Gabriel Colletis : « Manuel Valls a déclaré sa flamme aux actionnaires et non aux entreprises »

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  • Gabriel Colletis : « Manuel Valls a déclaré sa flamme aux actionnaires et non aux entreprises »
    Entretien, par Bernard Marx| 16 octobre 2014

    On reste confondu devant tant de passion. Et pourtant, on ne devrait pas, tant il est vrai que le gouvernement français a déjà très largement prouvé son amour pour les entreprises avec un énorme cadeau en période de disette budgétaire : le Crédit d’impôt pour la compétitivité… et l’emploi (CICE). Ce crédit d’impôt devait représenter environ 12 milliards d’euros pour sa première année de mise en place (2013). Il devrait finalement coûter un peu moins de 9 milliards aux caisses de l’État. Entre les allégements de cotisations patronales supplémentaires sur les bas salaires et d’autres baisses d’impôts pour les entreprises, le total des cadeaux nouveaux accordés aux entreprises est évalué à 40 milliards d’euros d’ici à 2017. Ce, sans contreparties autres que l’espoir que celles-ci voudront bien embaucher et investir. En France ? Rien n’est moins sûr s’agissant des grandes entreprises qui accaparent plus de 35% du CICE. Outre que celles-ci ont montré jusqu’à présent qu’elles préféraient largement investir à l’étranger plutôt qu’en France, force est de constater qu’elles ne méprisent pas leurs actionnaires. Tout au contraire ! Les firmes hexagonales, selon une étude du fonds Henderson Global Investors, ont décroché la palme mondiale de la rémunération des actionnaires au deuxième trimestre 2014 en versant à ces derniers pas moins de 40 milliards de dollars (ou 32 milliards d’euros) (en hausse de 30% en rapport au deuxième trimestre 2013 !).

    Pour être plus précis, Manuel Valls devant les dirigeants du Medef aurait donc dû déclarer sa flamme aux actionnaires et non aux entreprises tant il est vrai que, pour les plus grandes d’entre elles, le chemin entre les avantages consentis par l’État et les contribuables français et les poches des actionnaires risque d’être court. Le Premier ministre, sans doute un des hommes les mieux formés et informés de France, ne peut ignorer qu’alors que dans les années 1970 les entreprises françaises consacraient deux fois plus d’argent à leurs investissements nets qu’à la rémunération des propriétaires de leur capital, cette proportion est inversée aujourd’hui.

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