Mais nous souhaitions dénoncer un climat ambiant, pas focaliser l’attention sur les dix ou quinze auteurs des comportements que nous décrivons dans le texte. Si nous avions donné dix noms, on n’aurait parlé que d’eux pas d’un phénomène général, fréquent à tous les échelons et dans tous les partis, auquel beaucoup plus d’élus participent par leurs habitudes, leurs manières de faire. »
« Au bout de six signalements, on dénonce »
Pour Julien Bayou, co-porte-parole d’EE-LV, la pertinence des actions collectives n’est plus à prouver. Il a déjà pratiqué le « name and shame », notamment au sein du collectif Génération Précaire. « Il est utile au débat d’"outer" les sexistes, mais de manière éthique. Imaginons, dans le cas des femmes journalistes, que vous vous signaliez les noms des députés qui vous harcèlent. Au bout de 5, 6 signalements, y’a pas photo : on dénonce. La dénonciation collective évite à la victime de se sentir seule, de culpabiliser. Cela permet aussi de ne pas être dans quelque chose qui ressemble à de la vengeance personnelle. Il faut cibler les caricaturaux. Si vous prenez les pires, je peux vous dire que les autres vont sentir le vent du boulet passer. »
Les militantes du collectif féministe La Barbe, qui débarquent sans prévenir dans les colloques universitaires ou les assemblées générales d’entreprise trop uniformément masculins avec leurs postiches, diffusent régulièrement sur les réseaux sociaux les noms des entreprises et des participants à ces raouts d’hommes. Pour Sophie, une militante « barbue » qui ne tient pas à donner son nom de famille, « c’est comme un jeu de massacre : une quille tombe et en emmène d’autres avec elles. Il ne s’agit finalement jamais d’une simple affaire individuelle, mais de toute une organisation masculine qui est dévoilée. »