« La littérature m’a permis de voir les multiples facettes de la réalité »

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  • BALLAST Olivier Rolin : « La littérature m’a permis de voir les multiples facettes de la réalité »
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    Il porte un chapeau feutre et un imperméable beige. Marche légèrement voûté. Plutôt revêche, de prime abord — entre le détective des années Bogart et le vieux loup de mer. Un bout de papier indiquait sur sa porte qu’il fallait cogner fort, faute de sonnette en état de marche. « Vous n’auriez pas une cigarette ? Je suis en rade, là. » Un vétuste immeuble parisien ; des livres partout dans son appartement. « Oui, pas facile de trouver un endroit où bouffer chez moi. » Un fusil posé le long de la bibliothèque et un couteau que Rolin triture une partie de l’entretien. Nous avons lu presque tous ses livres, en France ou sur les routes de ce monde que l’écrivain aime à saisir, du Soudan à l’Est en passant par l’Amérique latine, depuis qu’il a raccroché les gants, lui l’ancien chef de la branchée armée de la Gauche prolétarienne. Hamon et Rotman ont déjà conté ses actions avec force détail dans le deuxième opus de Génération — quelques mots pour qui ne l’aurait pas lu : Rolin s’appelait alors Antoine, « un homme sûr, précis, courageux », prise d’assaut d’une usine (bras gauche et os du visage cassés), attaque d’un commissariat, cocktails Molotov, un député de droite qui trempait dans des affaires louches capturé dans une malle, noms d’emprunt et déménagements constants, une bombe dans les locaux de Minute, une mitraillette Sten (jamais de balles dans le chargeur), l’enlèvement d’un cadre de Renault pour venger la mort d’un ouvrier, « Nous représentons la volonté du peuple face à la loi des assassins », Sartre soutint, « Notre rôle est simple : montrer au peuple qu’il n’est pas de terreur qui ne puisse être combattue », nous en passons. Un bouquet de fleurs fanées près de photographies marines, dans le salon. Rolin nous avait fait savoir, lorsque nous l’avions contacté, que nous risquerions d’être déçus : le militant maoïste est devenu « un sceptique, hélas... » Raison de plus. L’écrivain s’assouplit à mesure que nous parlons. Jusqu’à la sympathie, même.