Voici ce qu’en dit Ellen Templin, gérante d’un studio de Domina à Berlin : « Il n’y a pas de prostitution volontaire. Une femme qui se prostitue a des raisons pour le faire. Ce sont en premier lieu des raisons psychiques. Ici dans mon studio, toutes les femmes ont été abusées durant leur enfance. Toutes ! L’âme de ces femmes qui se prostituent a déjà été détruite. » (Alice Schwarzer HG, Prostitution, ein Deutscher Skandal, 2013, p. 171-178)
Rosen Hircher, qui a commencé à se prostituer à l’âge de 31 ans, dit : « Cela me semblait tout à fait normal ce que je faisais. Je savais exactement où j’allais et cela me semblait normal d’y rester. Je ne vais jamais oublier jamais la phrase qu’une prostituée m’a dite dès le premier jour : ‘Alors tu as déjà fait cela toute ta vie.’ En effet, j’ai été abusée sexuellement par mon oncle lorsque j’étais enfant. Mon père était alcoolique et extrêmement agressif. Depuis mon enfance, j’avais l’habitude de subir la violence des hommes. » (Rosen Hircher, Une prostituée témoigne, 2009)
Effectivement, les multiples études faites sur ce sujet démontrent une corrélation étroite entre le passage à la prostitution et la violence subie durant l’enfance :
L’étude de Melissa Farley de 2003 démontre que 55 à 90% des femmes prostituées ont été victimes d’agressions sexuelles pendant leur enfance, et 59% de maltraitance. (Farley, « Prostitution and Trafficking in Nine Countries : An Update on Violence and Post-traumatic Stress Disorder », 2003)
Une étude menée en 2004 par le ministère allemand de la Famille, des Aînés, des Femmes et de la Jeunesse a conclu que 87% de ces femmes avaient subi des violences physiques avant l’âge de 16 ans. (Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend : Gender Datenreport, 2004)
Une étude de Sibylle Zumbeck menée en Allemagne en 2001 a établi que 65% d’entre elles avaient été maltraitées physiquement et 50%, victimes de violences sexuelles. (Zumbeck, Sibylle : « Die Prävalenz traumatischer Erfahrungen, Posttraumatische Belastungsstörungen und Dissoziation bei Prostituierten », Hambourg, 2001)
Le système prostitutionnel utilise ces traumatismes d’enfance dans son propre intérêt et pour son profit. Une telle enfance entraîne en effet trois mécanismes psychiques :
Täterintrojekte : L’identification avec l’agresseur : c’est l’estime de soi brisée, le sentiment que l’on n’a pas de valeur et que l’on ne mérite pas mieux.
Wiederholungszwang : La compulsion de répétition, soit le fait de revivre volontairement des situations traumatiques similaires avec l’illusion de contrôler le jeu à chaque fois.
La dissociation : J’aimerais développer ce point-là.