• Comment diffuser des « intox » fait naître le racisme
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    « Ils envahissent l’Italie, ils ne respectent pas les lois, ils nous volent nos emplois, ils sont porteurs du virus Ebola… ». L’immigration en Italie est victime de nombreuses idées reçues, souvent alimentées par une information incomplète qui se concentre sur des événements isolés. Cette vision du phénomène alimente la peur et les troubles sociaux. Voici les « intox » actuelles les plus répandues sur l’immigration, mais démenties par les faits.

    L’utilisation d’une photo particulière, le titre d’un fait divers pointant du doigt la nationalité des délinquants (« Une vieille dame se fait arracher son sac par un Marocain »), l’utilisation de données incomplètes ne permettant pas une comparaison avec d’autres ordres de grandeur (en 6 mois, 100 000 immigrés ont débarqué en Italie) : voilà des formes de communication qui favorisent l’apparition de stéréotypes dangereux et de croyances souvent erronées sur l’immigration. Dernière intox en date à la une de nombreux journaux italiens : les réfugiés coûteraient 40 euros par jour à l’Italie.

    Faire circuler de fausses informations sur l’immigration peut engendrer des troubles sociaux très graves, comme en témoignent les récentes agressions dans les bus ou dans la rue de personnes africaines accusées d’être porteurs du virus Ebola, ou les affrontements à Tor Sapienza (Rome).

    Sur Esseciblog, Andrea Colasuonno a souhaité démentir les informations actuelles les plus répandues sur l’immigration en Italie en utilisant l’arme fatale des journalistes : les données.

    1) « Ils envahissent l’Italie »

    En Italie, on dénombre un peu plus de 5,5 millions d’étrangers, ce qui représente 8 % de la population. Sur ces 5,5 millions, 300 000 seulement sont en situation irrégulière. Le Royaume‑Uni est le pays européen où affluent le plus grand nombre d’immigrés, c’est‑à‑dire environ 560 000 par an. L’Allemagne, en revanche, est le pays de l’UE où l’on trouve le plus grand nombre de résidents étrangers, soit 7,4 millions de personnes. Viennent ensuite l’Espagne et l’Italie. Par ailleurs, l’Italie se classe sixième pour les demandes d’asile, qui se chiffrent à 27 800. Remarquons que le pays où l’on dénombre le plus d’immigrés est également l’unique pays connaissant une croissance économique actuellement.

    2) « Ils vivent aux frais de la princesse »

    En travaillant en Italie, les étrangers contribuent au PIB italien à hauteur de 11 %, alors que l’état italien leur accorde moins de 3 % des prestations sociales. De plus, les étrangers financent complètement les retraites. L’âge moyen des travailleurs étrangers est de 31 ans, alors que celui des travailleurs italiens est de 44 ans. Il faudra attendre 2025 pour qu’un étranger sur 25 soit à la retraite, alors qu’aujourd’hui, 1 Italien sur 3 est à la retraite. Les cotisations versées par les étrangers (se chiffrant à environ 9 milliards d’euros) servent donc aujourd’hui à payer la retraite des Italiens.

    3) « Ils nous volent nos emplois »

    Selon la Banque d’Italie : « Le nombre croissant d’étrangers en Italie n’a pas diminué les possibilités d’emploi pour les Italiens ». En Italie, le travail effectué par les étrangers a comblé un vide dû à des facteurs démographiques. Prenons par exemple la région de la Vénétie. Entre 2004 et 2008, sur les 65 000 jeunes embauchés par an, 43 000 sont de jeunes italiens et 22 000 de jeunes étrangers. Entre 1979 et 1983, période présumée de naissance de ces nouveaux travailleurs, on comptait 43 000 naissances par an. Telle est la situation au centre nord de l’Italie. Au sud, la situation est un peu plus problématique : en effet, dans une économie fragile et moins structurée, les étrangers acceptent souvent des salaires très faibles, dans des conditions de travail exécrables, « volant » ainsi quelques emplois aux Italiens.

    4) « Ils ne respectent pas les lois »

    Selon l’Istat (Institut italien des statistiques et des études économiques, NdT), entre 1998 et 2008, le nombre d’étrangers en Italie a explosé de 246 % (l’immigration étant auparavant un phénomène quasi inexistant). La délinquance n’a pas pour autant augmenté et n’a connu que de faibles variations : le nombre de délits en 2007 est similaire à celui de 1991.

    5) « Ils sont porteurs du virus Ebola »

    L’Afrique est un continent immense, non pas un pays. Les pays majoritairement frappés par Ebola sont le Liberia et la Sierra Leone. Les immigrés arrivant en Italie ne viennent pas de ces pays, mais de la Libye, de l’Érythrée, de l’Égypte et de la Somalie. Le virus Ebola se manifeste rapidement par des symptômes très reconnaissables : un immigré ayant contracté le virus ne pourrait pas voyager pendant des semaines et arriver vivant en Italie. La propagation du virus Ebola a explosé en avril 2014. Au cours des 8 premiers mois de 2014, environ 100 000 immigrés sont arrivés en Italie et aucun d’entre eux n’a transmis le virus.

    6) « Il faut les aider dans leur pays »

    En 2011, le gouvernement italien a diminué de 45 % les fonds destinés à l’aide au développement. En effet, 179 millions d’euros seulement ont été débloqués pour cette aide, ce qui représente le montant le plus bas depuis 20 ans. L’Italie affecte 0,2 % de son PIB à ce domaine et se classe ainsi parmi les pays occidentaux les moins généreux en matière d’aide internationale. En 2013, le service civile italien a créé 16 373 postes, dont seulement 502 à l’étranger : en somme, 19 % de postes financés en moins par rapport à 2011.

    7) « Les étrangers sont favorisés pour l’attribution des logements sociaux »

    Il est évident que la nationalité ne fait pas partie des conditions d’attribution des logements sociaux en Italie. Les critères pris en compte sont : le revenu, le nombre de membres de la famille lorsqu’il est supérieur à 5, l’âge, un éventuel handicap. Les immigrés sont habituellement désavantagés car ils sont jeunes, en bonne santé et ont laissé leurs familles dans leurs pays. À la publication du ban par la commune de Turin en 2009, 45 % des demandeurs étaient des étrangers, mais un logement social n’a été attribué qu’à seulement 10 % d’entre eux. Dans la commune de Gênes, sur les 185 logements mis à disposition, 9 seulement ont été attribués à des immigrés. À Bologne, sur les 12 458 logements populaires, seulement 1 122 ont été attribués à des étrangers.

    8) « Essaye de construire une église dans un pays islamique »

    C’est l’argument le plus utilisé par les opposants à la construction de mosquées en Occident ou à l’interdiction de crucifix dans les lieux publics. Au Maroc, les catholiques représentent moins de 0,1 % de la population, et pourtant, on y trouve 3 cathédrales et 78 églises. On dénombre 32 cathédrales en Indonésie, 1 cathédrale en Tunisie, 7 cathédrales au Sénégal, 5 cathédrales en Égypte, 4 cathédrales et 2 basiliques en Turquie, 4 cathédrales en Bosnie, 1 cathédrale aux Émirats Arabes Unis, 3 monastères en Syrie, 7 cathédrales au Pakistan et ainsi de suite.

    9) « Les musulmans nous envahissent »

    Les étrangers les plus nombreux en Italie sont les Roumains : on en dénombre plus d’un million et la plupart d’entre eux sont orthodoxes. Viennent ensuite les Albanais (presque 600 000) dont 70 % d’entre eux ne sont pas pratiquants (résultat de la domination soviétique) et parmi les 30 % restants, 60 % sont musulmans et 20 % sont orthodoxes. En troisième position, se trouvent les Marocains (presque 500 000) qui sont presque tous musulmans, puis les Chinois (environ 200 000) qui sont presque tous athées. Ce qui signifie que la plupart des étrangers en Italie sont chrétiens, ou bien athées et que seulement une petite partie d’entre eux sont musulmans.
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