• La cocaïne est le « #pétrole blanc » du #capitalisme, selon Roberto Saviano (en accès libre)
    http://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/171014/la-cocaine-est-le-petrole-blanc-du-capitalisme-selon-roberto-saviano

    L’auteur de Gomorra se plonge dans l’#économie de la #cocaïne. Peu d’informations inédites, beaucoup de mise en scène, trop d’effets de style, mais un dessin d’ensemble saisissant et une thèse sous-jacente troublante : la dépendance entre les circuits de la coke et le système économique.

    #livre #drogues #économie #mondialisation #système-monde cc @pguilli @margherita

    Dans ce livre, on voit donc comment la mafia italienne exporte son savoir-faire en Russie ou au Mexique. On redécouvre l’histoire de Kiki Camarena, agent de la DEA (Drug Enforcement Administration) infiltré au cœur du narcotrafic mexicain, finalement repéré et torturé de telle manière que « les juges ont perdu le sommeil pendant des semaines après avoir écouté les cassettes » que ses ravisseurs enregistrèrent. On passe par Ciudad Juarez, devenue la ville la plus dangereuse du monde, avec près de 2 000 homicides par an. On voit le basuco, la drogue des taulards constituée à partir des restes de l’extraction de cocaïne et produite au moyen de substances chimiques toxiques pour l’homme, pénétrer les prisons à l’aide de #pigeons voyageurs.

    On apprend aussi que des narcos offrent une récompense de 10 000 dollars pour la tête d’Agata, une chienne particulièrement habile à flairer la poudre blanche, et que « la marchandise la plus secrète ne peut se passer de logo elle non plus ». Ainsi, « les pains de cocaïne sont marqués afin d’en certifier l’origine », avec une femme, un scorpion, la virgule Nike, le S de Superman, le cheval cabré de Ferrari prisé par les Zetas mexicains, le cerf de John Deere préféré par le cartel du Golfe, mais aussi la figure d’Hello Kitty, « l’héroïne japonaise adorée des petites filles du monde entier »…

    « La cocaïne est la réponse universelle au besoin de liquidités », écrit l’auteur.

    Roberto Saviano revient ainsi sur la déclaration choc d’Antonio Maria Costa, fin 2009, alors directeur de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime, expliquant que les profits des organisations criminelles ont été les seules liquidités investies dans certaines banques pour leur permettre d’éviter la faillite. Il avançait alors le chiffre astronomique de 352 milliards de dollars d’argent sale, blanchi par des banques.

    Pour Saviano, « les centres du pouvoir financier mondial se sont maintenus à flot grâce à l’argent de la coke », en utilisant tous les outils d’un capitalisme financiarisé qui a fait de la circulation accélérée des capitaux la principale de ses activités, au point que la chef de la section blanchiment au département de la justice américaine a pu affirmer en 2012 que « les banques américaines servent à recevoir de grosses quantités de fonds illégaux cachés parmi les milliards de dollars qui sont transférés chaque jour d’une banque à l’autre ».

    Ce qu’il faut alors retenir du livre de Saviano, en dépit des limites de ce travail, c’est peut-être sa conclusion, qui fait écho à l’échec flagrant des politiques de « guerre à la drogue » lancée dans les années 1980 [cf. http://seenthis.net/messages/292510] : « Je suis certain que la légalisation pourrait bel et bien être la solution. Car elle frappe là où la cocaïne trouve un terreau fertile, dans la loi de l’offre et de la demande. En étouffant la demande, tout ce qui se trouve en amont se fanerait telle une fleur privée d’eau. Est-ce une hérésie ? Un fantasme ? Le délire d’un monstre ? Peut-être. Ou peut-être que non. »