Les migrants s’imposent à l’agenda français et européen

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  • « La France voudrait des camps de tri en Italie »

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    via ISS sur FB.

    La frontière italienne renoue avec les campements. « Comme du temps des “printemps arabes” ! », se souvient Teresa Maffeis. Dimanche, la militante niçoise des droits de l’homme a pris le train, direction Vintimille, pour aider les Africains bloqués sur place et empêchés d’entrer en France par la police de l’air et des frontières (PAF). En gare de Nice, d’où elle est partie, sa première image a été celle d’un groupe de vingt-cinq migrants « attendant d’être réexpédiés vers l’Italie. La montée dans le train pour Paris leur a été interdite. Le lot commun depuis jeudi », se désole-t-elle. A Vintimille, la situation lui a paru difficile avec « trois cents personnes autour et dans la gare, sans rien. Les femmes et les enfants dorment à l’intérieur sur des morceaux de carton. Les hommes dehors ».

    Plus près de la frontière, un groupe de jeunes hommes campe sur les rochers. Eux ont refusé d’obtempérer à la police italienne, qui a repoussé violemment tout le monde, samedi soir, vers Vintimille, pour les éloigner de la France. « Ils sont indélogeables mais ne disposent que de quelques couvertures de survie et de la nourriture que les gens, solidaires, leur apportent », s’inquiète la militante de l’ADN, Association pour la démocratie à Nice.
    Un étrange signal

    Ce blocage est un effet secondaire de la crise parisienne. La tension qui règne dans la capitale depuis l’évacuation musclée du campement de la rue Pajol (dans le nord de Paris), lundi 8 juin, par les CRS, a incité le ministère à stopper les arrivées, en refoulant vers l’Italie les migrants restés dans le sud de la France et en empêchant les autres d’entrer. Un campement à Vintimille est moins médiatique qu’une installation sous des bâches à Paris. Par ailleurs, la capitale n’a que peu de marge de manœuvre, pour avoir choisi de désamorcer le conflit à coups d’hébergements d’urgence, une denrée dont elle manque cruellement.

    Pourtant, renvoyer des migrants vers l’Italie, alors que les ministres de l’intérieur des Vingt-Huit se réunissent mardi 16 juin à Luxembourg pour organiser « le renforcement de la solidarité » entre les États membres (selon les termes de la Commission européenne), résonne comme un étrange signal ou une appréciation originale de l’entraide communautaire.

    La réunion de mardi, qui prépare le sommet des chefs d’Etat du 25 juin, portera sur la répartition dans les différents pays européens des migrants éligibles au statut de réfugiés. La « stratégie pour la migration » élaborée par la Commission européenne évoque notamment le partage de 40 000 demandeurs d’asile syriens et érythréens, actuellement présents en Grèce et en Italie, et de 20 000 réfugiés des Nations unies, installés provisoirement dans des camps de pays limitrophes de la Syrie.

    La France et l’Allemagne ont demandé une révision des clés de répartition élaborées par la Commission de Bruxelles pour installer équitablement ces réfugiés. Celle-ci hésite. Le commissaire aux affaires intérieures, Dimitris Avramopoulos, n’y serait pas opposé, alors que l’entourage du président Jean-Claude Juncker reste plus dubitatif.

    De son côté, l’Italie exige désormais une décision claire et rapide, et lance une menace. En cas d’absence d’accord, elle promet de mettre à exécution « un plan B » qui « fera mal à l’Europe ». Le chef du gouvernement Matteo Renzi l’a fait savoir dans un entretien au Corriere della Sera dimanche. Il y demande aussi une modification de la convention de Dublin, qui prévoit que les demandeurs d’asile postulent dans leur pays d’entrée en Europe. L’Italie estime injuste cette règle qui laisse Rome théoriquement seule face aux 57 000 arrivées que le pays a enregistrées depuis le début de l’année (3 000 de plus qu’en 2014). Dans la pratique, son pays contourne la règle en « oubliant » souvent de relever les empreintes des migrants qui arrivent sur ses côtes et en laissant traverser, sans les inquiéter, ceux qui veulent gagner l’Europe du Nord.

    Pour sortir de cette situation, Bernard Cazeneuve voudrait convaincre son homologue italien de mettre en place sur son sol (comme en Grèce) des camps gérés par l’Union européenne pour trier les migrants économiques des demandeurs d’asile dès leur arrivée. Les premiers seraient refoulés vers leur pays d’origine, les autres répartis en Europe. Le bureau européen de l’asile et le HCR feraient ce premier tri et les États étudieraient les dossiers.
    Un nouveau campement toléré

    Si la migration est à l’agenda européen, elle est aussi au programme de l’exécutif français. D’une part parce que M. Renzi va rencontre François Hollande cette semaine à Milan, d’autre part parce que des réunions quotidiennes ont lieu place Beauvau avec Sylvia Pinel, la ministre du logement, sur ce sujet. Depuis que le chef de l’Etat lui a commandé un plan, mardi 9 juin, M. Cazeneuve travaille sur trois points : « Comment mieux accueillir les demandeurs d’asile, comment proposer un hébergement d’urgence aux migrants et comment être plus efficace dans l’éloignement », explique son entourage. Les discussions devraient se concrétiser dans les prochains jours.

    La solution doit être rapide car une centaine de migrants campent à nouveau dans le 18e arrondissement, en face du jardin d’Eole. Après l’évacuation de la rue Pajol, cette installation reste tolérée, bien que surveillée par la préfecture de police.

    L’annonce de la création d’un hébergement, probablement dans l’Oise, pour les « migrants en transit », par la maire de Paris, Anne Hidalgo, aura poussé l’exécutif à prendre l’initiative sur ce sujet à propos duquel il se montre frileux et peu bavard depuis le début de la mandature.

    #migrations #asile #france #italie