• « On accorde trop d’attention au climat par rapport aux autres questions environnementales »
    http://www.reporterre.net/On-accorde-trop-d-attention-au-climat-par-rapport-aux-autres-questions

    Pourtant, si on perd la bataille du #climat, ne perd-t-on pas toutes les autres batailles environnementales ?

    La focalisation extrême sur le changement climatique a conduit à considérer qu’il était la cause des autres problèmes #environnementaux – érosion de la #biodiversité, désertification, sécheresse accrue, accès à l’#eau, etc. – alors qu’en fait, il en est la conséquence. Par exemple, l’une des contributions majeures aux émissions de gaz à effet de serre, c’est la déforestation, à hauteur d’environ 25 %. L’une des mesures les moins chères à prendre en matière de lutte contre le changement climatique serait de la stopper. Il faut commencer par là.

    Comment expliquer cette focalisation en France des politiques environnementales sur le climat ?

    C’est un sujet que je n’ai volontairement pas abordé parce que c’est une recherche en soi. J’ai donc des hypothèses. Un, la France est un pays d’ingénieurs et de juristes, et par exemple, les #ingénieurs des Ponts-et-Chaussées sont très à l’aise avec ça. Le changement climatique renvoie en gros à cinq ou six gaz qui ont chacun une unité de conversion en équivalent CO2. C’est très facile de raisonner avec ça pour un ingénieur.

    Deuxièmement, cette affaire de climat ne remet pas fondamentalement en cause le système capitaliste. On peut en faire un marché. Vous pouvez développer des techniques anti-CO2, vous pouvez développer le marché des énergies renouvelables, et en fait quand vous regardez qui est sur ce marché en France, ce sont soit d’anciens promoteurs immobiliers reconvertis, soit des énergéticiens comme Total ou EDF, parce qu’il y a de très gros marchés. Quand vous arrivez sur des sujets comme le paysage, la biodiversité, cela devient beaucoup plus difficile à appréhender pour les fonctionnaires et les ingénieurs. Vous avez moins de critères quantitatifs, vous avez une opposition beaucoup plus forte à donner une valeur au vivant.

    • pas convaincu par l’entretien mais ça a le mérite de reposer une question que posait Deun il y a quelques années

      Il semble qu’une mystérieuse force ait distingué le taux de CO2 comme l’étalon quantitatif unique de tous les dégâts environnementaux, et qui va servir à leur représentation comme à leur gestion.
      Enfin cette force est-elle vraiment si mystérieuse que ça ? Est-ce si étonnant si malgré la diversité qualitative des problèmes, on s’oriente vers une formulation la plus simple possible permettant de ramener ces problèmes à un paramètre quantitatif et unique ?

      http://decinfo.apinc.org/phpBB2/viewtopic.php?p=52089&sid=e0b7b4f56da4580911214ed93382dc5a#52089

    • http://www.fredericdenhez.fr/co2/co2.html

      Lire ce texte vous prendra environ deux minutes, soit une quarantaine de grammes de carbone. Ce n’est pas bien. L’imprimer pour le relire serait pire, car alors vous tireriez scandaleusement sur le réseau électrique. Aujourd’hui, le carbone juge notre vie. Nos gestes, nos achats, nos décisions. Son « bilan » est une radiographie très précise d’un système, d’une entreprise, d’un service public, d’un secteur économique, d’un quartier, d’une pomme… de vous. Voir le carbone, c’est observer le fonctionnement de notre société, ce qui s’échange, ce qui est perdu, ce qui arrive, est stocké, repart, ce qui est essentiel et superflu. Tout peut être traduit en carbone, c’est une question de facteurs d’équivalence. Le carbone est roi. Il est le juge suprême. L’évoquer, c’est parler de tout, de tous les problèmes d’environnement, de la société, mais c’est surtout ne rien faire.
      Nous voilà donc maintenant avec un indicateur quasiment unique, technique, désincarné, autoritaire, dérangeant, abstrait, partiel. Est-il au moins utile ? Nous permet-il de réduire nos émissions de gaz à effet de serre ? La réponse est non. Le bénéfice des petits gestes est annulé par l’effet rebond qui compense l’efficacité énergétique, le « carbone gris » présent dans les importations (NDLR : autrement dit le carbone émis par la fabrication et le transport des produits étrangers que nous consommons), la tertiarisation de notre économie, la désindustrialisation-délocalisation de notre pays.

  • Culture : entretien Jocelyne Porcher sur les cochons« L’industrie porcine use et abuse des animaux sans rien leur offrir en contrepartie »« L’élevage a été remplacé par un système industriel qui organise la production animale
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2015/08/27/culture-entretien-jocelyne-porcher-sur-les-cochons-l-industrie-porcine-use-e

    Aujourd’hui, 95 % de la viande de porc consommée en France vient, non pas de fermes, mais de grandes structures industrielles qui sont en crise, comme vient de le montrer le conflit des éleveurs. #Jocelyne_Porcher, sociologue à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), analyse cette nouvelle donne. Elle est l’auteure de plusieurs livres sur l’élevage  : Vivre avec les animaux. Une utopie pour le XXIe siècle (La Découverte, 2011), ­Cochons d’or. L’#industrie_porcine en questions (Quae, 2010), Une vie de cochon (La Découverte, 2008, avec Christine Tribondeau).

    #paywall

    • Je n’ai pu lire l’entièreté de l’interview, du fait du #paywall. Mais son auteure ne m’inspire rien de bon.

      C’est la place prépondérante de la vie dans l’échange entre hommes et animaux qui peut permettre d’appréhender la mort des animaux d’#élevage dans le rapport de don. Car, ces animaux qui naissent, vivent, produisent, « il ne faut pas se faire d’illusion, on ne peut pas les élever pour les garder ».
      Ce fréquent constat, qui est celui d’une impuissance (« hélas », « malheureusement »… ) à porter la vie plus haut que la nature ne la porte, témoigne que la mort des animaux n’est pas en elle-même la finalité du travail de l’éleveur ; les éleveurs n’élèvent pas des animaux pour les tuer.En élevage également, ainsi que l’exprime Montaigne, la mort est le bout et non le but de la vie [ cf. Demonet, 1999, p. 28].

      Ce n’est donc pas la mort, la mort en soi, qui fait problème à de nombreux éleveurs, professionnels ou citoyens, mais le fait de tuer. Car le sujet du tuer n’est pas celui du mourir. Le tueur tue et l’animal meurt. Et non l’inverse.

      Symboliquement, et je rappelle ici que le don est considéré par Mauss comme un fait social de l’ordre du symbolique, nous retrouvons l’asymétrie première qui préside au don originel de la vie par l’éleveur. L’éleveur donne la vie et la reprend. La légitimité de la tuerie , qui ne va pas sans souffrance affective et nécessite chez l’éleveur un véritable travail de deuil, repose sur ce don initial, sur la qualité de l’échange et le respect de l’animal le temps de sa vie et au moment de sa mort. C’est pourquoi l’abattage des animaux d’élevage doit avoir un sens pour celui qui tue, le tueur lui-même et la communauté pour qui il tue – et bien que, fondamentalement, la tuerie n’ait aucun sens pour celui qui meurt et qui refuse de mourir, car il est indéniable que l’animal ne consent pas à mourir mais que nous lui ôtons la vie, par violence ou par ruse . Et l’on conçoit bien que, parce qu’elle n’est pas le but du travail de l’éleveur, mais le terme ultime le plus douloureux de l’échange, la tuerie des animaux doit être appréhendée pour ce qu’elle est pour de nombreux éleveurs : une violence non désirable. La mort existe, elle est indésirable, mais elle a un sens quand la vie a un sens.

      écrivait il y a quelques années Jocelyne Porcher dans un article intitulé
      L’esprit du don : archaïsme ou modernité de l’élevage ?
      Éléments pour une réflexion sur la place des animaux d’élevage dans le lien social

      http://www.cairn.info/revue-du-mauss-2002-2-page-245.htm#s2n3

      (c’est moi qui graisse)
      je ne sais pas ce que la force et la ruse, qui plus est mortels, viennent faire dans un système de don et de contre-don.
      Je ne sais pas ce que ça vous fait, mais qu’une chercheur soit capable d’écrire pareilles lignes, et que le Mauss l’ait publié, cela me fait froid dans le dos.

      Je dois sûrement être trop sensible. Ou trop « #analphabête », bien que fils et petit-fils d’agriculteurs et éleveurs ayant passer les vingt premières années de sa vie à la campagne, dans une ferme...

      Comme l’écrit Martin Gibert,

      Ce qui intéresse les chercheurs, c’est de voir comment on arrive à dealer avec ce qu’on appelle le paradoxe de la viande : comment on peut à la fois aimer les animaux et aimer son steak ?
      Ces recherches mobilisent souvent la théorie de la #dissonance_cognitive de #Leon_Festinger. L’idée générale, c’est que lorsque nos pensées sont en opposition avec nos comportements, il est bien sûr possible de changer son comportement (comme le font les véganes), mais il est souvent plus facile de modifier une pensée dissonante ou d’ajouter une pensée consonante.

      http://penseravantdouvrirlabouche.com/2015/05/12/voir-son-steak-comme-un-animal-mort-entrevue-avec-martin

      Il me semble (j’écris

      il me semble

      pour la forme : je suis curieux de voir comment on pourrait soutenir le contraire !) Jocelyne Porcher nous en offre une illustration caricaturale.

      D’autres ont détaillé un peu plus leur critique :

      La « viande heureuse »
      [...]
      Théorie du don
      Contrairement à ses complices, Jocelyne Porcher produit une multitude d’idées ou d’arguments pour promouvoir la viande heureuse. Les démêler exigera plus de temps. La plus originale de ses idées fait appel à une « théorie du don », où animaux d’élevage et humains se livrent à une sorte de Potlatch, se concluant par la mort des uns, et la dette infinie des autres.
      [...]
      « Dons et contre dons se poursuivent tout au long de la vie de la famille et du troupeau ». De manière générale, l’éleveur extensif donne une vie bonne à ses animaux. Il leur donne accès « au sol, à l’herbe, au soleil et à la pluie, au chant des oiseaux, au vent, à la neige ». L’éleveur cède indéniablement l’herbe de ses terres. Mais par quelle vue de l’esprit cette cession peut-elle être considérée comme un don, si l’intention de l’éleveur est d’engraisser l’animal pour le faire tuer ? Porcher répondrait que l’intention de l’éleveur est double : elle est à la fois de donner une vie bonne à l’animal, et de l’engraisser. Cette double intention ne change rien. Donner à la seule condition de pouvoir reprendre plus tard est la négation même du don. Pour éviter cette fâcheuse contradiction, il faudrait modifier le récit, dire que les éleveurs donnent l’herbe uniquement pour offrir une vie bonne à l’animal, et qu’en retour l’animal donne intentionnellement sa vie en sacrifice. Ce serait aller trop loin dans la supercherie, sauf peut-être pour les étudiants zélés de Porcher.
      [...]
      Porcher passe également sous silence certaines mutilations, comme la castration des mâles d’engraissement ou l’écornage. La séparation des groupes sociaux brille par son absence. Le plaisir de la relation sexuée chez les bêtes, sur laquelle Porcher insiste, est ainsi interdit soit par mutilation soit par séparation. En bref, la vie « donnée » par l’éleveur est bonne, surtout lorsque les dommages par inflictions et privations sont tus.
      [...]
      « Ce que nous donnent les animaux est irremplaçable »19. Mais il y a encore mieux et encore plus extraordinaire. Les animaux d’élevage, dans leur grande bonté, font plus que donner délibérément une vie bonne aux éleveurs. Ils donnent également leur vie : « Cette vie, que donnent les animaux aux êtres humains, est (…), du point de vue de la société globale, la vie donnée par les aliments que nous fournissent les animaux, et qui est directement ou indirectement liée à leur mort ». L’affirmation est tellement grotesque que Porcher finit pas se dédire. « Pas plus que la plupart d’entre nous, (…) les animaux ne semblent désireux de mourir et, comme nous, ils tendent à préserver leur vie, s’enfuient face au danger et résistent à la mort ». Il n’y a aucun sens à dire qu’ils donnent leur vie à l’éleveur. Nous prenons leur vie. Ce qui est très exactement l’inverse d’une situation de don. Porcher ne peut justifier l’abattage des animaux qu’en inversant délibérément le sens des mots. Ce qui est censé être donné est en réalité arraché, extorqué. Pourquoi donc forger un concept de don aussi bancal ?
      [...]
      Jocelyne Porcher a également d’autres idées pour promouvoir la religion de la viande. Mais elles sont moins singulières, moins fantaisistes, moins bling-bling . Elles ne se donnent pas l’air d’une profondeur insondable, d’une structure anthropologique universelle.
      [...]

      http://www.cahiers-antispecistes.org/spip.php?article430

      Peut on faire la critique de l’élevage industriel sans dans le même temps devoir mettre la réalité et les concepts cul par dessus tête, sans tenir des propos délirants prêtant des vertus à proprement parler inouïes à l’élevage traditionnel ?

      J’ose penser que c’est non seulement le cas, mais que le contraire n’est pas possible : que ce que fait depuis des années J. Porcher n’est pas la « critique de l’élevage industriel ». Plus sûrement, elle s’est jusqu’ici employée à nier la réalité de l’élevage, à distordre cette réalité pour en faire la promotion, et à reprocher à la fois à l’industrie et aux vegans de lui faire du tort, la première en se passant brutalement de la relation éleveurs/animaux, les seconds en dévoilant les ressorts de cette relation.

      De fait, elle semble avant tout percevoir l’horreur massive de l’élevage industriel comme une menace pour l’élevage tout court , dont il a le tort d’exposer crûment le noyau irréductible de domination sur des êtres sensibles, (éleveurs inclus) et se livrer en conséquence à des contre-feux idéologiques intellectuellement calamiteux.

      Je pense moi aussi que les éleveurs souffrent. Et économiquement, et de leur métier d’éleveur ; pas seulement de conditions de travail particulières .
      Je pense que l’élevage est indissociable de dissonances cognitives douloureuses.
      Mais je ne pense pas que le déni des causes de ces dernières souffrances - qui provient in fine de l’irréductible contradiction entre vouloir œuvrer pour une vie bonne et les nécessités de l’élevage : contraintes, mutilations et mise à mort - qu’échafaude laborieusement J. Porcher offre la moindre perspective.

      En tout état de cause, je ne peux que recommander à qui veut critiquer la société industrielle de ne pas s’égarer à le faire en pareille compagnie, mais à chercher à partir d’autres prémisses.

      #dissonance cognitive
      #carnisme
      #déni
      #fausse_conscience
      #Martin Gibert

    • Sinon sur l’ambivalence inhérente au lien avec les animaux, je me souviens de ce commentaire de Fabien, commentaire qui fera peut-être écho chez celleux ayant grandi à la campagne.
      http://decinfo.apinc.org/phpBB2/viewtopic.php?p=15012#15012

      Quand j’étais gamin, dans mon village, le boucher tuait les bestiaux dans son gagage, la porte grande ouverte donnant sur la rue. De l’autre côté de la rue, il y avait une murette très confortable. Chaque fois qu’il revenait avec sa bétaillière pleine de veaux, vaches ou agneaux, tous les gosses du village allaient assister au spectacle. J’ai vu abattre plusieurs dizaines de bêtes, dont quelques veaux ou brebis directement pendus par les pattes antérieures à une branche d’arbre pour pâques.
      Quand j’étais à l’école primaire, j’ai élevé moi-même au biberon deux chevrettes, et un agneau. Les premières ont été remises dans le troupeau, et le dernier nous a donné deux excellents gigots et un merveilleux ragoût.
      Personne ne s’est jamais posé la question de savoir si tout ça était juste ou pas.
      Je pense que je ne serai pas fier la première fois où ce sera moi qui devrai tenir le couteau, mais s’il faut le faire, je le ferai.

    • lien avec http://seenthis.net/messages/238720
      Les animaux d’élevage on peut très bien s’y attacher et se mettre en quatre pour eux, il n’en reste pas moins que (sauf les animaux de trait) si on les élève c’est parce-qu’à un moment on a besoin de bouffer. Dans une optique d’autonomie alimentaire les deux questions qui se posent alors c’est (1) peut-on passer en #végéculture, et si c’est vraiment pas possible (2) comment gérer la dissonance cognitive impliquant de tuer pour les manger des animaux avec qui on avait établi un lien affectif.

    • Comme @martin5 et @koldobika j’ai de plus en plus de réserve vis à vis des arguments avancés par JP. Les animaux d’élevage, même de ferme, sont tués en pleine jeunesse, c’est pas vraiment un sort enviable. Par rapport à son discours sur le fait que « l’élevage permet de maintenir des espèces qui serait sinon vouées à la disparition », je pense que le problème est ailleurs. Il est dans la façon dont les humains se sont appropriés tous les espaces pour les contrôler. Ainsi, on n’est pas fichu de concevoir que des espaces libres puissent être dévolus à des animaux semi-domestiqués. L’Inde, qui est pays où vivent une part importante de végétariens, les animaux tels que les vaches, les volailles, les cochons, etc... ont aussi leur place. Merci @intempestive je vais moi aussi pouvoir lire l’article.

    • L’Inde, qui est pays où vivent une part importante de végétariens, les animaux tels que les vaches, les volailles, les cochons, etc... ont aussi leur place.

      Ça c’est parce qu’il y a des non-végétariens qui consomment les bêtes quand elles ne sont plus productives

    • @Intempestive

      merci !
      Mais je crois qu’il n’est plus l’heure, pour la lecture zen.

      @Aude V.
      Le fait est que « Jocelyne » a écrit et dit à maintes reprises des choses plus qu’ébouriffantes dans le but de promouvoir l’élevage.

      Je suis d’accord avec vous :, je considère que de tels « arguments » ne sont pas acceptables .
      Et je peine à saisir en quoi d’aussi visibles efforts consacrés à nier l’existence et les conséquences, y compris pour les éleveurs, des rapports de domination qui sont au cœur de la domestication, pourrait servir quelque critique que ce soit.

      Je n’ai évidemment pas le pouvoir d’empêcher qui que ce soit de croire éperdument que la viande qu’ellil mange est un « contre-don », que « les éleveurs donnent la vie », ou que les employeurs créent des emplois.
      Mais je peux faire remarquer que ce sont là des calembredaines, des fariboles, du story-telling, et l’usage que l’on peut en faire

      Pour le reste, vos propos en sa défense n’engagent que vous.

    • @Koldobika

      Merci !
      (et soupir de lassitude devant des propos attendus, et encore réitérés)

      Comme le rappelait C. Delphy dans la ... revue du Mauss il y a trois ans à propos d’autres rapports sociaux de domination, et de leur justification complaisante par le « don » :

      _"la condition de possibilité du don, c’est l’égalité"_

      http://www.academia.edu/5383833/La_condition_du_don_cest_l%C3%A9galit%C3%A9_entretien_avec_Christine_Delph

    • En fait, j’imagine sans peine une Josiane Cheffedentreprise, militante anti-industrielle, nous proposer un de ces quatre matins une apologie de l’entreprise capitaliste artisanale, présentant les rapports employeur-salarié comme un magnifique et si humanisant potlatch , insistant sur les souffrances endurées par les généreux employeurs de PME qui donnent du travail et en attendent justement une contrepartie , mais qui ne peuvent hélas rémunérer mieux qu’une misère leurs salariés, parce que c’est bien triste, mais c’est comme ça, c’est le marché, c’est la nature. Des généreux employeurs qui déplorent les licenciements, la souffrance et les accidents au travail, qui témoignent complaisamment de leur immense affection pour cette main-d’oeuvre qu’ils sont amenés à côtoyer, de leur dévouement à son endroit, de la « dette éternelle » qu’ils contractent envers elle et de leur gratitude infinie pour tout ce que cette formidable relation qu’est le salariat où se mêlent joies, peines, responsabilité, engagement, etc. leur apporte d’ « humanité ».
      Une Josiane Cheffedentreprise qui conditionnerait ainsi la sauvegarde de son idée de l’humanité à la perpétuation du salariat.
      Dans cette perspective, capitalisme artisanal et exploitation - pardon, « potlatch » - seraient à défendre mordicus, et d’urgence, sur deux fronts : à la fois contre l’ignoble société industrielle, qui déshumanise sans vergogne jusqu’à l’exploitation capitaliste, mais aussi, si possible en leur témoignant au passage le plus cinglant mépris, contre les lubies des insensés qui auraient le front de nier l’apport humain essentiel que constitue l’exploitation capitaliste ! Lubies qui ne saurait manquer de trahir la connivence de ces égarés avec cette même société industrielle, ses penseurs post-modernes, son libéralisme.

      Il y a un an seulement, je n’aurais pas cru cela possible, et je n’aurais pas même eu l’idée d’écrire pareille parodie. Mais c’est que j’étais naïf : par exemple, je confesse ici que je ne découvre les (nombreux) écrits de J. Porcher, et l’échafaudage théorique renversant à partir duquel, se fondant pesamment sur les indiscutables souffrances au travail des éleveurs, y compris traditionnels, elle promeut... la perpétuation de la cause première d’une de ces souffrances : l’élevage, pour peu qu’il ne soit pas industriel... que tout récemment - quelques semaines, tout au plus.
      Et je fais connaissance avec cette propagande délirante (où l’élevage n’a pas pour but la mort des animaux, ou des espèces ont choisi la domestication,... De fait, l’existence même d’une Jocelyne Porcher, la teneur de ses écrits et leur écho me semble constituer une redoutable pièce à charge contre l’élevage et l’exploitation animale) à travers le soutien et la promotion que lui apportent des militants anti-industriels.

      Quant au salariat, et à l’esquisse de pastiche qui précède - je pense désormais qu’une partie au moins des militant-e-s anti-industriels actuels, au vu de la sorte de raidissement idéologique radical dont ellils ont fait montre à plusieurs reprises, sitôt que confronté-e-s non pas à un refus de critiquer la société industrielle , mais à une critique étayée de quelques uns des arguments plus que discutables auxquels ils prétendaient recourir pour le faire , est à deux doigts de promouvoir, à la virgule près, un tel discours, si elle ne l’a pas déjà fait.

    • Le film de Jean-Louis Le Tacon « Cochon qui s’en dédit » (#1979) est visible en ligne, ne le ratez pas.
      https://www.youtube.com/watch?v=Mrbqm7b2XmM


      C’est l’histoire il y a déjà 35 ans d’un jeune couple englué dans l’industrie tortionnaire du cochon qui pendant cinq ans tente de rembourser son crédit sans réussir à se payer un salaire. On voit bien (c’est peu de le dire) à quel traitement sont soumis les animaux.
      #super_8

    • Perso je reste sur ma ligne d’#écoumène paysan en végéculture. Société industrielle vs élevage est une fausse opposition, bien trop enfermante. On peut très développer un #écoumène riche, des spirales d’échange en #logique_du_don, des liens d’obligations hors logique libérale (logique qui ne cherche qu’à y trouver son compte jusque dans les liens humains) et une vraie cohabitation avec les animaux, sans s’obliger à forcément les domestiquer pour les bouffer ensuite.
      Quant à Jocelyne Porcher elle dit des choses très pertinentes sur la libéralisation généralisée et la zootechnie, auxquelles je souscris sans réserve, mais pour ce qui est de justifier la domestication à base de don et contre-don ça ne tient pas. Elle avait dit par exemple dans un entretien à Marianne :

      Elle aime élever son veau - et même si donner son veau à l’éleveur ne lui plaît pas et qu’elle voudrait drastiquement renégocier les conditions de ce don, elle y consent pour l’instant.

      Je ne crois pas une seconde que les animaux qui ont consenti à la domestication soient en capacité de comprendre et d’accepter le fait qu’ils le paient finalement de leur vie ou de celle de leurs petits.
      Quand on tue on tue, point, et on assume. On prend la vie d’un animal contre sa volonté, quels que soient les soins non objectivables prodigués par ailleurs, quels que soient les liens d’affect existant par ailleurs. La question à se poser c’est :
      – peut-on faire autrement (#végéculture)
      – si on peut pas, comment se démerder avec la dissonance résultant de l’abattage des animaux élevés

      Ce qui par ailleurs ne m’empêche pas dans le contexte actuel de soutenir par exemple l’élevage de montagne là où je vis, car il maintient un écoumène, dont l’abandon pur et simple transformerait la #ruralité en #agro-industrie d’un côté et parcs « naturels » de l’autre (#wilderness), qui nous amènerait un cran encore plus loin de ce à quoi j’aspire.

    • @Aude V

      merci beaucoup, vraiment, d’avoir pris la peine d’argumenter une réponse.

      (" Je t’en foutrais, de la bouffe sans exploitation animale à deux euros le repas complet de végétaux cultivés par des ouvriers migrants exploités avec le plein de pétrole" : évidemment que je suis d’accord. en fait, de ce point de vue, je pense que la pleine cohérence est un luxe hors d’atteinte ces temps-ci, et que quiconque prétend le contraire se passe surtout de la pommade, ou se bricole des oeillères, appelons ça comme on veut. Que l’on soit végan et/ou opposé à l’exploitation des humains (les deux ne sont pas incompatibles), il y a un gouffre entre ce que l’on peut penser et la possibilité de mener une vie en dehors de cette exploitation.

      Mon soucis est d’abord de ne pas laisser cette contrainte amoindrir la capacité à critiquer.

      on peut supposer qu’il vaut mieux avoir accompagné un animal de sa naissance à son abattage et au pire laissé parler et écouté quelqu’un qui l’a fait (ça devient rare) avant d’avoir de beaux principes de chevalier blanc là-dessus,

      C’est une idée qui me paraît très discutable. d’abord parce que j’ai moi-même vécu quinze ans au contact d’animaux (certes, c’étaient surtout des lapins et des poules, pas des porcs : quant aux vaches et aux chèvres, c’étaient celles des amis ou voisins) que je côtoyais jusqu’à ce qu’ils soient dans mon estomac (j’adorais le foie de lapin ou de volaille), et que je voyais tuer par ma mère ou ma grand mère. (curieusement, je n’aimais pas du tout cela) Je pense que mon « costume de chevalier » n’est donc plus tout blanc. Ensuite parce que justement, le discours que tiennent les personnes qui élèvent et tuent ou font tuer des animaux et le justifient peut aussi en dire long, malgré elles, sur leur mal-être, et la manière dont elles s’accommodent comme elles le peuvent de leur vécu.

      Je dois dire que je ne peux pas lire J ; Porcher sans avoir en tête, à chaque paragraphe ou presque, en sus des échos de ma propre expérience du monde agricole, les réflexions issues de divers auteurs sur la difficulté qu’il y a pour un-e être à concilier la conscience de la souffrance et des mauvais traitements auxquels ellil se trouve contribuer avec sa sensibilité, et une pensée bien que critique, impuissante à changer immédiatement ou même à court ou moyen terme cet état de fait.
      Je pense aussi bien à Stanley Milgram, qu’à beaucoup d’autres. Parce que cette expérience - celle d’un décalage entre ce que l’on subit douloureusement, voir ce que l’on se trouve critiquer et vouloir changer, et ce que l’on se trouve être et pouvoir faire de concret ici, maintenant, tout de suite - est la plus commune qui soit. Qu’il s’agisse de racisme, de genre, de capitalisme ou d’exploitation animale. Je peux être contre, je n’en reste pas moins, pour la société dans laquelle je vis, respectivement un blanc, un homme, de la chair à travail, un humain.

      Je ne défend donc pas en bloc les auteurs anti-spécistes ou égalitaristes. Par contre, je défends la nécessité, pour ce qui est de concevoir et d’entretenir des

      relations de qualité

      , avec qui ou quelque être que ce soit, d’accorder à minima à celleux-ci que leurs vies et leurs intérêts propres ne le cèdent en rien aux miens . Ce qui conduit, par exemple, à juger l’élevage et la domestication plus que problématiques, et à souhaiter construire d’autres formes de rapports avec les autres êtres vivants que ceux que nous avons aujourd’hui.
      Je n’ai pas le pouvoir de faire que cela soit immédiatement possible ici, maintenant. Mais il me semble que, pour qu’il y ait la moindre chance de s’en approcher jamais, il me faut bien oser penser ainsi sans attendre, aussi inconfortable cela puisse être, et que si je passe mon temps à inventer des raisons de m’accommoder des souffrances que je causes, je ne courrai pas le risque de contribuer à leur fin
      Ce qui me conduit à critiquer tout discours prétendant justifier quelque inégalitarisme que ce soit. Comme a critiquer les référence à « la nature ».

      En l’exemple, à la lire (j’y ai passé les deux derniers jours...) il me semble que la critique de l’exploitation animale soit une épine intolérable dans le pied de J. Porcher , alors que la critique, partielle, de cette exploitation, sous son seul angle « industriel », ait pour elle l’avantage de la préserver de devoir questionner les fondements mêmes d’un métier d’éleveur qu’elle a aimé et aime encore. C’est en tout cas une explication qui me paraît plausible de son incapacité à restituer avec un minimum d’exactitude (j’édulcore quelque peu, j’en conviens) et sans se mettre en colère ni témoigner d’un formidable mépris pour ses auteur-e-s le moindre élément d’une telle critique. Cela expliquerait aussi qu’elle ne cesse de présenter cette critique comme à la fois un sous-produit et un cheval de troie des pires projets de l’industrialisation du monde.
      Curieusement, cela me rappelle la manière dont Escudero et ses copains veulent nous persuader que la critique des rapports sociaux de genre œuvrerait pour le transhumanisme.

      J’en viens a penser que les militants anti-industriels - celleux-ci, pour le moins - critiquent ce monde dont ils sont comme chacun-e partie prenante sinon à moitié, à tout le moins très partiellement. Que cette critique focalisée sur la seule société industrielle, parce que partielle, leur est vraisemblablement un réconfort vis à vis de tout ce à quoi ellils ne peuvent pas ne pas contribuer, qui existait avant l’industrialisation et qui perdure encore ; et qu’il leur est plus insupportable encore de se voir dépassés et de voir les limites de leur propos mises à jour, ne serait-ce que sur quelques points.

      Mais en l’état, cette réponse n’est qu’un brouillon.

    • J’ajoute que je suis particulièrement sensible à la manière dont les militants anti-industriels restituent les pensées qu’ils ne partagent pas pour une raison bien précise.

      j’ai fait connaissance avec ce courant de pensée à travers l’Encyclopédie des Nuisances, dans la deuxième moitié des années 1990. A ce moment là, l’EdN a publié les « Essais, Articles et Lettres » de Georges Orwell, que j’ai acquis en souscription (250 fr d’économie, avec ma solde d’objecteur, ça vallait le coup) et le concept de novlangue connaissait son heure de gloire. La notion de falsification caractérisait la société industrielle, et Orwell était mis en avant comme parangon d’honnêteté intellectuelle, en particulier pour son analyse lucide sur la guerre d’espagne, le communisme stalinien, le totalitarisme. (tout ceci nous éloigne quelque peu des élevages, j’en conviens).
      L’année 1997 avait été l’occasion d’une campagne de dénigrement d’Orwell, suite à une prétendue révélation-falsification parue puis démentie dans la presse britannique, puis reprise plus tard (sans le démenti) par la presse française, qui prétendait révéler que, sous les dehors de l’honnêteté intellectuelle et du courage critique, se dissimulait en Orwell un banal et lâche délateur ; l’EdN avait publié une brochure mettant en relation cette grossière calomnie, ses auteurs, ceux qui la propageaient avec son propre propos critique, sous le titre « Georges Orwell devant ses calomniateurs ». Cette campagne démontrait une fois de plus que nous vivions à l’ère du mensonge, du faux sans réplique, de l’ersatz et de la falsification.

      Voilà, entre autres, d’où vient que je ne passe aux actuels militants anti-industriels aucune facilité de cet ordre, que je sois en mesure de constater. Quand Escudero s’imagine pouvoir faire dire n’importe quoi aux auteures qui le gênent aux entournures (et, au vu de son propos, ellils ne manquent pas), et que le milieu anti-industriel n’y voit aucun problème, voire communie dans la falsification, quand Porcher travestit la critique de l’exploitation animale traditionnelle en grand méchant loup industriel, ou pousse l’extravagance et la recherche de justification jusqu’à grimer la domestication en Potlatch ! ... et que le même milieu la trouve décidément très intéressante, j’en viens à penser que l’honnêteté intellectuelle et le courage de penser ne sont pas toujours chez celleux qui se revendiquaient, et se revendiquent toujours, comme héritiers d’Orwell.

      Et qu’accessoirement, quelques menus dévoilements, corrections et rectifications, histoire de contribuer à défalsifier un petit peu la pensée qui se veut critique, sont tout de même encore à la portée de qui veut bien s’en donner la peine.

    • Le contrôle de la reproduction est effectivement à la base de la domestication. Mais on peut aussi envisager d’autres formes de liens avec les animaux, développer une forme d’apprivoisement qui sans être exempt d’intérêt matériel (je pense notamment aux animaux utiles à la limitation des ravageurs en agriculture ou horticulture) n’impliqueraient pas nécessairement de captivité ni de contrôle de la reproduction, ni un tel arasement des instincts comme on en causait ici http://seenthis.net/messages/368600#message368613

      Et à nous ça nous permet de faire ce truc dégueu qu’on appelle l’agriculture et la civilisation.

      Ouais, l’agriculture fait le lit du capitalisme (voire du patriarcat aussi d’après certains auteurs).
      L’horticulture c’est moins enclin à tomber dans ces travers-là http://theanarchistlibrary.org/library/jason-godesky-thirty-theses#toc9

    • @koldobika

      Ce qui est remarquable dans les propos de J. Porcher, c’est le nombre de fois où l’on y croise des phrases qui sonnent, apparemment, à première lecture comme une condamnation sans appel de l’élevage . Comme celle-ci :

      Ce sont les productions animales dans leur ensemble, ici et ailleurs, qui imposent leur logique mortifère à nos existences.

      je la reproduit, parce que j’ai de la peine à y croire :

      Ce sont les productions animales dans leur ensemble, ici et ailleurs, qui imposent leur logique mortifère à nos existences.

      "dans leur ensemble" : il ne s’agit pas d’une condamnation de la seule industrie, apparemment. "Ici et ailleurs" : cela tend à confirmer cette compréhension. "qui imposent leur logique mortifère à nos existence" : on a une condamnation du caractère systémique du problème : les productions animale imposent une logique , mortifère qui plus est, à nos existences.

      Qui ne lit que cette phrase se dit : tient, encore une militante antispéciste qui va nous emmerder à nous faire la morale !

      Sauf que la phrase qui suit contredit radicalement ce propos :

      Les vaches ne vivent pas avec nous, ni nous avec elles depuis des milliers d’années pour le bénéfice des investisseurs, mais parce que la vie est plus belle ensemble que séparés .

      Magiquement, comme il y a une relation entre l’éleveur et l’animal, du point de vue de J. Porcher l’élevage non-industriel ne semble pas comporter, (ou annuler, compenser ?), la moindre part de cette sinistre « production animale » ?
      C’est donc que les animaux n’y seraient pas élevé dans le but d’être consommés ? Parlerait-elle donc d’improbables éleveurs vegans ?
      A moins que le lait, les œufs, la viande, le cuir, les plumes et j’en passe ne soient alors plus des produits . Mais alors que sont ils ? On ne sait plus trop. Une manne ? Des dons ? Des contre-dons ? l’élevage n’était donc pas un travail ? L’animal « élevé » faisait don de son plein gré, à sa guise, de son lait, de sa chair ? Ou en reconnaissance des bons soins ?Comment le sait-elle ? Comment trancher ?
      L’entendement pareil à un cabri, on essaie de faire retomber le raisonnement sur ses pattes. Mais le sol se dérobe ! - et déjà le couteau approche.
      Pour celleux qui mangent, la vie est belle ! Et probablement savoureuse.
      Quant aux savouré-e-s, hélas ! on déplore qu’ellils ne soient plus en mesure de manifester leur sentiment. Mais il est heureusement des bouches pleines qui se font un devoir de parler pour elleux !

    • @aude_v Il n’y a pas que la coccinelle, plein d’animaux peuvent participer à leur façon à une horticulture : oiseaux insectivores, hérissons, crapauds, couleuvres... Pour certains phylogénétiquement éloignés de nous les interactions seront très maigres (le cas extrême étant peut-être le lombric du compost), pour d’autres (oiseaux et mammifères notamment) on peut développer un apprivoisement mutuel mais sans les couper à terme de leur instinct.

      On fait vivre aux animaux qui vivent avec nous la même chose que ce qu’on vit nous

      Oui, et en ce sens le parallèle que fait Lorenz est carrément intéressant.

    • @Aude

      Cette discussion devient intéressante !

      logique de contrat entre femmes pauvres et mecs qui achètent leur ventre ou leur chatte, et on veillera à l’empowerment de tout le monde.

      Ce qui m’a le plus fâché dans cette affaire, c’est qu’Escudero rendait ainsi inaudible la critique féministe radicale qui m’a tout de même semblé articuler bien mieux que lui critique du sexisme et critique du libéralisme, y compris chez les féministes : puisqu’il la décrédibilisait en bloc, tout en se posant lui en chevalier blanc, pour le coup ! bref, de sa part, c’était dégueulasse à plusieurs niveaux. Sa manière de cibler Delphy m’a semblé particulièrement révélatrice.

      Je suis presque toujours du côté du manche. Sauf peut-être comme chair à travail. Encore que ce soit très relatif, et que j’en ai re-trouvé un il y a quelques mois.
      C’est confortable : c’est à dire que, si l’on essaie de penser quand même un peu, c’est donc très inconfortable.
      Comme l’écrivait l’excellent Albert Memmi il y a quarante ans à propos du sexisme sous le titre « plaidoyer d’un tyran » : à chaque fois que je l’ouvre ou presque, il me faut « souhaiter que l’on considère tout ce que je vais dire ici comme éminemment suspect ».

      je ne suis pas en désaccord avec la suite sur l’élevage et les animaux domestiques.

      Le fait est pour moi que vous comme moi nous arrivons après des millénaires de domestication. Comme nous arrivons après des millénaires de sexisme, ou des siècles de colonialisme et de racisme, et d’autres formes de discriminations... Nous en sommes pétris, et le monde a été façonné par ces hiérarchies.
      Quand Porcher écrit que « les productions animales dans leur ensemble, ici et ailleurs, [...] imposent leur logique mortifère à nos existences . », elle dit quelque chose qui me semble très profond.
      Je pense que la domestication est une catastrophe en son genre. Mais c’est une catastrophe qui par sa durée a produit un monde et des espèces.

      Je pense que nous commençons à peine d’en prendre conscience, et d’en mesurer les conséquences - tandis que l’industrialisation que nous avons aussi produit prononce à sa façon la liquidation de ce monde.
      Tout comme la profondeur du conditionnement de genre, ou la résistance du caractère systémique du racisme ne cessent de se montrer bien pires que nous ou d’autres avant nous on pu le penser.

      Je ne me pense pas particulièrement « thanatophobe », si je comprends ce que ce terme recouvre. Mais je pense qu’administrer la mort, dominer, est toujours catastrophique, y compris pour l’esprit de qui en est bénéficiaire. Et que tout discours humain tendant à légitimer l’administration de la vie des animaux « doit être considéré comme comme éminemment suspect ». Je pense que le Pouvoir - et le pouvoir, c’est toujours celui de contraindre, de faire souffrir ou in fine de mettre à mort - est catastrophique aussi chez qui l’exerce.

      Il y a une expression de James Baldwin qui me semble éclairante. Confronté à un antiraciste blanc, il avait eu cette expression : « Ce n’est pas tout ce que vous avez pu me faire qui vous menace.
      C’est tout ce que vous avez fait à vous-même qui vous menace . »

      En effet, les animaux d’élevages ne peuvent pas « être protégés et se reproduire à loisir ». C’est une évidence.

      Mais il serait bon de reconnaître que ce sont les êtres humains qui sont les seuls responsables et les seuls bénéficiaires de cet état de fait. Et que cette relation pose des problèmes qui dépassent la seule question des relations aux animaux non-humains.

      Pour ma part, je peine à concevoir qu’on condamne la domestication des humains et qu’on approuve dans le même temps celle des animaux. Il me semble que l’une a très probablement servi de matrice pour l’autre. Qu’en tout état de cause les deux sont vraisemblablement plus étroitement liées que l’on est invité à le penser communément, contrairement à ce que prétend la vieille idéologie humaniste qui utilise l’animal comme repoussoir.
      Qu’on ne met pas des individus face à des situations de dissonance comme celles que l’élevage et la domestication impliquent sans conséquences émotionnelles et psychiques qui se manifesteront aussi en dehors des situations d’élevage - ou des repas. Que nous n’apprenons pas à manger de la viande sans une certaine éducation à l’insensibilité et à la chosification d’êtres vivants.

      Que la civilisation et donc son agriculture, telles qu’elles se sont constituées au cours des millénaires qui nous ont précédé, méritent amplement, par bien des aspects, d’être qualifiées de « trucs dégueus ».

    • @Aude_V

      à propos de l’argument de Porcher : j’entends bien ce qu’y trouvent les éleveurs, ou des éleveurs plus encore que d’autres, en terme relationnel. Je le vis aussi.
      Il y a eu et il y a encore chez moi - chez nous - des « animaux de compagnie ». Si cela ne tenait qu’à moi, il n’y en aurait pas. Mais lorsqu’il y en a, je suis incapable de ne pas établir une relation forte avec eux.

      Le problème étant que cette relation n’est possible que dans un cadre de société organisée autour de l’élevage, de la domestication, et de tout ce qui s’ensuit.
      Qui souhaite cette relation ne peut pas dans le même temps refuser les abattoirs, les castrations, les femelles à lait et à portées, etc. Les deux sont indissociables.

      Qui souhaite cette relation ne peut pas se contenter du côté face, relationnel, de la pièce, et doit, d’une manière ou d’une autre, faire avec son côté pile, froidement gestionnaire, et sanglant.

      Présenter cette relation comme essentielle, indispensable, ou sa perte comme une catastrophe, est à mes yeux un argument pour rendre plus acceptable le carnage qui va avec, ou pour prétendre qu’il est vain de le critiquer, et en faire une sorte de fatalité. Ce que ne cesse de dire Porcher, c’est que les domestiqueurs souffrent eux aussi, mais que nous ne serions pas humains sans carnage.

      Je tiens que nous ne serions pourtant pas moins vivants et capables de sentiments et de relations - certes autres - si nous y mettions fin.
      Et je pense qu’"humain" est effectivement un terme indissociable d’un certain rapport aux animaux, d’une hiérarchisation. En cela je suis d’accord avec plus d’un antispéciste. Si « humains » désigne ce que nous sommes parce que nous nous distinguons ainsi des animaux, j’ai assez fortement envie d’essayer d’être autre chose.

      Dans « refuser d’être un homme », Stoltenberg parle de ces hommes qui veulent bien critiquer le patriarcat, mais qui veulent y rester des hommes. Et il en conclut qu’il s’agit d’une éthique de l’inaction. Parce qu’ « homme » désigne justement la place de privilégié au sein du patriarcat. Si je veux vraiment soutenir le combat féministe, je dois renoncer à « être un homme », à ce qui fait socialement de moi « un homme ». Thiers-Vidal dit sensiblement la même chose quant il parle de trahison. Je crois avoir compris que les féministes matérialistes tiennent des propos similaires. (Et si j’en reconnais la nécessité, je ne prétends pas y être parvenu).

      De même, en matière de racisme, l’on commence à comprendre que blanc et noir, ou arabe, ou musulman, sont des catégories politiques. Et qu’il ne s’agit pas seulement « de ne pas être raciste », mais encore de trahir sa blancheur . Enfin, je crois que du côté des amis de Charlie, on ne comprend pas très bien cela.

      Je pense que, si nous voulons enfin regarder en face la domestication, nous n’aurons pas d’autre choix que de décider aussi de renoncer à être des « humains » - ces « humains » qui ne se sentent tels qu’en opposition aux animaux sur lesquels ils s’arrogent tout pouvoir, et qui ont une peur sans nom de déchoir s’ils renoncent à leurs privilèges...
      Mais je sais à quel point « renoncer à être des humains » est entendu partout comme le nec plus ultra de la barbarie. Je sais que ça fait bien plus bizarre encore que le propos de Porcher. Inhumain, y’a pas pire.

      Je tiens notre civilisation, notre humanité pour le summum de la barbarie. Un summum qu’elle ne cesse de pousser plus haut.

    • je ne crois pas qu’elle puisse être remplacée par celle avec des animaux de rencontre aussi communicants que des insectes, oiseaux, reptiles.

      insectes et reptiles non mais oiseaux oui, et pas juste des animaux de rencontre. Tous les animaux ne sont pas migrateurs et ne sont pas que de passage, beaucoup vivent dans nos jardins, on peut les voir régulièrement. Pour ne prendre que des exemples proches, quand je bêche en automne il y a souvent un rouge-gorge qui s’approche, je me dis que c’est peut-être un descendant de celui que ma mère avait recueilli en janvier 1988 et qui revenait souvent nous voir ensuite. Un de mes oncles avait nourri un jeune merle paumé, une fois adulte et autonome il revenait souvent le voir. Mon grand-père avait tenté une approche avec un écureuil, ça avait presque marché.
      Mais sinon effectivement ces relations-là n’ont pas vocation à remplacer celles avec des animaux domestiqués car les animaux y restent sauvages et disposent de leur liberté d’aller et venir, de leur reproduction, de leur instincts.
      Tu me diras ce sont des relations exemptes d’obligations mutuelles, mais de mon point de vue ces relations-là doivent avoir lieu entre humains doués d’entendements compatibles.

    • S’engager réciproquement me semble plus profond et je trouve qu’il y a dans cette exigence-là de quoi changer plus de choses qu’en refusant d’entretenir des relations avec les animaux.

      Pour moi s’engager réciproquement (chose éminemment souhaitable et nécessaire dans tout lien) ne peut être fait qu’entre humains partageant un même entendement et un moyen de se comprendre (et un niveau suffisant d’équité, plus que d’égalité formelle). Avec un animal comme tu le dis la réciprocité est douteuse. D’autant plus s’il s’agit qu’on le bouffe à un moment.

    • Pense aussi à la relation d’élevage avec un chien. Celui-là on ne le bouffe pas mais on le rend stérile, contraint ses rapports sexuels ou tue ses rejetons. Parce que c’est comme ça qu’on élève les animaux, en substituant notre administration aux dangers qui les guettent dans le milieu naturel.

      C’est un cas très poussé d’arasement des instincts. Avec l’ancêtre non domestique du chien par exemple ça se passe pas comme ça. un chien c’est une sorte d’ado, un loup qui ne deviendrait pas adulte http://rue89.nouvelobs.com/2015/01/24/nallez-plus-voir-les-loups-les-chiens-les-hommes-comme-avant-257253 (pas mal d’éléments intéressants dans cet article)

      Pour ma part plutôt que l’égalité formelle entre individus je préfère la recherche d’équité, et des liens fondés sur l’entraide et le respect de la parole donnée.

    • La seconde découverte récente qui nous éclaire sur ce contexte, c’est qu’on sait depuis 2013, toujours grâce à l’analyse de l’ADN, que le chien n’est pas ancien de 8 000 ou 10 000 ans comme on le croyait mais qu’il a été créé il y a 30 000 à 36 000 ans, soit 26 000 ans avant l’agriculture et l’élevage.

      Ça veut dire d’abord que le chien a été créé 26 000 ans avant le passage du mode de vie de chasseur-cueilleur au mode de vie sédentaire, 26 000 ans avant la civilisation en fait. Ça veut dire aussi que l’homme s’est baladé avec des chiens pendant 26 000 ans. Et même que, probablement avant ça, l’homme se baladait avec des loups pour chasser.

    • Suite à l’article de JP

      La viande heureuse
      Par Enrique Utria, spécialiste de philosophie morale
      http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/09/01/la-viande-heureuse_4742612_3232.html

      « Un animal qui vous offre sa vie », tel serait l’animal d’élevage. Le steak haché serait une forme de cadeau de Noël offert par la vache. Les animaux se rendraient à l’abattoir en camion pour que nous leur fracassions le crâne avec un pistolet percuteur. La « sociologue de l’élevage » Jocelyne Porcher, interrogée par Le Monde (« L’industrie porcine use et abuse des animaux sans contrepartie », Le Monde du 29 août), ne mobilise rien de moins qu’une théorie du don, à la façon de Marcel Mauss, pour légitimer l’abattage de milliards d’animaux.

      Nous offririons aux animaux une vie bonne et, en retour, dans une sorte de Potlatch, ils feraient don de leur vie. Cette fiction est bien sûr absurde. Nous nous approprions leur vie, choisissons le jour de leur mort et déclarons « nécessaires » leurs mutilations en fonction de nos intérêts. Dans ce contexte, on comprend que la sociologue de la viande, dans sa théorie du don, insiste davantage sur l’idée de dette que de don.

      Puisqu’il prend la vie de son cheptel, nous dit-on, l’éleveur lui doit une bonne existence. Cette idée est probablement partagée par les « amis des animaux ». Il n’est pas déraisonnable de penser un devoir de gratitude envers les êtres qui éclairent notre existence. Mais de là à imaginer que les abattoirs sont la condition de possibilité de tout compagnonnage avec les animaux, il y a un pas pour le moins étrange.

      après c’est paywall...

    • Je pense que la philosophie végane est née de l’éloignement au monde naturel. Dès que tu te rapproches un peu de la verdure, tu dois gérer des interactions avec le monde vivant non humain, et ça concerne pas juste les jolies rencontres avec les écureuils. Ça veut aussi dire gérer les bestioles qui mangent ce que tu plantes ou les rongeurs qui grignotent dans les murs et t’empêchent de dormir la nuit. Une fois que t’en en es à tuer des rongeurs, pourquoi pas des lapins ?

    • La mort à un coté très définitif tout de même @aude_v . Perso je suis d’accord avec les problèmes soulevés par les stérilisation, mutilation, captivité, contrôle de la sexualité, enclosure.... Comme je suis encore dans Federici et que je tag #dressage et #domestication pour parler de l’oppression des femmes ces mots raisonnent particulièrement pour moi en ce moment. Federici parle d’ailleurs dans un chapitre de la philosophie de Descartes et du lien entre cette mentalité mécaniste et de ce qu’ont subit les femmes et les travailleurs pauvres qui est comparable à ce que les non-humains domestiqué ont pu subir avec la mentalité capitaliste. Je vais copier ce passage plus tard car il aurais sa place ici à mon avis.

      Je précise que je mange de la viande et que j’ai un chat en captivité en appartement qui est stérilisé et équipé d’une puce RFID alors je ne suis pas antispéciste mais quant même j’ai des scupules et je sais que je ne suis pas raccord avec ce que je ressent de l’individualité des non-humains. Et j’en ai honte mais probablement pas encore assez pour parvenir à réprimer mon désir de rognons de veau sanguinolents ou de compagnie féline. Bref les végétariens et végétaliens peuvent me conspuer car il y a de quoi.

      La mise à mort c’est la dernières des violences, la négation de la vie dans les individus non-humains. On (les êtres vivants) peut toujours s’accommoder d’une vie affreuse (on s’habitue à tout, même à la domesticité), mais la mort à part quant elle te délivre (ce qui doit arriver à beaucoup de non humains qu’on élève dans les conditions abjectes que l’on sais) les vivants ne la désirent pas.
      Imaginons une gentille paysannerie respectueuse qui prendrait soin avec amour de ses brebis, truies, vaches et poules. Pourquoi ces êtres qui ont eu une chouette vie pleine d’amour voudraient qu’on les assassinent en pleine fleur de l’age ? On veux mourir quant on en a assez de la vie et les non-humains ne disent pas qu’ils veulent qu’on les tuent. Nous par contre ca nous arrangent bien de se faire croire que « c’est pour leur bien » ou qu’illes « consentent à l’oppression »...

      Ca ne me semble pas possible moralement de dire que des êtres vivants donnent leur vie volontairement pour qu’on se tapent une bonne bouffe ou qu’on maintienne nos cultures de terroirs.
      Ca me rappel ce que j’avais mis sur le #consentement et la métaphore de l’âne et de la carotte : http://seenthis.net/messages/396369#message396385

      edit - je ne veux pas dire qu’il n’y a pas des raisons compréhensibles pour le maintiens de certains types d’élevages. Mais la mise à mort, ca devrais être réservé aux non-humains agonisants. La viande devrait être celle d’animaux morts par accident, ou de maladie ou de vieillesse.

      @nicolasm j’avais pas vu ton message avant d’envoyer le mien. Je ne veux pas faire de yaka-fokon, je suis citadine et j’ai pas de notion de la masse de travail certainement dantesque que demande la terre. Mais peut être qu’héberger (ou favorisé les conditions d’installation libre) des chats pour qu’ils chassent les mulots, des rapaces et renards pour les lapins, des hôtels à insectes prédateurs de chenilles bouffeuses de patates... Peut être une approche plus animal-friendly qui permettrais de concilié la cohabitation des humains avec les non-humains.
      Le truc c’est que les humains ont les moyens techniques et morales de faire autrement alors je pense que c’est pas mal de chercher à moins tuer quant il y a des alternative. Un faucon ne va pas avoir d’alternative au fait de manger des rongeurs, nous par contre on peu choisir de manger des aliments qui ne causent pas de mort. Choix que je ne fait pas moi même par pure paresse et égoïsme alors je ne juge pas les tueurs de taupe et de lapinou ni même les mangeurs de chats et chiens et je ne cherche pas à faire de reproches à qui que ce soit.

    • hi hi @mad_meg je viens tout juste de commencer à lire Federici qui était à la maison depuis un an (manque de temps) et j’ai été tentée de faire le même rapprochement. Je ne suis pas encore végétarienne mais je consomme très peu de viande, de moins en moins et je pense qu’à un moment je m’en passerai totalement. J’aurai par contre plus de mal à me passer de fromage.

    • @odilon c’est totalement passionnant « Caliban et la sorcière » il m’en reste encore un morceau mais vraiment ca me retourne la tête tout ce qu’elle dit sur la renaissance. Tout ce que j’ai appris sur l’histoire « moderne » est complémentent changé. J’ai hâte qu’on en discute :).
      Sinon pour la viande je pense pouvoir m’en passé je l’ai fait quelques mois mais alors les oeufs et les laitages c’est pas possible. J’aime pas beaucoup de légumes alors des patates aux patates tous les jours ... et sans beurre .... pffff et puis des gâteaux vegans j’ai déjà gouter et ca m’a mis le moral dans les chaussettes.
      Mon objectif c’est deja de baisser ma conso en cadavres, ca sera deja pas mal par rapport à mes critères moraux. Par contre les oeufs et les laitages je ne pense pas ni vouloir ni pouvoir les supprimer ni même les réduir. Ma courte periode sans viande à été très ovo-fromagère d’ailleurs. En plus par rapport à la paysannerie et la culture tu terroir ca ne me semble pas souhaitable car c’est justement là que je peu suivre les discours de @aude_v, @nicolasm et JP. En tant que « fromage-qui-pue » il est pas question qu’on me prive de Saint Marcellin !!! Par contre avec mon histoire ovo-lactée il n’y a que les femelles qui vont être maintenu en captivité les mâles deviennent inutiles... Ah si on pourrait les saigner de temps en temps comme les MassaÏ le font avec les watusi. On peut faire du boudin sans tuer les bêtes, comme on le fait pour les don du sang et puis ca rendrait l’élevage des mâles un peu interessant car sinon ils vont être tuer à la naissance vu que les mâles ca ne produit pas grand chose d’intéressant à part de la violence.

    • Que moi j’ai toujours adoré les légumes et les fruits toutes catégories et les céréales. Les œufs aussi je m’en passe très bien (d’ailleurs je ne digère que les œufs extra frais, ça limite). Je ne consomme pas de lait frais non plus. Il n’y a que le fromage, genre langre, munster, et les biques dont je suis addicte.

    • @mad_meg

      [...]Peut être une approche plus animal-friendly qui permettrais de concilié la cohabitation des humains avec les non-humains.

      J’ai beau avoir deux chats, on a des soucis de souris, et les chats ne semblent pas efficaces quand les souris sont dans les murs ou le plafond. Je n’essaie pas de me justifier (j’ai pas de soucis moraux avec le fait de piéger des souris à la tapette) mais c’est plus facile d’adhérer à ou de concevoir une morale dans laquelle on ne tue pas quand on habite un désert urbain, où les km2 de bétons autour et les quelques mètres de hauteur aident à ne pas se soucier de la cohabitation avec les autres animaux.

      Le truc c’est que les humains ont les moyens techniques et morales de faire autrement alors je pense que c’est pas mal de chercher à moins tuer quant il y a des alternative.

      C’est un argument que je trouve assez faible. Et personnellement, je me demande bien ce que répondrait une végane à un pro-vie qui tiendrait le même raisonnement.

    • Chez moi se sont les chats qui foutent la zone dans le potager. En grattant la terre ils virent les semis et les jeunes plants, grrr. Ou alors ils se battent. Cet été deux matous du coin m’ont détruits des pieds de haricots, de maïs et mon unique pied de bourrache, grr grr. Depuis que je n’ai plus de chat, je donne à manger aux oiseaux du ciel et je fournis une pataugeoire (beaucoup de moineaux, un couple de tourterelles, plus ponctuellement des mésanges noires, des rouge-queues, un rouge-gorge, un accenteur mouchet) et c’est un beau spectacle qui me ravit. Il y a aussi pas mal de merles dans nos jardins, dont une merlette pas sauvage du tout.

    • Effectivement, ça n’utilise que des amendements végétaux. L’exemple le plus abouti que je connaisse est en Finlande, ils combinent brf et purin d’ortie (amendement de fond et purin à effet rapide), et cultivent une grosse proportion de fabacées et légumes racines, à la fois pour l’apport protéique/calorique et pour minimiser les besoins en azote.
      EDIT : précédemment cité ici http://seenthis.net/messages/219945#message222265

    • @Aude v

      Pour ce que j’ai pu en lire (principalement du côté des auteurs des "cahiers_antispécistes), ça n’est pas la seule mort qui est centrale, mais bien plus le fait de faire délibérément souffrir, et de considérer que le plaisir des humains justifie les souffrances qu’ellils infligent aux être non-humain. Par voie de conséquence, que les humain-e-s traitent les animaux en choses administrables - ce qui est aussi une définition de l’élevage, même traditionnel.

      Par ailleurs, je suis d’accord avec Mad meg : la mort a tout de même quelque chose de définitif .
      (Je ne sais pas de quand date l’expression « commettre l’irréparable » ?)
      j’ajouterai que cette idée confortable, selon laquelle la critique du spécisme pouvait être une conséquence de la peur de la mort telle que peut la produire la société industrielle me semblait crédible à moi aussi ... il y a quinze ans.

      Sur ce point, comme sur d’autres, après avoir lu chez certains auteurs antispécistes des textes dont la teneur, et surtout la rigueur m’a d’abord surpris, j’ai changé d’avis. Bien que je ne sois pas toujours d’accord avec elleux, (ne serait-ce que parce que je ne me définis pas comme « utilitariste ») je tiens des gens comme Bonnardel, Reus ou Olivier, par exemple, pour des intellectuel-le-s respectables, dont les propos méritent d’être critiqués avec des arguments tout de même mieux fondés que ce genre d’à priori - qui me semble tout de même un peu trop facile et teinté de mépris.

      Mais il y a quinze ans, je voyais la critique du spécisme comme un truc d’urbains qui ne savaient évidemment rien des « réalités de la vie à la campagne » et qui avaient probablement peur de la mort et de la violence.
      J’en aurais parlé comme J. Porcher, probablement.

      Depuis, c’est mon regard sur la manière dont je m’accommodais alors des souffrances infligées aux animaux qui a changé. Sur ce à quoi j’avais recours pour me dissimuler une réalité dont j’étais pourtant témoin. Comment, afin de ne pas être en contradiction avec moi-même, j’en faisais une douloureuse nécessité, une fatalité, un indépassable et sinon un impensable, du moins un objet dont la pensée ne pouvait qu’être un loisir inepte.
      Comment je naturalisais le fait que l’humanité considère acceptable, massivement, et banal, justifié, évident, nécessaire , de faire souffrir et mettre à mort les animaux.
      Comment, enfin, traiter à priori les antispécistes en enfants gâtés de l’industrie me permettait de protéger mes propres subterfuges, en me donnant une bonne raison de ne pas courir le risque de les confronter vraiment à leurs propos, que je ne lisais pas. Comment ce mépris me venait surtout de ce que l’idée même d’antispécisme m’était intolérable parce qu’elle venait justement me mettre en face de mes propres mécanismes de rationalisation - je n’aimais pas faire souffrir, je condamnais cela, mais ma vie de petit français de la fin du XXème siècle - j’aimais manger fromages et viandes, et porter des vêtements ou chaussures en cuir -impliquait que l’on fasse souffrir des animaux, beaucoup d’animaux, : il fallait bien que ce soit pour une bonne raison , le contraire n’était tout simplement pas possible .

      Comme ne cesse de le développer depuis plus de dix ans de façon désarmante de franchise Porcher, pour les humains qui en sont responsables, il faut que la mort des animaux ait du sens .
      Mais elle n’exprime là qu’un voeu : loin de justifier quoi que ce soit, pareil acharnement dans une telle voie, couplé aux impossibles acrobaties intellectuelles que demande de calquer là dessus une théorie du don qui n’avait rien demandé, me semble ne faire que mettre en lumière la violence de la dissociation qu’elle même éprouve, et la nécessité impérieuse de la résoudre.

      C’est à cette facilité qui était alors la mienne que je me refuse depuis plusieurs années sur cette question - ainsi que sur quelques autres. )

    • « C’est un argument que je trouve assez faible. Et personnellement, je me demande bien ce que répondrait une végane à un pro-vie qui tiendrait le même raisonnement. »
      @nicolasm juste sur ce point, je vais répondre à ce « pro-vie » fictif.
      Un fœtus n’est pas encore un être, il est une partie du corps de la génitrice et un tas de cellulles en develloppement. Et on n’avorte pas à partir d’un certain stade de develloppement. C’est à mon avis comparable à une sorte de parasite car il suce le sang de son hôte. C’est à l’hôte de faire le choix de porter ce tas de cellules en formation. J’ai jamais entendu ni lu de vegan dire qu’il fallait protéger les ténias et les douves du foie et en abrités dans son organisme parce que c’est des êtres vivants et qu’il faut les proteger de l’extinction. Si tu me trouve de la doc la dessus je veux bien mais je suis sceptique. Le foetus est dépendant d’une tierce pour sa survie et cette tierce personne est libre de la décision de savoir qui va squatter son corps.

      Ta comparaison ne marche pas. Il y a maintenant des fermes à mères porteuses en Indes et je ne pense pas que les vegans défendent cette pratique. Ca m’étonnerais même. Et je ne voie pas trop l’analogie entre foetus-génitrice et animal domestique-fermier

      @aude_v bon l’argument des croyances religieuses je pensais pas que tu me le sortirais. Je pense beaucoup de mal des religions elles servent justement de « lave-conscience » aux oppresseurs. La religion ca permet la legitimation de l’esclavage, de l’asservissement, les guerres, tortures, executions et j’en passe. Avec la religion on peu même défendre le cannibalisme alors la mise à mort de non-humains on peu aussi.
      Et pour ceci ;

      Dans un élevage de production laitière, les mâles passent à la casserole plus ou moins jeunes. Donc le fromage aussi, c’est la mort anticipée des animaux.

      j’en avais parlé aussi et j’avais proposé la technique des massaï avec les watusi. Je remet la partie ou je disait cela juste avant ta réponse. Je m’auto-cite désolé pour l’impolitesse ^^ :

      Par contre avec mon histoire ovo-lactée il n’y a que les femelles qui vont être maintenu en captivité les mâles deviennent inutiles... Ah si on pourrait les saigner de temps en temps comme les MassaÏ le font avec les watusi. On peut faire du boudin sans tuer les bêtes, comme on le fait pour les don du sang et puis ca rendrait l’élevage des mâles un peu interessant car sinon ils vont être tuer à la naissance vu que les mâles ca ne produit pas grand chose d’intéressant à part de la violence.

      Alors j’ai conscience que c’est utopique cette histoire de Watusi (et ca doit pas plaire aux vegans) et je parle toujours d’élevage dans des conditions de petite élevage comme ce que tu défend. Je ne cherche pas à défendre une exploitation industrielle des non-humains. Et je ne propose pas de faire des usines à sang de bœufs qu’on mettrais sous perfusion H24. On peu faire pas mal de choses sans mettre à mort et sans causer de souffrances si c’est la volonté qu’on a. Avec cette triade lait-ovules-sang on a de quoi rester gourmands, préserver le terroir et la culture paysanne, avoir des relations plus saines avec les non-humains qu’on garderais avec nous et tout ca sans les tuer.

      Federici parle de la tristesse des paysannes quant leur mari prenait leur cochon qu’elles avaient nourri et choyer pendant des années pour l’abattre. Elle explique que la mise à mort des animaux de ferme est aussi une forme de violence fait aux femmes car se sont elles qui s’occupent de ce type d’animaux. Le porc est nourri avec les reste des repas dont la femme était à charge, et dans les rites de mise à mort du cochon les femmes sont contraintes de préparé le cadavre de leur vieil ami pour le servir à la famille. Féderici dit que c’etait une grande souffrance pour ces femmes. J’ai la flemme de copier ce passage maintenant mais je vais le faire ce soir. :)
      Bonne journée

    • La mort n’est pas un drame quant elle est la délivrance d’une souffrance et je l’ai mentionner dès le debut. Dans le contexte d’un élevage paysan liée au terroir et qui prend soin de ses bêtes comme celui que tu semble defendre a mes yeux, les bêtes n’ont aucune raison d’être délivré de leur souffrances puisqu’elles ne souffrent pas. C’est dans l’industrie qu’elles souffrent et a part pour les malades et vieillards épuisés, il n’y a pas de raison de les euthanasier. Bon comme tu as dit que tu te retirais je laisse aussi la place. Et je reconnais que je suis mal placé pour parler de ce sujet vu que je suis une citadine et que mon expérience dé tout ce qui est agricole passe grossomodo par @seenthis
      Bonne journee a toi faut que je retourne bosser aussi ?

    • Ah bon y a p’u personne ?

      J’explique mieux mon parallèle véganisme / pro-vie :

      Dans les deux cas on a des personnes qui disent qu’on ne peut pas prendre le droit de tuer un être vivant (foetus / animal non humain), qui ont notamment pour argument qu’on peut faire autrement (adoption / végéculture + végétalisme). Les deux se basent sur des considérations morales, et techniques (système nerveux, ou autres développements).

      Je dis pas que les deux positions vont de pair, juste que j’aimerai qu’un végan comprenne que ma position face au véganisme peut être comme leur position face aux anti-avortement.

    • franchement @nicolasm ta comparaison me blesse. Pour moi un fœtus n’est pas encor vivant comme l’est un animal et il est physiquement dépendant de la génitrice. alors qu’un animal n’est pas dépendant physiquement d’un agriculteur à part peut être des vers parasites de l’intestin.
      Bonne soirée.

    • Ah désolé mon but n’est pas de blesser. Je fais juste un parallèle de démarche, pas de valeurs. Mon but n’est pas débattre de si l’animal mérite la vie ou si le foetus mérite la vie. On peut tout à fait être végan et pro-choix, je dis juste que les végans pourraient envisager le débat avec les omnivores en pensant à un débat avec des pro-vies pour pouvoir comprendre ce que se joue dans le débat, car souvent les végans sont pro-choix et donc se retrouvent dans l’autre rôle (celui de l’omnivore) vis à vis d’un pro-vie (défense d’un être vivant incapable de se défendre lui même).

    • Moi aussi je suis choquée. La grande majorité des végétariens ne consomment pas de viande par choix, un choix qui n’engage que soi-même et que je trouve parfaitement respectable. Les anti-avortement imposent leur point de vue aux autres, se sont des militants, leur point de vue n’est pas respectable parce qu’il ne respectent pas les choix différents et ne prennent pas en considération les situations comme une grossesse due à un viol. Je trouve aussi irrespectueux de vouloir imposer le régime omnivore à ceux qui ne veulent pas, en utilisant des arguments à la noix. Si la mort violente n’est pas un drame, alors allons-y, ils restent quelques éléphants et rhinos à flinguer, sans parler des primates, bref, à quoi bon s’en soucier, le projet c’est le bon plaisir de l’humain (enfin pas tous, faut pas exagérer non plus) rien que l’humain et le reste du monde à son loisir. Personnellement je trouve pas le projet folichon. Historiquement les humains n’ont jamais consommer de viande autant qu’aujourd’hui, c’est un phénomène récent. Il n’y a pas si longtemps, les familles paysannes tuaient le cochon une fois l’an et c’étaient à peu près la seule viande qu’elles mangeaient. Et quand je dis famille, c’est pas un couple et ses deux enfants, c’est les grands-parents, les oncles et tantes, etc... Je ne comprends que pour défendre l’élevage, on dénigre les végétariens, c’est absurde, pour moi c’est pas une argumentation valable.

    • Au stade où on en est, ll va bien falloir envisager que la mort joue un rôle important si l’on veut remettre en cause l’élevage : la situation dont on hérite ne permet pas d’en faire abstraction

      Supprimer l’élevage aujourd’hui, c’est certainement mettre en œuvre un plan d’extermination à une échelle industrielle...

      (C’est le même paradoxe qui fait que le démantèlement de l’industrie nucléaire est une activité qui ne peut être qu’industrielle et confiée à des nucléaristes)

    • Je repasse par ici. C’est chouette cet outil que tu prépare @archiloque !
      Cette discussion m’a permis de franchir le cap du végétarisme avec quant même une exception menstruelle car quant j’ai mes règles j’ai trop envie de foie. je dois manquer de fer. Je me souviens avoir vu des videos de crudivores posté sur seenthis et il y avait aussi des instincto-pates ou -peute (je me souviens plus) qui mangeaient à l’instinct. Ça consistait à mettre plusieurs fruits différents autour de soi, de les renifler et de manger ce qui nous semble avoir la meilleur odeur. Ca m’avait plu.
      A cause du manque de fer j’ai essayé avec les pois chiches (parait il riches en fer) mais c’est pas pareil ca me frustre alors que le reste du temps la viande ne me manque pas du tout, voire me dégoute. En 40 ans j’ai mangé tellement de cadavres que je suis pas à un foie près. Et peut être qu’a la ménopause j’aurais plus ces envie sanguignolantes ^^

      C’est l’occasion de faire un nouveau mot qui va pas servir beaucoup, #Végétaro-menstruo-hépathophagisme hihi ca peu aussi faire un bon titre de film d’horreur

    • @mad_meg pour assimiler le fer des pois chiches, mange du boulghour avec et non traité car il faut le plus complet possible, le son de blé contient 16 mg de fer/100 g
      A propos, le pain complet en boulangerie contient plus de produits chimiques qu’un pain blanc.

  • The Brain vs Deep Learning Part I : Computational Complexity — Or Why the Singularity Is Nowhere Near | Deep Learning
    https://timdettmers.wordpress.com/2015/07/27/brain-vs-deep-learning-singularity

    [Ray] Kurzweil ... stresses that once the hardware level is reached, first “simple” strong AI systems will be developed quickly. He sets the date for brain-like computational power to 2020 and the emergence of strong AI (first human like intelligence or better) to 2030.
    ...
    Ray Kurzweil based his predictions on the neuroscience of 2005 and never updated them. An estimate for the brains computational power based on 1% of the neuroscience knowledge does not seem right. Here is small list of a few important discoveries made in the last two years which increase the computing power of the brain by many orders of magnitude:

    It was shown that brain connections rather than being passive cables, can themselves process information and alter the behavior of neurons in meaningful ways, e.g. brain connections help you to see the objects in everyday life. This fact alone increases brain computational complexity by several orders of magnitude
    Neurons which do not fire still learn: There is much more going on than electrical spikes in neurons and brain connections: Proteins, which are the little biological machines which make everything in your body work, combined with local electric potential do a lot of information processing on their own — no activation of the neuron required
    Neurons change their genome dynamically to produce the right proteins to handle everyday information processing tasks. Brain: “Oh you are reading a blog. Wait a second, I just upregulate this reading-gene to help you understand the content of the blog better.” (This is an exaggeration — but it is not too far off)

    Deep learning is currently the most promising technique for reaching artificial intelligence. It is certain that deep learning — as it is now — will not be enough, but one can say for sure that something similar to deep learning will be involved in reaching strong AI.

    Deep learning, unlike other applications has an unusually high demand for network bandwidth. It is so high that for some supercomputer designs which are in the TOP 500 a deep learning application would run slower than on your desktop computer. Why is this so? Because parallel deep learning involves massive parameter synchronization which requires extensive network bandwidth: If your network bandwidth is too slow, then at some point deep learning gets slower and slower the more computers you add to your system. As such, very large systems which are usually quite fast may be extremely slow for deep learning.
    ...
    My model shows that it can be estimated that the brain operates at least 10x^21 operations per second. With current rates of growth in computational power we could achieve supercomputers with brain-like capabilities by the year 2037, but estimates after the year 2080 seem more realistic when all evidence is taken into account. This estimate only holds true if we succed to stomp limitations like physical barriers (for example quantum-tunneling), capital costs for semiconductor fabrication plants, and growing electrical costs. At the same time we constantly need to innovate to solve memory bandwidth and network bandwidth problems which are or will be the bottlenecks in supercomputing. With these considerations taken into account, it is practically rather unlikely that we will achieve human-like processing capabilities anytime soon.
    ...
    My philosophy of this blog post was to present all information on a single web-page rather than scatter information around. I think this design helps to create a more sturdy fabric of knowledge, which, with its interwoven strains of different fields, helps to create a more thorough picture of the main ideas involved.

    Quelle merveilleuse introduction dans la matière, pourtant je compte 1/2 journée pour lire et comprendre les bases de cet article. Si vous êtes biologue, mathematicien ou les deux à la fois, c’est sans doute plus facile. :-)

    #singularity #biologie #mathematique #science #cerveau

    • ces objections ne sont-elles pas également valable contre l’idée que la singularité c’est pour « bientôt » ?

      merci pour tous ces citations. j’ai hâte de les lire.
      j’en profiterai également pour lire toutes les répliques dans ce post.

    • ces objections ne sont-elles pas également valable contre l’idée que la singularité c’est pour « bientôt » ?

      Oui, ces objections sont valables pour toute « démonstration » posant a priori la perspective inéluctable d’une « singularité » où les capacités computationnelles d’une machine feraient émerger une « intelligence »

    • Tim Dettmers écrit notamment, en entame de la section « Part II » :

      Now I will explain step by step how the brain processes information

      Drôle de préambule...

      Pour moi, il est équivalent à :

      Maintenant, je vais vous expliquer pas à pas comment le cerveau fait du café

      Il est indéniable que le cerveau peut être impliqué dans la réalisation d’un café. Il est aussi indéniable qu’une machine peut réaliser la même tâche. Est-ce que ça fait du cerveau une machine à café ? Est-ce qu’une machine à café suffisamment perfectionnée peut faire la même chose qu’un cerveau ?

    • ah merci @ktche , c’est la première objection que j’ai eu en commençant l’article : la cognition n’est pas une computation.

      Après, en #sciences_cognitives c’est souvent une approche que l’on est « obligé » d’avoir (réductionnisme scientifique oblige) tout en sachant qu’elle est fausse, incomplète (mais beaucoup l’oublient, surtout ceux pour qui « la Science » est leur religion de substitution).

    • la cognition n’est pas une computation.

      Oui certes, mais pour moi on en revient à la même application intéressante du test de Turing : si la computation est suffisamment avancée pour simuler la cognition, et que pour ce dont on a besoin il n’est pas nécessaire de mêler toute une vérité philosophique, est-ce que cela ne suffirait pas ?

      Je pense que c’est utile de nuancer un peu. Parfois on n’a pas besoin que ça soit une pipe, mais juste une image de.

    • Oui, le réductionnisme formaliste peut effectivement se contenter de la simulation puisque l’objectif visé est de produire des applications (faire « comme si »). Pour que la démarche soit valide (ou du moins cohérente avec le cadre épistémologique), il faut donc un test qui permette d’établir l’équivalence formelle entre deux dispositifs, celui simulé et celui qui simule (même input donne même output de façon déterministe nonobstant une marge d’erreur acceptable). Or, il n’y a pas de test valide qui ait été proposé jusqu’ici : non seulement le « test de Turing » n’est pas un test qui permet de valider « l’intelligence » d’une machine, mais le test ne concerne même pas la machine !

      Qu’est-ce que le dispositif proposé par Turing permet de mettre en évidence alors ? Ceci qu’un être humain est capable de faire ce qui est impossible pour une machine : prendre une décision. En effet, dans le cas où il est formellement impossible de distinguer entre les réponses fournies par deux interlocuteurs cachés, seul un être humain est en mesure de trancher sur leur nature respective (et éventuellement de se tromper) c’est-à-dire d’agir en situation d’indécidabilité (de non-calculabilité). Ce qui est donc mis en évidence par le « test de Turing », c’est « l’intelligence » humaine (ce qu’un être humain peut faire et qu’une machine ne peut pas) et en aucun cas « l’intelligence » d’une machine qui n’est dans ce cas qu’un élément du dispositif expérimental et non pas l’objet de l’expérience.

      Pour prendre conscience de la signification réelle du « test de Turing », on peut se reporter à la façon dont Turing décrit le calibrage de son dispositif (et qui en dit long sur les questions existentielles auxquelles Turing cherchait des réponses...). Pour Turing, le dispositif est censé être correctement mis en œuvre (c’est-à-dire qu’aucun biais ne permet à l’opérateur de deviner la nature de son interlocuteur) lorsqu’il n’est plus en mesure de distinguer s’il a affaire à une homme ou une femme. On voit bien que ça n’a pas grand chose avoir avec la détections d’une forme d’intelligence et que le vrai sujet de l’expérience, c’est l’opérateur lui-même (et à travers lui, la question de l’identité, notamment de genre, chère à Turing pour des raisons qui lui sont propres)

      En gros, ce que démontre Turing, c’est que la cognition humaine n’est pas réductible à une machine de Turing (domaine du calculable). C’est malheureusement, exactement l’inverse qui est postulé par ceux qui se revendiquent de Turing même !

      Le problème du réductionnisme formel en sciences cognitives n’est donc pas l’écart entre le phénomène et sa simulation, mais plutôt dans le fait suivant : pour que la méthode soit pertinente, il faut commencer par définir un test valide, ce qui n’a jamais été le cas.

  • Faut-il conqué­rir les syndicats ou les détruire ?
    http://www.non-fides.fr/?Faut-il-conque-rir-les-syndicats

    Dans le siècle passé, au début du mou­ve­ment de la clas­se ouvrière, Karl Marx fut porté à con­s­idérer dans les or­ga­nis­mes syn­di­caux, les for­mes par les­quel­les la lutte de clas­se avait abou­ti à une lutte po­li­tique et révo­lu­ti­onn­ai­re. Les expéri­en­ces du ch­ar­tis­me en par­ti­cu­lier cont­ri­buèrent à étayer his­to­ri­que­ment l’opi­ni­on de Marx suiv­ant laquel­le les syn­di­cats, école du so­cia­lis­me, se­rai­ent l’arène de la Révo­lu­ti­on. Ce ju­ge­ment ne peut pas être con­damné si l’on con­s­idère la période his­to­ri­que, où il fut for­mulé. Mais si l’on se re­por­te à l’époque ac­tu­el­le, il faut cons­ta­ter que les syn­di­ca­lis­tes ont in­di­g­ne­ment spéculé sur l’an­ci­en­ne opi­ni­on de Karl Marx, pour at­tri­buer aux for­mes syn­di­ca­les l’ex­clu­si­vité du rôle révo­lu­ti­onn­ai­re. C’est un fait généra­le­ment ignoré en Fran­ce et en Ita­lie, que Marx, en ob­ser­va­teur scru­pu­leux du déve­lop­pe­ment de la lutte des clas­ses, et en ad­ver­sai­re in­las­sa­ble de toute con­clu­si­on dog­ma­tique n’a nul­le­ment manqué de réviser son point de vue à la lumière de l’expéri­ence his­to­ri­que. Il se ren­dit comp­te que les syn­di­cats enlisés dans les sa­bles de la résis­tan­ce éco­no­mi­que n’étai­ent plus les or­ga­nes na­tu­rels de la lutte de clas­se, comme l’af­fir­ment en­core les épi­go­nes de l’école léni­nis­te, (Trots­kis­tes, Bordi­gu­is­tes, Brand­le­ris­tes, etc.) mais que leur fonc­tion se li­mitait à résis­ter à la ten­dance des ca­pi­ta­lis­tes de réduire au mi­ni­mum pos­si­ble les frais d’exis­tence du ca­pi­ta­lis­me.

    #syndicalisme #conseillisme #communisme

  • «Une planète trop peuplée»: anatomie d’un mythe - LeTemps.ch
    http://www.letemps.ch/Page/Uuid/f1801488-0e15-11e5-bce4-0f8872f43eca/Une_plan%C3%A8te_trop_peupl%C3%A9e_anatomie_dun_mythe

    Nourrir tout le monde implique-t-il d’aller dans le mur sur le plan écologique ? Les #populationnistes pensent que oui. Pour eux, « le monde est confronté à un choix cornélien entre l’#agriculture industrielle, qui détruit l’#environnement mais nourrit tout le monde, et l’agriculture respectueuse de l’environnement, qui protège ce dernier mais ne nourrit pas la moitié des habitants sur Terre. Heureusement, il y a tout lieu de penser qu’ils ont tort. » Le contre-exemple vient de #Cuba : « Soudain privé de ses approvisionnements en carburants, en #engrais, en #pesticides et en semences lorsque l’Union soviétique s’est effondrée en 1990, le pays a adopté à grande échelle une agriculture #biologique à faible impact. » Résultat : « l’agriculture cubaine s’est plus que redressée, en usant de procédés qui n’étaient pas censés fonctionner ». Plusieurs études ont confirmé cette possibilité. Une méta-analyse de 300 recherches, conduite en 2007 à l’Université du Michigan, comparait les rendements de l’agriculture industrielle et écologique en montrant que « l’approvisionnement en denrées biologiques estimé excédait l’approvisionnement alimentaire actuel dans toutes les catégories de produits ».

    Un modèle maintenant menacé par les #Etats-Unis

    What Cuba can teach America about organic farming
    http://www.pbs.org/newshour/bb/cuba-can-teach-america-farming

    JEFFREY BROWN: But questions loom, as diplomatic relations between the U.S. and Cuba improve, and American agriculture and food companies look for commercial opportunities on the island.

    JASON REIS: I was just talking to our guide at the farm here, and she says that genetically modified organisms are outlawed in Cuba. They’re not allowed. However, chemicals may be allowed.

    And I don’t know what will happen if the American agriculture companies get in here, and are able to sell their products, if it’s going to continue like this organic model, or if it’s going to look a lot more like what we see in the U.S. I really — I really don’t know what’s going to happen.

    JEFFREY BROWN: Miguel Salcines says farming here will change, but he hopes the focus on organic methods continues.

    MIGUEL SALCINES (through translator): The use of chemicals is inevitable. The chemists are going to return. What we have to know is to what extent, and use them as little as possible, and try to continue to emphasize organic agriculture.

  • Métro de Paris: nos affiches refusées! | BLOG L214
    http://blog.l214.com/2015/02/22/metro-paris-nos-affiches-refusees

    Premier essai : « Dans la production de foie gras, les canetons femelles sont broyées vivantes » avec un caneton dans un entonnoir industriel, en route pour le broyeur.

    Refusé parce que « Une telle allégation peut sembler excessive » (Oups, dommage les carnistes mais la réalité EST excessive.)

    Deuxième essai : « Le foie gras, quand on sait, on arrête » avec une oie se faisant gaver par un producteur respectueux de son bien être.

    Refusé sans explications.

    Troisième essai : « Tous, nous ferions le même geste pour leur sauver la vie. Ne laissons pas une tranche de foie gras nous le faire oublier. » avec un couple aidant des canetons à monter sur un trottoir pour rejoindre leur mère et ne pas se faire écraser.

    « L’affichage de ce visuel dans le métro n’est pas souhaité en cette période de fêtes. » (Sous-titre (...)

    #veganisme

    • Cela dit, il y a aussi des producteurs de fois gras qui ne gave pas les animaux. Toujours la confusion entre tel résultat final (tranche de foie gras, ou manger de la viande en général) avec une pratique issue du modèle industriel ou de la vente avec haut rendement en général (que ce soit le gavage méga industriel ou le gavage « à la main », le but étant d’avoir un haut rendement pour vendre plus).

      Les éleveurs de volailles de notre AMAP, ils font juste à manger eux-mêmes à leurs animaux pendant plusieurs semaines à la fin de l’année, avec un mélange de céréales, de pain et de lait, beaucoup beaucoup plus riche que la nourriture du reste de l’année. Sinon le reste du temps ils gambadent sur le terrain, voire dans la forêt.
      cc @aude_v :)

      Mais ok, le but n’était pas de parler de l’argumentation mais de la censure et je suis bien d’accord que c’est n’importe quoi (et aussi d’accord avec ce que dénonce les 2 premières affiches, càd les méthodes industrielles).

    • S"lut, Ligne 13, 7h tu es compressé, endormi, mort-vivant, soudain une affiche tu chopes 2 mots--->foie gras tu penses Noël, fête, vacances, bien-être et merde tu comprends que cette affiche n’est pas comme les autres habituellement qui te donnes le nom du parfum que tu dois t’asperger et les films et autres niaiseries que tu dois aller voir, tu te concentres dessus ladite affiche hors norme « c’est ton côté révolutionnaire, enfin s’il t’en reste un » et tu lis--->caneton femelle broyé tu te dis merde c’est Tjrs les mêmes qui triment, tu te poses des questions, tu t’échappes un court instant de ce trajet qui te mène toi-même à l’abattoir et tu te dis quoi à cet instant précis ? rien, il y a bousculade et éternel cliché putain ya pas assez de place, ques ce qu’ils foutent pour rajouter des trains elle est déjà oubliée l’affiche dénonçant un scandale parmi tant d’autres. Conclusion : Vous toucherez beaucoup plus de monde on restant sur le web et autres procédés. Ce n’est que mon avis. Plaisir.

    • Donc en gros tu t’opposes à eux parce que t’aimes pas la manière dont illes diffusent leurs infos sur un forum auquel tu participes, je ne vois pas le rapport avec l’hypocrisie dont fait preuve la régie publicitaire du métro.

    • Si, clairement, dans les affiches pré-citées, ce qui est mis en avant ce sont les horreurs de l’industrialisation et des hauts rendements, que ce soit avec le mixage d’animaux vivants, ou le gavage avec un tube dans la bouche. Ce sont ces points-là précisément qu’elles mettent en avant dans l’image.

      Alors que concrètement, on peut élever des animaux pour les manger, et même faire du foie gras, sans ces choses-là. De nos jours ce n’est plus monnaie courante, ça oui, en tout cas dans nos pays industriels. Mais c’est parfaitement possible d’y revenir et certain⋅e⋅s le font déjà.

      Ce n’est pas forcément bien suivant la morale qu’on adopte, et il y a des arguments contre cela. Mais l’argumentation de ces affiches (les 2 premières tout du moins) ne correspond pas à la réalité ; ça le serait si les affiches dénonçaient le mode de production industriel. Mais là elles impliquent un parallèle obligatoire, alors qu’il ne l’est pas.

    • T’as l’air de croire que le gavage non industriel se fait sans tube dans la bouche et sans forcer les animaux mais…

      (le sous titre sur Wikipédia c’est : Gavage mécanique et artisanal d’une oie.)

      Ils n’y a que la 1ère affiche qui montre une situation d’industrialisation, c’est d’ailleurs indiqué dans l’article :

      Afin de mettre toutes les chances de notre côté, nous choisissons de montrer ce qui se fait de plus traditionnel et artisanal : le gavage d’une oie en parc - plutôt que ce qui se fait de plus courant (le gavage à la pompe d’oiseaux en batterie).

      Alors quand tu dis :

      l’argumentation de ces affiches (les 2 premières tout du moins) ne correspond pas à la réalité

      Je me demande quand même dans quelle réalité tu vis considérant que la quasi-totalité du foie gras est fabriqué en broyant les canetons femelles et en gavant les oies au tube.

    • 1) Depuis le début je parle de mode de production industriel OU à hauts rendements. Si j’aligne les deux à la suite ça veut bien dire que je ne fusionne pas les deux, et que donc ça peut être non-industriel mais avec pour but des hauts rendements quand même. Car le but final est de vendre le plus, car l’éleveur reste inscrit dans un mode de production capitaliste où il doit vendre pour continuer à vivre. Le fait de montrer un papy qui gave une oie ne change pas grand chose à ma distinction précédente. S’il gave comme ça c’est en partie pour avoir des rendements (en grosseur et en quantité) plus importants, car il doit vendre. Et en autre partie car il ne sait pas ou plus faire autrement.

      2) Ben oui, dès le premier message je parle très clairement de foie gras SANS tube dans la bouche (donc sans gavage, pour @nicolasm, car pour moi gavage c’est le tube, industriel ou du papy peu importe). Je dois ré-écrire la même chose ou on peut scroller plus haut ? Je connais personnellement des gens qui le font, ce n’est pas une utopie, et ce n’est même pas horriblement compliqué. La quantité n’est pas la même, c’est sûr… Mais cela prouve bien que ça existe et que c’est reproductible.

      3) Le fait que là durant telle époque, on produise de telle manière, n’implique en rien que ce soit la seule manière d’élever des animaux ou de produire tels aliments. Il existe d’autres méthodes, que ce soit des savoirs anciens retrouvés ou des innovations récentes (il ne s’agit pas du tout d’idéaliser tout ce qui serait avant).

      Je me demande quand même dans quelle réalité tu vis considérant que la quasi-totalité du foie gras est fabriqué en broyant les canetons femelles et en gavant les oies au tube.

      Et bien donc je vis dans cette réalité où je connais des éleveurs de volailles qui ne font aucune des choses que tu listes là.

      Et donc je réitère : je n’ai pas dit « les photos de ces affiches ne correspondent pas à la réalité » mais bien « l’argumentation de ces affiches ».
      Car les photos de ces affiches montrent des choses à dénoncer (et que je dénonce moi-même) mais sauf que le texte en rapport ne dénonce pas ce qui est montré (précisément le gavage et l’élevage industriel) mais des choses plus larges qui ne sont pas obligatoirement liées avec ces images.

      Le texte de la pétition liée est presque bien et se borne presque à dénoncer le gavage et l’enfermement des animaux :
      https://www.change.org/p/agissez-fermement-contre-les-infractions-commises-par-la-france-dans-la-prod

      Mais le tout premier paragraphe :

      Pour produire du foie gras, les canards sont…

      Pourrait par exemple être :

      Dans la majorité des exploitations, pour produire du foie gras, les canards sont…

    • @Alda, Oulala, mon mess était plus pour vous inciter à continuer hors métro « qui est loin d’être la panacée pour diffuser une idéologie demandant réflexion » qu’une mise à l’écart de votre combat, continuer genre--->Distribuer des tracts à l’entrée de la grande foire actuelle, web 3.0 facilite l’échange entre partenaires du même combat « RastaPopoulos en est un »---> sans lui « le web » je/tu/il passait à coté de cet acte, etc. Pour ma part le métro nous lobotomise rien de sérieux ne peut venir de lui, ses affiches ne sont perçues que comme des pubs sans intérêt, bon tu laisses une pub pendant 1 an sur Châtelet je dis pas elle finira par être vue mais quant à changer le bordel industriel j’ai un gros doute. Bonne continuation.

    • @aude_v

      Et que certain-e-s végan-e-s ne voient pas que le problème est celui de l’industrie et de l’industrialisation (gigantisme, financiarisation, on n’a encore rien vu), c’est un manque de clairvoyance qui va se payer cher.

      Ben il me semble que le problème est plus vaste pour les vegan.e.s vu que gavage ou pas, industriel ou artisanal, l’animal est tué à la fin.

    • Que nombre d’associations et de militant-e-s vegans soient des plus critiquables dans leur pratique militante est évident, et L214 l’illustre sans le moindre doute hélas.
      Pour autant, la critique de ces pratiques ne saurait constituer un argument justifiant que l’on refuse de se confronter au fond de leur critique.

      Pour paraphraser quelqu’un qui m’est très sympathique, il me semble que le préalable à toute discussion sur la solidarité des vegans avec les petit-e-s paysan-ne-s contre l’industrie est de la part des petit-e-s paysan-ne-s et et de leurs ami-e-s une prise de position claire sur le spécisme, ou plutôt contre lui . On est loin d’en être là, et que cette prise de position se fasse tellement attendre semble indiquer que les critiques de la société industrielle pourraient avoir intérêts à la perpétuation du spécisme. Mais de toute façon, c’est leur choix : une éventuelle alliance entre les vegans et les anti-industriel-le-s passe par là. C’est à ces dernier-e-s (les anti-industriel-le-s) de voir si l’alliance avec les vegans contre la société industrielle vaut le coût de l’abandon des bénéfices spécistes, ou si ellils préfèrent garder ces bénéfices, au risque de ne pas pouvoir en finir avec la société industrielle tou-te-s seul-e-s.
      Leur décision nous en apprendra beaucoup - leur indécision nous en apprend déjà beaucoup.

      (et en attendant, aller chercher des poux dans la tête des vegans sous prétexte que, du point de vue de la critique anti-industrielle , l’industrie et l’artisanat sont assurément deux choses radicalement différentes, voilà qui est au mieux s’engager délibérément dans un dialogue de sourds, voilà qui est au mieux hors de propos . Prétendre que l’industrie parierait à long terme sur le veganisme contre le carnisme de l’artisanat, aller faire de cela un argument contre la critique du spécisme, qualifier brutalement de « manque de clairvoyance qui va se payer cher » le fait que, du point de vue de la critique du spécisme, le fait déterminant est l’exploitation animale , et non qu’elle soit réalisée de manière industrielle ou artisanale - tout cela revient à préférer faire aux vegans un faux procès : leur reprocher de proposer une autre approche critique , et à enferrer la critique anti-industrielle et la critique du spécisme dans une stérile opposition frontale.
      Pour ma part, a défaut de faire beaucoup plus ces temps-ci, il me semble préférable, a minima, d’essayer de penser contre la société dans laquelle je vis, laquelle se trouve être à la fois spéciste et industrielle, entre autre joyeusetés.)

    • D’après les échanges que j’ai pu avoir sur le net, la vision végane est très peu holistique ou intersectionnelle. Bien sûr les végan.e.s croient que ça réglera tout (climat, injustice, faim dans le monde) mais ce sont juste des conséquences (questionnables) du véganisme. Dès qu’on pointe des bienfaits ou une meilleure performance d’un mode de vie non végan sur ces points, la personne se replie souvent sur un autre point (arrête de manger ton steak d’abord, on peut faire autrement et végan (même si moins performant), la souffrance des animaux, etc). C’est du coup souvent le seul point d’entrée de la réflexion, un axiome qui borne la réflexion.

    • La faiblesse structurelle de la majorité des discours véganes c’est l’impasse faite sur la question de la production alimentaire. De quelle agriculture veut-on, de quel rapport aux écosystèmes, au monde, veut-on. Et en lien direct, de quelle économie et de quels rapports sociaux veut-on.
      Ne pas poser cette question laisse la porte grande ouverte à la société technicienne, et laisse sans voix face à la viande in vitro et au soylent tant que l’unique critère discriminant est l’absence de captivité animale.
      M’intéressant depuis quelques années à la #végéculture #biointensive, une des nombreuses déclinaisons de l’#horticulture, qui est un type de production alimentaire exempt de nombre des défauts sociaux, politiques et écologiques de la céréaliculture et de l’élevage http://theanarchistlibrary.org/library/jason-godesky-thirty-theses#toc9 je me désespère de voir que quasiment personne parmi les véganes ne saisit cette perche pour articuler véganisme et critique des modes de production et des organisations sociales qu’elles engendrent. Tout comme la #critique_techno ces réflexions-là restent quasiment inaudibles.
      Tout ça est vraiment très peu holistique ou intersectionnel.

    • D’ailleurs ça commence à me fatiguer le préchi-préchat sur les F1 qui feraient des trucs dégénérés et « qui en n’aucun cas ne protège la biodiversité et ne vont dans le sens de la vie ». Je pense que c’est pour ça que ça s’appelle Femmes semencières, cet espèce de naturalisme moisi, vu que par ailleurs ça a été voulu par un homme et qu’il peut y avoir des hommes comme des femmes.

      Juste pour dire, si quelqu’un sauve des graines de fruits issus de F1 et les ressèment, y aura une diversité génétique plus importante que si on ressème les graines de sa variété paysanne. Est-ce que ça va dans le sens de la vie ? Aucune idée je comprends même pas ce que ça veut dire ..

    • Un jour j’écrirais mieux ce que je pense, mais je trouve que ça mélange un peu tout, et surtout que ça fait porter des conséquences des domaines législatifs/économiques sur du biologique. Et que ce qui est proposé au final, se rabattre sur les semences paysannes et conserver ce trésor du passé, est assez limité même si essentiel.

    • Ah mais ces paysans ne demande pas la suppression des semences hybrides, il demandent de pouvoir se réapproprier leur métier notamment celui de produire leurs propres semences, d’améliorer les sélections et de pouvoir les échanger.

    • S’il y a confusion à propos des hybrides de façon générale, ne serait-elle pas due au fait que les grands semenciers aurait pu proposer aux paysans des hybrides qui supporte mal d’être resemés dans le but de faire plus de profit (en revendant des graines tous les ans). Auquel cas, ces semenciers seraient en partie responsables de cette confusion ?

    • Oui certaines critiques sont fondées évidemment. Pour les jardiniers c’est simple, mais les paysans sont bloqués par les catalogues officiels, la propriété intellectuelle, et les brevets (pas en Europe il me semble).

      Ce qui me dérange c’est surtout le côté solutions, toujours basées sur les semences paysannes, variétés anciennes, lignées pures, pollinisation contrôlée. C’est dommage qu’on en soit toujours là, il y a très peu de dynamique. Et surtout c’est pas toujours cohérent (niveau diversité génétique notamment). Bon là c’est pas très clair, faut que j’écrive quelque chose de complet.

      Mais bon, y a tellement de trucs faux ou approximatifs sur les F1 que ça fait peur ...

    • Ce qui me dérange c’est surtout le côté solutions, toujours basées sur les semences paysannes, variétés anciennes, lignées pures, pollinisation contrôlée.

      Ben, ce que j’entends par « semences paysannes » c’est des semences qui appartiennent aux paysans, c’est-dire à ceux qui les utilisent, qui les produisent avec le droit de les sélectionner, de les améliorer, de les vendre ou de les échanger, sans être contraints par le CO. Je trouve rien de dérangeant là-dedans. Sur les variétés anciennes, c’est autre chose, il me semble que c’est une petite poignée de personnes (pas forcément des paysans d’ailleurs mais d’autres semenciers) qui relaient ce discours en boucle sur les médias mais je ne pense pas que se soit la ligne des petits paysans, qui eux, on ne les entend que rarement.

    • De ce que j’en comprends (parce que je cherche à comprendre, hein, c’est ce qui motive mon questionnement) on parle des semences anciennes pour reprendre un processus arrêté dans son évolution par l’imposition de semences inscrites au catalogues, et pour sortir des variétés inscrites, il faut repartir des variétés d’avant et surtout libres. Ce qui n’empêche pas de les sélectionner et de les améliorer. C’est ce que dit réseau de semences paysannes

      Un certain nombre de paysans et d’amateurs, bio pour la plupart, ont décidé de produire eux-mêmes leurs semences ou plants afin de les adapter en permanence à leurs terroirs, à leurs pratiques culturales et à leurs besoins de qualité. Souvent à partir de variétés anciennes et/ou locales, mais en sachant aussi profiter de l’apport de la diversité de variétés exotiques, ils pratiquent des sélections massales ou de populations, conservatrices, amélioratrices ou évolutives. Au contraire des hybrides et autres clones, leurs semences et plants sont peu stables et peu homogènes de manière à conserver, à côté de quelques caractères fixés, un maximum de variabilité qui leur permet de s’adapter en permanence à des conditions naturelles changeantes ou à profiter au mieux des interactions bénéfiques avec d’autres plantes.

      http://www.semencespaysannes.org/pourquoi_les_semences_paysannes_8.php
      Encore une fois sur les hybrides je ne sais pas.

    • @nicolasm

      toujours basées sur les semences paysannes, variétés anciennes, lignées pures, pollinisation contrôlée

      c’est curieux j’entends justement souvent parler de « open pollinated seeds » mais jamais de contrôle pour ce qui est des varietés populations.
      C’est justement pour la production des F1 qu’on requiert un gros contrôle de la pollinisation, et l’obention préalable de lignées pures. C’est aussi ce qui en fait de mon point de vue l’opposé d’un #outil_convivial
      http://fr.wikipedia.org/wiki/Hybride_F1

      Il est donc plus intéressant pour l’exploitant de racheter des semences chaque année car la production de semences F1 n’est pas à la portée de l’agriculteur moyen

    • En fait, si on se réfère aux hybridations naturelles des cucurbitacées ou des pommiers du Kazakhstan, on s’aperçoit que les fruits obtenus n’ont pas tous les qualités requises pour être consommés. Certains sont insipides, d’autres amers ou petits et durs. La reproduction des semences est incertaine. Certes, ça peut créer de la diversité mais on comprend que le paysan n’ait pas envie de prendre le risque de se retrouver avec une partie de sa production sur les bras parce qu’il ne pourra pas la vendre, c’est un mode de reproduction risqué. Créer de la diversité ce n’est pas à proprement parler le rôle du paysan, son rôle c’est de nourrir la population en s’assurant un revenu. Déjà qu’il doit faire avec les aléas de la météo, si en plus il doit faire avec les aléas de l’hybridation, c’est jouer à la roulette russe.

    • @odilon, ce n’était pas de la mauvaise foi :) Je pense vraiment que le métier à changé, et que les maraichers, mêmes ceux avec une vraiment bonne démarche, sont limités au niveau de la production de semences, indépendamment des barrières légales, car pour répondre en partie à @koldobika, je ne suis pas sûr que conserver plusieurs variétés d’un légume et faire des F1 de ce légume soit si éloigné que ça.

      Pour les autogames, qui se pollinisent tout seuls sans intervention, oui garder plusieurs lignées pures est plus facile, il suffit de ne rien faire. Pour faire des F1s, c’est pas si dur pour les tomates, et pour le reste je ne suis pas au courant d’F1 produits et vendus (haricots, pois, salades), vu que ça serait trop dur et qu’apparemment il n’y a pas (trop) de gain de vigueur par hybridation sur les autogames.

      Pour celles qui peuvent facilement se polliniser à la main (courges, autres solanacées), du coup c’est la même chose

      Pour celles trop difficile à faire à la main et qui ne rapportent pas beaucoup de graines à chaque pollinisation (famille des choux et des carottes par exemple), ça devient compliqué. Pour les hybrideurs, ils ont inventé les CMS et grâce à cette stérilité mâle ils font des hybrides assez facilement. Développer des lignes CMS c’est pas à la portée de tous, mais une fois que c’est commercialisé la ligne reste CMS pour toujours, donc à le fois on peut se réapproprier la technique, mais je ne sais pas à quel point c’est intéressant, mais par contre on se trimbale des trucs à moitié stériles pour toujours aussi. Bon vu que ça ne peut pas polliniser, ça ne peut rien contaminer, mais ça agit comme un trou noir vu que ça demande chaque année du pollen mais ne pourra jamais en fournir. Du côté des lignées pures, c’est un peu la galère, parce que du moment que tu veux créer des lignées pures, il ne reste que l’isolation, ce qui n’est pas forcément à la portée de tout le monde. Il y a les serres qui peuvent aider mais faut contrôler l’entrée/sortie des insectes, et introduire des pollinisateurs « propres » niveau pollen. Faut ajouter le caractère bi-annuel de certains légumes, et le fait que c’est encore plus galère pour les brassicacées vu que c’est même plus seulement entre variétés mais aussi « types » de légumes (vu que les choux, broccolis, chou fleurs, choux de bruxelles sont la même espèce). A noter qu’il y a des mécanismes d’auto-stérilité chez certains brassica (ils ne peuvent pas s’auto polliniser) du coup pas besoin de CMS, et ça revient juste à isole deux variétés des autres pour faire des hybrides.

      Je me dis que si les maraichers s’emparent du truc, peut être que le surplus en terme de technologie sera compensé par une plus grande production, comme le fait de greffer ses pieds de tomate. Si la technique est maitrisée, ce n’est pas à nous de juger si c’est convivial ou pas ? Mais perso ce ne sont pas les hybrides F1 qui m’intéressent, mais plus généralement les hybrides (pour faire des variétés population).

      « Open-pollinated », c’est une mascarade. Justement j’ai posé la question sur un forum de jardiniers US récemment, parce que je ne comprenais pas d’où venait le terme. Si tu lis les définitions, une variété OP se reproduit fidèlement, mais bien sûr si elle est pollinisée par le pollen de la variété. Du coup on contrôle bien qui est le père, sauf pour les autogames (et le terme vient peut être de ce cas particulier) ou par isolation. Bref pas « open » du tout ! Tout comme pour les F1, on met les contraintes pour connaître le père, et c’est plus facile dans le cas particulier où il n’y a qu’une variété dans un certain périmètre, parce que pour les hybrides c’est forcément deux. Mais ce contexte particulier est surtout celui des producteurs de semences plus que des producteurs de légumes.

      Pour les lignées pures, oui souvent elles sont plus pures dans la lignée des parents d’hybrides (plus les parent sont pures, plus les F1 sont homogènes) mais les variétés traditionnelles sont aussi très pures, puisqu’elle doivent être assez stables au niveau reproduction pour conserver pas mal leur phénotype. Il y a forcément un peu de diversité dans le lot (si j’ai bien compris, hétérogénéité là où les récessifs ne changent pas le phénotype) mais des fois même pas et les variétés perdent en vigueur (dépression endogamique). Le procédé pour créer une nouvelle variété c’est de faire un hybride et d’auto pollinisé pour jeter assez de diversité génétique pour avoir certains traits fixés. C’est le paradigme même de la variété (dite ancienne à l’opposé des hybrides) alors qu’avant c’était plus des variétés populations que des « vraies » variétés.

      @odilon le texte que tu cites est pas mal, j’aime la dynamique qui s’en dégage (sur la diversité et les sélections), mais alors je ne comprends rien quand ils critiquent les hybrides, puisque pour moi une variété population c’est justement un pool génétique où les « variétés » s’hybrident. Hum du coup je commence à mieux comprendre. Ils sont toujours dans le paradigme « variétés », et du coup des hybrides c’est forcément entre deux variétés (c’est à dire reconnues comment telles, avec les tampons de noblesse, et des différences phénotypiques marquées entre les deux). Si les lignées ne sont pas assez pures, ce ne sont pas des hybrides pour eux. Hum, du coup je crois que leur définition d’hybrides F1 est trop restrictive, puisqu’un F1 c’est la première filiation après un croisement, il n’y a pas de contraintes sur les parents (à part qu’ils soient différents génétiquement je suppose).

      Je commence à y voir plus clair :)

    • @nicolasm

      je ne suis pas sûr que conserver plusieurs variétés d’un légume et faire des F1 de ce légume soit si éloigné que ça.

      Il me semble que c’est pas du tout la même démarche. Par exemple chez moi je cultive humblement deux variétés de courgettes depuis 2010, à force des les planter intercalées au même endroit aujourd’hui elles forment une population où on retrouve les deux types initiaux plus trois nouveaux phénotypes aux formes et couleurs intermédiaires (+ une couleur vert foncé que les initiales n’ont pas) et avec des textures et goûts nouveaux (notamment une à peau tacheté vert et gris clair qui a un petit goût d’avocat). Par contre je n’ai pas le luxe (= le temps) de faire des hybrides F1, et encore moins sur les autres légumes que je cultive.

      mais alors je ne comprends rien quand ils critiquent les hybrides, puisque pour moi une variété population c’est justement un pool génétique où les « variétés » s’hybrident

      La différence est entre soit laisser tout ce monde se reproduire entre eux et faire une sélection massale, soit piloter la pollinisation pour obtenir un F1 bien spécifique et bien homogène, et avoir le temps pour ça. Mais dans ce deuxième cas on change de logique, ce n’est plus un #outil_convivial. Mis à part pour le maïs où un·e paysan·ne peut se faire son F1 à la maison en castrant une des deux variétés, faire des F1 en mode #bricole n’est pas envisageable, sauf si on n’a que ça à faire, ce qui implique une certaine spécialisation économique.

    • Ce n’est pas la même démarche mais le niveau de technicité n’est pas très éloigné.

      Pour tes courgettes c’est une chouette expérience, mais tu ne gardes pas tes deux lignées pures, et c’est sur ce point que je comparais. Si tu avais voulu faire des hybrides F1, comme si tu avais voulu conserver tes deux variétés pures, il aurait fallu faire des pollinisations manuelles. Certes plus pour les hybrides (pour les F1, mais aussi garder les lignées parentes pures), mais c’est la même technicité.

      Peut être que cette discussion tourne autour de ce qu’on met derrière les F1, comme j’ai dit à la fin du précédent message. Pour moi ta variété population contient des F1, même si les lignées ne sont pas pures (depuis le premier croisement) ou que la pollinisation n’est pas contrôlée. Bref ta variété population ce sont des hybrides (de plusieurs générations).

      Mais si un F1 pour toi ou d’autres, c’est forcément deux lignées pures, ou un processus qui consiste à créer année après année le même F1 à partir des mêmes lignées, on est d’accord que le F1 ce n’est pas forcément intéressant. Mais bon, à moins que je me trompe F1 ça a un sens en biologie qui est la première génération après une hybridation, tout comme il y a F2, F3, etc. Ce n’est à priori pas lié aux contexte des grosses firmes qui vendent au maraichers.

      Je ne suis pas fan des F1, c’est juste qu’on dit beaucoup de choses fausses dessus, peut être basées sur une définition peu claire ou informelle des F1. Mais ce qui me dérange plus c’est de passer à côté de tout ce qu’apporte l’hybridation et d’en rester aux variétés pures, c’est vraiment dommage. Car ça sent indirectement un peu la poussière, parce que pour créer de nouvelles variétés, à part grâce à des mutations spontanées, il faut bien hybrider des variétés

      Pour le côté conviviale, encore une fois, faire des pollinisations croisées pour sauver plusieurs variétés de lignée pure ou pour faire des hybrides, je vois pas la différence.

    • @odilon : c’est pour ça que les maraichers aiment les F1, pour l’assurance d’avoir un plant qu’ils connaissent, et des plants identiques entre eux.

      Y a aussi les variétés paysannes qui sont relativement stables

      Et ensuite les pools génétiques, variétés populations qui ont une grande diversité. C’est sûr que ça fait pas forcément des fruits de la même taille, couleur, texture, goût ... mais ça s’adapte aussi mieux aux fameux aléas climatiques. J’y vois beaucoup de potentiel, et certains fermiers utilisent cette méthode.

    • Un F1 c’est la première génération après croisement de deux lignéees homogènes. Dans une population avec une certaine variabilité et avec un brassage génétique, il n’y a pas de lignées pures, donc le concept de F1 ne s’y applique pas.
      Les « lignées pures » ne datent que de la seconde moitié du XIXème siècle (avec notamment Vilmorin), avant on faisait de la sélection massale sur populations fermières.
      Et on peut quand même créer des populations même à partir de « lignées » récentes.

    • Effectivement il semble bien y avoir la condition d’homogénéité pour les parents des F1, hum il faudra que je reprenne tout pour voir ce que cela implique.

      C’est quand même bizarre que les variétés anciennes soient aussi pures, il me semble qu’il n’y ait plus vraiment de variétés populations anciennes disponibles ? De quand date cette « épuration » ?

      Pour créer des populations à partir de lignées récentes, il faut passer par des F1 :) A l’origine c’est pour ça que j’aime pas les critiques farfelues des F1 genre ça donne des trucs dégénérés. Ça me semble plutôt sain de semer des trucs qu’on a sous la main pour voir ce que ça donne. C’est un peu comme les réactions horrifiées quand tu dis que tu vas semer un pépin de pomme (mais c’est encore une autre histoire ça).

    • Quelque part je trouve que le discours écolo/militant dans le domaine ça fait passer la compétence des semences des agro-industries aux paysans d’autrefois, comme si les variétés étaient issues d’un passé glorieux et qu’on ne pouvait que conserver dans faire mieux.

    • Selon le Gnis
      http://www.gnis.fr/index/action/page/id/544/title/Les-varietes-hybrides-les-varietes-F1-de-quoi-s-agit-il-

      Les variétés hybrides, les variétés F1 : de quoi s’agit-il ?

      Pour la plupart des légumes, il existe des variétés hybrides

      concombre hybride Les plus courantes sont les hybrides appelés « F1 ». Ils sont issus du croisement de deux parents (de la même espèce), choisis pour leurs caractères complémentaires et intéressants. Par exemple, rendement et précocité pour un parent, qualité gustative et résistance aux maladies pour le second. Les caractères intéressants pour les jardiniers sont très nombreux et les possibilités de croisement entre parents sont presque infinies. Tout l’art des sélectionneurs est de trouver les meilleures combinaisons possibles. Après des tests et des essais pendant plusieurs années, seuls les hybrides les plus performants sont commercialisés.

      > Pourquoi ne peut-on pas semer, l’année suivante, des graines de variétés hybrides ?
      La particularité des variétés hybrides, c’est qu’elles sont beaucoup plus vigoureuses que chacun de leurs deux parents, car elles bénéficient de la vigueur hybride (ou effet d’hétérosis). Ce phénomène est d’autant plus grand que les deux parents sont très différents génétiquement. Par contre, lorsque l’on récupère des graines de ces variétés hybrides pour les ressemer l’année suivante, les plantes qui se développeront seront différentes de celle de la variété hybride. Elles auront perdu une partie de leur vigueur hybride et de leur homogénéité, d’où un intérêt moindre pour les jardiniers.

      > Toutes les nouvelles variétés sont-elles des hybrides ?
      Non. Parmi les nouvelles variétés créées chaque année par les sélectionneurs, il n’y a pas que des variétés hybrides.
      La sélection apporte de nombreux progrès, sans qu’il soit né­cessaire de recourir à la technique d’hybridation. Ces nouvelles variétés, comme pour les hybrides, ont été sélectionnées pendant un grand nombre d’années sur les qualités gustatives, la résistance aux ma­ladies, sur la qualité de la récolte, la précocité, le rendement l’adaptation à la congélation...

      Je reste persuadée que des paysans ont essayé de les ressemer :)

    • Je crois qu’il faut aussi laisser du temps au temps pour que les paysans ou les maraîchers, en tout cas ceux qui s’intéressent à la sélection se réapproprient ces outils oubliés par des décennies de « prêt à planter ou à semer », il faut réapprendre ce qu’est une plante comme il faut réapprendre ce qu’est un sol.

    • Y a même des paysans qui les resèment encore, et se servent de ce patrimoine génétique pour l’incorporer dans la création de variétés ou de variétés population, et y a des breeders qui dérivent des variétés non hyrbides qui sont proche de l’hybride d’origine. Il faut juste pas se couper de tout ce côté en proclamant des choses comme la dégénérescence ou la stérilité sur les F1 sans plus de précision ou d’analyse.

    • Je vais me moquer de ce titre « Mouvement Femmes Semencières » où il n’y a rien de ’femmes’ là-dedans, à part à considèrer la femme comme la réceptrice de la graine mâle, uh uh ou détentrice d’un privilège sur la nature, la reproduction ? encore ça, encore le ventre, foutez nous la paix !!. Coller ce terme de femmes n’importe où c’est exaspérant, ça fait récupération, juste inacceptable de semer cette confusion. Et pourquoi pas du tofu femme, ou du dentifrice bio de femmes ?

    • Ah voilà, donc la vidéo commence par

      1) c’est Pierre Rabhi qui a demandé la création d’un tel mouvement (ou de ce mouvement ?)
      2) bien sûr c’est ouvert aux hommes
      3) « C’est l’énergie de la femme en tant que gardienne de la vie qui nous intéresse »

      Le tout dans les premières 50s, et pour accompagner la vidéo c’est portrait de Rabhi, puis une femme (indienne ?) courbée qui gratte le sol, et un viel homme blanc à barbe qui dispense son savoir.

      Le tout en 50s donc, fallait le faire :)

      https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=-B2ZSvCxsE0

    • Ah oui, je suis aussi preneuse !
      Certains #écologistes #raccourcis_du_bulbe présupposent dans leur mode de vie que le monde de la nature est un ordre des choses patriarcal et hiérarchisé par la #quequette_biologique. Du coup, certains retours à la pleine nature quand il n’y a pas de four, de machine à laver et de contraceptifs, c’est juste le piège pour les femmes. Ces lieux de vie si ils ne sont pas expressément pensés en terme d’anti patriarcat ne seront pas égalitaires car les charges quotidiennes (enfant, nourrissage, soins, lavage) retombent « naturellement » sur les femmes.

    • Ah ben si les forces vives de seenthis sont intéressées ou sur le coup, c’est chouette !

      De ce que je vois, c’est que depuis le début l’activité de subsistance alimentaire a clairement une division sexuelle, j’imagine principalement à cause de la contrainte de allaitement. Du coup il y avait la chasse pour les hommes, et la cueillette ou l’horticulture pour les femmes. Puis avec l’agriculture, le potager et le petit élevage (basse-cours, justement dans la cours, pas loin de la maison), et le gros bétail et les champs pour les hommes car plus éloigné de la maison. Mais on ne peut pas ignorer les symboles de prestiges du gros élevage et des céréales (valorisés car touchés par la main des hommes, ou le contraire ?).

      Peut être aussi un lien avec ce qui est écrit dans ce livre,
      « Naissance des divinités. Naissance de l’agriculture » de Jacques Cauvin.

      Mais bon, sur l’approche féministe de l’agriculture (plus spécifique que l’écologie), je suis quand même dans le flou.

      Y a bien l’approche machiste de défoncer la terre (http://seenthis.net/messages/240804) mais est-ce que ça ne fait pas sombrer la critique dans le problème inverse (attribuer des caractéristiques féminines à la terre/Terre).

    • seenthis c’est super, hop, il y a déjà le tag #écoféminisme à suivre !
      Une des raisons qui m’ont poussé à aller vers la permaculture depuis 20 ans est aussi son approche radicalement opposée à cette culture patriarcale qui enseigne à labourer/violer la terre/ventre et à considérer la production agricole comme un dû.

    • Par rapport au début, sur les paysans en France : d’accord avec @nicolasm.

      La paysannerie c’est un mode de vie particulier. Qu’il soit choisi ou subit, le principe de base c’est d’avoir une économie de subsistance. La commercialisation n’est qu’une chose en plus, à la marge, parfois même inexistante. La majeure partie est « hors économie ». Il n’y a plus de paysans en France depuis environ les années 50-60, un truc comme ça. En revanche dans le reste du monde, il en reste plein, ça oui. Mais pas en France.

      Le terme « paysan » a été repris ensuite, plusieurs décennies plus tard, par… « marketing politique » ? La confédération « paysanne », les paniers « paysans », etc. Ça fait rural, ça fait rustique. Mais ce n’est pas de la paysannerie.

      En France, on peut parler d’agriculteurices (ce n’est pas infamant hein, bien que ça reste dans le cadre du commerce), de maraîcher⋅e⋅s, de fermier⋅e⋅s. Mais mise à part quelques exceptions qui se comptent sur les doigts des mains, il n’y a plus vraiment de paysans.

      Le fait de parler d’"agriculture paysanne" pour en fait parler de trucs durables, écologiques, à petite échelle, etc, c’est une réécriture de ce que veut dire la paysannerie. Une réécriture après disparition, dans le cadre de l’économie marchande. Je ne sais pas exactement si c’est bien ou mal, j’ai plutôt tendance à penser que ce n’est pas très bien de tout confondre, et de faire croire que ça a un rapport avec comment c’était avant (avant que ça ne rentre pleinement dans l’économie).

      Je pense qu’il est possible de parler des initiatives d’agricultures marchandes plus respectueuses des équilibres, sans pour autant tout mélanger avec la paysannerie.

    • D’ailleurs cet état de fait change beaucoup de choses au niveau des semences, car avant c’était souvent une variété population du coin, alors que maintenant il faut avoir plusieurs variétés pour étaler la production, avoir chaque type de variétés bien homogène, plaire aux clients, etc

    • Oui tout à fait, et cela signifie que parler de comment les paysan⋅ne⋅s d’Afrique ou d’Asie gèrent leurs semences pour leur subsistance, ce n’est pas pareil que de parler de comment les agriculteurices européens gèrent les leur pour leur commerce. Ce n’est vraiment pas super d’utiliser les mêmes termes pour décrire deux réalités très différentes.

    • Sur les glissements sémantiques qui s’opèrent, on remarque aussi que l’agriculture bio c’est de l’agriculture qui se veut respectueuse de la terre, et l’agriculture intensive c’est de l’industrie agricole. Je suis donc pour qu’on inverse ce qui est marqué sur la bouffe, rien à mettre si c’est bio puisque c’est une nourriture sans ajout de chimie nocive donc « normale » mais que l’industrielle soit bien repérable, tiens, avec un logo tête de mort.

    • Je suis pas tout à fait d’accord, historiquement la paysannerie ce n’est pas un mode de vie, c’est une classe sociale. Avec la réforme agraire et l’industrialisation du pays, on peut séparer en deux branches les activités agricoles : les fermes industrielles d’un côté et les fermes traditionnelles de l’autre. Comme toutes les activités économiques, la paysannerie a changé avec les évolutions du temps et de la modernité. Je considère que des producteurs (maraîchers, fromagers, éleveurs de volailles, etc...) qui écoulent leurs produits sur les marchés locaux sont des paysans et d’ailleurs des paysans qui vivent chichement. Je suis d’accord, la réforme agraire qui n’a pas fini de sévir en a anéanti une part énorme. Mais dire qu’il n’y en a plus, c’est faux. Je vous invite à sillonner comme je le disais plus haut quelques campagnes pour voir des paysages de petites parcelles entourées de haies bocagères, de petites prairies adossée à une ferme avec quelques vaches qui paissent pour les voir.

    • Voila, merci @odilon, c’est plus clair ! Je cherchais un biais un peu moqueur pour le dire car cela me gêne aussi que sous prétexte de modernisation des pratiques agricoles on ne puisse plus utiliser un terme pour distinguer ceux qui sont encore proches de la terre (et je peux expliciter ce terme) de ceux qui sont des patrons d’entreprise agricole.
      D’autant qu’un peu partout en france je connais des paysans, et qu’ils créent encore des émules dans la même philosophie paysanne et même si ils réinventent la paysannerie et heureusement, je ne vois pas pourquoi il faudrait les nommer différemment.

    • Je pense quand même que le contexte a changé, alors s’il faut un mot pour désigner cette catégorie, j’y vois plus une néo-paysannerie.

      Après à la base on parlait de paysannerie à travers les semences, donc c’est quand même restreint et je ne vois pas trop comment l’élevage rentre dedans

    • Ben on est clairement pas d’accord sur le terme. :D

      La paysannerie, c’est un mode de production général, donc un mode de vie, caractérisé par l’économie de subsistance (c’est à dire en fait, hors de l’économie, ou très à la marge). À partir du moment où la majeure partie des activités concernent de la marchandisation (et non plus uniquement en marge), on est plus paysan. C’est autre chose.

      Le fait d’utiliser le mot « paysan » pour caractériser ce qui n’est « pas industriel » (en gros), ça c’est une acception relativement récente du terme. Parler d’agriculture paysanne pour se distinguer des exploitants industriels, c’est un truc de maintenant, ya pas longtemps.

      On peut changer le sens des termes, bien sûr, une langue ça vit. Sauf que là, ce n’est pas comme si l’ancien sens avait totalement disparu. Il a disparu au moins en France, ou en Europe occidentale. Mais dans plein d’autres endroits au monde, il existe toujours de la paysannerie, hors économie. Du coup mélanger tout ça dans un même terme ne me semble pas clair, et plus ou moins mensonger pour ce qui concerne celleux d’ici.

      Et il ne faut pas exagérer : personne n’a dit qu’on ne pouvait plus utiliser un terme pour distinguer l’industriel du non-industriel. J’ai dit que CE terme là, n’était à priori pas le bon, ne correspondait pas à ce que signifie à la base la paysannerie (économie de subsistance en priorité, je me répète). Rien n’interdit de trouver d’autres termes, tout du moins pour ce qui concerne les agriculteurs européens qui sont dans le circuit marchand.

    • Est-ce que l’économie informelle de @rastapopoulos et la vision de classe d’@odilon ne se rassemble pas dans le fait qu’une paysannerie devrait représenter un minimum de % de la population ?

      Edit :

      Dans le sens d’un schéma récurrent de « transition de secteurs d’activité » d’un pays qui caractérise la révolution industrielle (on passe du primaire au secondaire puis au tertiaire).

      Est-ce que la paysannerie peut être un concept atomisé au niveau de la ferme, ou est-ce que c’est au niveau macro ?

    • http://fr.wikipedia.org/wiki/Paysan

      Le paysan est une personne qui exerce le métier d’agriculteur et vit à la campagne. Il peut adopter ou subir une économie de subsistance. Il peut être amené à se déplacer d’une manière saisonnière dans d’autres « pays » par exemple vers des pâturages qui font défaut à ses bêtes. Il façonne son environnement (et indirectement le paysage) par ses différents prélèvements, apports, aménagements, plantations, etc. Ses activités sont souvent multiples : élevage, cultures, maçonnerie, artisanat et, accessoirement, commercialisation de ses excédents de production.

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Agriculture_paysanne

      L’agriculture paysanne telle qu’elle est entendue en France s’appuie sur une charte, 10 principes, et 6 thèmes.

      Les dix principes de l’agriculture paysanne :

      Principe n° 1 : répartir les volumes de production afin de permettre au plus grand nombre d’accéder au métier et d’en vivre.
      Principe n° 2 : être solidaire des paysans des autres régions d’Europe et du monde.
      Principe n° 3 : respecter la nature.
      Principe n° 4 : valoriser les ressources abondantes et économiser les ressources rares.
      Principe n° 5 : rechercher la transparence dans les actes d’achat, de production, de transformation et de vente des produits agricoles.
      Principe n° 6 : assurer la bonne qualité gustative et sanitaire des produits.
      Principe n° 7 : viser le maximum d’autonomie dans le fonctionnement des exploitations.
      Principe n° 8 : rechercher les partenariats avec d’autres acteurs du monde rural.
      Principe n° 9 : maintenir la diversité des populations animales élevées et des variétés végétales cultivées.
      Principe n° 10 : raisonner toujours à long terme et de manière globale.

      #paysannerie #agriculture_paysanne

    • @aude_v l’émission est très intéressante. Perso je ne l’ai pas entendu récuser l’appellation de paysan, et d’après ce que j’ai compris de sa démarche il souhaiterai plutôt en défendre la liberté d’action : par exemple dans le choix des bêtes non dicté par des impératifs bureaucratiques ou la diversité d’activités. Il dénonce bien l’activité spécialisée (il cite Giono d’ailleurs) dans laquelle tombent les paysans à cause de la PAC, et surtout de la façon dont ils sont formés. Quant aux obligations technologiques, puçage, surveillance satellitaire, etc il dit que cela fait partie de cette désautonomisation forcée de l’ensemble de la société : obéir sans se poser de questions et produire en masse pour des citadins eux-mêmes entassés. Que les paysans disparaissent, soit, et depuis 1966 et même avant (l’idée de ne pas disperser ses terres en ayant un seul enfant leur a été fatale en 14/18) et la défense tardive de Dumont pour les paysans procède aussi de leur disparition. Mais c’est quand même parce qu’il reste quelques paysans que l’état d’esprit paysan tente d’être conservé, notamment avec la Conf et de jeunes qui s’installent en refusant toute aide gouvernementale.

    • Je ne suis pas de mauvaise foi, je m’intéresse un peu à cette histoire, quand même. Le terme « agriculture paysanne » est un truc récent inventé par la Confédération Paysanne, pour remettre à l’ordre du jour ce mot. Ce dernier a ensuite été repris dans les années qui ont suivi par la mouvance altermondialiste, qui s’est un peu gargarisé de ce mot. Mais ça ne recouvre en rien ce que les historiens (de quoi se mêlent-illes celleux là ?!) appellent « la paysannerie », et qui n’existe plus en France.

      Refuser une aide gouvernementale ne fait pas de toi un⋅e paysan⋅ne⋅ ! Ne plus s’inscrire dans l’économie, ou ne vendre qu’un petit surplus à la marge, ça oui (mais ce n’est pas que ça, condition nécessaire mais pas suffisante, car il y a tout l’ethos et le mode de vie dont a parlé @koldobika).

      J’ai retrouvé une explication de Clément Homs sur feu decroissance.info (vive la mémoire et les archives militantes !) :
      http://decinfo.apinc.org/phpBB2/viewtopic.php?p=39601#39601

      Deuxième élément de ma réflexion sur l’étiquette paysanne : ayant fait des études d’histoire, j’ai toujours lu, et appris des personnes qui se penchaient dans leurs recherches sur ces questions, qu’il fallait clairement distinguer historiquement, les figures du chasseur-cueilleur, du paysan, de l’agriculteur et de l’entrepreneur agricole (c’est le b-a-ba de toutes études sur le monde rural, son évolution et sa modernisation depuis la Révolution fourragère et individualiste du XVIIIe siècle). Les temps historiques de ces figures sont différents (le temps long de Braudel), et la nature de ces activités connaissent à chaque fois, une altération (voir le texte initial du topic). Et le paysan n’est pas un agriculteur, il ne travaille pas que la terre ou n’est pas qu’un éleveur, les activités artisanales sont très importantes et occupent en volume plus de temps que le travail des champs notamment (veillées, saisons creuses, travail des femmes, etc). La vie paysanne relève aussi bien d’un système politique (résistance auto-organisée, prise en charge de l’administration municipale, etc), culturel (patois, habillement spécifique, jeux collectifs et fêtes particulières, etc), identitaires (saints locaux, mémoires, etc), social (communauté villageoise avec esprit de groupe, sentiments communs, organisation du travail), religieux (assistance aux pauvres dans le cadre paroissial, autorité morale du curé de village, n’imaginons pas non plus un monde paysan écrasé par le labeur dont nous aurait libérer les scènes de nos vies futures, puisque selon les pays entre 1/4 et 1/3 des jours de l’année sont des jours et des fêtes chomés notamment du fait du calendrier religieux et festifs, etc), coutumiers, juridiques et judiciaires

      Quant à la Fédération des Travailleurs de la Terre (CNT), elle écrit cela :

      Pour comprendre la situation actuelle, il faut déjà oser faire le constat que la paysannerie a disparu en Europe, en Amérique du Nord, comme dans tous les pays industrialisé. Dans le reste du monde, là où elle subsiste, elle est en train de subir à un rythme accéléré les modifications structurelles que la paysannerie française, notamment, a connu lors des 100 dernières années. Ce type de société tirait son originalité de sa logique autonomisante : autosubsistance alimentaire, autonomie technique (non spécialisation des tâches et maîtrise de l’outil de production), autonomie de la collectivité sociale (famille, villageoise, collective). Constater la disparition de ce type d’organisation sociale et économique a l’avantage de clarifier la situation actuelle, et d’éviter les chausse-trappes de la dialectique marchande qui, dans ce domaine aussi, brouillent notre perception de la réalité.

      Sans oublier : Henri Mendras La fin des paysans, 1967
      http://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Mendras
      http://agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/CEP_Analyse54_Henri_Mendras_Retour_sur_La_fin_des_paysans_cle0ba475

      En 1984, 17 ans plus tard, il disait :

      Certes il reste des agriculteurs qui nous nourrissent en abondance et qui font du bruit, bien qu’ils soient trois fois moins nombreux qu’il y a trente ans. Certes les ruraux sont toujours aussi nombreux, ou presque, et la société rurale a connu une spectaculaire renaissance. Mais ni les uns ni les autres ne sont plus des paysans.

    • à propos de d’#agro-industrie, d’#agriculture_paysanne et de la conf, je retombe sur une vieille interview de René Riesel
      http://www.liberation.fr/week-end/2001/02/03/les-progres-de-la-soumission-vont-a-une-vitesse-effroyable_353523

      On connaît la blague classique du môme qui demande si les poissons sont carrés parce qu’il ne les a vus que sous forme de surgelés panés, des gens de 40 ans ne savent pas où est le devant et le derrière d’une vache : cet état d’ignorance tragique se généralise. Mais devant l’espèce de panique qui saisit les gens face à l’abîme, on tente de les rassurer avec le retour à de pseudo-traditions rurales, qui seraient un refuge possible de la qualité en matière agricole, alors qu’en réalité on libère seulement l’inventivité publicitaire pour rhabiller la même merde industrielle. J’ai vu les choses se dégrader à vive allure. Il n’y a plus de #paysannerie en France, seulement des agriculteurs, plus ou moins intégrés, qu’ils l’admettent ou pas, dans un segment de la production agro-industrielle. Et, contrairement à ce que clame sans cesse la #Confédération_paysanne, l’industrialisation de l’agriculture ne se traduit pas nécessairement par la concentration des exploitations.

      Pourquoi être allé à la Confédération si son projet vous semble à ce point faux ?
      L’industrialisation de l’élevage du mouton était la tendance dominante et, comme éleveur, j’ai pratiqué exactement l’inverse. Ce fut l’union sacrée pour me dégager. En 1991, les gens de la Confédération du cru sont venus me chercher et, avec eux, j’ai eu la tentation d’élargir un peu la bagarre. La Confédération rassemble des socialistes, des babas, des gauchos repentis, des Verts, un club d’idées assez paradoxal qui fonctionne sur le consensus de façon à présenter une unité de façade, avec toutes sortes de tendances qui cohabitent sans jamais aller jusqu’au bout des discussions... J’ai cru pouvoir faire avancer des questions pour moi centrales. Nombre de ces gens étaient ou sont vraiment de bonne foi. Il y avait des choses à faire sur le terrain ; ensuite, je n’ai jamais renoncé à rien, j’ai toujours dit ce que je pensais du fonctionnement de l’organisation, des illusions qui y étaient répandues, mais bon, j’y ai fait ce que je pouvais y faire (contre les OGM, en particulier), et j’en suis parti en mars 1999, quand rien n’est plus resté possible.

      Pourriez-vous expliquer en quoi le devenir de la paysannerie et les questions liées au génie génétique constituent à vos yeux des questions fondamentales ouvrant sur la possibilité de refonder une théorie critique ?
      Eleveur, j’ai vu de près la fin du blitzkrieg dont a été victime le monde rural et agricole dans les pays développés. On a cassé la civilisation paysanne, ou du moins ce qui en restait. La paysannerie traditionnelle n’était certes pas porteuse de valeurs mirifiques, à préserver à tout prix ; simplement, elle conservait vivante une mémoire permettant de suivre des chemins autres que ceux imposés par le développement industriel. On y trouvait des attitudes par rapport à la vie, et notamment à la vie sociale, très antinomiques avec le rationalisme dominant, un mode de vie, en tout cas, moins séparé que ce à quoi a abouti l’industrialisation en réduisant l’homme au travail et en colonisant ensuite le temps libre. J’ai vu l’ancienne société rurale se liquéfier, pourrir sur pied, des comportements se raidir. On ne peut se contenter des simplifications des antimondialistes, avec les méchantes transnationales qu’on substitue aux 200 familles et aux capitalistes à haut-de-forme et gros cigare pour avoir un ennemi clairement identifiable, alors que la domination fonctionne essentiellement grâce à la soumission : la soumission à l’industrialisation, à l’emprise d’un système technique.

      ... Que trop peu de gens, à votre avis, critiquent fondamentalement.
      Ma critique n’est pas de type heideggérien et ne vise pas la technique en tant que telle. Mais il faut bien saisir l’enjeu de l’industrialisation de l’agriculture, qui atteint un stade ultime avec les chimères génétiques : il s’agit, ni plus ni moins, d’une tentative de supplanter définitivement la nature (extérieure et intérieure à l’homme), d’éliminer cette dernière résistance à la domination du rationalisme technologique.

      Une « raison » qui veut ignorer ­ et ici supprimer pratiquement­ ce qui n’est pas elle, c’est, je crois, la définition minimum du délire. Si on comprend cet enjeu, alors on doit remettre totalement en cause les bases mêmes de l’actuel système agricole.

      Or, que voit-on ? Une pseudo-contestation qui en appelle à l’Etat interventionniste pour tenir et moraliser les marchés, assurer l’existence des agriculteurs, alors que le projet ouvert de ces Etats est de les éliminer, comme en Grande-Bretagne où la paysannerie totalise à peine 1 à 2 % de la population. Il y a aujourd’hui un projet, paraît-il progressiste, visant à intégrer l’agriculteur dans un dispositif où il est un agent de l’Etat, modèle totalement bureaucratique dont on voit bien les sources historiques.

      Du coup, on comprend mieux les liens entre divers mouvements comme Attac ou la Confédération. C’est la tentative de restauration du parti des vaincus historiques, c’est-à-dire des partisans de l’Etat, vaincu à leurs propres yeux ­ la souveraineté des Etats s’effrite, etc. ­, mais ne désespérant pas d’en refonder un qui serait, cette fois, « vraiment citoyen ».

      #ogm #critique_techno #étatisme

    • suite

      Prendre les choses à la racine, c’est critiquer les bases technoscientifiques de la société moderne, comprendre la parenté idéologique profonde entre le progressisme politique ou social (c’est-à-dire la « mentalité de gauche » telle que la définit Theodore Kaczynski) et le progressisme scientifique. L’industrialisation est depuis la « révolution industrielle » en Angleterre une rupture absolument fondamentale avec l’essentiel du processus d’humanisation. Sans civilisation paysanne, c’est la civilisation tout court qui se défait, on le constate aujourd’hui. Et la signification historique de l’industrialisation, sa vérité profonde devenue manifeste au XXe siècle, c’est la destruction : avec Auschwitz et Hiroshima, on a les deux fonts baptismaux sur lesquels a été portée l’époque contemporaine.

    • Ben non je vois pas la contradiction. Il dit clairement que pendant un temps donné, la conf a permis (lui a permis, notamment) de porter certaines luttes (mais il ne parle pas de lutte pour revenir à la paysannerie du tout). Et qu’ensuite quand il a pensé que l’état du syndicat ne permettait plus de porter correctement ces luttes, il en est parti.

  • Rôle d’un certain type d’#élevage dans la résilience face au changement du #climat et au pic d’#énergie, dans deux textes qui se croisent :

    Bee keeping for the energy descent future, David Holmgren
    http://www.resilience.org/print/2011-01-27/bee-keeping-energy-descent-future

    This thought might make some permie purists feel a little smug as they grind and leach acorns for their daily bread, but the resilience of many of our cherished tree crops to climate chaos is not much better than annual crops, a point made (through gritted teeth) by my good mate Graeme Brookman at the Food Forest. (Lack of winter chill and extreme heat waves are having increasing impact on the yield from mainstay tree crops at the Food Forest.)

    Compared with annual crops, one disadvantage of tree crops is vulnerability due to specific seasonal conditions for fruit set and ripening. Long lead times and resources involved in planting and establishment of tree crop species and varieties adapted to emerging climates are also problematic.

    Diversity gives us a “hedge” against climate (and market) chaos, with some winners and some losers each season, but this value from diversity is most useful in small scale systems supplying a household rather than market systems where some degree of commitment to scale and specialisation is inevitable (even in a more localised world).

    Microclimate buffering of extreme weather conditions is another advantage of food forests but much of that buffering of heat scorch, frost, wind damage etc is restricted to the understorey. It is the tree canopy, especially in temperate climate systems, exposed to full sun that provides the greatest yields.

    Timber forests are more capable of dealing with the extreme weather and seasonal chaos than food forests. They grow fast when moisture and temperature allow but continue to slowly gain (dense) wood in all but the most extreme seasons. Ironically it is grasslands with grazing animals that might be one of the most resilient systems of land use in the face of climate chaos; these opportunistic systems mostly developed through the pulsing of ice age and interglacial over the last few million years. Animals represent storages that dampen the pulse while predators act to further moderate and protect the whole system. Hunter/gatherer and nomadic pastoralist cultures (at their best) incorporated this wisdom of nature to survive and thrive harsh climatic transitions of the past. This interpretation might be a bitter pill to swallow for vegetarian and vegan idealists wedded to the idea that the keeping of livestock represents the most destructive and unethical of our land uses. (They will have to console themselves with the fact that the obscenity of factory farming of pigs, poultry and cattle will be consigned to the rubbish bin of history in a post peak oil world.)

    Some of the historical advantages of pastoral farming and even nomadic pastoralism could also be important in the energy descent future. Animals (rather than machines and fossil fuel) do most of the work converting plant biomass into condensed and self-transporting storages of value to people. At the same time, they provide environmental services, such as vegetation management, fertility cycling, transport, companionship and even security.

    Now the issue of security is a big one. Many years ago a friend travelling through the Sudan noticed that no one kept chooks and that those who could afford to, ate powdered eggs from the EU. When he asked why no one kept chooks, the answer was that someone with an M16 rifle would come along and claim the chook as theirs

    The Resilient Farm and Homestead : An Innovative #Permaculture and Whole Systems Design Approach, Ben Falk

    1816, THE YEAR WITHOUT A SUMMER
    Resiliency planning, development, and operations require planning for worst-case scenarios, but we humans tend to have short memories indeed. We look back at the past with rose-colored glasses, perhaps a necessary psychological mechanism, but physically, it’s certainly a maladaptive one.
    “Those who forget the past are bound to repeat its mistakes.” The Year Without a Summer is a particularly informative planning example, as it highlights the effects of a wholly natural chain of events: volcanic eruptions. The year 1816 saw a killing frost every month of the year. People died in a snowstorm in July in northern Vermont. And this was all before human beings started really tampering with the climate in earnest. This was merely the result of a series of volcanic eruptions occurring the year before in 1815, many of them on the opposite side of the planet. A year without a summer is not “likely” to happen again—it’s guaranteed to. It’s merely a question of when, not if.
    As with any decision in life, we can plan for inevitable events, or we can ignore them and pretend that they won’t happen again. While the latter is certainly the modus operandi of the Modern Age, it’s not a terribly resilient way of engaging the future. So how to plan for the inevitable vagaries of Earth’s dynamic, plate-tectonic-driven influences (not to mention any other change agents such as global trade resource supply disruption)? The following strategies serve as a general overview. Write them off as tinfoil-hat approaches at your own peril:
    • Store months of food, preferably a year’s supply or more. It’s easy and not that expensive, and in the end it saves you money (food costs are always increasing).
    • Diversify, diversify, diversify. Note the crops that failed in 1816 in New England: vegetables and grains, annuals, fruits and nuts. Pastures, on the other hand, probably had a decent year, given that moisture levels remained high (evaporation stayed low), and the animals grazing on such pastures can handle frost easily enough. Grazing systems may have actually benefited from such a catastrophic year. That’s the power of diversity. Sure, you won’t live on meat and milk alone; that’s where the stored food comes in. Grains and beans from the year—or five years before—added to the animal-based diet would do wonders to round out the survivability of a year like 1816. Add some greens to the mix—kale, chard, arugula, and a host of other cold-hardy greens don’t care about a little frost. Now you have not only a survivable but a thriveable way to get through a particularly dynamic year like 1816. Whether it happens again in 2014 or 2114, it really doesn’t matter. You’re prepared. Your surplus can be sold or traded for value. You are a resource to your community if a food disruption only lasts a week or the entire growing season.