Ebola, clips et contre-clips - Arrêt sur images

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    La réponse d’artistes africains à Band Aid : « Africa stop Ebola »

    Ils sont prêts à aller « sauver l’Afrique », mais l’Afrique préfèrerait qu’ils s’abstiennent. Trente ans après le Band Aid contre la famine en Ethiopie, des artistes occidentaux se mobilisent, cette fois contre le virus Ebola. Leur morceau, « Do They Know It’s Christmas ? », a été vivement critiqué par des chanteurs africains, qui l’ont jugé « paternaliste et misérabiliste », et ont lancé leur propre chanson, « Africa Stop Ebola ».

    « Un monde qui ne connaît que les dégâts »

    Que nous disent réellement ces artistes dans leur morceau ? Et en particulier, que disent-ils de la cause qu’ils défendent, la lutte contre la propagation du virus Ebola en Afrique de l’Ouest - qui aurait fait 6331 morts à ce jour, pour 17 800 cas identifiés, d’après l’Organisation mondiale de la santé ? Dans la version britannique, ils entonnent notamment :"Pendant que vous vous amusez, il y a un monde, derrière votre fenêtre, un monde de crainte et de peur, où un baiser d’amour peut vous tuer, et où la mort est dans chaque larme." Le baiser et la larme qui tuent : références au caractère contagieux du virus Ebola, qui se transmet par les fluides – y compris salive et larmes, donc. Mais la référence à ce monde « de crainte et de peur » n’est-elle pas anxiogène et stigmatisante ?

    Penchons-nous maintenant sur les paroles de la version française, adaptée par Carla Bruni : « Il flotte des sapins et des cadeaux, quand vient le jour de Noël, pendant qu’à l’autre bout du monde coulent des sources de problèmes »– on relève la référence à « l’autre bout du monde », géographiquement douteuse : à vol d’oiseau, la capitale guinéenne Conakry est plus proche de Paris (4619 km) que New-York (5836 km). Le morceau poursuit : « C’est comme un parfum d’enfance, Noël est là. (...) C’est au nom d’un monde qui tremble, et qui se meurt, et qui se bat. Au nom d’un autre monde, exsangue, qui ne connaît que les dégâts. Et lorsque nos vies se réchauffent sous les étoiles, comme autrefois, d’autres vies se brisent. » L’Afrique qui « ne connaît que les dégâts » appréciera. Et les malades d’Ebola apprécieront davantage encore le couplet final : « Noël est là. Lève ton verre à tous ceux qui ne boivent pas, brise ton pain pour tous ceux qui ne dînent pas ». Quel rapport entre les personnes qui « ne boivent pas » et « ne dînent pas » et les malades de la fièvre hémorragique Ebola, si ce n’est un lot commun de stéréotypes associant pêle-mêle guerre, famine, malnutrition, problèmes d’accès à l’eau, et épidémies ?

    Lassés d’entendre ce type de discours sur leur nécessaire malheur, des jeunes de la ville de Goma, à l’est de la République démocratique du Congo (région non touchée par le virus Ebola, mais régulièrement en proie à des conflits armés) ont lancé, en juin 2014, un clip vidéo intitulé « Happy we are from Goma », où ils se filment dans leur quotidien, avec en fond sonore le tube « Happy », de l’américain Pharrell Williams – car « l’autre bout du monde », à l’occasion, écoute Pharrell Williams.

    En France, la charge la plus virulente est venue du reggaeman ivoirien Tiken Jah Fakoly qui a jugé la video de Band Aid 30 « paternaliste, misérabiliste et globalement nocive à l’Afrique », et a décidé de lancer son propre contre-clip. À ses côtés, une brochette de célébrités africaines : les Maliens Salif Keïta, Oumou Sangaré, le duo (malien également) Amadou et Mariam, ou encore le rappeur sénégalais Didier Awadi.

    avec une perle :
    http://www.dailymotion.com/video/kNqIolJCmEmsnn9zbQA

    & happy from goma
    http://www.youtube.com/watch?v=fq1uN2jbPIg