• Mort de Zyed et Bouna : dernier jour de procès blessant pour les familles - Libération
    http://www.liberation.fr/societe/2015/03/20/mort-de-zyed-et-bouna-dernier-jour-de-proces-blessant-pour-les-familles_1
    http://md1.libe.com/photo/725042-zyed.jpg?modified_at=1426879321&width=750

    La décence aurait voulu que Me Billaud s’efface. Quelques minutes auparavant, les familles Benna et Traoré avaient assisté à la plaidoirie de Daniel Merchat, avocat des policiers Sébastien Gaillemin et Stéphanie Klein. Au lieu de quoi, Me Billaud s’égare dans de longs souvenirs personnels, disserte, seul, de tout et de rien, puis remercie la procureure, Delphine Dewailly, « dont les réquisitoires [prônant la relaxe, ndlr] furent lumineux et impartiaux ». Ensuite, se tournant vers les prévenus : « Je salue votre courage et vous dis combien la République serait démunie sans sa police. » Un temps, on se demande s’il ne va pas qualifier de héros les fonctionnaires incriminés… Etait-il besoin d’humilier un peu plus des familles pendues à l’attente d’un procès depuis dix ans ?

  • Si après ce papier y’a encore quelqu’un qui me dit que libération est un canard de gauche, il en prend une mais alors violente
    La justice le dit maintenant : ils sont reconnus coupables de meurtre. Ils ont assassiné un pov’gars qui faisait que gagner sa vie dans un boulot de merde.
    Malgré une couverture médiatique minable et à décharge pour les meurtriers, la justice est quand même passée tellement c’était odieux.

    Et t’as libé qui est quand même capable de commettre ça, c’est à gerber. Si y’a encore un gars qui se pense de gauche et qui achète encore ce torchon c’est à pleurer.
    Heureusement fô payer pour lire cette m$*@#, t’as juste le début, mais ce début doit annoncer la suite :

    ...Ou l’histoire de quatre jeunes, délinquants à la petite semaine, dont la violence a conduit un homme acculé à se jeter dans un canal...

    une drôle d’odeur se dégage de cette adresse
    http://www.liberation.fr/societe/2015/03/26/said-bourarach-frappe-noye-instrumentalise_1229190

  • « Aucun système… » : euh… (1) dans mes jeunes années, il y avait trois personnels dans le cockpit, pas deux ; (2) il n’y a pas si longtemps, on n’avait pas encore décrété que c’était une super-idée anti-terroriste de rendre le cockpit totalement inviolable.
    http://www.lavoixdunord.fr/france-monde/crash-a320-le-copilote-a-eu-une-volonte-de-detruire-ia0b0n2734165

    « Aucun système au monde ne pourrait empêcher » l’acte du copilote, a-t-il souligné.

    (Et sinon, on va éviter de se demander si les types qui se suicident au travail – si c’est le cas ici – ça ne serait pas un peu lié à leurs conditions de travail. Des fois qu’on irait interroger le, kof kof, système…)

  • France : Noyade de Saïd Bourarach, un crime raciste ? Ouverture du procès aujourd’hui - Libération

    http://www.liberation.fr/societe/2015/03/17/vigile-noye-a-bobigny-4-hommes-juges-a-partir-de-mardi-aux-assises_122226

    Trois des accusés sont arrivés libres au tribunal. En jean et chemise, les visages pâles, ils ont pris place devant une salle comble et ont décliné leur identité calmement.

    Le quatrième accusé, absent, sera jugé par défaut, a précisé la présidente du tribunal.

    Jugés jusqu’au 26 mars pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, avec usage ou menace d’une arme », les quatre hommes, âgés de 23 à 30 ans, encourent 15 ans de réclusion.

    Saïd Bourarach, un père de famille marocain de 35 ans employé dans un magasin de bricolage à Bobigny (Seine-Saint-Denis), avait été pris à partie le 30 mars 2010 par un client qui voulait entrer après la fermeture pour y acheter un pinceau et un pot de peinture.

    Une altercation avait alors éclaté, son agresseur s’emparant d’une manivelle à cric tandis que le vigile répliquait avec sa bombe lacrymogène.

    L’éconduit avait appelé en renfort son frère, habitant d’une cité voisine à Pantin, qui était arrivé sur place avec un cousin et des amis, et tous l’avaient pris en chasse le long du canal situé derrière le magasin.

    Le corps sans vie de Saïd Bourarach avait été repêché le lendemain, l’autopsie concluant à une noyade.

    Les mis en cause ont toujours soutenu que le vigile s’était noyé après s’être volontairement jeté dans le canal, mais à l’époque, son décès avait suscité une vive émotion, notamment dans la communauté musulmane.

    Arguant du « caractère raciste » de l’agression, les accusés étant de confession juive, des manifestants s’étaient rassemblés pour demander la « justice pour Saïd ».

    Leur renvoi devant les assises avait été décidé en septembre 2013, puis confirmé en mars 2014 par la chambre de l’instruction, deux des mis en examen ayant fait appel.

    Le juge avait à l’époque estimé que les accusés avaient provoqué la noyade du vigile en le soumettant à une « pression psychologique » telle qu’il n’avait d’autre échappatoire que de sauter pour leur échapper.

    Une analyse contesté par la défense, pour qui la « qualification criminelle » ne correspond pas aux faits. Mais pour les proches de Saïd Bourarach, l’enchaînement des événements ayant conduit à sa mort reste à éclaircir.

  • Treize raisons de lâcher le steak barbare - Libération
    http://www.liberation.fr/societe/2015/03/06/treize-raisons-de-lacher-le-steak-barbare_1215727

    Quelques raison écologiques (la production de viande dégage plus de CO2 que l’agriculture), économiques (les grosses industries capitalistes qui étouffent les petit⋅es producteurices), sociales (les grosses industries capitalistes qui exploitent leurs employé⋅es pour réduire les coûts) et idéologiques (tuer des êtres vivants sensibles, c’est éthiquement plutôt moyen) pour lâcher la consommation de viande.(Permalink)

    #veganisme

  • Geoffrey, 20 ans, « gueule cassée » du flash-ball
    http://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/geoffrey-20-ans-gueule-cassee-du-flash-ball-05-03-2015-4577405.php

    Propos recueillis par Gwenael Bourdon | 05 Mars 2015, 07h08 |

    Une silhouette d’ado chancelant sous le choc du tir. Ainsi apparaissait Geoffrey, alors âgé de 16 ans, sur la vidéo amateur diffusée sur le site Internet Rue89 à l’automne 2010. Le 14 octobre, le jeune garçon était atteint au visage par un tir de flash-ball, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), en pleine mobilisation lycéenne contre la réforme des retraites.

    Cinq ans plus tard, Geoffrey peine encore à se remettre des multiples fractures subies au visage, au nez, et des lésions de l’oeil gauche...

    Le policier auteur du tir doit comparaître aujourd’hui devant le tribunal correctionnel de Bobigny pour violences volontaires, mais aussi pour faux et usage de faux. Dans un procès-verbal dressé immédiatement après les faits, il avait affirmé avoir visé un individu ayant lancé plusieurs projectiles en direction des renforts policiers, appelés alors que des élèves tentaient de bloquer l’entrée du lycée Jean-Jaurès, à Montreuil. « Au tout début, Geoffrey passait pour un caillasseur », souligne l’avocat du jeune homme, M e Pierre-Emmanuel Blard. Cette version, que le policier a maintenue durant plusieurs mois, a ensuite été contredite par la quasi-totalité des témoins, ainsi que par la vidéo. L’avocat du policier n’a pas souhaité s’exprimer avant l’audience. Geoffrey, aujourd’hui âgé de 20 ans, nous raconte les dégâts physiques et psychologiques causés par ce qu’il considère « presque comme une arme de guerre ».

    Comment vous sentez-vous à l’approche de ce procès ?
    GEOFFREY. J’ai essayé d’y penser aussi peu que possible. J’ai traversé une grosse dépression et je sais que ça va être une épreuve. Mais il faut en passer par là.

    Pourquoi tant d’appréhension ?
    J’ai dit tout ce que j’avais à dire au cours de l’enquête. J’ai toujours été honnête. Les preuves sont là. Mais je sais qu’on va me questionner et essayer de me prendre en défaut sur la parole qui a été la mienne il y a quatre ans.

    Vous étiez lycéen à l’époque des faits. Qu’êtes-vous devenu ?
    Mes études se sont écroulées. J’ai tenté de continuer mon cursus en informatique et de passer mon bac. Mais j’ai eu l’impression que tout le monde me laissait tomber. J’ai eu beaucoup de mal à remonter la pente. Finalement, cet été, on m’a offert l’occasion de travailler dans l’événementiel. Mes horaires sont irréguliers, le week-end, parfois le soir. Ça me convient : j’essaie de me noyer dans le travail pour ne plus penser au reste.

    Quelles séquelles physiques avez-vous conservées ?
    J’ai eu plus de chance que d’autres victimes, qui ont parfois perdu la vue ou d’autres facultés. Je n’ai pas bénéficié d’une reconstruction parfaite du visage. Mais ce que les médecins ont réalisé relevait de l’impossible ! On m’a opéré six fois, pour me poser des plaques en titane au visage. Mon oeil a été bien retouché. Ma vue était tombée à 1/10 après la blessure. Aujourd’hui, j’ai récupéré, à 7/10 environ. C’est un grand soulagement. J’ai toujours la gueule cassée, même si ce n’est pas flagrant. Ma paupière ne se referme pas totalement, une partie de mon visage reste un peu paralysée. Les nerfs ne se sont pas reconstruits, et je ne sais pas s’ils le seront un jour...

    Et sur le plan psychologique ?
    Je me sens une autre personne. A l’époque, j’avais 16 ans, et j’étais dans une certaine innocence. J’avoue que j’ai failli mal tourner après cette affaire, je voyais rouge. Heureusement qu’on m’a soutenu ! Mais la colère est toujours là, je réagis à toutes les injustices, qu’elles soient policières ou non.

    Qu’attendez-vous de ce procès ?
    Qu’on reconnaisse qu’un policier a tort, et qu’un jeune, qu’on a tenté de faire passer pour un délinquant, a raison. Une parole assermentée, on a du mal à la contredire. C’est grâce à la vidéo que la vérité a pu éclater.

    Faut-il, selon vous, remettre en cause l’usage du flash-ball ?
    Ça fait longtemps qu’on sait que c’est une arme qui casse, presque une arme de guerre. Quand j’ai vu mon scanner et les dégâts que la balle avait causés sur mon visage... C’est vraiment triste de penser qu’on peut l’utiliser contre des gens qui manifestent, qui expriment leurs idées, et ne sont pas armés.❞

    • http://www.liberation.fr/societe/2015/03/05/flashball-un-an-de-prison-avec-sursis-requis-contre-un-policier-qui-a-ble

      dépêche AFP

      Une audience sur le flashball tourne au procès de la police et de ses armes

      Procédures piétinées, visée approximative, inconscience du danger d’une arme qui peut tuer, et même mensonges : le procès d’un policier à Bobigny a jeté une lumière peu glorieuse sur l’usage du flashball par la police.
      Geoffrey, 16 ans, avait été gravement blessé au visage le 14 octobre 2010, en pleine mobilisation des lycéens contre la réforme des retraites, alors qu’il déplaçait une poubelle devant un lycée de Montreuil, pour tenter, avec d’autres élèves, de bloquer l’établissement.

      « Il n’y a pas l’ombre d’une situation de légitime défense dans ce dossier », a souligné le procureur adjoint Loïc Pageot, requérant un an de prison avec sursis pour violences volontaires et faux et usage de faux, contre Jean-Yves Césaire, le policier de 42 ans auteur du tir.

      Il s’agirait de l’une des toutes premières condamnations en France pour des faits de ce type.

      Il a également demandé une interdiction professionnelle de deux ans et l’interdiction de porter « toute arme » pendant cinq ans.

      La balle en plastique de 4 cm de diamètre avait atteint Geoffrey en plein visage, lui infligeant notamment des fractures multiples de la face, une hémorragie dans l’œil et des fractures du nez.

      Il a fallu six interventions chirurgicales pour sauver son oeil. Son état de santé n’est toujours pas stabilisé quatre ans après les faits, même si les cicatrices, très impressionnantes après les faits, sont désormais discrètes.

      Outre le tir, alors qu’il n’était pas menacé et n’avait pas reçu d’ordre formel, la justice reproche au policier d’avoir dressé un faux procès-verbal, qui aurait pu conduire à des poursuites et une condamnation de sa victime pour violences contre les policiers.

      – « Tout est faux » -

      Plusieurs témoignages et surtout deux vidéos anonymes publiées sur Rue89 et Dailymotion ont réduit en poussière la version de M. Césaire et d’autres policiers, selon laquelle Geoffrey avait eu « une attitude menaçante et dangereuse » et « jeté des projectiles ».

      Le policier avait été jusqu’à évoquer une « pluie de projectiles » - aucun ne sera retrouvé sur la chaussée - voire une « lapidation » des forces de l’ordre.

      « Dans ce PV, tout est faux, tout est contraire à la vérité », a tonné le procureur, soulignant que le policier avait même prétendu faussement avoir porté secours à sa victime. A l’audience, le policier a dû convenir ne pas savoir combien de projectiles avaient été tirés, ni par qui.

      « Nous étions au bord d’une erreur judiciaire (...) Je m’inquiète de la façon dont certains policiers (...) se servent de procès verbaux d’interpellation pour travestir la vérité », a déclaré le procureur.

      Le gardien de la paix, un homme à la carrure massive qui avait troqué devant le tribunal l’uniforme pour un costume gris, se justifiant maladroitement, a multiplié les déclarations accablantes.

      Dans ce procès-verbal, « j’ai pas réussi à expliquer ce qu’il s’était passé », a-t-il avancé, mais « il n’y avait pas de volonté de tricher ». « Pour tricher, il y a d’autres façons de faire », a-t-il lâché.

      Pourquoi n’y a-t-il pas eu de sommation avant le tir d’une arme dont l’usage est supposé rester exceptionnel ? Inutile car « le flashball, c’est pas quelque chose d’inconnu en Seine-Saint-Denis », dit-il candidement. Et puis, « je n’avais que ça sous la main... »

      Mais le prévenu et l’accusation ont également souligné les carences de la hiérarchie.

      Jean-Yves Césaire dit avoir tiré car ses formateurs lui « avaient expliqué (qu’un tir de flashball), c’est un gros coup de poing d’un boxeur moyen » alors que cette arme peut tuer.

      En cause aussi, les trois tirs d’entraînement annuels prévus pour chaque policier. « Pas assez », témoigne M. Césaire, d’autant que pour lui, la séance a été repoussée de plusieurs mois, son commissariat étant en panne de munitions.

      L’enquête montrera aussi que le dispositif de visée du flashball était défectueux, l’arme tirant 12 cm trop haut.

      Plusieurs affaires de blessures graves liées à des tirs au flashball, ou « lanceur de balles de défense », qui tire des balles en caoutchouc non perforantes, grosses comme celles d’un jokari, font l’objet de procédures judiciaires.

      A Bobigny, le jugement a été mis en délibéré au 2 avril.

  • Comment les hôpitaux vont « devoir » économiser 3 milliards
    http://www.lemonde.fr/sante/article/2015/02/28/comment-les-hopitaux-vont-devoir-economiser-3-milliards_4585324_1651302.html

    La ministre de la santé, Marisol Touraine, a arrêté début février la répartition du plan d’économies de 3 milliards d’euros prévu pour les hôpitaux d’ici à 2017, selon un document ministériel publié vendredi 27 février par Challenges.

    La maîtrise de la masse salariale devrait rapporter à elle seule 860 millions d’euros, soit l’équivalent de 22 000 #postes et 2 % des #effectifs de la fonction publique hospitalière, selon l’hebdomadaire. Par ailleurs, « la mutualisation des achats des #hôpitaux et l’obtention de meilleurs tarifs auprès des fournisseurs » devraient dégager 1,2 milliard, et « les rapprochements entre hôpitaux voisins quelque 450 millions d’euros ». Le développement de la #chirurgie_ambulatoire, qui permet une sortie de l’hôpital le jour de l’intervention, « doit générer 400 millions » d’euros et « la réduction des durées d’hospitalisations 600 millions ».

    Un frein à la hausse des dépenses

    Le ministère de la Santé a précisé que « les économies doivent s’entendre non pas comme une réduction des dépenses mais comme une évolution maîtrisée de l’augmentation des dépenses ». Les efforts ne vont donc pas forcément se traduire par des coupes budgétaires ou des réductions de personnels, mais par un frein à la hausse des dépenses de #santé.

    #austérité #économie #insititution_culturelle #concentration-capitalistique #l'économie_est_la_politique_du_capital #Dégradation_de_la_qualité_des_soins #socialauds

  • La néolaïcité ou le risque d’amalgame

    Deux mois après les tueries de Charlie Hebdo, de Montrouge et du supermarché Hypercasher, la laïcité – plus précisément une néo laïcité - est au centre des débats publics. Le cadrage « néo-laïque » s’est encore imposé. Des acteurs politiques de droite comme de gauche établissent un lien entre les attentats de janvier et de supposées menaces sur la laïcité. Le 18 février, M. Eric Ciotti dépose à l’Assemblée Nationale une proposition de loi visant à étendre le principe de laïcité aux établissements publics d’enseignement supérieur ; et lundi 2 mars 2015, Mme Pascale Boistard, Secrétaire d’Etat aux droits des femmes, renchérit, estimant qu’il n’est pas certain que le voile ait sa place à l’Université. Le Jeudi 12 mars 2015, la proposition de loi adoptée par le Sénat en janvier 2012 dans le cadre de l’affaire Baby Loup, et discrètement reléguée aux confins de l’agenda législatif depuis lors, ressurgit. Cette loi, qui doit être discutée en mai après les élections départementales, prévoit d’interdire le port de signes religieux dans les crèches privées bénéficiant de subventions publiques - soit dans l’immense majorité des crèches. Interrogeons-nous un instant. Quel rapport entre les massacres de janvier et ces réponses politico-législatives ? Serait-ce vraiment dans un oubli ou une méconnaissance de la « laïcité » qu’il faudrait chercher les causes (ou les remèdes) de ces massacres ?

    On voudrait ici répondre par la négative. Car en effet, accepter de poser la question du rôle de la laïcité face aux tueries de janvier, c’est accepter l’idée que les auteurs des attentats, du seul fait qu’ils se réclament de l’islam (et plus exactement d’organisations armées islamiques comme Al Qaida ou l’Etat islamique), soulèvent une question comparable à celles qui tombent dans le champ de la laïcité : la présence ou l’expression de la religion dans l’espace public. Or il y a là quelque chose de dangereux, qui revient à placer sur un plan comparable les femmes musulmanes qui portent le voile (puisque ce sont bien elles qui sont l’objet du débat sur la laïcité tel qu’il se déploie depuis de nombreuses années) et la violence politique à référence islamique. Il est bien là, le fameux « amalgame » entre l’islam et la violence politique qu’en façade tout le monde s’accorde à ne pas souhaiter faire. Bien sûr, cette violence politique a « à voir » avec la religion, puisqu’elle est mobilisée pour justifier des acteurs meurtriers, mais elle ne s’explique pas par un « facteur religieux », en ce sens que (faut-il le rappeler ?), le fait d’être musulman ne prédispose pas à la violence. S’attaquer aux femmes voilées après les tueries de janvier revient à les rendre responsables d’actes qu’elles n’ont pas commis, mais dont on soupçonne qu’elles sont secrètement solidaires. Le fait de croire en l’existence d’une « communauté musulmane » essentialisée fondant une solidarité atavique porte un nom : racisme anti-musulman ou islamophobie.

    Interdire le voile à l’Université ? Ce serait là remettre en cause les principes fondateurs de l’Université, comme lieu de la libre expression et du libre débat, comme cadre de l’éducation ouverte à tous et toutes, comme lieu où doivent s’enseigner et s’éprouver l’esprit critique et l’autonomie de chacun-e. Interdire le voile, pour répondre à quel problème exactement ? Si l’Université va mal, c’est à cause des politiques d’austérité imposées par le gouvernement actuel et ceux qui l’ont précédé. Où voit-on l’ordre public universitaire « troublé » par le port du voile par des étudiantes ? Et que dira-t-on demain aux étudiantes voilées venues du Moyen-Orient ou d’Amérique du Nord ? Devra-t-on expliquer à nos collègues à l’étranger, qui considèrent déjà les débats franco-français avec consternation, que leurs étudiantes ne sont pas les bienvenues ? Si cette question n’a pas été posée par ceux qui préconisent l’interdiction du voile, c’est que la cible de leurs discours et de leurs politiques n’est pas l’étudiante internationale qui poursuit ses études dans les grandes écoles, mais bien celle qui vient des milieux populaires et qui fréquente l’université.

    Interdire le voile dans les structures accueillant de jeunes enfants ? Mais a-t-on jamais vraiment établi que le port du voile causait des troubles aux jeunes enfants (la proposition de loi vise les établissements en charge d’enfants de moins de 6 ans) ? Et si c’est bien le cas, comment et pourquoi tolérer alors un système d’opt out pour les structures « à caractère propre », ou pour les assistantes maternelles et autres « nounous » travaillant à domicile ? Si le voile menace réellement la République, ne la menace-t-il pas alors toujours et partout ?

    C’est que, bien sûr, ce ne sont ni les femmes ni les enfants qu’il s’agit de protéger. Au contraire, le point commun des deux propositions de loi est de vouloir renvoyer dans l’espace privé les femmes voilées qui étudient ou qui travaillent à l’extérieur de chez elles.

    Ces discriminations légales sont en train de construire un régime juridique d’exception, qui bafoue le droit à l’éducation et le droit au travail. Ce ne sont pas non plus les droits humains qu’il s’agit de défendre : François Baroin, dans un rapport officiel destiné à théoriser cette « nouvelle laïcité » (Pour une nouvelle laïcité, Rapport au Premier ministre, 2003, p. 40), n’écrivait-il pas lui-même que la laïcité qu’il s’agissait d’encourager était « dans une certaine mesure, incompatible avec les droits de l’homme » ? Il importerait que celles et ceux qui restent attachés à ce paradigme aient pleine conscience des glissements et usurpations d’héritage que la néo-laïcité implique.

    Marielle Debos
    Abdellali Hajjat
    Stéphanie Hennette Vauche

    http://www.liberation.fr/societe/2015/03/11/la-neolaicite-ou-le-risque-d-amalgame_1218792