ! | ONG d’enquêtes journalistiques en Bretagne
    https://splann.org/brest-prefet-subvention-association-loi-separatisme

    Non-respect du contrat d’engagement républicain. C’est la justification, inédite en Bretagne, apportée par le sous-préfet de Brest au retrait d’une subvention à la télé associative Canal Ti Zef. Le média y voit une sanction politique liée à son implication auprès de l’Avenir, un squat culturel rasé sous escorte policière durant l’été 2023. Cette piste est d’autant plus sérieuse que trois autres associations ayant soutenu ou relayé cette lutte viennent également de perdre un financement de l’État.

  • Les étudiants de #Bordeaux testent la « sécurité sociale de l’alimentation »

    Depuis la rentrée, 150 étudiants bordelais reçoivent l’équivalent de 100 euros en #monnaie_locale pour faire leurs courses. L’objectif : lutter contre la #précarité, mais aussi promouvoir une #alimentation saine, durable et produite dans des conditions éthiques.

    Chaque fois qu’elle fait ses courses, Lison Rousteau, 21 ans, souffle un peu. De son propre aveu, l’étudiante en master alimentation durable à l’université Bordeaux-Montaigne ressent moins de pression et n’a plus vraiment à se demander si elle doit sacrifier tel ou tel aliment pour s’octroyer une sortie avec ses ami·es.

    Depuis le mois d’octobre, elle appartient à la cohorte des 150 étudiant·es tiré·es au sort à l’université Bordeaux-Montaigne pour participer à l’expérimentation lancée par le Centre ressource d’écologie pédagogique de Nouvelle-Aquitaine (Crépaq) et la Gemme, l’association qui gère la monnaie locale girondine. Les deux associations ont mis en place dans les campus bordelais une expérimentation inédite : une « sécurité sociale de l’alimentation » (SSA).

    Cette idée de promouvoir un modèle plus vertueux en matière sanitaire, écologique et sociale chemine depuis plusieurs années à gauche, notamment au sein du #collectif_SSA.

    Moyennant une cotisation de 10 à 50 euros pour les plus fortuné·es, les participant·es reçoivent l’équivalent de 100 euros en monnaie locale – la gemme, du nom de la résine du pin maritime présent sur tout le territoire – et doivent les dépenser dans les magasins partenaires.

    Le #Crépaq et la #Gemme pilotent le dispositif, au budget global de 200 000 euros, financés par des collectivités, l’#université_Bordeaux-Montaigne et des fondations, ainsi que par les cotisations des participant·es, qui représentent environ 10 % du montant total.

    Non boursière, Lison Rousteau verse 30 euros tous les mois à la caisse commune. Elle considère qu’elle n’est pas des plus à plaindre, car ses parents lui octroient tous les mois 800 euros pour vivre. Mais pouvoir mieux manger lui paraît être un horizon enviable.
    Manger bio

    Lila Vendrely, étudiante en maths appliquées et sciences humaines, boursière à l’échelon 5 (sur 7 échelons) est tout aussi enthousiaste de prendre part à l’expérimentation. Elle parvient à s’en sortir en faisant un service civique à Bordeaux Métropole en parallèle de ses études. Chaque mois, elle cotise à hauteur de 10 euros et ajoute seulement 20 à 30 euros pour faire ses courses. Une économie non négligeable.

    Avant d’être sélectionnée pour l’expérimentation, elle ne connaissait pas grand-chose à la monnaie locale. Et même si elle était déjà sensibilisée à la question de l’alimentation durable et sourcée par ses parents, elle reconnaît qu’elle a progressé et qu’elle mange mieux. « Aller dans un magasin bio ne me semblait pas étrange, mais désormais, je consomme beaucoup plus de saison et local », précise-t-elle. L’étudiante varie davantage son alimentation et cuisine beaucoup plus. Elle a désormais tendance à s’éloigner des produits transformés comme les gâteaux industriels.

    Le Crépaq est une association créée en 1996, dont l’objet est la transition écologique et solidaire dans la région Nouvelle-Aquitaine. Par la force des choses, elle en vient à s’intéresser à l’alimentation durable, à la résilience et la démocratie alimentaires. L’idée de mettre en place une sécurité sociale de l’alimentation a germé en 2019. Le confinement du printemps 2020 a mis un coup d’arrêt au projet, mais il a été relancé en 2022.

    Entre-temps, le Crépaq s’était rapproché de l’université Bordeaux-Montaigne, qui compte 17 000 étudiant·es, en y installant deux « frigos zéro gaspi », dans lesquels tout le monde peut entreposer ou prendre les denrées à disposition, selon ses besoins.

    L’association propose à la Gemme de se joindre à elle pour ce projet. « L’avantage de la monnaie locale, et c’est pour cela que le Crépaq a pensé à nous, c’est que nous avions un réseau de commerçants et de producteurs qui adhéraient à cette charte, et proposaient de l’achat local, bio, éthique et solidaire », explique Yannick Lung, président de la Gemme.

    L’ancien universitaire est partant pour penser l’expérimentation. La première réunion lançant le projet se tient en octobre 2022, débouchant sur la création d’une « caisse locale », le mode de gouvernance de la sécurité sociale de l’alimentation. On y trouve des étudiant·es, des associations déjà engagées sur la question alimentaire, des collectivités et des commerçant·es.

    Olivier Buitge, gérant d’un Biocoop à Talence, à deux pas du campus, voit chaque mois entre cinquante et soixante étudiant·es s’approvisionner dans ses rayons dans le cadre de l’expérimentation. Il est convaincu du bien-fondé du projet. Après plusieurs années dans la grande distribution, il a choisi d’ouvrir ce magasin bio pour donner du sens à son travail : « J’avais à l’esprit d’avoir un projet social. Je ne trouve pas normal que des producteurs agricoles se suicident alors qu’ils bossent 80 heures par semaine parce qu’ils touchent 600 euros par mois. »

    Ceux qui le fournissent sont rémunérés à un juste prix. Alors prendre part à l’expérimentation lui a semblé couler de source. Il était de surcroît déjà familier des gemmes, et essaie aussi de payer ses producteurs avec. « Le but d’une monnaie locale, c’est qu’elle circule… » Aurore Bonneau, de la Gemme, confirme que le projet privilégie le choix de « commerces tournés vers la transition écologique, vers le respect de l’environnement et du vivant ».

    La crise sanitaire, et avec elle « l’explosion de la précarité alimentaire », amène le Crépaq à investir davantage le sujet. « Il faut changer ce système d’aide alimentaire qui a atteint ses limites, et c’est d’autant plus d’actualité que même les Restos du cœur n’y arrivent plus et menacent de fermer leurs portes », poursuit Dominique Nicolas, codirecteur du Crépaq, assis à la grande table de l’association, à Bordeaux.

    Il dénonce l’institutionnalisation d’un système censé être provisoire depuis les années 1980. « On en arrive à l’absurdité, où on demande à des bénévoles de se décarcasser pour aller donner à manger à 10 millions de personnes… » Avec toute la violence que cela peut engendrer pour les personnes concernées, comme l’a décrit l’anthropologue Bénédicte Bonzi.

    Si la sécurité sociale de l’alimentation n’a pas pour seul objet de juguler la précarité des étudiant·es, le sujet s’est imposé de lui-même et reste un volet important du projet. Selon une étude de la Fédération des associations générales étudiantes (Fage), première organisation étudiante, rendue publique début janvier, 19 % des étudiant·es ne mangent pas à leur faim.
    Une évaluation à venir

    Xavier Amelot, vice-président de l’université Bordeaux-Montaigne, a lui aussi dû affronter des situations de précarité alimentaire dans la population étudiante, notamment en 2020, lors du premier confinement. Dans un contexte d’urgence, des distributions d’aide alimentaire ont eu lieu et un soutien financier a été apporté aux associations qui mettaient en place des dispositifs complémentaires de ceux du Crous et de la Banque alimentaire, en dehors de tous critères sociaux.

    Kevin Dagneau, aujourd’hui directeur de cabinet de Xavier Amelot, était à l’époque chargé de la vie étudiante. Les deux hommes ont tissé un lien avec le Crépaq, notamment autour de la mise en place de ces « frigos zéro gaspi ». « Quand le Crépaq et la Gemme ont voulu lancer le projet en 2022, ils se sont tournés vers nous car nous étions devenus un partenaire privilégié autour de ces questions, se souvient Xavier Amelot. Tout de suite, cela nous a semblé correspondre à l’esprit des initiatives que nous souhaitons soutenir sur notre campus. »

    Même si elle n’est pas « la plus à plaindre », Lison Rousteau confie que la hausse des prix alimentaires grève son budget depuis plusieurs années. « Entre la vie étudiante et la vie sociale, la part que je consacrais à mon alimentation s’était réduite, et j’avais fini par acheter des produits de moins bonne qualité. Forcément, acheter en bio, c’était fini. » Avant d’arriver à Bordeaux, elle avait pu profiter de paniers à bas prix proposés par l’aide alimentaire sur le campus de Tours, où elle étudiait. Aujourd’hui, elle suit les recettes envoyées par le Crépaq pour varier sa cuisine.

    L’expérimentation en cours va être évaluée. À l’issue de la première année, Une étude d’impact sera réalisée par plusieurs chercheurs et chercheuses de l’université, sur la base des questionnaires remplis par les étudiant·es au fil des mois. Caroline Bireau, l’autre codirectrice du Crépaq, précise que les chercheurs vont aussi vérifier s’ils notent une amélioration de l’état psychologique et matériel des bénéficiaires. Les premières remontées de terrain plaident en ce sens.

    Les différents acteurs sont conscients des enjeux de cette première, qu’ils espèrent parvenir à pérenniser. Mais pour cela, il faudra mobiliser plus largement la communauté universitaire, notamment les salarié·es qui seraient susceptibles de cotiser davantage. Cela permettrait de répondre à l’autre nécessité : tendre vers une autonomie plus prononcée, et dépendre moins des acteurs extérieurs pour abonder la caisse.

    Le vice-président de l’université est convaincu que les universités, encore plus en sciences humaines, doivent être des lieux d’expérimentation. « L’idée de la Sécurité sociale, et l’esprit dans lequel elle s’est construite après la Seconde Guerre mondiale, est assez réjouissante. Et politiquement, ce n’est pas neutre, cela promeut une vision de la solidarité et des communs que nous voulons valoriser. »

    Xavier Amelot et Kevin Dagneu espèrent que cette expérimentation donnera des idées à d’autres établissements et que la sécurité sociale de l’alimentation sera bientôt largement considérée comme « un moyen de lutter contre la précarité à l’université ».

    https://www.mediapart.fr/journal/france/200124/les-etudiants-de-bordeaux-testent-la-securite-sociale-de-l-alimentation

    #université #étudiants #pauvreté #sécurité_sociale_de_l'alimentation #SSA #sécurité_sociale_alimentaire #ESR