/2015

  • La gauche actuelle est thermidorienne et cynique
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/04/10/la-gauche-actuelle-est-thermidorienne-et-cynique_4613863_3232.html

    La nouveauté que les thermidoriens vont léguer à la gauche contemporaine réside dans leur très forte capacité à habiller le cynisme et un amour inconsidéré du pouvoir pour le pouvoir des oripeaux du progressisme. Si l’on ne saurait exonérer les thermidoriens d’un minimum de convictions, ce qui les caractérise avant tout c’est une passion pour le pouvoir et de tout ce qu’il permet. Dans cette perspective, les nombreux dirigeants du PS qui sont issus de l’extrême gauche ne sont pas sans rappeler tous ces ex-conventionnels adeptes de la terreur qui sauront très bien se reconvertir après le 9 thermidor et entamer, pour beaucoup d’entre-eux, des carrières très fructueuses (à tous les points de vue), on pense ici à Fouché.
    (…)
    Enfin, dernier legs de Thermidor : l’institutionnalisation du pouvoir intellectuel. C’est dans cette période que va, en effet, s’institutionnaliser le pouvoir intellectuel en France avec la création de l’Institut et la domination des fameux idéologues tant raillés par Bonaparte puis Napoléon. Dès lors, l’intellectuel français va adopter des caractéristiques qui ne le quitteront plus. Il sera philosophiquement progressiste, socialement bourgeois, très souvent anticlérical ou athée, profondément élitiste (même s’il proclame le contraire) et très souvent fâché avec le monde réel. Et conclurons-nous très proche des pouvoirs établis ! L’intellectuel de gauche n’est pas né avec l’affaire Dreyfus, il est un enfant de Thermidor.

  • Pourra-t-on encore consommer des produits laitiers ?
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/04/08/pourra-t-on-encore-consommer-des-produits-laitiers_4612062_3232.html

    Pour continuer à manger des bons #produits_laitiers en quantité modérée, pour épargner aux éleveurs la conduite infernale des futures usines à #lait, pour maintenir sur tout le territoire des élevages écologiques de vache laitière, il est temps de changer de paradigme, d’écrire la charte d’une production laitière écologique et durable, de la mettre en application et de stopper la course au rendement laitier. C’est en maîtrisant le volume de ses productions que la viticulture a réussi à maintenir ses revenus. C’est en consommant moins de produits laitiers dont on connaîtra la qualité et l’origine que la #santé humaine sera mieux gérée et l’avenir de l’#élevage mieux assuré. Mais que font nos politiques, n’ont-ils qu’une compréhension à court terme des conséquences de leur décision, nos éleveurs auraient-ils perdu leurs liens avec la nature et les consommateurs tout sens critique ? Les industriels nous auraient-ils transformés en veaux ?

  • J’avais demandé sur un rézosocio moins beau que SeenThis « où trouver des textes soutenant le projet de loi Renseignement (alias Frenchiot Act, alias Surveillance Généralisée, notamment de l’Internet) » puisqu’il me semblait que seuls les adversaires de ce projet s’exprimaient et argumentaient.

    Des gentils membres ont trouvé :

    Un article ancien (bien avant Charlie) d’une fondation Jean Jaurès (pauvre Jaurès) qui développait déjà le futur système de surveillance généralisée http://www.jean-jaures.org/content/download/16644/162418/version/2/file/Vadillo_renseignement.pdf

    Un rapport du député PS (Pro-Surveillance) Urvoas, le représentant des « services » à l’Assemblée Nationale : « Aux exégètes amateurs qui comblent leurs lacunes par des préjugés et à ceux de mauvaise foi pour qui le soupçon tient lieu de raisonnement, il faut opposer une analyse dépassionnée du droit » http://www.nextinpact.com/news/93746-loi-renseignement-urvoas-sen-prend-a-amateurisme-et-mauvaise-foi-o

    Un article d’un blog pro-militaire et pro-services « Décrié voire moqué, le texte issu1 du projet de loi relatif au renseignement se singularise moins par son contenu que par le manque de conviction de ses partisans à le défendre. Stagne un brouillard qui favorise la crainte bien légitime d’une loi qui serait liberticide. Le dissiper demanderait une communication claire des partisans de ce texte. » http://conops-mil.blogspot.fr/2015/04/loi-renseignement-faussement.html Cet article défend le projet mais en critique sévèrement les limites.

    Un point de vue plutôt trollesque, sur un forum souverainiste-Internet http://www.forumatena.org/node/663#art2

    #Frenchiot_Act #PJLrenseignement #surveillance_Internet

  • « La grève à Radio France est d’utilité publique », par les grévistes de Radio France
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/04/04/radio-france-une-greve-d-utilite-publique_4609807_3232.html

    Depuis dix-sept jours, à #Radio_France, les irresponsables ne sont pas ceux que l’on croit. Depuis dix-sept jours, les salariés en #grève, qui échangent et se battent pour la défense de vos antennes, ont une douloureuse conscience de ce qui se joue pour l’avenir de la radio de service public. Mais cela fait bien plus de dix-sept jours que nous réclamons à notre PDG un vrai projet stratégique. Dix mois déjà que nous attendons des réponses, qu’on ne nous parle que de formats et non de contenus, de marques et non d’identité d’antennes, d’argent et non de richesses.

    L’homme invisible de la Maison de la radio préfère courir les plateaux télé pour minorer honteusement le nombre de grévistes et répéter en boucle que Radio France est le « problème ».

    Non, nous ne sommes pas un problème mais une ressource, et donc une solution. Nous ne sommes pas un frein à la modernité mais au contraire, des acteurs de notre transformation, vigilants et éclairés. Contrairement aux clichés les plus faciles, nous ne sommes pas contre les réformes, nous réclamons une gestion honnête et efficace de notre entreprise.

    (...) Radio France n’a pas pour vocation de faire du profit, mais doit gérer sainement ses finances, et cela en revanche, est de la responsabilité de nos dirigeants. Ceux qui s’engageront sur cette voie nous trouverons toujours à leurs côtés.

    Or, #Mathieu_Gallet gaspille l’argent public pour son image et son confort personnel plutôt que de s’investir pour l’image de Radio France. Le CSA a peut-être été séduit par sa « modernité », nous sommes atterrés par sa désinvolture.

    (...) Dans cette Maison chargée d’histoire, lieu de tant de découvertes, espace de liberté et de pensée, nous voulons au minimum être représentés par quelqu’un d’exemplaire. C’est le sens de notre motion de défiance. L’Etat doit nous dire clairement s’il veut faire vivre le service public de la radio avec des moyens à la hauteur de ses ambitions. Faute de preuve, nous considèrerons, et nos auditeurs avec, que ce gouvernement a décidé du contraire.

  • La #toponymie, une vieille obsession de l’#extrême_droite

    L’extrême droite xénophobe en France cultive son populisme avec un discours simpliste sur le supposé nécessaire bon sens contre les idéologies. Elle conteste ainsi systématiquement toute une série d’initiatives municipales, départementales ou régionales pour leur caractère internationaliste et intellectuel, dans le domaine culturel et mémoriel. Sa rhétorique réactionnaire est bien souvent conforme à la grille de lecture proposée par l’économiste américain Albert O. Hirschman (1915-2012). Ce discours rejoint celui de la droite promotrice de l’identité nationale puisqu’il invoque l’inanité de ces initiatives culturelles. On leur prête des effets pervers qui contribueraient à la perte des repères et à la mise en péril des valeurs essentielles à la cohésion nationale.


    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/26/la-toponymie-une-vieille-obsession-de-l-extreme-droite_4602209_3232.html

  • « Avec la fin des #quotas, les laiteries vont se faire la guerre sur le dos des producteurs » - Terra eco
    http://www.terraeco.net/fin-des-quotas-laitiers-lait,59210.html

    Le 1er avril, les fameux quotas européens qui encadrent la production depuis trente ans disparaîtront. Antoine Jean, producteur de #lait dans le Nord, craint un effondrement des prix et la perte d’autonomie des éleveurs.

  • Radio France : « Ils jouent avec votre radio, notre avenir », tribune de Valeria Emanuele, secrétaire nationale du SNJ Radio France
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/30/radio-france-ils-jouent-avec-votre-radio-notre-avenir_4605763_3232.html

    « Nous suivons jour après jour, dans la presse, les échanges entre Fleur Pellerin, Manuel Valls et Mathieu Gallet, uniques sources d’information pour les salariés de #Radio_France à propos de ce détail futile : leur avenir. Nous en sommes là, simples pions dans la partie d’échecs qui oppose le ministère de tutelle - qui ne « communique » que dans son intitulé - à la présidence de Radio France, mutique et passée experte en maladresses morales et stratégiques.

    Nous ne sommes pas dupes. Ce qui se joue dépasse le seul sort des salariés de Radio France. La rue de Valois et la présidence de Radio France sont engagées dans un bras de fer. Et nous sommes au milieu, coincés entre le marteau et l’enclume, privés d’information mais objets de beaucoup de mépris.

    Nous les observons casser cette maison qui n’est qu’une ligne sur leur CV. Cette maison qui est notre identité, notre ADN, notre présent et notre avenir. Nous sommes tellement fiers de travailler pour elle. Et donc aujourd’hui tellement en colère de voir que nous ne sommes que les pantins d’un pathétique jeu de rôles.

    Alors que faut-il comprendre de ce blocage ? Pourquoi le sort de Radio France se trouve-t-il entre les mains de personnes qui semblent s’en désintéresser ?

    Les salariés de Radio France ne sont pas responsables de son déficit. Notre sort financier dépend à 90 % de l’Etat qui a décidé, depuis trois ans, de ne plus octroyer la dotation promise. 87 millions d’euros n’ont pas été versés. Nous avons tenu grâce aux économies, mais cette fois les caisses sont vides et le trou menace de se creuser encore un peu plus : 21 millions dès 2015, pire les années suivantes, puisque l’Etat entend négocier un Contrat d’objectifs et de moyens revu à la baisse.

    Comment accorder le moindre crédit à un PDG qui se rend compte neuf mois après sa nomination, que la trésorerie est à sec ? Comment croire que Bercy, qui siège au Conseil d’administration de Radio France, n’était pas au courant ? Comment faire confiance au ministère de la communication, qui prend un malin plaisir à lâcher publiquement le PDG d’une entreprise publique ?

    Des commentateurs assurent que l’enjeu ultime se situerait de l’autre côté de la Seine, en face de notre belle et onéreuse nouvelle Maison de la Radio. Que tout cela se jouerait en réalité à France Télévisions. La tutelle affaiblit Mathieu Gallet, et à travers lui le CSA qui l’a nommé. Et ainsi, comme au bon vieux temps de la nomination des présidents de l’audiovisuel public par le pouvoir, le ministère de la communication pourrait imposer son (sa) candidat(e) pour la présidence de la télévision de service public. Alors que le duel continue ! Et tant pis pour l’indépendance. Tant pis pour Radio France. »

    #radio #grève

  • « Refusons l’asservissement de la radio publique », par Marie Hélène Fraïssé, productrice radio, écrivain, présidente de la Société des producteurs de France Culture
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/27/refusons-l-asservissement-de-la-radio-publique_4602885_3232.html

    Rubrique incompétence : un chantier interminable, utilisant des matériaux toxiques, explosant ses budgets, enchaînant les dérapages financiers et techniques. On construit des studios et des cabines de montage, puis on défait, on refait, on redéfait… Pendant tout ce temps la production radio est sommée de s’adapter, entre les coups de marteau. Et comme le bâtiment ne va pas, rien ne va plus. Où sont les responsabilités ? Où sont les évaluations impartiales de ce chantier dément qui fait réviser en baisse toutes les ambitions culturelles dont il était censé fournir l’écrin ?

    Rubrique opportunisme : rentabilisons la valeur locative de nos espaces, disent nos dirigeants actuels, faisons de l’évènementiel, multiplions les partenariats. Infléchissons nos programmes pour plaire aux bailleurs de fonds, aux fournisseurs d’espace et de visibilité. Vous avez dit « pub » ? Mauvaise langue… Vous avez dit « dépendance », « asservissement » : il est l’heure de prendre votre retraite, les temps ont changé.

    Rubrique rigidités : faire évoluer les méthodes de travail, certes. On l’a fait. On le fera. Il faut le faire. Mais pas avec une direction qui ligue contre elle la quasi totalité des corps de métier. La #grève est massive, cette fois. La preuve : même ceux qu’on appelle producteurs, les saltimbanques, qui conçoivent les émissions, les préparent, intermiteux à vie, stars de l’antenne, grandes voix et petites, électrons libres par vocation, se rassemblent et rejoignent le mouvement initié le 19 mars.

    Quelles solutions ? Comment redonner un peu de souffle à cette notion de service public, si galvaudée, si instrumentalisée ? D’abord en affirmant haut et fort qu’un service public, par définition, n’a pas pour vocation d’être rentable. Tout ce qu’on lui demande, c’est d’œuvrer avec talent, intégrité, au plus juste des moyens qui lui sont donnés. Exit le business plan forcené. L’Etat doit prendre ses responsabilités. En coupant les vivres, comme il le fait depuis 2010, il nous oblige à nous vendre au plus offrant. Non, nous ne coûtons pas trop cher. #Radio_France, c’est moins de 20 % d’une redevance annuelle de 136 euros.

    #radio

  • « Le repas végétarien est le plus laïc de tous » (LeMonde.fr)
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/26/le-repas-vegetarien-le-plus-laique-de-tous_4602163_3232.html

    Le principe laïc n’implique nullement d’imposer un menu unique aux enfants, au mépris des différences et des préférences individuelles. Il faut dépasser ce faux débat : plutôt que d’utiliser le porc ou la laïcité pour attiser la haine confessionnelle et diviser les Français, nous proposons l’instauration dans les cantines scolaires d’une alternative végétarienne à tous les repas.

    […]

    Le plat végétarien, et à plus forte raison végétalien, est une solution laïque et œcuménique aux préférences alimentaires de chacun, qui a le mérite de représenter l’alternative la plus simple pour les collectivités locales qui ne peuvent satisfaire des contraintes et des préférences alimentaires multiples. Le repas végétarien réunit tout le monde.

    #éducation #cantine #alimentation #école #laïcité #repas #collectivité #végétarien #pragmatisme #végétalien #périscolaire

  • #Philippe_Meyer : « Il faut stopper la dérive de Radio France »
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/27/philippe-meyer-il-faut-stopper-la-derive-de-radio-france_4602473_3232.html

    Les informations publiées semaine après semaine par Le Canard enchaîné ne sont pas pour rien dans la #grève de #Radio_France, mais on aurait tort de croire qu’elles en sont la cause unique ou même principale. D’ailleurs, lorsque, il y a un an, le même hebdomadaire révéla que le premier geste du PDG fraîchement nommé à l’unanimité par le CSA avait été de réclamer à sa tutelle une substantielle augmentation de salaire, aucune vague d’indignation, de réprobation ou même de simple déception ne parcourut la Maison ronde.

    C’est qu’en 2014, après cinq ans d’une gouvernance médiocre, à la fois indolente et brutale, confiée par Nicolas Sarkozy à des amis ou à des complaisants, les personnels de Radio France n’accordaient d’importance qu’à une chose : avoir enfin un projet et un patron. Lors de l’arrivée de leur nouveau président, la plupart des collaborateurs avaient, comme ils l’ont aujourd’hui, conscience de l’importance des défis à relever.

    Le premier de tous est de demeurer un service public dans un monde où l’on fait bon marché de l’intérêt général, dans un domaine, celui de l’audiovisuel, où la spécificité des programmes proposés par les sociétés nationales n’a fait qu’aller en s’érodant, et dans un secteur d’activité, celui de la culture, d’autant plus difficile à faire vivre qu’il est devenu une auberge espagnole en même temps qu’une variable d’ajustement budgétaire.

    Et après le #paywall, tribune lisible sur
    https://twitter.com/sophiarandr/status/581136592154337280

  • Laissons les filles tranquilles (LeMonde.fr)
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/24/laissons-les-filles-tranquilles_4599912_3232.html

    Nous sommes féministes et nous croyons que sommer des filles de dix ans de choisir un camp entre famille et école, entre la religion et la laïcité forcée, n’est pas la solution dont ces filles ont besoin pour s’émanciper. « Ne me libérez pas, je m’en charge ! », dit un vieux slogan féministe. Car ce n’est pas comme ça qu’on libère, c’est comme ça au contraire qu’on contribue à aliéner ceux qu’on prétend libérer. Le corps des femmes n’appartient à personne, pas plus à ceux qui veulent lui imposer le voile qu’à ceux qui veulent le lui retirer de force. Ce n’est pas en arrachant le voile d’une écolière ou en la chassant de l’école publique qu’on fera reculer le sexisme, bien au contraire.

    Laissons les filles tranquilles ! Laissons-les réfléchir et discuter ensemble des voies et moyens de leur propre libération, qu’il s’agisse de se libérer de la norme sexiste, du dogme hétérosexuel ou des interdits religieux, de la symbolique de tel fichu ou de tel chiffon, de la morale et du sacré, des injonctions à montrer ou cacher son corps et ses désirs. Et quoi de mieux pour cela que les bancs et la cour d’une école ?

    #éducation #laïcité #féminisme #voile #islamophobie #émancipation

  • Sortir de l’impuissance nationale
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/18/sortir-de-l-impuissance-nationale_4595725_3232.html

    On a beaucoup glosé sur les trois semaines de « psychodrame » à rebondissements entre bureaucrates internationaux qui ont suivi la victoire de Syriza. Mais on n’a rien dit sur l’embarrassante démonstration qui a été faite là, en eurovision. Pour qui n’a pas consenti à se crever les yeux, elle se formule comme suit. Un : voter pour un gouvernement ou pour un autre – fût-ce un « gouvernement d’ultra-gauche », comme l’a écrit Le Monde dans le cas grec – est sans effet. Deux : tout gouvernement, en Europe, ne peut plus être qu’un relais local de la machine gouvernementale globale. Trois : comme Podemos peut-être demain, Syriza n’a fait qu’amener à s’échouer au sein du jeu politique la puissance née dans la rue lors du « mouvement des places ».

    #Grèce #Tsipras #Europe

  • « Thomas Piketty, la France et la méritocratie », par Jean-Pierre Dupuy (Le Monde, 10/03/2015)
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/10/thomas-piketty-la-france-et-la-meritocratie_4590638_3232.html

    Le succès quasi planétaire du livre de Thomas Piketty, Le #Capital au XXIe siècle (Seuil, 2013), a quelque chose de troublant. C’est comme si la simple publication de données statistiques sur les #inégalités de richesse et de revenu avait une portée morale et politique immédiate, comme si les faits pouvaient à eux seuls constituer des valeurs, ce qui, en bonne philosophie, est un passage indu.

    Des siècles de réflexions et de débats nous ont en effet appris que le sens attribué aux inégalités dépendait fortement du contexte social et moral dans lequel elles se situent. Opposant les sociétés démocratiques aux temps aristocratiques, Tocqueville écrivait ainsi dans De la démocratie en Amérique : « Quand l’inégalité est la loi commune d’une société, les plus fortes inégalités ne frappent point l’œil ; quand tout est à peu près de niveau, les moindres le blessent. C’est pour cela que le désir de l’égalité devient toujours plus insatiable à mesure que l’égalité est plus grande. »

    Au sujet de la #France, Piketty affirme trois choses : la méritocratie est une des valeurs phares de la République ; c’est pourquoi les inégalités sont le plus souvent justifiées par le mérite ; cette justification est un masque qui cache une réalité plus sordide.

    Sur les deux derniers points, on croirait lire du Pierre Bourdieu (La Reproduction, 1970), mais pas sur le premier point. Car, jamais Bourdieu n’aurait considéré le mérite comme une #valeur devant être récompensée !

    Nous avons tous appris de Bourdieu à suspecter le vernis hypocrite des légitimités qui masque les rapports de force. La priorité de la sociologie critique est de dénoncer la « transmutation de l’héritage social en grâce individuelle ou en mérite personnel ». Le système d’enseignement se dit capable de sélectionner « les meilleurs » (ceux que la nature a dotés largement en capacités et talents, et qui font l’effort de les développer) et d’assurer leur succès dans la vie, alors qu’il ne fait en réalité que reproduire le classement social de départ, tout en le consacrant au moyen de la fiction du mérite individuel.

    En vérité, la cible de la sociologie critique n’est pas tant la méritocratie que la #hiérarchie. Le voile qu’il s’agit de lever est moins celui de la bourgeoisie que celui de la société d’ordres et de castes.

    Et là on retrouve l’idée de #race (au sens de l’abbé Siéyès, confère le prochain numéro de @vacarme, mais aussi au sens de Nietzsche).

    Le bourgeois, c’est le « parvenu » - parvenu à se hisser au faîte de l’échelle sociale au prix d’efforts dont il va jusqu’à se flatter. Le grossier personnage. La méritocratie du travail et de la peine est surtout coupable de naïveté aux yeux de la sociologie critique : elle trahit la vérité honteuse de l’ordre social, faite de conflit et d’arbitraire.

    Non, c’est au noble, à celui qui possède sans jamais s’être donné la peine d’acquérir, qu’il s’agit d’abord de rabaisser le caquet. D’ailleurs, qui méprise qui ? Est-ce le bourgeois qui méprise l’aristocrate ? Dans la pièce inénarrable d’Octave Mirbeau, Les affaires sont les affaires (1903), le noble de Porcelet répond au bourgeois Lechat qui lui propose une alliance : « Vous pouvez tout nous acheter, nos biens, nos titres, nos filles, mais pas la manière de s’en servir ! »

    Entre les #valeurs de l’acquis et du faire et les valeurs de la naissance, de l’essence et de la nature, la hiérarchie propre aux sociétés aristocratiques a toujours placé les secondes au sommet. Mais c’est aussi le cas, par mimétisme, des sociétés bourgeoises qui ne sont pas en reste pour mépriser la « marque roturière de l’effort ». L’élève que l’on admire n’est pas celui qui réussit en se tuant à la tâche. C’est celui à qui tout est donné et qui caracole en tête les doigts dans le nez.

    Là l’auteur exagère. Philosophe et professeur à l’université Stanford, en #Californie, il devrait peut-être songer à prendre un peu l’air pour voir. Puisqu’on parle de valeurs, il y a là un un glissement de la France aux Etats-Unis (#idéologie_californienne ?).

    Le livre de Piketty montre bien que le #capitalisme redevient un monde d’héritiers. Mais il correspond en cela à l’#idéologie profonde des Français. Ceux-ci ne sont-ils pas bien davantage opposés aux droits de succession qu’à l’impôt sur le revenu ? Contrairement à ce que Piketty pense, les faits et les valeurs sont donc bien en phase. Même si cela ne veut évidemment pas dire que ces valeurs échappent à la critique.

    via @opironet

  • Le plan anti-pauvreté de Manuel Valls ne traite pas le mal à sa racine, #Nicolas_Duvoux
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/04/le-plan-anti-pauvrete-de-manuel-valls-ne-traite-pas-le-mal-a-sa-racine_45873

    La création d’une #prime_d’activité pour se substituer au revenu de solidarité active (#RSA) et à la prime pour l’emploi (#PPE), présentée par le premier ministre le 3 mars, vient symboliquement marquer la fin d’une période ouverte par la réforme du revenu minimum d’insertion (RMI) voulue par Martin Hirsch et adoptée en 2008, au début de l’ère Sarkozy.

    Sous cette rupture avec un dispositif qui devait incarner le « travailler plus pour gagner plus » dans les politiques sociales, il existe une forte continuité dans la gestion de la pauvreté. Cette continuité ignore ou dissimule plusieurs dimensions qui font de cette réalité dramatique une question fondamentalement politique.

    Trois points peuvent être soulignés.

    Le premier est la continuité dans une approche qui fait de l’accès au marché du travail l’alpha et l’omega de la lutte contre la pauvreté. La chanson des « Enfoirés » pour l’année 2015 a fait polémique, notamment parce que les aînés y disent à leurs cadets qu’il leur faudrait « se bouger ». En réalité, depuis une quinzaine d’années, les principes du retour au #travail [#emploi en fait, ndc] comme solution à la #pauvreté se sont imposés, au détriment de tout débat de fond sur les causes de la fragilisation des #salariés les plus modestes.

    Deux tendances convergentes sont à l’œuvre.

    Il y a, d’une part, l’autonomisation des débats techniques relatifs aux moyens – les #politiques_publiques – par rapport au #débat_politique d’ensemble et, d’autre part, l’avènement d’un nouveau consensus sur les fins.

    La seule nuance entre la gauche et la droite porte ici sur l’attention portée à l’hyperprécarité : la gauche souhaitant éviter d’encourager de manière indirecte les emplois à temps très partiel en accordant des aides à ceux qui les occupent ; la droite valorisant l’accès, au premier euro gagné, de tous aux dispositifs de soutien.

    De ce point de vue, la création de la prime d’activité incarne un parfait #consensus entre ces deux options : soutien au premier euro gagné d’un côté mais limitation du soutien aux travailleurs très modestes de l’autre.

    Cette #dépolitisation du traitement de la pauvreté nie la #relation profonde qui existe entre l’état du marché du travail, les transferts sociaux et la régulation de la pauvreté, réduite à être l’appendice d’un ensemble de débats qui n’y sont que pas ou peu reliés.

  • « Oui, “Charlie Hebdo” est obsédé par l’islam »

    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2015/03/05/oui-charlie-hebdo-est-obsede-par-l-islam_4588297_3232.html

    par Damien Boone, docteurs en sociologie politique et Lucile Ruault, doctorante en sociologie politique

    À propos de l’interprétation des Unes de Charlie-Hebdo « De qui se moque-t-on ? » interrogent Jean-François Mignot et Céline Goffette dans un article recensant les thèmes des Unes de Charlie Hebdo entre 2005 et 2015. Excellente question, qu’on peut autant poser aux membres de la rédaction de l’hebdomadaire qu’aux auteur·es de la tribune, affirmant que « Charlie Hebdo n’est pas obsédé par l’islam ». À l’appui de cette assertion, le constat, sur la période étudiée, de 38 Unes consacrées à la religion, dont 20 % « se moquent principalement de l’islam » (soit 7). « Au total, concluent les sociologues, seulement 1,3 % des “unesˮ se sont moquées principalement des musulmans. De fait, Charlie Hebdo n’était pas “obsédéˮ par l’islam ». L’utilisation de données quantitatives a toutes les apparences de la scientificité et fonctionne comme un argument d’autorité quasi imparable.

    Pourtant, cette démonstration masque davantage d’éléments qu’elle n’en dévoile, en mettant en avant un simple chiffre. Ce chiffre évacue un ensemble d’hypothèses et de postulats qui, s’ils ne sont pas sérieusement interrogés et étudiés, ne lui confèrent qu’une faible valeur interprétative. Autrement dit, affirmer qu’à partir de cette étude, Charlie Hebdo « conformément à sa réputation, est un journal irrévérencieux de gauche, indéniablement antiraciste, mais intransigeant face à tous les obscurantismes religieux », laisser ainsi entendre que rien, dans le contenu du journal, ne pose problème (sur les musulmans ou sur d’autres sujets comme le sexisme), et que les personnes qui s’en indignent ou le questionnent ont tort, est un glissement qui ne peut résulter du raisonnement proposé.

    Les « obsessions » d’un journal

    Étudier les Unes, ce n’est pas étudier le journal : les deux universitaires le précisent bien. Mais alors le titre de l’article qui, en recourant à la métonymie, assimile tout le journal à sa Une, est abusif. Présupposer que les Unes sont à l’origine des accusations d’islamophobie relève davantage d’une intuition au doigt mouillé que d’une réflexion sérieuse : elles ont reposé sur des articles, éditoriaux et prises de position des membres de la rédaction, au cœur du journal et en dehors. En outre, étudier les Unes seulement en tant que produit fini, comme si elles arrivaient ex nihilo, sans s’interroger sur la manière dont elles sont élaborées, est problématique.

    Gaël Villeneuve, sociologue des médias, souligne sur son blog que la sociologie du journalisme a depuis longtemps montré que le choix d’une Une relève davantage d’une logique commerciale que des « obsessions » des membres d’un journal. Même chez Charlie, la Une est souvent un dessin lié à l’actualité immédiate, un positionnement décalé sur ce qui fait parler dans le temps médiatique. Et, quand bien même on considérerait que les Unes reflètent les seules préoccupations des journalistes, on ne sait ici rien des manières dont elles sont collectivement discutées et débattues au sein de la rédaction. La seule étude des couvertures tend à homogénéiser la rédaction, alors que s’y expriment des opinions plurielles.

    En fait, bien trop d’éléments entrent en ligne de compte dans la production d’une Une pour qu’on se contente d’en tirer des conclusions à partir de ce qui est immédiatement visible. Surtout, le fait d’exposer le débat en laissant entendre que les reproches faits à Charlie Hebdo se posaient quantitativement relève d’un procédé intellectuel douteux consistant à réfuter une proposition qui n’a pas été tenue en ces termes. Les polémiques suscitées par Charlie- Hebdo ne portent pas sur le nombre de références à l’islam, mais sur les manières dont cette religion est représentée.
    Il est bien sûr autorisé de choisir un point de vue inédit, mais alors il conviendrait d’en préciser les limites. Imaginons le parallèle suivant : 1,3 % des discours d’un vieux leader d’extrême droite évoquent la Shoah. Doit-on en conclure qu’il n’a pas d’« obsession » antisémite ou négationniste ? Imaginons ensuite qu’une minorité des Unes du journal fasse figurer des femmes, ou plutôt une paire de seins, de fesses et un vagin. Leur faible représentation protégerait-elle la rédaction de Charlie de tout soupçon de phallocratie ? La question n’est pas « l’obsession » quantitative, mais les modalités, logiques et registres d’expression.
    Par ailleurs, on ne peut traiter ce sujet sans s’interroger en amont sur les rapports de domination au sein de la société, sur la stigmatisation de l’islam, et donc sur les interprétations racistes qu’on peut faire de ces dessins. Songeons par exemple aux manières distinctes dont Charlie Hebdo s’en prend aux religions : à propos du catholicisme, ses dessins représentent majoritairement la hiérarchie ecclésiastique, quand l’islam est avant tout abordé par le biais des femmes voilées, ou de pratiquants « ordinaires ».

    Chiffres

    En nous attelant à notre tour à une première analyse statistique sommaire des Unes de Charlie Hebdo, il s’avère que nous n’aboutissons pas aux mêmes résultats : sur une période moindre (2009-2014), nous trouvons 3,5 fois plus de références à l’islam en Une que nos collègues (24 Unes). Il ne s’agit pas de trancher sur la vérité d’un chiffre, mais plutôt de souligner que toute étude statistique se construit en fonction de critères choisis par l’analyste ; il lui revient de les expliciter, sans quoi son approche n’est pas rigoureuse. Quelle définition de la catégorie « islam » adoptent donc les sociologues en amont de leurs calculs ? Enfin, si c’est « l’obsession » qu’on veut réfuter, alors on se doit de contextualiser les données, c’est-à-dire de les mesurer par rapport au traitement médiatique général de l’actualité, en l’occurrence Charlie Hebdo, obsédé par l’islam ?
    Ce n’est pas en posant la question en ces termes que l’on pourra comprendre pourquoi des personnes se sentent offensées par ce qu’elles y trouvent. Si nous avons la faiblesse de ne pas savoir si Charlie Hebdo est islamophobe ou islamophile, nous savons avec force que l’étude des Unes ne permettra de conclure ni à l’une ni à l’autre de ces options, tout en suggérant toutefois une interprétation préférentielle. Dès lors, les sociologues qui font appel aux chiffres se doivent de garder prudence et humilité sur leurs résultats, en en signalant au moins les angles morts. Car, en effet, citant le sociologue Olivier Galland, nous rejoignons nos collègues sur leur conclusion : le manque de connaissances sérieuses « laisse le champ libre aux interprétations et aux solutions simplistes ».

  • « L’Europe doit abandonner l’euro »
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/02/l-europe-doit-abandonner-l-euro_4585513_3232.html

    Suite du livre de Wolfgang Streeck traduit chez Gallimard, "Du temps acheté", et du débat sur l’euro qui l’a opposé à Jürgen Habermas l’an passé...

    Si tout se passe bien, nous assistons au commencement de la fin de l’union monétaire européenne. « Si l’euro échoue, l’Europe échoue », disait Angela Merkel. Aujourd’hui, c’est exactement l’inverse. L’euro est en train de détruire l’Europe. Si l’euro échoue, il se pourrait quand même que l’Europe finisse par ne pas échouer. Ce n’est pas certain : les blessures qu’a causées l’union monétaire sont trop profondes.

    Avec l’arrivée au pouvoir en Grèce du parti de gauche Syriza, en alliance avec un parti groupusculaire d’extrême droite, le projet monstrueux consistant à greffer une monnaie commune à des sociétés ayant des économies différentes semble devoir connaître la fin qu’il mérite.

    On en avait pourtant fait, des tentatives ! On avait commencé par installer à la place des gouvernements élus des technocrates issus des bureaucraties financières privées et publiques, mais les peuples ingrats les ont renvoyés chez eux. L’ère de la docilité européenne est ainsi révolue : les institutions démocratiques ont rejeté les implants bruxellois.

    #euro #Syriza #Podemos #monnaie

  • Internet, ou l’inversion du capitalisme
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/02/internet-ou-l-inversion-du-capitalisme_4585982_3232.html

    On ne voit pas très bien à quoi pourront servir dans deux ou trois décennies des métiers comme ceux de fonctionnaire, de traducteur, d’agent d’assurances, de courtier, de vendeur, d’enseignant et même, pourquoi pas, d’avocat, de médecin, de pharmacien : tous ces métiers pouvant être progressivement remplacés par l’intelligence artificielle. Ne resteront alors que de petits métiers manuels ou encore des métiers créatifs mais peu lucratifs, comme ceux d’artiste ou d’artisan.

    On peut, d’ores et déjà, prévoir que, si rien n’est changé, cette forme de capitalisme à l’envers éradiquera une grande partie de la classe moyenne actuelle en la faisant basculer dans un no man’s land. Sans emploi, cette vaste classe ne pourra plus se payer aucun luxe. Privé ainsi de la majeure partie de sa plus-value comme source de profit, ce système économique sera-t-il encore viable ?

    Je suis peut-être naïf, mais je ne crois pas vraiment à l’idée d’un capitalisme qui exclurai les classes moyennes. Qui les asservirai, les exploiterai, les avilirai, les manipulerai, etc. oui, sans aucun doute. Qui exclurai les plus marginaux, aussi. Donc sur le fond le problème reste entier.

    Mais ceci étant donc posé, j’ai le sentiment qu’au contraire, la masse du capitalisme, et du capitalisme numérique en particulier, est plutôt en quête d’un « équilibre » (ce qui suppose donc bien d’exclure les marges, à commencer par celles du bas). En gros, c’est souvent 10 fois mieux de vendre 10 000 fois un produit à 1€ que 100 fois l’un à 10€. Ça trompe personne ^^

    Au passage, on peut d’ailleurs ajouter qu’il ne devrait clairement pas appartenir à un petit groupe d’entités privées de réguler et d’organiser cet équilibre, et ce d’autant plus quand il s’agit, comme le rappelle l’article, de la connaissance, de la communication ou de l’économie entre les personnes. Le problème n’est pas nouveau, mais sur ce plan il s’exacerbe. Les challengers existent, il faut les favoriser plutôt que d’envisager de démanteler des monopoles sans aucune vision alternative (d’ailleurs il conviendrait aussi d’interroger sérieusement la notion de monopole mais aussi surtout de démantèlement dans une économie numérique et supranationale. Bref.). Favoriser les challengers, c’est pas seulement favoriser les petits d’aujourd’hui pour qu’ils soient les gros de demain. Non, c’est à mon sens essentiellement favoriser d’autres méthodes et d’autres valeurs parmi lesquelles le logiciel libre, les solutions ouvertes, contributives, pair-à-pair, résilientes, etc.

    Et donc pourquoi le capitalisme numérique en particulier chercherait à maintenir une forme de classe moyenne ? D’abord parce qu’il a un avantage sur le coût de production : on peut « vendre » un produit ou un service plusieurs fois (des milliers, des millions) sans changer significativement sont coût de production. Et puis surtout parce que la masse d’utilisateurs lui permet même de plus en plus d’améliorer son efficience par la collecte et le traitement de masses de données considérables en quantité et en diversité (a.k.a. big data). Évidemment, sur ce point c’est difficile de savoir ce qu’il en adviendra sur le long terme. Mais aujourd’hui, et même en tentant de mettre de côté l’effet de mode, c’est clairement la direction que ça a pris, et le changement semble pas imminent. D’ailleurs, on observe bien que parmi les stratégies les plus évidentes et agressives des GAFA, la quête de nouveaux marchés figure en bonne place. Google et Facebook par exemple rivalisent pour conquérir les « marchés émergents » et y apporter un accès internet universel (enfin, probablement plutôt une sorte d’internet by Google ou by Facebook).

    Au final, si le capitalisme numérique détruit les emplois et la classe moyenne qui va avec, il fait à mon sens aucun doute qu’il inventera, voire imposera, lui-même et dans un même temps des alternatives pour garantir sa continuité. Et on peut alors s’attendre à ce que ces alternatives lui soient encore plus profitables, et deviennent encore plus hégémoniques et inéluctables. Et c’est en ce sens que ça me semble finalement bien plus dangereux que la pure destruction de la classe moyenne.

    Donc une nouvelle fois, il convient de s’approprier ces questions tant qu’il est encore temps et de ne surtout jamais déléguer à d’autres l’invention de nos lendemains.

    #Automatisation #Capitalisme #Classe_Moyenne #Intelligence_artificielle #Internet #Libre_concurrence #Monopole #Numérique #Revenu_de_base #Économie_numérique

  • #Internet, ou l’inversion du #capitalisme
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/02/internet-ou-l-inversion-du-capitalisme_4585982_3232.html

    Historiquement, rappelons que c’est la formation de la classe moyenne et son accès à la #consommation qui ont sauvé le capitalisme de ce que Marx avait identifié à son époque comme étant un système économique nécessairement voué à l’échec. Une question pointe donc à l’horizon : ce capitalisme inversé permettra-t-il à long terme de maintenir une classe moyenne suffisamment prospère ? Si le développement de l’intelligence artificielle nous permet d’envisager une production moins onéreuse dans un proche avenir, celle-ci sera-t-elle profitable financièrement à l’ensemble de la population, ou restera-t-elle l’apanage des bonzes d’Internet et des grandes entreprises ?

  • Le climat et le juteux commerce du doute
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/03/02/le-climat-et-le-juteux-commerce-du-doute_4585749_3232.html

    L’objet du délit est consigné dans une série de documents confidentiels du Harvard-Smithsonian, obtenus par Greenpeace et le Climate Investigations Center au terme d’une procédure légale, et publiés le 21 février. Ces 131 pages sont accablantes. En une décennie, des industriels du charbon ou de la pétrochimie ont payé, directement ou par le truchement de leurs faux-nez, quelque 1,2 million de dollars pour que le chercheur cherche. Cela s’est traduit par la mise à la torture de toutes sortes de données, dans le but évident de leur faire dire n’importe quoi pourvu que ce fût un moyen de jeter le doute sur l’ampleur du changement climatique, ou sur ses causes humaines. Une dizaine d’« études », conduites par M. Soon, ont ainsi été publiées ; dans la grande majorité d’entre elles, l’astrophysicien a caché ses sources de financement, en contravention avec les règles éthiques.

    #paywall

    Deeper Ties to Corporate Cash for Doubtful Climate Researcher
    http://www.nytimes.com/2015/02/22/us/ties-to-corporate-cash-for-climate-change-researcher-Wei-Hock-Soon.html

    #climat #corruption