Les municipales n’auraient pas contribué statistiquement à la propagation du Covid-19
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Une étude menée par des épidémiologistes et statisticiens conclut que la tenue du premier tour, le 15 mars, n’a pas accéléré statistiquement la circulation du virus, sans nier toutefois que des contaminations aient pu avoir eu lieu dans des bureaux de vote.
Le maintien du premier tour des élections municipales, le 15 mars, en pleine épidémie est, depuis deux mois, au centre d’une vive controverse. A l’effet indéniablement massif de la crise sanitaire sur la participation s’ajoute la suspicion que le scrutin ait pu jouer le rôle d’amplificateur de la diffusion du Covid-19 sur les territoires.
De fait, chaque bureau de vote pourrait avoir fonctionné comme une plaque tournante, contaminant les membres du bureau et redistribuant localement le coronavirus aux votants. Si elle n’est pas fantaisiste, cette hypothèse n’est toutefois pas confirmée par une étude mise en ligne, vendredi 15 mai, sur la base de prépublication MedRxiv et conduite par des épidémiologistes et statisticiens français. Des résultats qui pourraient prendre une importance considérable dans le débat public, alors que l’exécutif s’interroge sur les modalités du second tour de scrutin et qu’un avis du conseil scientifique sur ce sujet est attendu en début de semaine prochaine.
Les auteurs de cette analyse ont travaillé sur les données de participation au premier tour à l’échelle du département, colligées et consolidées par l’institut IFOP. Ils les ont mises en regard des informations d’implantation et de progression au niveau local du nouveau coronavirus.
Les chercheurs ont d’abord décrit l’enracinement du SARS-CoV-2 dans les territoires en fonction du taux d’admission à l’hôpital et du nombre de cas confirmés de Covid-19. Ils ont ensuite évalué la progression de la maladie dans chaque département en fonction de trois paramètres : la vitesse à laquelle de nouvelles hospitalisations surviennent, le nombre maximal d’hospitalisations totales, et le temps écoulé avant que la hausse des hospitalisations ne cesse – c’est-à-dire le point d’inflexion de la progression de l’épidémie.
Possibles facteurs de confusion
« Nous n’avons pas trouvé d’effet statistique du niveau de participation dans chaque département sur les hospitalisations ultérieures pour Covid-19, mesurées localement, dit Jean-David Zeitoun (Centre d’épidémiologie clinique de l’Hôtel-Dieu, à Paris), coordinateur de l’étude. Dit autrement, ce n’est pas parce que les gens sont plus allés voter dans un département donné que la maladie s’y est propagée plus rapidement en matière d’hospitalisations. »
Une telle analyse ne réfute pas la possibilité que des individus aient pu être contaminés pendant le vote, rappelle toutefois M. Zeitoun. « De nombreuses informations rapportées par la presse ont fait état d’assesseurs contaminés voire, malheureusement, décédés, et nos résultats ne contredisent pas ces cas individuels, précise-t-il. Le résultat auquel nous parvenons dit seulement que ces situations n’ont pas conduit à une accélération statistiquement mesurable de la diffusion de la maladie.