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    • Mais dans certains crânes a germé l’idée que l’expression de cette inquiétude infondée des maires et des élus locaux permettrait de réaliser l’opération d’auto-blanchiment dont ils rêvent. La démagogie électoraliste d’un certain nombre de sénateurs dans la perspective des prochaines élections sénatoriales affirmant la main sur le cœur leur volonté de protéger leurs futurs électeurs en a fourni l’occasion.

      « Profitons de la discussion et du vote de la loi de prolongation de l’état d’urgence, pour faire passer un texte salvateur sous forme d’amendement ». Dans la confusion actuelle, avec un Parlement godillot une modification des textes en forme d’amnistie préventive pourrait être adoptée subrepticement et mettre à l’abri tous ceux qui craignent que leur impéritie, leur négligence, leur désinvolture, leur amateurisme et l’ampleur de la catastrophe qu’ils ont tant aggravée les emmènent dans le box des accusés.

      Premier leurre envoyé par le sénateur Hervé Maurey annonçant à grand son de trompe le dépôt d’une proposition de loi destinée prétendait-il à protéger les maires. Ce texte est à la fois inconstitutionnel et juridiquement inepte :

      « La responsabilité, civile ou pénale, d’un maire ou d’un élu municipal le suppléant ou ayant reçu une délégation, appelé à mettre en œuvre une décision prise, durant l’état d’urgence sanitaire, et en lien avec celui-ci, par l’État ou d’autres collectivités territoriales que la commune, ne peut être engagée que s’il est établi qu’il disposait des moyens de la mettre en œuvre entièrement et qu’il a commis de façon manifestement délibérée une faute caractérisée. »

      Tout d’abord, faire un régime spécial pour un élu afin de l’exonérer de l’application d’une infraction à caractère général concernant tous les citoyens, n’est pas possible. Ensuite la simple lecture de cette proposition démontre qu’elle n’est qu’une paraphrase du texte déjà existant. Pour un acte en lien avec l’état d’urgence sanitaire, l’élu ne pourra pour être condamné que « s’il disposait des moyens de la mettre en œuvre entièrement ». Formidable innovation ! C’est précisément la définition des diligences normales déjà prévues à l’article 121-3 du code pénal (voir plus haut). Et la proposition de poursuivre : « l’élu ne pourra être condamné que s’il a commis une faute caractérisée » !

      Alors pourquoi cette énormité juridique inutile ? La suite nous l’apprend lorsque la presse publie une tribune de 138 députés de la majorité annonçant, la main sur le cœur leur soudaine sollicitude pour les élus locaux et leur volonté de déposer une proposition de loi destinée à les protéger.

      Mais là patatras, Aurore Bergé mange le morceau. Et confirme dans son intervention calamiteuse que bien sûr il s’agit de protéger les maires (dont on sait qu’ils sont déjà juridiquement couverts) mais c’est pour ajouter : « mais aussi toutes les personnes dépositaires d’une mission de service public ». Mais quelle surprise ! Parce que qu’est-ce qu’une personne dépositaire d’une mission de service public ? On va en citer quelques-unes, comme ça au hasard : Édouard Philippe, Christophe Castaner, Laurent Nuñez Sibeth Ndiaye, Olivier Véran, Agnès Buzyn, Jérôme Salomon, les directeurs des ARS, etc. etc.

      #incurie #important