http://www.revue-ballast.fr

  • BALLAST Jack London : histoire d’un malentendu
    http://www.revue-ballast.fr/jack-london-histoire-dun-malentendu

    La gloire est une méprise. Un plan rapproché sur l’un des pans d’une œuvre plurielle ; un regard prononcé sur ce qui mérite sans doute le moins d’attention. Célébrer, c’est tronquer : le devant de la scène se plaît à raboter rugosités et coulisses. Jack London est connu de par le monde entier et nous avons été nombreux à grandir avec Croc-Blanc ou L’Appel de la forêt. London est souvent perçu comme un auteur de jeunesse, un romancier des chevets d’adolescence – ce n’est nullement un mal mais cela peut le devenir lorsque l’on omet l’écrivain sans âge et sans public ciblé, la plume sociale, le candidat et militant révolutionnaire. Sait-on assez que, par-delà les adaptations produites par Walt Disney, London fut l’une des dernières lectures de Lénine, agonisant auprès de sa femme ? que Trotsky, en exil, fit état de la « vive impression1 » que l’un de ses ouvrages lui procura ? que Che Guevara songea, se voyant mourir, blessé lors de la prise de Cuba, à l’une de ses nouvelles ? Sait-on assez que le régime fasciste de Mussolini fit interdire les éditions populaires des écrits révolutionnaires de l’Américain ? Sait-on assez que l’un de ses succès de librairie conduisit à la fin des camisoles pour les prisonniers de droit commun ?

    #Jack_London #socialisme #littérature

  • BALLAST David Graeber : « Nos institutions sont antidémocratiques »
    http://www.revue-ballast.fr/david-graeber

    Oui. C’est une des choses fascinantes avec l’économie... Prenons le marché : il sait. On ne peut pas aller à son encontre. Mais si on demande aux économistes ce qu’est le marché, ils répondront : « Eh bien, c’est un modèle, cela n’existe pas vraiment. » Ce sont les premiers à admettre que c’est une chose qui a été construite. Et c’est contre-intuitif d’imaginer ce que serait le monde si chacun agissait rationnellement, en détenant une information parfaite. C’est comme s’ils reconnaissaient ainsi avoir créé une idéalisation de toutes pièces, une sorte d’image divine, alors qu’ils l’ont évidemment créée dans l’idée que c’était une chose réelle.

  • BALLAST Christine Delphy : « La honte doit changer de bord »
    http://www.revue-ballast.fr/christine-delphy

    Il faut dire en plus que le mot « radical » a un sens différent dans chaque pays ! Il n’est pas le même en France, aux États-Unis, etc. La notion de #féminisme radical, c’est un petit groupe, dont j’étais, qui l’a mise en circulation en France. Je venais, avant cela, d’un groupe qui se nommait, au début des années 1970,« Féministes révolutionnaires ». Il y avait différentes tendances au sein des mouvements féministes à cette époque. Notre position à nous était de dire : nous prenons toutes les femmes, nous refusons d’en exclure certaines pour des raisons sociales ou économiques, nous refusons d’en laisser sur le bord de la route. J’ai toujours lutté pour qu’aucune femme ne puisse être rejetée du mouvement, sur quelque base que ce soit. Ce qui m’a d’ailleurs conduite à m’opposer à quelques groupes de lesbiennes radicales qui estimaient que les femmes hétérosexuelles étaient des « collaboratrices » de l’ordre patriarcal. J’ai lutté contre ça à l’intérieur même de ma propre revue, qui a éclaté à cause de ça – c’est pour cette raison qu’elle est passée de Questions féministes à Nouvelles questions féministes. Et, de la même façon, je lutte contre l’idée que les femmes musulmanes, parce qu’elles portent un foulard, doivent être exclues de l’école ou des mouvements féministes.

  • BALLAST Naomi Klein : « Le changement climatique génère des conflits »
    Par Ballast - 4 décembre 2015
    http://www.revue-ballast.fr/naomi-klein

    Nous sommes à Paris, aujourd’hui ; nous sommes plusieurs à vivre à Bruxelles, dans la revue : deux des villes dont on a le plus parlé ces dernières semaines, toutes deux sous « état d’urgence ». Les gouvernements belge et français évoquent la possibilité de faire passer des lois très proches du Patriot Act nord-américain — qui engendreront moins de libertés et plus de surveillance. Ne nous approchons-nous pas d’une nouvelle forme de « stratégie du choc » ?

    Naomi Klein :– Pas tellement nouvelle, en fait. Et nous ne nous en approchons pas, nous sommes en plein dedans. Sous certains aspects, ce qui se passe en ce moment est même pire que ce qui s’est passé après le 11 septembre. Car, à l’époque, Bush n’a pas interdit totalement les manifestations. Même si la présence policière a été accrue, les rassemblements n’ont pas été complètement interdits dans les villes. Ce qui s’est passé à Bruxelles est tellement extrême... Je ne me souviens pas avoir vu quelque chose de semblable en Amérique du Nord. Je pense que la stratégie actuelle des gouvernements est une vieille recette : ils utilisent une crise et la peur de la population pour mettre en place des politiques qu’ils essayaient déjà de faire passer — comme les restrictions des libertés individuelles, du droit à la vie privée, de la libre circulation des personnes, de la limitation de l’immigration. C’est un grand classique. Le fait que tout cela arrive ici, à Paris, au moment du sommet international sur le climat, nous éclaire également sur ce que les gouvernants décident de qualifier de crise ou pas : nous voyons aujourd’hui que cela est très subjectif. Nous sommes ici pour débattre de la crise climatique, une crise majeure pour l’humanité, mais qui n’a jamais été traitée comme telle par les élites. Nos dirigeants font tous de très beaux discours mais ne changent jamais les lois. Il y a clairement deux poids, deux mesures. Pour des raisons sécuritaires, ils feraient n’importe quoi, mais quand il s’agit de la sécurité de l’humanité, de protéger la vie sur Terre, c’est beaucoup de paroles et très peu d’actes. Ils n’ont jamais mis en place aucune mesure de régulation sérieuse pour les pollueurs, par exemple, et ils ne veulent pas que les accords qu’ils passent entrent eux soient juridiquement contraignants. Le protocole de Kyoto l’était. Mais voilà que nous faisons marche arrière.(...)

  • Après les attentats, la querelle des interprétations, par Joseph Confavreux (Mediapart, 25/11/2015)
    https://www.mediapart.fr/journal/france/251115/apres-les-attentats-la-querelle-des-interpretations?onglet=full

    Toute interprétation manichéenne est frappée d’inanité au moment où l’ampleur de la situation impose un « impératif de complexité », pour reprendre les termes du sociologue Edgar Morin. Comme vient de le souligner un texte aussi solide que précis de la revue en ligne Ballast : « Ceux qui pensent contenir pareils enjeux dans une seule réponse (au choix : "la haine de la liberté et de la civilisation", "le vide spirituel et le matérialisme", "la pauvreté et le désespoir", "le capitalisme mondialisé", "l’impérialisme occidental", "le sionisme", "l’islam", "le système racial", "l’islamophobie d’État") n’élucident rien : ils ne révèlent que l’obsession qui les habite. »
    http://www.revue-ballast.fr/paris

    Déjà, après les attentats de janvier dernier, l’historien Patrick Boucheron et l’écrivain Matthieu Riboulet soulignaient la nécessité de « dédaigner toute parole qui prétendrait, ne serait-ce que furtivement, trouver dans la situation présente la confirmation d’une conviction précédemment formulée ».

    S’interroger sur les cibles choisies par les assaillants reste toutefois nécessaire, puisque comprendre les djihadistes permet non de les excuser, mais de mieux les combattre. Et l’analyse n’est pas du tout la même selon que l’on met l’accent, pour le dire vite, sur les modes de vie ou sur la politique extérieure de la France.

    (…)

    Mais il est évident que la grille de lecture religieuse est insuffisante. Comme l’expliquait récemment Jason Burke, auteur d’un livre important sur l’attrait du djihad pour les jeunes occidentaux : _« Ce que les djihadistes offrent à ces jeunes, c’est ce que la culture du « gangsta rap » offre aussi. Les images postées sur les médias sociaux depuis Raqqa ou Mossoul ressemblent au rap : des jeunes avec des armes qui se présentent comme dangereux. Ce qui distingue l’Etat islamique d’Al-Qaida, c’est qu’il offre aussi des opportunités sexuelles, des mariages, voire des esclaves. Al-Qaida imposait un célibat forcé, avec pour ses membres une très forte probabilité de mourir. L’Etat islamique est différent. Sa base syrienne est bien plus confortable, bien plus accessible, les communications y sont bien meilleures que dans la zone pakistano-afghane.

    Il y a des voitures de luxe où ses combattants adoptent la pose classique des gangsters. On peut aussi imaginer qu’on y protège les faibles, ou qu’on obéit à une injonction religieuse. Au lieu d’avoir une vie relativement peu intéressante quelque part en Europe, vous devenez « Abou Omar al Britani » ou que sais-je. Vous avez un statut qui ne se serait jamais offert à vous auparavant. Ce qui est très clair aussi, c’est que le djihadisme version Etat islamique est très peu exigeant en termes religieux. Vous ne devez renoncer à presque rien, à part peut-être l’alcool. Il ne demande rien de difficile en termes d’apprentissage religieux, de voyage spirituel que la foi véritable exige. Il y a très peu de foi, de spiritualité là-dedans. »_

    • Après les attentats, changer d’imaginaire, par Christian Salmon (Mediapart, 22/11/2015)
      https://www.mediapart.fr/journal/france/221115/et-maintenant-changer-d-imaginaire?onglet=full

      On le sait depuis le 11 septembre 2001, le défi du terrorisme n’est pas militaire, il ne vise pas à établir un rapport de force stratégique, il n’est pas essentiellement religieux non plus, contrairement aux apparences. Est-il idéologique ? Pas davantage, si l’on entend par idéologie une vision cohérente du monde, un corpus de doctrines ou de concepts que l’on s’efforce de transmettre par l’éducation ou la propagande. Son défi essentiellement est narratif.

      (…)

      Une remarquable enquête du Washington Post auprès de défecteurs de Daech emprisonnés au Maroc décrit l’appareil de propagande comme une superproduction d’une émission de téléréalité. « Des équipes de tournage se déploient à travers le califat tous les jours, les scènes de bataille et de décapitations publiques sont scénarisées et mises en scène à tel point que les combattants et les bourreaux effectuent souvent plusieurs prises successives d’une même scène. Appareils photo, ordinateurs et autres équipements vidéo arrivent régulièrement de Turquie. Ils sont livrés à une division de médias dirigée par des étrangers traités comme des “émirs” à égalité de rang de leurs homologues militaires. Ils sont directement impliqués dans les décisions sur la stratégie et le contrôle du territoire... Vidéastes, producteurs et éditeurs forment une classe privilégiée dont le statut, les salaires et les conditions de vie sont enviés par des combattants ordinaires. »

      L’article poursuit : « Rejetant les codes de lectures utilisée par Al-Qaïda, les vidéos de l’État islamique sont cinématographiques et mettent l’accent sur des scènes dramatiques, des transitions stylisées et des effets spéciaux. “Le groupe est très soucieux de son image”, selon un responsable américain du renseignement impliqué dans le suivi des opérations médias de l’État islamique. Son approche obéit aux principes de la construction d’une marque au même titre que Coca-Cola ou Nike. »

      #jeux_vidéo #néolibéralisme #individu

      Ca va aussi dans le sens d’Olivier Roy (on assiste « non pas une #radicalisation de l’islam mais une islamisation de la radicalité », Salmon dirait un « #storytelling islamisant ») : http://seenthis.net/sites/828567

      Cf. aussi, cité par Salmon, « La métamorphose opérée chez le jeune par les nouveaux discours terroristes »
      http://www.bouzar-expertises.fr/metamorphose

    • Vont dans le même sens que Salmon et Roy, à bien des égards :
      Alain Bertho http://www.bastamag.net/Il-faut-etre-clair-un-monde-a-pris-fin-il-n-y-aura-pas-de-retour-en-arrier

      Nous ne sommes plus dans une démarche historique. On ne parle plus d’avenir mais de gestion du risque et de probabilité. On gère le quotidien avec des responsables politiques qui manipulent le risque et la peur comme moyens de gouvernement, le risque sécuritaire comme le risque monétaire (la #dette), qui parlent beaucoup du réchauffement climatique mais sont incapables d’anticiper la catastrophe annoncée.

      Peter Harling http://orientxxi.info/magazine/tuer-les-autres-se-tuer-soi-meme,1103

      Il est relativement facile de se rendre en Syrie pour rejoindre les rangs d’un « djihad » en forme de questionnaire à choix multiples. Les candidats peuvent cocher les cases suivantes : look combattant, propos virils, maniement des armes, construction d’une image valorisante sur les réseaux sociaux, retournement des stigmates habituels en emblèmes et réalisation de soi instantanée à travers une forme d’héroïsme très moderne malgré les références superficielles au Prophète de l’islam.

      Cette nouvelle identité clef en main, mâtinée de jeux vidéos et de télé réalité, se construit dans une érotisation de la violence dont l’OEI est davantage le produit que l’origine. Cette pornographie se donne à voir dans le culte de la sécurité qui s’approfondit dans la sphère culturelle et politique américaine, par exemple, où les notions de justice, de droit, de défense et d’intérêt national sont de plus en plus associées à des corps « bodybuildés », des discours dopés à la testostérone, des armes qui relèvent du fantasme et des orgies de violence qui sont censées tout régler. Et la virilisation de la politique intérieure et étrangère est un phénomène éminemment contagieux, une épidémie globale.

  • Pasolini, par-delà les détournements
    http://www.revue-ballast.fr/pasolini-par-dela-les-detournements

    « On entre dans un mort comme dans un moulin », disait Sartre. Pasolini connaît une étrange postérité : le communiste qu’il fut, anticolonialiste et fervent partisan de l’abolition de nos régimes d’esclaves et de maîtres, est devenu, ici et là, mais assez souvent pour que l’on puisse parler de « récupération », une référence au sein d’espaces nationalistes ou anti-socialistes. Comment expliquer que l’écrivain-cinéaste, qui agitait au-dessus de son œuvre « le rouge chiffon d’espérance », ait pu subir pareil destin ? En l’amputant ; en prélevant la lettre sans l’esprit. Source : Ballast

  • BALLAST Mona Chollet : « #Écrire, c’est un acte à part entière »
    http://www.revue-ballast.fr/mona-chollet-ecrire


    @mona chez Ballast, c’est quand les grands esprits se rencontrent!

    Cette répartition des rôles est tellement ancrée ! J’ai l’impression que l’#érotisme est foncièrement fondé sur cette distinction que le fait de troubler cet ordre-là, pour les #femmes hétérosexuelles, peut réellement créer des perturbations dans leur vie intime et amoureuse. Elles ont tellement l’habitude que ce qui est érotique soit d’être regardée et d’être un objet de #désir ! Avancer un point de vue, être active ou affirmer un désir — tout cela est assez lié — est perçu de manière agressive. La réalisatrice Claire Denis m’impressionne en cela dans sa manière de filmer les hommes. Je trouve sa démarche très audacieuse et belle, mais c’est assez rare, finalement. Cela reste ingrat pour une femme de s’affirmer comme créatrice. Ça revient à menacer un ordre, et renvoie une image souvent négative et déplaisante. Il faut un certain courage. C’est un sujet sur lequel j’aimerais bien travailler : les rapports entre #féminisme et érotisme. Énormément de femmes la jouent profil bas, et surtout ne voudront jamais se revendiquer comme féministes, ayant trop peur de bouleverser leur imaginaire érotique et leur rapport aux hommes. C’est perturbant de réaliser que nos fantasmes et nos désirs sont modelés par l’imaginaire #dominant, y compris dans ce qu’on croit avoir de plus #intime et de plus personnel.

    • D’une certaine manière, il y a une pensée religieuse qui imprègne le militantisme, y compris chez des gens qui se revendiquent parfois athées militants. Il y a un côté très judéo-chrétien dans l’engagement politique. Ça me paraît complètement stérile, et il ne peut en sortir que des choses très malsaines. Je pense que le nombre d’engagements motivés par une forme de culpabilité ou d’intimidation est très important. Il y a l’idée qu’il ne faudrait pas s’écouter, qu’il faudrait sortir de soi, se faire un peu violence. La glorification du « terrain » dans le militantisme rejoint ce que j’ai écrit sur le journalisme. Il faudrait une théorisation de l’utilité sociale de cela. Dans La Tyrannie de la réalité, je raconte comment, en Mai 68, l’écrivain Jean Sur a eu une forme d’illumination qui a changé sa vie. Il était assez désorienté, et il a demandé conseil à son ami Jacques Berque — grand islamologue et professeur au collège de France —, qui lui a répondu : « Augmentez votre poids spécifique. » Je trouve que c’est un excellent conseil. Je me méfie de la délégation de pensée, de l’homologation qui opère dans les structures militantes.

      Mais tellement. Et je le vois aussi à l’oeuvre même dans des milieux qui revendiquent une militance festive et joyeuse. C’est triste à quel point ça imprègne tout.

  • Zoe Konstantopoulou : « Le gouvernement grec a sacrifié la démocratie »
    http://www.revue-ballast.fr/zoe-konstantopoulou

    On connaît Zoe Konstantopoulou comme la seconde femme à avoir pris le rôle de présidente du Parlement grec. Largement élue à ce poste en tant que membre de Syriza au début du mois de février 2015, elle le quitta le 4 octobre de la même année, cette fois comme membre d’Unité populaire — un parti formé après l’annonce des élections anticipées. Tout au long de ces huit mois, Konstantopoulou a marqué les esprits pour son travail au sein de la Commission pour la vérité sur la dette publique grecque autant que pour son respect des règles démocratiques, son opposition forcenée à la capitulation du gouvernement Tsípras et sa vigueur à contredire l’affirmation que celui-ci n’avait pas d’autre choix… Elle s’est moins exprimée sur la question monétaire, sa vision actuelle des « plans B », ou encore sa courte mais (...)

  • BALLAST Thoreau, derrière la légende
    http://www.revue-ballast.fr/thoreau-derriere-la-legende

    Il en tirera Résistance au gouvernement civil, en 1849 (un détail plus conséquent qu’il n’y paraît : La Désobéissance civile est le titre, devenu concept politique et philosophique, sous lequel l’ouvrage est connu mais il n’est qu’un choix éditorial, survenu après le décès de l’écrivain – ainsi que le rappelle Michel Granger, dans sa biographie Henry David Thoreau, on ne trouve nulle trace de cette formule de son vivant : « L’usage du titre posthume revient, rapporte Granger, à figer la pensée de Thoreau », puisque la « désobéissance civile » n’est pas l’exact synonyme de « résistance »). Petit ouvrage de haute volée, par la densité et la vigueur du propos, comme le sont souvent les textes politiques fondateurs (songeons au Discours de la servitude volontaire de La Boétie ou au Manifeste du Parti communiste de Marx et Engels). Thoreau y déclare que la place de l’homme juste, lorsque son gouvernement ne l’est pas, se trouve en prison, tout en appelant explicitement à « la révolution ». Un ouvrage qui influencera Luther King et Gandhi – ce glorieux héritage contribuera malgré lui à tronquer sa pensée.

  • BALLAST Bérengère Kolly : « La #fraternité exclut les #femmes »
    http://www.revue-ballast.fr/berengere-kolly-la-fraternite

    Pendant mes études, j’ai d’abord travaillé sur la fraternité et les frères politiques. J’étais très confiante, pensant que la fraternité était nécessairement l’universel, l’inclusion, et le lien #politique à défendre. Ma première prise de conscience a été la lecture de Politiques de l’amitié de Jacques Derrida, paru en 1994. Derrida montre d’abord que la fraternité ne parvient pas à se détacher de la problématique de la race et du sang, et qu’elle est un paradigme de l’amitié politique. Il montre ensuite (les deux sont liés) que la fraternité, dans les textes, n’existe que sans les sœurs, et sans les femmes. Puis j’ai rencontré le travail des historiennes et des philosophes qui avaient montré, avant Derrida, et à l’épreuve de l’histoire des femmes, donc du réel, que la fraternité était une notion masculine (je songe à Joan B. Landes, Geneviève Fraisse, Lynn Hunt, Françoise Gaspard, Carole Pateman). J’ai donc décidé d’aller voir du côté de cette histoire que l’on ne disait jamais : les sœurs existaient-elles, avaient-elles quelque chose à dire, à revendiquer ? Pouvait-on, du côté des sœurs, trouver le modèle d’un autre lien politique ? Lorsque j’ai commencé ma thèse, je me suis rendu compte de deux phénomènes : soit les sœurs étaient absentes (la #sororité ne semblait pas exister, sinon comme notion miroir, pas très intéressante, de la fraternité — une sorte de « fraternité au féminin », comme disent parfois les dictionnaires —) ; soit la sororité était investie par avance d’un contenu (la solidarité entre toutes les femmes), et il semblait qu’il n’y avait pas grand-chose de plus à dire. J’ai donc choisi de faire une recherche ascendante, en allant chercher les textes où le mot de « sœur » était présent, et avait une signification politique. À partir de ces textes, j’ai essayé de faire émerger une définition. Je me suis alors rendu compte qu’il n’y avait pas de symétrie entre fraternité et sororité, pour deux raisons au moins. La première, c’est que les femmes ont longtemps été exclues du lien politique, puis discriminées : lorsque les sœurs se pensent, c’est dans une situation d’#exclusion, donc aussi de résistance aux frères.

    • Lorsque Ségolène Royal parle de sororité en 2007, les journalistes ont pensé qu’elle inventait un nouveau mot, comme avec la « bravitude » !

      Je me souviens que j’avais profité d’un effet de visibilité sur mon site grâce à Mme Royal. Dans mes liens j’ai une rubrique « Liberté, égalité, sororité » qui n’a pas changé depuis 2007 d’ailleurs http://www.madmeg.org/base/friandises/liens/feminisme.html et comme c’était une des rares occurrences de ce mot sur le web francophone de l’époque mes statistiques avaient explosé avec ce mot clé sur gogol.

    • La fraternité se pense initialement dans un contexte où les femmes sont exclues de la vie politique. La fraternité dit donc ce qu’il se passe : un lien entre des citoyens masculins. Cela énoncé, on pourrait en déduire qu’une fois les femmes incluses dans la vie politique, il n’y aurait plus de problème. Mais c’est un peu plus compliqué que cela. La fraternité ne fait pas qu’énoncer un lien politique masculin, elle le construit : elle est donc un instrument d’exclusion des femmes.

      Par mon père j’ai connu pas mal de trucs sur la franc-maçonnerie, un gros morceau de la « fraternité » en action. Il était à la Glnf qui refusait les femmes (je sais pas si ca à changé mais à l’époque c’etait non-mixte). Son ami (le même que l’histoire raconté ici http://seenthis.net/messages/420077#message420153 ) était aussi là dedans et disait qu’il aimait bien être « entre couilles ». L’exclusion des femmes était pour eux la base du truc, leur motivation profonde etait là.
      J’avais demandé un jour à mon père pourquoi il n’y avait pas de femmes dans leur club et il m’a répondu d’un air outré « Mais c’est impossible ! Il faut être torse nu pour le rituel d’intronisation, ça serait ridicule et déplacé avec des femmes. »
      Comme je connais pas mal de détails sur leurs rituels écossais rectifié niveau ridicule c’est pas quelques mamelles qui vont changer la donne.

      Par contre cette fraternité de maçonnerie à des effets directes contre les femmes. Pour trouver du travail ce réseau est utile, pour obtenir des crédits, des aides diverses, des plan pour un logements etc. En politique ca compte beaucoup et c’est un des gros lieu de rencontre entre grand banditisme, industrie et politique. J’ai l’impression d’enfoncer des portes ouverte en disant ca, mais mon vecu colle avec les rumeurs sur ces fraternités et ca montre bien ce qu’est vraiment une fraternité : un complot des hommes entre eux pour se garder le pouvoir et profiter de la mise en prostitution des femmes. Cf DSK et son « matériel », ou comment les contrats se négocient au bordel chez Vinci...

    • La sororité ne dure pas dans le temps car les divergences de classes et d’intérêts entre femmes sont réelles.

      Là je me demande pourquoi les fraternitées dépasseraient ce clivage de classes et d’interets contradictoire et pas le sororitées.
      Pour revenir à la maçonnerie, un exemple de fraternité bien nocif et toujours en place, je pense que le clivage de classe est présent. Par rapport à la GLNF mon père me disait qu’il fallait être théiste, sois disant ils acceptaient les juifs et les musulmans. Alors je veux bien croire qu’il y en ai des juifs et des musulmans mais un peu comme le copain alibi de service. Les rituels et symboles maçonniques sont bien fortement imprégné d’inspiration chrétienne alors ca a forcement de l’impacte sur la clientèle de ce genre de club. Par rapport aux classes sociales c’est plutot des bourgeois et pour y être invité il vaut mieu être « fils d’un maçon » ca limite le brassage comme ca. Il me reviens que le rituel d’intronisation pour les « fils de » est plus light que pour les nouveaux venus. Pour la maçonnerie il y a en tout cas un tri assez fin pour éloigné les hommes qui ne sont pas déjà assez haut dans l’échelle de la domination. C’est aussi un truc hiérarchique, ils s’appellent avec plein de titres comme dans le sado-masochisme ou l’armée ou l’église ...

      Bon comme le féminisme c’est pas être aussi moche que le masculinisme/patriarcat, l’intention des sororités n’est pas de discriminé comme le font les fraternités. Alors ne croyez pas que je parle de ma maçonnerie pour que les sororités s’en inspire !!!

    • La fraternité recouvre des questions de solidarité concrète, d’entre-soi et de connivence. Parler de fraternité, c’est mettre le doigt sur cet entre-soi, sur des formes de cooptations qui s’effectuent de manière non-mixte. On n’est donc pas seulement dans les liens publics, conventionnels entre citoyens, on est aussi ici dans l’intime et dans la relation. Interroger la fraternité, c’est également aborder ces aspects : le rôle de l’amitié, de l’entre-soi dans les partis politiques, de ses conséquences — y compris dans les prises de décisions. La sororité, pour sa part, ne parle pas seulement de solidarité entre femmes : elle dit aussi que le lien entre femmes est mouvant, pluriel. Le premier mouvement collectif féministe, en France, se constitue dans les années 1830, ce sont les saint-simoniennes, que l’on a déjà évoquées. Pour elles, dire « Nous sommes toutes sœurs » signifie : nous avons toutes un objectif, une flamme commune, mais nos modalités d’y parvenir peuvent être différentes, à la fois individuellement et collectivement. Concrètement parlant, les saint-simoniennes écrivent un journal, autofinancé, indépendant de toute tutelle intellectuelle, et choisissent de réfléchir collectivement au statut des femmes. Elles sont ouvrières, lingères, couturières. Elles décident de prendre en main leur propre sort et de réfléchir ensemble (la maternité philosophique est très présente) aux voies d’émancipation qui sont possibles pour elles. Elles écrivent des articles, proposent à leurs lectrices d’en écrire, ouvrent leurs colonnes à des femmes venant d’autres pays. Ces articles sont parfois contradictoires, et elles en discutent. Le titre de la revue change tout le temps. Leur union est donc mouvante, pratiquement parlant.

      #historicisation #histoire #saint-simoniennes

      ... les saint-simoniennes sont pour une forme de liberté sexuelle et disent en même temps que l’on ne peut pas imposer la liberté sexuelle. Chacune, en fonction de sa classe, de son histoire, de son vécu se débrouille avec ce qu’elle est et avec les objectifs d’égalité et de liberté.

      A mettre en perspective avec ceci ; http://seenthis.net/messages/420872
      et se rendre compte à quel point on n’avance pas d’un iota...

    • L’égalité des sexes semble alors devenir une forme de consensus mou, ou de vernis posé sur la pensée politique. Au contraire : si on remet l’égalité des sexes au cœur des préoccupations politiques, on verra que les clivages ne sont pas si brouillés que cela.

    • @mad meg

      Là je me demande pourquoi les fraternitées dépasseraient ce clivage de classes et d’interets contradictoire et pas le sororitées.

      Je risque d’enfoncer une porte ouverte, de dire en moins bien quelque chose qui a déjà été énoncé, mais tant pis si je me fiche par terre tout seul, j’essaie. (je n’ai pu lire l’article de ballast, « site suspendu »)

      Il me semble pour aller vite, que fraternité et sororité ne relèvent pas de la même chose. Pour la simple raison que la fraternité est une alliance sinon purement entre dominants, du moins dans leur langue . Liés ainsi par la défense d’un privilège, commun. Contre les femmes. Qu’elle relève et participe donc pleinement de l’intériorisation des privilèges masculins en patriarcat.
      Et qu’en ce sens, les fraternités ne sont certainement pas confrontées à la même nécessité que peuvent l’être des sororités de « dépasser » des clivages de classes et d’intérêts. Je ne sais quel mot employer - mais en un sens, elles les précèdent, ou plutôt, ces clivages ne peuvent jamais les menacer que jusqu’à un « certain point », voir fonctionnent en les renforçant (recours à la féminisation/dévirilisation des hommes dominés, qui ne sont dans cette mesure plus concernés par une fraternité dont ils ne relèvent plus essentiellement).
      Face à ce quasi-donné, à cette construction qui dispose de l’appui de l’ensemble de la structure patriarcale, toute sororité me semble devoir elle être conquise au prix d’une lutte permanente, d’un effort de conscience toujours soutenu et rencontrant plus d’une forme de résistance et d’hostilité.

      J’espère ne pas avoir été inopportun.

    • Tu n’est pas du tout inopportun @martin5 tes remarques, et réflexions sont les bienvenues.
      Pour la question auquel tu répond, l’article dit aussi la même chose. C’était une question que je m’étais posé au fil de ma lecture et j’avais fini par y répondre aussi mais tu fait bien de développer ce point qui est très important. J’espère que tu pourra lire l’article car il est très riche et interessant et qu’on pourra en discuter :)
      Bonne journée

    • Mince j’avais besoin de relire ce texte pour un dessin en cours, mais Ballast fait sa maintenance. Du coup j’ai été voire #wikipédia et comme d’hab c’est le règne du révisionnisme masculiniste ;

      La fraternité ou l’amitié fraternelle est, au sens populaire du terme, l’expression du lien affectif et moral qui unit une fratrie. « Fraternité » vient du latin « frater » qui désignait tout membre de l’espèce humaine. Pour spécifier un lien de descendance, il fallait accoler l’adjectif « germain » évoquant le « germen », la graine


      https://fr.wikipedia.org/wiki/Fraternit%C3%A9

      La partie sur la révolution française ne mentionne même pas que les femmes et les personnes racisées n’étaient ni libres, ni égales, et que la notion de fraternité n’avais strictement rien d’universel à l’époque puisqu’elle ne s’appliquait pas à ces groupes et ne s’y applique d’ailleurs toujours pas. Les femmes n’étaient pas citoyennes, elles n’avaient pas le droit de vote, et il n’y a pas de mention du fait que les esclaves non plus ne votaient pas.

    • La fraternité à l’épreuve des femmes.

      Conférence donnée par Pierre Pasquini dans le cadre des rencontres de Philo Sorgues.
      http://www.philosorgues.fr/index.php/43-la-fraternite

      Mais la fraternité est une forme masculine, ce sur quoi s’interroge Derrida. « Le frère, fut-il orphelin, est un fils et donc un homme. Si on veut y inclure par exemple la femme ou la fille, il faut peut-être changer de mot (Le toucher, p36).

      3.La fraternité à l’épreuve des femmes.

      La Révolution française est révélatrice à cet égard. La notion de fraternité la parcourt de part en part, orchestre la période qui va de 1789 aux premiers mois de l’an II. Elle est inclusive au départ, puisqu’elle peut se comprendre comme l’union des frères et des sœurs. Mais elle peut aussi fonctionner de façon exclusive. L’ajout du mot de sœur après celui de frère ne suffit pas, en effet, à faire fonctionner l’ensemble, car la métaphore familiale ne se réduit pas à la relation frère/sœur. Elle concerne également, du côté féminin, le rôle et l’image de la mère, en confrontation à celle du père. Or ces deux images (mère/sœur) et ces deux réalités vont interférer de façon conflictuelle dans le thème –et la revendication- de fraternité. Quelques décennies après, l’historien Michelet l’exprimera de façon très claire, bien que sans doute involontaire. « J’espère une société pure, libre, forte, où la table de la fraternité reçoive à sa première place l’épouse, la mère, la vierge » (L’amour, la femme). Comme on le voit, les femmes reçues à cette table ne sont pas celles qui peuvent prendre place à la même table, de la même manière, de façon égale : les sœurs.

      Comment les sœurs ont-elles disparu de l’énumération, et cela a-t-il une signification relativement à la fraternité et au statut des femmes ? Bérengère Kolly montre que, de 1789 à l’interdiction des clubs féminins en 1793, les femmes se sont emparées de cette question de la fraternité politique. Elle part d’une hypothèse liée à la question centrale de l’égalité des sexes, liée à la figure de la mère : « La Révolution française n’a pas pensé les sœurs politiques. Par contre elle a pensé les mères républicaines qui, de mon point de vue, entravent la venue des sœurs politiques. L’exclusion des sœurs de la fraternité n’est donc pas fortuite, elle est le signe d’une division des sphères domestiques et politique, elle-même guidée par une différenciation des rôles entre hommes et femmes » (La fraternité à l’épreuve des femmes, Genre et histoire, 2008).

      On peut reprendre à cet égard les grandes étapes du combat des femmes révolutionnaires pour la reconnaissance et des résistances à ce combat. Par exemple le discours prononcé en 1791 au cercle social, et reproduit dans le journal La bouche de fer : « Le trône d’une femme est au milieu de sa famille, sa gloire est dans la gloire des enfants qu’elle a élevés pour l’Etat ». Rappeler en particulier le rôle d’Olympe de Gouges (1748-1793), ainsi que les demandes faites par les femmes de pouvoir porter les armes, de former des associations.

      Celles qui le demandent ne sont pas des femmes assez familiales pour être admises au sein de la République. Ce sont des femmes publiques, opposées aux bonnes mères de famille. Et quand, le 21 septembre 1893, la cocarde tricolore est instaurée pour les deux sexes, le décret sème la panique : ressort le fantasme des cheveux courts, du port des armes et du renversement des rôles. Un mois plus tard, le 30 octobre 1793, l’interdiction des clubs féminins, puis la condamnation d’Olympe de Gouges (guillotinée le 3 novembre) sont accompagnées de mises en garde contre les « femmes-hommes » qui voudraient être hommes d’Etat. C’est un coup d’arrêt fatal au mouvement révolutionnaire des femmes et à leurs revendications. La femme est refusée à l’amitié comme à la fraternité. Elle est seulement amour, débordement maternel et amoureux qui ne peut, du coup, satisfaire aux exigences éthiques et politiques de la philia : la fraternité, en ce sens, exclut la mixité.
      4.Le mouvement complexe de la fraternité.

      La fraternité qui ne se vit que du côté masculin « active les rouages de l’égalité, de l’amitié et de la rivalité », comme le dit B. Kolly. L’élément essentiel en est la mère éducatrice, soutien nécessaire et contrepoids impératif d’une sœur toujours subversive, même en puissance. La fraternité politique ouvre le débat sur l’égalité politique et l’entrée des femmes dans l’espace public. Elle est donc partie prenante de l’histoire du féminisme. Mais ce débat en apprend aussi beaucoup sur ce que l’on pourrait appeler le mouvement originaire et complexe –sinon contradictoire- de la fraternité. En arrachant le lien entre les personnes à son origine familiale tout en le nommant comme s’il en faisait effectivement partie, la fraternité pose une exigence de reconnaissance mutuelle des frères, qui implique plus qu’un rapport de droit, un lien d’amitié. Ce lien d’amitié ne saurait toutefois recouvrir les tensions, rivalités et conflits qui peuvent exister entre les amis, qui gardent leur propre personnalité. Peut-on assumer une amitié qui garde en elle ce secret de la possibilité de la différence, du conflit ? C’est l’enjeu de la fraternité exprimé parfois de façon violent à travers la question de la place des femmes. C’est pourquoi on peut dire que les revendications féminines éprouvent la fraternité.

      Elles permettent de comprendre les réticences avec lesquelles celle-ci a pu être envisagée.

      « En comparaison avec les idées de liberté et d’égalité, l’idée de fraternité a moins de place dans la théorie de la démocratie. Beaucoup voient en la fraternité un concept moins précisément politique, qui ne définirait aucun des droits démocratique » (Rawls, Théorie de la justice, p171).

    • http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/tlfiv5/affart.exe?19;s=3325650840;?b=0 ;

      Étymol. et Hist. Ca 1140 fraternited « lien existant entre personnes ayant des relations fraternelles » (G. GAIMAR, Hist. des anglais, éd. A. Bell, 4335). Emprunté au latin fraternitas « confraternité ; relations entre frères ».

      L’étymologie marque bien le masculin, mais la définition de ATILF fait comme si ce n’était pas le cas et efface cette spécificité. J’imagine que les définitions de ATILF sont dictées pas les 40 masculinistes de l’académie française.

      –---
      LA FRATERNITÉ MAÇONNIQUE :

      RÉALITÉ OU UTOPIE ?

      SYNTHÈSE DES CONTRIBUTIONS ECRITES DES DIVERS ATELIERS AUX 14e REHFRAM

      Lomé, les 3, 4 et 5 février 2006
      http://sog2.free.fr/802/Documents.Rituels/Afrique.Rehfram206Lome.Synthese.htm

      Par ailleurs, d’aucuns définissent la « fraternité » comme le lien de solidarité et d’amitié devant exister entre les membres d’une société. Mais la fraternité n’est pas la solidarité, bien que les deux termes soient souvent synonymes et puissent être employés l’un pour l’autre. La solidarité implique une communauté d’intérêts ou, plus exactement, de but et d’action, une obligation d’entraide dans l’accomplissement d’un même destin. Tous les combattants d’une même armée par exemple sont solidaires dans la défaite ou la victoire. Ils ne se sentent pas nécessairement frères. La fraternité n’est non plus l’amitié. Assurément, une amitié peut devenir fraternelle, mais la fraternité n’est jamais amicale. L’amitié est essentiellement élective. On choisit ses amis, on ne choisit pas ses frères, pas plus dans le noyau familial que dans un groupement religieux ou maçonnique. Aimer un ami comme un frère signifie bien que les liens de la fraternité viennent s’ajouter à ceux de l’amitié élective et les renforcer.

      #solidarité #amitié

    • #merci
      Je note en vrac qq idées qui me viennent
      – des lieux de fraternité exclusifs comme le sport construits sur des valeurs masculines qui s’opposent à celles édictées pour les femmes (beauté, douceur, compréhension) avec l’interdit homosexuel en fond
      – les clubs de geeks logiciel libre avec 92% d’hommes, avec la théorie sur le pourquoi de l’informatique (exclure la matrice féminine)
      – la construction hiérarchique des rapports intra familiaux dictée par l’Histoire, avec l’ainé héritier masculin, cf la loi salique http://www.elianeviennot.fr/FFP-loi-salique.html

    • Merci @touti
      Les bordels et lieux de prostitution sont aussi des lieux exemplaire de fraternité. C’est d’ailleur aussi en lien avec la fraternité sportive couvert par l’expression « 3 eme mi-temps ».
      L’initiation à la domination sexuelle des femmes par les jeunes hommes passe la plus part du temps par la prostitution et la pornographie (qui est de la prostitution filmée). Le « frère » âgée emmène le jeune homme se « déniaisé » au bordel et les frères qui se refilaient hier les revues porno, aujourd’hui s’échangent les adresses internet les plus trashs.
      Les forum de prostitueurs sont aussi des lieux dans lesquels les hommes fraternisent en classant et sanctionnant les prostituees.

      Les banques et places financière sont aussi des lieux de fraternité. La bourse, c’est chasse gardée masculine. Les révélations des Panama Paper ont dévoilé de nombreux produits banquaires spécifiquement concu pour éviter aux hommes divorcés de payer des pensions à leur ex compagne. Les paradis fiscaux sont des lieux fraternels. De plus en ne payant pas d’impôts ces hommes millionnaires appauvrissent avant tout les femmes puisque ce sont elles les plus touchés par la pauvreté suceptibles de profiter des aides sociales distribuées par l’état.

      Les religions sont aussi fraternels, le clergés est masculin (a 100% quand on monte en hiérarchie) et s’organise pour opprimer les femmes. Les croyants s’appellent d’ailleurs volontiers « mon frere » entre eux.

      Ah et j’oublie l’armée et ses freres d’armes !

    • Ballast est toujours en maintenance. Reviens Ballast tu me manque ! J’ai besoin de ton texte sur la fraternité et je sais même pas dans quel numéro il est pour le prendre en librairie.

      edit - C’est pas dans le #1, #2 ni le #3 selon ce lien ;
      https://adeneditions.com/category/revue-ballast
      vu les dates ca devrais être dans le #4. Je voie que la librairie que j’aime bien a coté de chez moi diffuse la revue, chouette. http://www.aden.be/uploads/Ballast4enlib.pdf
      Y a plus de problème, Ballast peu rester en maintenance ^^
      Désolé pour ce message totalement inutile.

  • Palestine : Naplouse, l’indomptable 1/2
    http://www.revue-ballast.fr/palestine-naplouse-lindomptable-12

    Revenir à Naplouse dix ans après l’avoir quittée, c’est assister à une petite métamorphose. Les habitants qui ont pu fuir la ville, au commencement de la seconde intifada, reviennent souvent avec la même histoire : ils ne reconnaissent pas leur ville. En quelques années, la deuxième plus grande agglomération de Cisjordanie a subi une transformation profonde. Naplouse s’est reconstruite, mais elle y a laissé une partie de son âme. (...) Source : Ballast

  • BALLAST Quand les élites mondiales récupèrent le #féminisme
    http://www.revue-ballast.fr/quand-les-elites-mondiales-recuperent-le-feminisme
    http://www.revue-ballast.fr/wp-content/uploads/2015/09/BANDEAUFEM.bmp

    En légitimant le travail des femmes, les pays riches de l’Occident ont permis aux propriétaires d’industries, dans des pays tels que la Chine, le Viêt Nam et la Malaisie, de qualifier le recours à une main-d’oeuvre majoritairement féminine dans le secteur manufacturier comme un geste féministe – au regard de la création d’emplois rémunérés pour les femmes. En effet, n’entend-on pas continuellement Nicholas Kristof du New York Times défendre ces usines, vociférant qu’elles sont des lieux d’opportunités pour les femmes ? N’est-ce pas mieux pour elles, demande-t-il à ses lecteurs, d’avoir un emploi que de devoir fouiller les décombres des dépotoirs afin de trouver de quoi se nourrir ou des objets à vendre ? L’utilisation d’une main-d’oeuvre féminine bon marché dans la production de biens d’exportation n’a rien de nouveau. C’est la Corée du Sud qui est à la tête de ce « miracle économique » : où l’on a sorti les femmes de la campagne pour les confiner au travail manufacturier. Comme l’a suggéré l’économiste politique Alice Amsden en 1989, l’écart des salaires entre les hommes et les femmes est l’un des éléments clés du succès de l’industrialisation en Corée du Sud.

  • BALLAST Bernard Friot : « Nous n’avons besoin ni d’employeurs, ni d’actionnaires pour produire »
    http://www.revue-ballast.fr/bernard-friot

    Dans l’une de vos conférences, vous affirmez que la France n’est pas un État laïc. Pouvez-vous nous expliquer en quoi le capitalisme est une religion, d’État qui plus est ?

    La France est un État partiellement laïc et c’est heureux : la laïcité, en séparant l’État des religions, est une condition de l’émancipation populaire, car les religions sont de puissants systèmes d’adhésion à la classe dirigeante. Mais justement, il y a une religion qui, loin d’être séparée de l’Etat, y règne en maître : c’est la religion capitaliste. Entendons par là un ensemble très construit de dogmes, de croyances, de rituels, qui font passer pour divine la violence des institutions du capital. Les dogmes sont construits par la prétendue « science économique », qui s’est imposée à l’université en excluant les hétérodoxes des postes de professeur et qui formate tout le discours des gouvernants et des médias. Plus la réalité infirme le dogme, plus il est raffiné, avec l’affirmation classique de toute religion : c’est parce que nous ne sommes pas assez fidèles au dogme qu’il n’informe pas encore suffisamment le réel ! La prétendue « science économique » procède par injonction permanente. Les croyances permettent d’intérioriser les injonctions du capital : nous présenter sur le marché du travail comme « demandeurs d’emploi » (alors que nous sommes les seuls producteurs de la valeur !) parce que nous croyons que seuls ceux qui ont un emploi produisent de la valeur économique ; nous soumettre aux marchés financiers parce que nous croyons que l’on ne peut financer l’investissement (et créer de la monnaie) que par crédit ; accepter la rémunération du capital parce que nous croyons que l’outil de travail crée de la valeur ; apprendre à vivre avec la souffrance d’un travail mené sous la dictature du temps parce que nous croyons que la mesure naturelle de la valeur, c’est le temps de travail. Je m’en tiens à ces exemples, mais les croyances capitalistes nous enserrent dans un filet très fin.

  • Grèce : pas de démocratie sans désobéissance aux traités
    http://www.revue-ballast.fr/pas-de-democratie-sans-desobeissance-aux-traites

    « Nous serons originaux, en respectant après les élections ce que nous disions avant »1, avait annoncé Alexis Tsípras. Quelques mois plus tard, force est de constater que l’originalité se situe ailleurs : un nouveau paquet d’austérité est endossé par la « gauche radicale » élue pour y mettre fin. Pour justifier cette mutation, toute critique est renvoyée à cette question : « Qu’auriez-vous fait à sa place ? » Ce à quoi on peut répondre, sans hésitation : autre chose, autrement. Source : Ballast

  • Que pense Podemos ?

    Les radicaux de gauche qui analysent le discours des leaders de #Podemos, nomment déjà le parti Habrias podido ("Nous aurions pu").

    http://www.revue-ballast.fr/que-pense-podemos-14

    Les commentateurs officiels peinent encore à définir Podemos, que l’on dit pourtant aux portes du pouvoir. Cet objet politique non identifié bouscule les petites cases de la clique médiatique : populistes, eurosceptiques, alter-mondialistes ? Et chacun d’y aller de son étiquette ou d’agiter le traditionnel chiffon rouge : communistes, marxistes-léninistes, chavistes, bolivariens, castristes, etc. Que pensent, au fond, ses fondateurs ? Quels sont leurs stratégies, leurs références, leurs leviers théoriques ? Qui est à la barre de ce mouvement qui ne cesse d’appeler à couper la société en deux : non plus entre la gauche et la droite, mais entre le peuple et les puissants. Nous les avons lus, et écoutés, en langue espagnole. Itinéraire d’un mouvement qui perturbe échiquiers et agendas politiques.

    Et aussi un article du Diplo en #paywall :

    Pourquoi y parviennent-ils et pas nous ? Depuis l’émergence de Podemos en Espagne, la question hante la gauche radicale européenne. Interrogés à ce sujet, les dirigeants de la jeune formation espagnole expliquent volontiers leur succès par le choix d’un populisme assumé, nourri des travaux de l’intellectuel argentin Ernesto Laclau (1935-2014), professeur de théorie politique à l’Université britannique de l’Essex de 1973 à 1997. Cette pensée leur a offert une singulière martingale : la capacité d’épouser la nature protéiforme des revendications liées au mouvement du 15-M (pour « 
    15 mai », c’est-à-dire l’immense mouvement de mobilisation populaire qui a débuté au mois de mai 2011) tout en réhabilitant la notion d’intérêt général. Elle n’en suscite pas moins quelques interrogations.

    http://www.monde-diplomatique.fr/2015/09/KEUCHEYAN/53712

    #Espagne #15M #Podemos #élections #discours_politique #ovni #stratégie_politique #radicalité #lutte_des_classes

  • BALLAST Les tribunaux d’arbitrage contre les peuples
    http://www.revue-ballast.fr/les-tribunaux-darbitrage-contre-les-peuples
    http://www.revue-ballast.fr/wp-content/uploads/2015/08/ImageALAUNE.bmp

    Le 10 juin 2015, le Parlement européen devait se prononcer sur la poursuite des négociations entre l’Union européenne et les États-Unis pour l’édification du Grand marché transatlantique (GMT, TAFTA ou encore TTIP). L’opacité générale qui entoure ces tractations ainsi que le reste de sens démocratique de certains députés sociaux-démocrates ont forcé le président du Parlement, Martin Schulz, à reporter le vote1. Ce raté dans la procédure d’acceptation tient en grande partie aux dissensions portant sur une clause particulière du texte : la création de tribunaux indépendants d’arbitrage. La plupart des traités de libre-échange signés dans le monde ont mené à la création de tels tribunaux. Quelles leçons pouvons-nous tirer de ces expériences ?

    Rappel : Grande semaine de mobilisation internationale contre les traités de libre- échange en cours de négociations du 10 au 17 octobre 2015

  • BALLAST Les tribunaux d’arbitrage contre les peuples
    http://www.revue-ballast.fr/les-tribunaux-darbitrage-contre-les-peuples

    Les mesures d’aide au développement durable sont, par ailleurs, régulièrement mises en accusation. À la suite d’une plainte, l’Ontario (Canada) a dû renoncer à sa politique de soutien aux entreprises locales investies dans la transition énergétique19. Mais il y a mieux encore. Veolia n’hésite pas à remettre en cause les mesures gouvernementales en matière sociale : le 25 juin 2012, cette société française a porté plainte auprès du CIRDI contre l’Égypte, considérant que la revalorisation du salaire minimum de 31 euros contrevenait à ses profits20. De même, Tampa Electric a obtenu 25 millions de dollars du Guatemala pour avoir plafonné les tarifs de l’électricité21. La Libye, quant à elle, a été condamnée à verser 900 millions de dollars à un plaignant ayant investi seulement 5 millions de dollars dans un projet de tourisme. Celui-ci jugeait que l’instabilité politique actuelle attentait à ses profits et constituait une expropriation indirecte. Cette condamnation va à l’encontre des décisions arbitrales antérieures, qui ont généralement jugé que les profits perdus ne peuvent être accordés que si l’entreprise en question dispose d’un bilan de la rentabilité des opérations, de sorte que les bénéfices futurs peuvent être établis avec suffisamment de certitude, ce qui n’était pas le cas ici. Mais qu’importe, 900 millions de dollars, une bagatelle pour un pays comme la Libye22. L’Argentine, amenée à prendre des mesures d’urgence à la suite de la crise économique qu’elle connaissait, a été tout particulièrement attaquée. Le peuple argentin a été condamné à payer 500 millions de dollars à cinq entreprises pour avoir dévalué sa monnaie23. Au total, depuis 2002, ce pays a essuyé 52 plaintes. Parmi celles qui ont été traitées, 10 ont déjà mené à la condamnation du pays. Plus récemment, l’État argentin a dû verser 405 millions de dollars à Suez Environnement24 à la suite de la résiliation par le gouvernement de son contrat de concession et d’assainissement des eaux, l’expérience de la privatisation de ce secteur s’étant soldée par une hausse des prix, des défauts de maintenance, des problèmes de contamination des eaux et des coupures d’eau rapides en cas de facture impayée.

  • BALLAST Yanis Varoufakis : « Que voulons-nous faire de l’Europe ? »
    http://www.revue-ballast.fr/yanis-varoufakis

    Je ne crois pas que la sortie représente une voie optimale pour les progressistes. La sortie pourrait être envisagée en tout dernier ressort. Mais si vous êtes poussé dans une impasse, comme nous l’avons été, quand on vous dit « La bourse ou la vie », « L’accord (non-viable) ou dehors », ma tentation serait de dire : « Je ne sors pas, poussez-moi dehors ! » Et alors, s’ils sont prêts à faire cela, sachant qu’il n’y a aucune base légale qui le prévoit, aucun cadre juridique pour pousser un État vers la sortie, on aura démontré que c’était une menace vide de sens. Mais dès lors que l’on commence à croire à la menace, elle n’est plus vide, elle est auto-réalisatrice. Décrire, comme vous l’avez fait, la manière dont fonctionne l’Union européenne, avec l’unanimité, etc., c’est décrire une organisation foncièrement conservatrice. En économie, pour ceux qui l’ont un peu pratiquée, c’est ce que l’on appellerait une sorte de principe de Pareto. Ce principe, ou optimum, dit que toute nouvelle mesure qui améliore la situation d’au moins un acteur, sans pour autant dégrader celle d’un autre, est bonne à prendre. Et ça paraît assez décent et logique, n’est-ce pas ? Si nous pouvons faire quelque chose et améliorer la vie des uns sans dégrader celle des autres, pourquoi ne pas le faire ? Pourtant, si vous n’agissez que selon ce principe de Pareto, vous découvrez qu’il est extrêmement conservateur, parce qu’il y a le revers de la médaille : si vous ne voulez rien faire qui dégrade la situation d’un seul acteur, alors en pratique vous ne faites… rien ! Parce qu’il y aura toujours quelqu’un qui sera dérangé, il y aura toujours des gens dont les intérêts seront remis en cause par les avancées progressistes. Alors oui, l’Europe a été construite volontairement sur la base d’un principe de Pareto conservateur, avec des décisions prises en réalité par un ou deux. Ce que ces gens décident est adopté, et quand nous voulons changer quelque chose pour le bénéfice d’une vaste majorité, on nous oppose ce principe de Pareto, et nous sommes ligotés. C’est pour cela qu’il est indispensable de pousser dans la direction d’une décentralisation qui doit aller de pair avec l’européanisation. Cela paraît un peu… complexe, mais j’aime les contradictions — car ce n’est qu’à travers elles qu’on peut avancer. Mais il faut qu’il s’agisse de contradictions rationnelles, progressistes.

    #varoufakis #grece #crise #troika

  • BALLAST Yanis Varoufakis : « Que voulons-nous faire de l’Europe ? »
    http://www.revue-ballast.fr/yanis-varoufakis

    Nous sommes devenus ce stupide continent, et nous avons un euro très mal adapté à nos besoins. En attendant de le rendre viable, peut-être aurons-nous besoin de devises parallèles. Peut-être avons-nous besoin, d’ailleurs, non pas tant de devises que d’un système de paiement parallèle, d’une sorte de version locale de liquidité, libellée en euros. Je pense que nous en aurons besoin. Et j’ai publié récemment, dans le Financial Times, un article1 dans lequel j’explique ce qui se passerait dans ce cas, ce qui se passerait en France. Rendre quelques degrés de liberté aux gouvernements nationaux sans sortir de l’euro ni même créer d’autres devises, créer plutôt un système parallèle de paiement utilisant l’euro comme unité de compte — c’est possible. Pour moi, c’est ce qu’il faut faire, dans le même temps que l’on essaie de créer une coalition européenne pour réparer les dégâts politiques et économiques, et notre monnaie elle-même.

    #euro #Europe #monnaie