En finir avec l’opposition égalité/équité

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  • En finir avec l’opposition égalité/équité - Une heure de peine...
    http://uneheuredepeine.blogspot.ch/2015/05/en-finir-avec-lopposition-egaliteequite.html

    Vous êtes peut-être déjà tombé sur l’image ci-dessus : sur Facebook, sur Twitter, sur Tumblr, dans un mail qu’un ami vous aura envoyé, sur un blog, un site ou que sais-je encore. Et vous vous êtes peut-être dit « ah ben ouais, pas con, tiens ». C’est la force des memes : un message simple, un brin d’humour, l’apparence de l’évidence, et donc un pouvoir de conviction très important par rapport aux efforts déployés. Il y aurait tout une étude à faire sur leurs effets sur les perceptions et les comportements politiques. Mais ce n’est pas le sujet ici. Si ce dessin a particulièrement retenu mon attention, c’est que l’on ne peut pas étudier, et encore moins enseigner, la sociologie et l’économie sans chopper quelques notions de philosophie de la justice au passage. Et donc sans s’énerver lorsque l’on voit une erreur répétée, encore et encore...

    Quel problème, donc, avec cette image ? Pour le dire de façon directe, l’opposition qu’elle présente entre l’égalité et l’équité est purement artificielle. Pire : elle est fausse. Elle n’a en fait aucun sens. « Egalité » et « équité » ne sont pas des termes alternatifs ou opposés, pas plus que ne le sont « équilibré » et « beau » pour un tableau.

    #vocabulaire #égalité #équité

    • #justice #philosophie #libéralisme

      Et ce commentaire intéressant :

      Sylvain Garniel a dit…

      Alors pour le coup, je ne suis pas trop d’accord avec votre analyse néanmoins intéressante des erreurs colportées sur ces notions. Que la pensée de Rawls soit une pensée libérale et donc classée à gauche aux EU est incontestable, encore faut-il préciser qu’il n’existe pas de gauche absolue ! La gauche libérale est tout sauf une gauche d’inspiration socialiste évidemment... Mais quand vous suggérez que Rawls ne pense qu’aux aides sociales (aux diverses formes des mesures de compensation des inégalités) quand il parle d’une inégalité qui profite aux plus défavorisés (ce que j’ai déjà entendu d’amis de gauche justement : donner plus aux défavorisés et moins au favorisés), vous vous trompez selon moi ! Rawls pense que les inégalités sont justifiées quand elles correspondent à des positions ouvertes à tous (nous retrouvons l’équité : juste égalité des chances) et quand elles profitent aux plus démunis, non seulement en ce qui concerne l’aide que l’on peut leur apporter (ici, la caisse en plus pour voir le match) mais bien aussi en ce qui concerne les inégalités de richesse qui sont justifiées par la liberté. L’un ne va pas sans l’autre ! Rawls n’est pas non plus le penseur du ruissellement pour lequel l’extrême richesse finit par profiter à tous, mais ce n’est pas seulement un penseur de l’inégalité nécessaire des aides sociales ou de la discrimination positive ! On ne peut justifier une correction des inégalités que si l’on a d’abord justifié ces inégalités elles-mêmes ! Quel besoin de compenser des inégalités qui n’existeraient pas ? Et Rawls ne parle pas des inégalités « naturelles » mais bien de celles issues du choix rationnel de l’équité à partir de son hypothèse du « voile d’ignorance »... Bref, la justice comme fairness, c’est tout de même une histoire d’égalité des chances et de compensation des inégalités quand c’est nécessaire. L’objectif n’est pas la suppression des inégalités, la contestation de leur apparente justification, mais bien la continuation d’un état de fait (la société est inégalitaire en raison du principe de différenciation qui vient de la liberté individuelle) sous une forme la moins insupportable possible pour les moins favorisés... Est-ce vraiment alors une pensée de gauche comme nous pouvons l’entendre dans la vieille Europe dépassée par son manque de pragmatisme et de rationalité ? C’est avant tout une pensée libérale qui constate et tente de justifier rationnellement des inégalités dont l’origine n’est pas - en réalité - la différenciation des libertés, mais bien d’autres inégalités de pouvoir, de position, de patrimoine...

      Rawls répondrait sans doute : il faut que chacun ait accès aux positions, mais l’on voit bien alors qu’il s’agit d’une pétition de principe, d’une expérience de pensée qui n’a aucun sens concret, aucune réalité historique et qui ne peut en avoir... De même, l’idée selon laquelle il serait juste que Bertrand gagne plus qu’Amélie parce qu’il travaillerait plus, déjà hautement contestable, ne correspond surtout à aucune réalité ! Ceux qui gagnent le plus dans nos sociétés ne sont pas ceux qui travaillent le plus, au contraire, les revenus du capital comme on dit étant supérieurs à ceux du travail... Donc, je résume, on reproche à ceux qui veulent en finir avec les inégalités sociales et non les atténuer d’être des utopistes, mais le pragmatisme libéral consiste surtout à « bénir » un état de fait et à chercher à le prolonger en lui donnant la caution - abstraite et spéculative - de la rationalité et de la bienveillance équitable...