Du racisme aux politiques de racialisation

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  • Du racisme aux politiques de racialisation
    http://blogs.mediapart.fr/blog/eric-fassin/181114/du-racisme-aux-politiques-de-racialisation

    Sous couvert de mesures transitoires, on les a exclus du marché du travail, quitte à les accuser ensuite de mendier ou de voler ; on continue même de les priver des conditions d’hygiène les plus élémentaires, en refusant le ramassage des ordures dans les bidonvilles, pour mieux leur reprocher ensuite… leur manque d’hygiène ; au mépris du droit, on continue de faire obstacle à l’inscription sur les listes électorales de ces citoyens européens ; on bannit trop souvent leurs enfants de l’école au prétexte de leur prétendu nomadisme, qui ne devient une réalité qu’à force d’expulsions répétées qui reviennent à les chasser sans cesse un peu plus loin.

    C’est ainsi qu’on produit une différence, supposément « culturelle », qui justifie en retour de traiter les populations roms comme si elles étaient de nature différente. Bien entendu, c’est sans rapport avec la biologie, mais cela a tout à voir avec la politique qui produit cette différence. Bref, il s’agit proprement d’une politique de la race

    #racisme #Roms #race

    • c’était là hier http://seenthis.net/messages/313867
      et puis, autrement, là http://seenthis.net/messages/195477

      « En gros, le racisme assure la fonction de mort dans l’économie du bio-pouvoir, selon le principe que la mort des autres, c’est le renforcement biologique de soi-même en tant que l’on est membre d’une race ou d’une population, en tant que l’on est élément dans une pluralité unitaire et vivante. Vous voyez que nous sommes là, au fond, très loin d’un racisme qui serait, simplement et traditionnellement mépris ou haine des races Ies unes pour les autres. Nous sommes très loin aussi d’un racisme qui serait une sorte d’opération idéologique par laquelle les États, ou une classe, essaieraient de détourner vers un adversaire mythique des hostilités qui seraient tournées vers (eux) ou qui travailleraient le corps social. Je crois que c’est beaucoup plus profond qu’une vieille tradition, beaucoup plus profond qu’une vielle idéologie, c’est autre chose. La spécificité du racisme moderne, ce qui fait sa spécificité, n’est pas lié à des mentalités, à des idéologies, aux mensonges du pouvoir. C’est lié à la technique du pouvoir, à la technologie du pouvoir. C’est lié à ceci, qui nous place, au plus loin de la guerre des races et de cette intelligibilité de l ’histoire, dans un mécanisme qui permet au bio-pouvoir de s’exercer. Donc, le racisme est lié au fonctionnement d’un Etat qui est obligé de se servir de la race, de l’élimination des races et de la purification de la race, pour exercer son pouvoir souverain. La juxtaposition, ou plutôt le fonctionnement d’un Etat, à travers le bio-pouvoir, du vieux pouvoir souverain du droit de mort implique le fonctionnement, la mise en place et l’activation du racisme. »

      (Michel #Foucault, « Il faut défendre la société »)

  • Du racisme aux politiques de #racialisation
    http://blogs.mediapart.fr/blog/eric-fassin/181114/du-racisme-aux-politiques-de-racialisation

    Force est de reconnaître que des #politiques de racialisation sont à l’œuvre. On ne peut plus lutter contre le racisme idéologique et les discriminations raciales sans mettre en cause, non pas seulement l’inaction des pouvoirs publics, mais aussi leur action, ce qu’ils font au moins autant que ce qu’ils ne font pas.

    La « question #rom » est actuellement le révélateur le plus brutal de cette racialisation politique. Les responsables nationaux, mais aussi locaux, prétendent certes répondre à une demande populaire, comme si le racisme d’État pouvait s’autoriser de celui qui est censé définir les « riverains ». En réalité, le second se nourrit du premier. De Nicolas Sarkozy à Manuel Valls, et jusqu’aux élus locaux, émanant d’une majorité ou de l’autre, des pompiers pyromanes prétendent éteindre l’incendie qu’ils allument d’abord et attisent ensuite par leurs paroles et leurs actes. Car l’altérité radicale imputée aux Roms venus de Roumanie ou de Bulgarie est avant tout l’effet du traitement radicalement autre qu’on leur fait subir.

    Sous couvert de mesures transitoires, on les a exclus du marché du travail, quitte à les accuser ensuite de mendier ou de voler ; on continue même de les priver des conditions d’hygiène les plus élémentaires, en refusant le ramassage des ordures dans les bidonvilles, pour mieux leur reprocher ensuite… leur manque d’hygiène ; au mépris du droit, on continue de faire obstacle à l’inscription sur les listes électorales de ces citoyens européens ; on bannit trop souvent leurs enfants de l’école au prétexte de leur prétendu nomadisme, qui ne devient une réalité qu’à force d’expulsions répétées qui reviennent à les chasser sans cesse un peu plus loin.

    C’est ainsi qu’on produit une différence, supposément « culturelle », qui justifie en retour de traiter les populations roms comme si elles étaient de nature différente. Bien entendu, c’est sans rapport avec la biologie, mais cela a tout à voir avec la politique qui produit cette différence. Bref, il s’agit proprement d’une politique de la race.

    Mais il ne s’agit pas seulement des Roms. En fait, cet exemple radical fait ressortir clairement le rôle des responsables politiques de tous bords dans la montée en puissance de la « question raciale » au sens le plus large.