• Vous ne verrez plus cette statue de Georg Lukács à Budapest, déboulonnée avant-hier par les autorités de la ville, sur proposition de l’extrême droite (Jobbik), soutenue par le parti national-conservateur du premier ministre Viktor Orbán (Fidesz), qui prétend depuis 2010 « reconnecter la Hongrie au supposé cours naturel des choses et rejeter la gauche, qu’elle soit postcommuniste ou libérale, dans le camp des partisans d’une histoire honnie. »

    Cf. http://lemonde.fr/livres/article/2017/03/30/georg-lukacs-deboulonne-ou-la-memoire-hongroise-en-peril_5103128_3260.html #st

    Quelques archives @mdiplo :

    · Frénésie nationaliste en Hongrie (décembre 2016) https://www.monde-diplomatique.fr/2016/12/LEOTARD/56841

    · Qui veut la peau de Georg Lukács ? (Les blogs du Diplo, 1er novembre 2016) https://blog.mondediplo.net/2016-11-01-Qui-veut-la-peau-de-

    · Décibels et extrême droite en Hongrie (novembre 2016) https://www.monde-diplomatique.fr/2016/11/PIEILLER/56763

    · Le Jobbik, un parti d’extrême droite qui n’exècre pas l’islam (avril 2014) https://www.monde-diplomatique.fr/2014/04/LEOTARD/50337

    http://zinc.mondediplo.net/messages/56356 via Le Monde diplomatique

  • C’est pas le moment de chroniquer Houellebecq, par Christine Angot
    http://lemonde.fr/livres/article/2015/01/14/c-est-pas-le-moment-de-chroniquer-houellebecq-par-christine-angot_4556380_32

    La réalité visible peut alimenter des fresques sociales ou des autofictions, la division n’est pas là, ce n’est pas un territoire qu’on se partage, c’est en profondeur que ça se passe. L’image n’est pas celle d’une surface, d’une carte et d’un territoire, ni de la surface plane d’un miroir où on se voit, mais d’un puits à sec sous la surface, dans lequel on s’obstine quand même à envoyer des seaux pour essayer de remonter quelque chose. Le sentiment que l’être a de son humanité. Voilà. Ce sentiment n’est pas dans le seau. Mais dans le fait de ne rien trouver et de ne pas s’y résoudre. De chercher encore. Et de finir par trouver un mini-indice qui n’était pas visible. Ça, Houellebecq ne le fait jamais. Non seulement il ne le fait jamais, mais il le détruit, il le raille. Il raille Mai 68, l’humanisme, l’antiracisme, la psychanalyse, les universitaires, ceux qui essayent de trouver quelque chose derrière la réalité, ceux qui se disent que l’humain ça doit exister, et pas besoin d’avoir recours à Dieu pour ça.

    Si « la religion la plus con c’est quand même l’#islam », comme il le disait en 2001, pourquoi la mettre au pouvoir ? Si DSK est un cochon, pourquoi en être amoureuse ? Pour montrer qu’on a bien réfléchi. Houellebecq ne fait pas de différences fondamentales entre chien et humain, animalité et humanité, regard morne de l’animal et regard de souffrance de l’humain. L’humain n’a rien de spécial. Les droits de l’homme pourraient être les droits du chien. Tout cela, selon un raisonnement qui se présente comme imparable, calme, et surtout : intelligent. Mais d’une intelligence qui se trouverait au-dessus de l’intelligence. Trissotin avait ce type d’intelligence. Bouvart et Pécuchet ne s’énervaient jamais. Ils avaient une capacité à discuter calmement. Et les médecins de Molière parlaient doctement.

    (…) H se trompe. Non, il n’y a pas de retour du religieux, c’est la fin au contraire, et c’est bien pourquoi ils veulent nous tuer. Non, les femmes ne rentreront pas à la maison, et c’est bien pourquoi il parle de notre « sécheresse vaginale » passé un certain âge et de l’affaissement de nos chairs. Non l’être humain n’est pas un produit, et c’est bien pourquoi il tient à le calibrer.

    Céline n’aurait pas été Céline s’il n’avait fait que ses pamphlets, avec ses points de suspension. Dans ses grands romans il n’y a pas la moindre petitesse. Ses personnages sont tous quelqu’un.

    #littérature #roman #religion ; le #réel et son #secret (#seenthis-paywall-done)

    • @Histhom me répond en partie sur twitter (la suite autour d’un café, ça veut dire que c’est pas immédiatement reproductible ?!! — argh) :

      le pire texte écrit sur le roman, et je compte ce qu’à pu écrire Joffrin… pire papier sur Houellebecq qui ne parle finalement que d’elle… pour changer ; et pour Joffrin qui qualifie le roman d’entrée du lepenisme en littérature c’est tout simplement ridicule : on en revient aux procès du XIXe faits à Flaubert ou Baudelaire pour raisons de #morale.

      cc @lucile

  • Kant, c’est plastique
    http://lemonde.fr/livres/article/2014/08/28/kant-c-est-plastique_4478274_3260.html

    Avant demain poursuit ce travail. Kant soutenait que la raison, par ses seuls moyens, ne peut rien dire sur le monde ; il faut qu’elle soit informée par l’expérience. Cependant l’expérience, elle, est conditionnée (par le #temps, l’espace, la causalité, etc.), et ces conditions ne sauraient être dérivées de l’expérience. Vous ne les trouverez pas sous votre microscope, puisqu’il faut que vous les ayez déjà acceptées pour reconnaître comme un fait ce que vous voyez dans votre ­microscope ! Mais ces conditions (que Kant appelle « transcen­dantales ») ne sauraient, non plus, être nécessaires en elles-mêmes. Elles sont nécessaires pour nous. Il se trouve que notre expérience n’est possible que par elles. D’où leur instabilité : sont-elles une sorte de fait contingent, ou bien une nécessité ?

    Cette question hante la #philosophie moderne. Le #livre de Malabou traverse les grandes lectures de Kant, mais sur le mode d’une enquête, en prenant pour indice une expression que Kant utilise très précisément au paragraphe 27 de Critique de la raison pure : « épigenèse de la raison pure ».

    L’épigenèse s’oppose à la préformation : celle-ci soutient qu’un corps est le développement d’un programme entièrement déterminé ; celle-là, au contraire, qu’il est le résultat d’une aventure embryonnaire toujours en contact avec son dehors. Parler d’épigenèse de la raison, c’est donc suggérer que le transcendantal n’est pas juste « ainsi et pas autrement » ; il est le résultat d’un ­développement. Mais – et tout l’intérêt du livre de Catherine ­Malabou est là – l’épigenèse n’est pas une remontée à l’origine ; elle est au contraire l’ouverture à une transformation de soi : elle « joue avec les forces de son propre dehors à partir de ses ressources créatrices, formatrices et trans­formatrices. On parvient ainsi à définir le cœur de la #rationalité comme milieu mobile entre ­constitution et dessaisissement de soi ».

    cc @opironet @pguilli @prac_6