• Les municipales n’auraient pas contribué statistiquement à la propagation du Covid-19
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/05/15/les-municipales-n-auraient-pas-contribue-statistiquement-a-la-propagation-du

    Une étude menée par des épidémiologistes et statisticiens conclut que la tenue du premier tour, le 15 mars, n’a pas accéléré statistiquement la circulation du virus, sans nier toutefois que des contaminations aient pu avoir eu lieu dans des bureaux de vote.

    Le maintien du premier tour des élections municipales, le 15 mars, en pleine épidémie est, depuis deux mois, au centre d’une vive controverse. A l’effet indéniablement massif de la crise sanitaire sur la participation s’ajoute la suspicion que le scrutin ait pu jouer le rôle d’amplificateur de la diffusion du Covid-19 sur les territoires.

    De fait, chaque bureau de vote pourrait avoir fonctionné comme une plaque tournante, contaminant les membres du bureau et redistribuant localement le coronavirus aux votants. Si elle n’est pas fantaisiste, cette hypothèse n’est toutefois pas confirmée par une étude mise en ligne, vendredi 15 mai, sur la base de prépublication MedRxiv et conduite par des épidémiologistes et statisticiens français. Des résultats qui pourraient prendre une importance considérable dans le débat public, alors que l’exécutif s’interroge sur les modalités du second tour de scrutin et qu’un avis du conseil scientifique sur ce sujet est attendu en début de semaine prochaine.

    Les auteurs de cette analyse ont travaillé sur les données de participation au premier tour à l’échelle du département, colligées et consolidées par l’institut IFOP. Ils les ont mises en regard des informations d’implantation et de progression au niveau local du nouveau coronavirus.

    Les chercheurs ont d’abord décrit l’enracinement du SARS-CoV-2 dans les territoires en fonction du taux d’admission à l’hôpital et du nombre de cas confirmés de Covid-19. Ils ont ensuite évalué la progression de la maladie dans chaque département en fonction de trois paramètres : la vitesse à laquelle de nouvelles hospitalisations surviennent, le nombre maximal d’hospitalisations totales, et le temps écoulé avant que la hausse des hospitalisations ne cesse – c’est-à-dire le point d’inflexion de la progression de l’épidémie.

    Possibles facteurs de confusion
    « Nous n’avons pas trouvé d’effet statistique du niveau de participation dans chaque département sur les hospitalisations ultérieures pour Covid-19, mesurées localement, dit Jean-David Zeitoun (Centre d’épidémiologie clinique de l’Hôtel-Dieu, à Paris), coordinateur de l’étude. Dit autrement, ce n’est pas parce que les gens sont plus allés voter dans un département donné que la maladie s’y est propagée plus rapidement en matière d’hospitalisations. »

    Une telle analyse ne réfute pas la possibilité que des individus aient pu être contaminés pendant le vote, rappelle toutefois M. Zeitoun. « De nombreuses informations rapportées par la presse ont fait état d’assesseurs contaminés voire, malheureusement, décédés, et nos résultats ne contredisent pas ces cas individuels, précise-t-il. Le résultat auquel nous parvenons dit seulement que ces situations n’ont pas conduit à une accélération statistiquement mesurable de la diffusion de la maladie.

    #paywall

    • Simplicissimus, besoin de tes lumières, là.

      Est-ce qu’on pouvait réellement s’attendre à établir un lien entre « taux de participation » et hospitalisations ultérieures, dans une période où le virus n’était pas présent de manière uniforme sur le territoire, et dont on pense largement qu’il se répandait en clusters, c’est-à-dire à partir d’un nombre très limité de contaminations initiales.

      Le cas emblématique étant la Corée, par exemple :
      https://www.lemonde.fr/international/article/2020/03/13/en-coree-du-sud-l-epidemie-met-une-secte-opaque-dans-la-lumiere_6032948_3210

      En effet, 63 % des 7 500 cas dénombrés au mardi 10 mars concernaient des membres de ce mouvement

      De manière caricaturale, si on essaie d’établir alors un lien statistique entre « taux de participation à un culte religieux » et « contaminations initiales », on aurait un résultat inexploitable, avec quasiment aucune contamination dans « 100% moins une » églises recensées, et 4700 contaminations dans une seule église. C’est à dire : pas de lien statistique, mais un très évident lien de causalité.

      D’où, d’ailleurs dans cette phase de l’épidémie, l’importance des tests systématiques pour identifier les contacts à partir d’une seule personne positive. Ce qui n’a notoirement pas été fait (car apparemment pas possible) en France. Or il me semble que c’est justement cette méthode qui aurait permis de répondre à la conclusion citée :

      Une telle analyse ne réfute pas la possibilité que des individus aient pu être contaminés pendant le vote, rappelle toutefois M. Zeitoun. « De nombreuses informations rapportées par la presse ont fait état d’assesseurs contaminés voire, malheureusement, décédés, et nos résultats ne contredisent pas ces cas individuels, précise-t-il.

      Sans tests systématiques à l’époque permettant une enquête sur la chaîne de contamination (ce qui, à l’inverse, a été largement documenté en Corée), on ne peut donc que prétendre qu’on ne trouve pas de lien « statistique », tout en reconnaissant que la seule méthode valable pour établir un lien de cause à effet, ça aurait été l’autre (celle qu’on n’a pas faite).

    • Ouh la ! Je dois dire que je ne comprends pas grand chose aux explications fournies dans l’article… En particulier sur les 3 paramètres mentionnés (une vitesse (?), un maximum et un délai, rien de facile à intégrer conceptuellement dans une relation). D’où mon souhait de mettre la main sur la publication (toujours sans succès…)

      Par ailleurs, l’idée d’une corrélation spatiale me paraît vouée d’avance à l’échec, alors qu’on a une épidémie qui a fonctionné en taches. Ou alors, il aurait fallu que ces taches coïncident avec des poussées de participation ce qui me semble guère avéré.

      Enfin, de mon expérience personnelle, puisque ma commune était cluster dès le 5 mars, la chaîne de contamination est passée avant le premier tour et, à partir de l’épisode zéro pour le département, assez vite identifié comme étant un tournoi de bridge ayant eu lieu à la fois à Auray et à Crac’h, la propagation, ici, a eu lieu lors de réunions électorales (un peu) et en interne dans les familles (beaucoup, les cas graves étant des conjoints de membre de la liste municipale touchée). On remarquera que sur la bonne dizaine de personnes touchées, seules deux, les cas graves, ont été testées, ce qui n’a pas empêché l’établissement de la chaîne de contaminations (vers l’amont, l’aval s’étant assez vite tari).