J’étouffe

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  • #superbe #J’étouffe
    https://le1hebdo.fr/journal/jetouffe/301/1/article/j-touffe-3898.html
    #raoul_peck #extraits

    [...]
    Les soignants manifestent depuis des années pour dire combien nos vies sont en danger. On les admoneste et on leur reproche d’être alarmistes et « paresseux » (!).

    Les « gens » percent bien la rhétorique bancale. Quand il s’agit des banques, des fabricants d’automobiles, de l’industrie pharmaceutique, des Bourses, des spéculateurs, tout devient soudain possible : l’abandon des principes, la suppression des protections fiscales, environnementales, médicales, la déréglementation à gogo, la modification accélérée des barèmes, l’élimination ou l’amendement des normes de sécurité, les votes express au parlement, les mesures d’urgence, la loi martiale, et même : « laisser filer le déficit ». « Il faut relancer l’#économie ! » s’époumonent-ils. Mais laquelle ?

    [...]

    Dans un film que j’ai réalisé en 2000 (!), Le Profit et rien d’autre (Arte), à la question rhétorique : « Pourquoi je fais des films ? » j’ai répondu : « Parce que c’est beaucoup plus convenable que de #brûler_des_voitures. » Des amis ont cru que c’était un trait d’esprit.

    [...]

    Qu’est-ce que tout ceci a à voir avec le #racisme ? Un peu de patience. Avoir un peu de « contexte » permet de mieux assurer la cible.

    Depuis la #crise pétrolière des années 1970, le monde est rentré dans un nouveau cycle capitaliste. Cela a remis en question les rapports de force existants. Les anciens empires perdent leur exclusivité et refusent d’assumer que la gloire est (dé)passée et qu’il faut renoncer à l’idée de toute-puissance.
    Mais laquelle ?

    [...]

    Je suis fatigué d’éduquer, d’être patient, de faire bonne mine contre mauvaise fortune, alors que je suis confronté à un racisme dégradant (conscient ou inconscient). Je suis fatigué d’être pédagogue ; je suis fatigué de retenir ma réponse brutale, alors qu’une apostrophe censée être drôle vient d’être émise, énième microagression déguisée sous une « bonne foi » infantile. Je ne veux plus gérer l’inconfort de la stupidité d’un moment.
    [...]
    Les élus ? Certains ont compris. Ils se battent. Mais ils sont isolés. Les maires et les « gens de terrain » ? Peut-être nos seuls espoirs. Car eux, au moins, ils sont obligés de se confronter à l’humain au quotidien. Ils sont dans le réel, dans la vie, la mort, les naissances, le malheur, les fêtes, les enterrements. Dans les bons et les mauvais moments, ils n’ont d’autres choix qu’être présents. Père, mère, confesseur et soignant à la fois. Eux, ils savent. Il faut tout reprendre à la racine. Tout mettre sur la table, pour tout reconstruire. Aucune institution ne doit y échapper. C’est le problème de chaque citoyen, de chaque institution, la presse comprise, de chaque conseil d’administration, de chaque syndicat, de chaque organisation politique, partout il faut ouvrir ce chantier car c’est à vous de résoudre ce problème, pas aux Noirs, ni aux Arabes, ni aux femmes, ni aux homosexuels, ni aux handicapés, ni aux chômeurs. On saura vous rejoindre en temps voulu. Une discussion locale, régionale puis nationale, en totale indépendance du pouvoir. Organiser des états généraux sans avoir à brûler la Bastille ? Un impossible rêve de citoyen ? La République tolérera-t-elle sa remise en question ?
    [...]
    « Et nous voilà au milieu de la courbe, pris au piège dans le plus voyant, le plus coûteux, le plus invraisemblable toboggan que le monde ait jamais connu. Il nous faut agir maintenant comme si tout dépendait de nous […]. Si nous nous montrons dignes […] peut-être la poignée que nous sommes pourra-t-elle mettre fin au cauchemar racial, faire de notre pays un vrai pays et changer le cours de l’histoire. Si nous n’avons pas, et dès aujourd’hui, toutes les audaces, l’accomplissement de cette prophétie, reprise de la Bible dans une chanson écrite par un esclave, est sur nos têtes : Et Dieu dit à Noé / Vois l’arc en le ciel bleu / L’eau ne tombera plus / Il me reste le feu*… »

    Ce matin, en me levant… j’ai pleuré. J’ai pensé qu’un autre monde était possible, sans qu’on ait à mettre le feu partout. Maintenant, je ne suis plus sûr du tout.

  • J’étouffe | Raoul Peck
    https://le1hebdo.fr/journal/jetouffe/301/1/article/j-touffe-3898.html

    Ce matin en me levant, j’étais déjà brisé. Il y a eu tant de matins comme celui-là. Et chacun de ces matins laisse des traces. Des traces qui s’accumulent. Puis, ces cauchemars en sommeil, qui reviennent à chaque déflagration. Ce qui se passe en ce moment aux États-Unis me trouble à la nausée. Ce n’est cependant pas de l’Amérique dont je désire vous parler. Mais de la France. Par quelle extraordinaire magie celle-ci pourrait-elle rester en dehors de ce grand déballage ? Source : Le 1

    • Il faut tout reprendre à la racine. Tout mettre sur la table, pour tout reconstruire. Aucune institution ne doit y échapper. C’est le problème de chaque citoyen, de chaque institution, la presse comprise, de chaque conseil d’administration, de chaque syndicat, de chaque organisation politique, partout il faut ouvrir ce chantier car c’est à vous de résoudre ce problème, pas aux Noirs, ni aux Arabes, ni aux femmes, ni aux homosexuels, ni aux handicapés, ni aux chômeurs. On saura vous rejoindre en temps voulu. Une discussion locale, régionale puis nationale, en totale indépendance du pouvoir. Organiser des états généraux sans avoir à brûler la Bastille ? Un impossible rêve de citoyen ? La République tolérera-t-elle sa remise en question ?