Conflit entre sunnites et chiites : le Moyen-Orient à la veille d’une guerre entre Arabes et Iraniens ?

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  • Mais d’où viennent donc les préoccupations anti-« impérialisme chiite » des experts de la « rue sunnite humiliée » ? Et comment font-ils encore pour se présenter dans le même temps comme opposés à la fois aux dictatures arabes et à Israël ?

    Lire par exemple : Conflit entre sunnites et chiites : le Moyen-Orient à la veille d’une guerre entre Arabes et Iraniens ?, revue Outre-Terre, 2009, texte signé Uzi Rabi, directeur du centre d’Étude Moshe Dayan à l’université de Tel Aviv (!)
    http://www.cairn.info/revue-outre-terre1-2009-2-page-189.htm

    Pour le président Moubarak, les chiites des États arabes (avant tout ceux d’Irak et du Golfe) restent principalement fidèles à l’Iran, pas aux États dans lesquels ils résident [3] (Entretien avec la chaîne satellite de télévision Al-Arabiya,... [3]). Le ministre des Affaires étrangères saoudien Sa’ûd al-Faysal exprimant à diverses reprises et dans différents contextes le même sentiment. En décembre 2004, le roi ‘Abdallah II de Jordanie mettait en garde devant l’avènement d’un « croissant chiite » (al-hilal al-shi’i) introduisant une division au sein du monde arabe et musulman [4] (Entretien avec le Washington Post, 18 décembre 2004 ;... [4]). Une formule qui allait provoquer un vif débat dans les médias arabes où la question est devenue majeure comme en témoignent des titres du genre « Vague chiite », ou bien « Renaissance chiite », ou encore « Péril chiite » dans la presse ou sur Internet. Un semblable croissant s’étendrait de l’Iran sur le versant nord du golfe Persique à l’Irak (quelque 60 % de chiites), au Bahrein (65 %), au Koweït (30 %) et à l’Arabie saoudite (13 %). Ce croissant incluant aussi tant la Syrie client de l’Iran que le Liban (40 % de chiites).

    […]

    La guerre entre le Hezbollah et Israël à l’été 2006 a encore alimenté cette préoccupation. Les oulémas wahhabites (l’école de pensée la plus radicale de l’islam) saoudiens émettant de nombreuses fatwâ dénonçant le chiisme en tant que pure hérésie. Et les clercs wahhabites allant jusqu’à taxer Hassan Nasrallah d’ennemi et de « fils de Satan ». L’’alim saoudien Sheikh ‘Abd Allâh bin Jibrin dépassa tous les autres en qualifiant le soutien au Hezbollah de « péché » [6] (Al-Hijaz, 15 août 2006 ; et Ruz-al-Yusuf, 18 septembre... [6]). Au lendemain de la guerre, cette acrimonie arabe ne fit que s’intensifier. En août 2006, le savant égyptien résidant au Qatar Sheikh Yusuf al-Qaradhawi déclencha un débat public sur le statut des chiites en Égypte ; la communauté arabe sunnite devait prendre conscience d’une « infiltration » dans les États concernés ; d’un incendie susceptible d’éradiquer largement la bonté et la piété : « Nous pourrions aisément assister à des événements de type irakien dans d’autres États arabes sunnites » [7] (Al-Masri al-Yawm, 2 septembre 2006. Et à ce propos... [7]). La presse égyptienne se fit l’écho des mises en gardes de Qaradhawi selon lequel les chiites s’employaient à légitimer la diffusion de leur message en prétendant que les tombeaux de personnages saints du chiisme comme Sayyid Hussein et Sayyida Zaybab en territoire égyptien [8] (Ruz-al-Yusuf, 18 septembre 2006. [8]). Le savant musulman prévenait aussi de l’utilisation du soufisme par les chiites en tant que tête de pont de la prédication militante tashayu’.

    […]

    La soi-disant conversion au chiisme finit par devenir une histoire de taille dans les médias arabes [11] (Bonne illustration dans Rus al-Yusuf du 16 janvier... [11]). Les chiites n’aspiraient pas seulement au « croissant », mais à la « pleine lune », ‘al-badr al-shi’i [12] (« Al-Shi’a Yahlumun bil-Badr al-Shi’i », « Al-Shi’a... [12]). Funeste prophétie : la phrase de Moubarak était censée paradoxalement s’avérer ; ceci alors que la population chiite, en Égypte, ne représente qu’1% de la population musulmane du pays, soit approximativement 650 000/700 000 personnes. Mais la couverture par les médias égyptiens montre déjà en tant que telle à quel point on s’alarme du « péril chiite » dans le monde arabe.

    Le reste de l’article est évidemment rigolo dans le genre fantasmes israéliens, ce qui donne des tournures carrément cocasses du style :

    Durant les campagnes du XXe siècle, Israël était entièrement exclu des coalitions régionales. Désormais, par contre, ses intérêts coïncident largement, à bien des égards, avec ceux du bloc modéré arabe antichiite.

    (oui @kassem, ça va te plaire, il a écrit « bloc modéré arabe antichiite ») Mais c’est bien tout l’intérêt : même les Israéliens écrivent des évidences que nos « experts de la rue sunnite » et des mouvements islamistes « grassroot » font mine d’ignorer.