• Comment les très jeunes s’informent sur les réseaux comme Instagram et TikTok
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    Les plateformes sociales sont devenues les premières sources d’infos pour les collégiens. Sans complexe, c’est sur TikTok, Insta et Snapchat qu’ils suivent l’actualité et qu’ils développent leurs propres formes de débats par story... avec ou sans émoji.

    Illustration crée par Louis Bolla pour Bien Vivre le Digital

    On les croit déconnectés de la réalité, à se dandiner sur les derniers tubes à la mode sur TikTok, ou cachés derrière leurs filtres « rabbit » sur Snap. Vous pensez que la Gen Z ne pense qu’à sa prochaine paire de snickers fluo ? Vous avez tout faux. Ceux qui sont nés entre 1996 et 2015 vont entrer dans l’âge adulte en ayant connu une pandémie, une récession et un temps à faire des barbeuk’ en Alaska. Alors, loin des images colorées et flashy qu’ils se partagent d’habitude en longue conversation ininterrompue avec leurs amis, la jeune génération a affiché son soutien politique sur les réseaux sociaux via une flopée de carrés noirs le 2 juin dernier. Noire, comme la couleur de peau de George Floyd, asphyxié par un policier blanc aux États-Unis pendant son arrestation. Un événement qui a secoué le monde entier, et révélé que les jeunes ont une conscience politique forte qu’ils n’hésitent pas à afficher sur TikTok, Snapchat ou Instagram, leurs premiers lieux de revendication.

    Des pavés… au hashtag

    Alors que leurs grands-parents balançaient des pavés en cherchant la plage, que leurs aînés sont descendus dans la rue contre les CPE, pour Charlie et contre les « porcs », les jeunes eux, s’arment de leur clavier et affichent leurs revendications sur les réseaux, comme un premier moyen d’appartenir à une mouvance. Le slogan même de « Black Lives Matter » est né d’un post Facebook.

    Retour en juillet 2013. Le jeune afro-américain, Trayvon Martin, 17 ans, désarmé, est abattu. L’acquittement de George Zimmerman, le meurtrier du jeune homme déclenche la colère d’Alicia Garza, activiste pour les droits homosexuels.

    Sous le coup de l’émotion, elle publie un post Facebook : « Black People. I love you. I love us. Our lives matter » (« Personnes noires. Je vous aime. Je nous aime. Nos vies comptent »). L’artiste et activiste Patrisse Khan-Cullors lui répond alors : « Black Lives Matter ».

    Depuis la mort de George Floyd le 25 mai dernier à Minneapolis, le mouvement Black Lives Matter s’est répandu comme une traînée de poudre sur les autres continents, via les réseaux. Pour autant, s’il est né sur les réseaux, le mouvement ne s’y est pas cantonné. Il a connu un immense écho en France. Lors des dernières manifestations contre le racisme et les violences policières le 2, le 9 et le 13 juin dernier, de nombreux collégiens et collégiennes sont venus grossir les rangs des manifestants.

    Des millions de vues sur TikTok, Snapchat et Instagram

    Les chiffres confirment l’engouement des jeunes pour le sujet. Sur TikTok, le réseau social préféré des moins de 13 ans (puisque 45,7% l’utilisent selon l’agence Heaven), la page #BlackLivesMatters a comptabilisé 10,2 milliards de vues. Même constat d’une montée en puissance de thèmes plus politiques sur Snapchat et Instagram, où le hashtag a comptabilisé près 22,1 millions de vues.

    #BLM n’est pas le seul sujet de société a avoir suscité l’attention des jeunes. #ImComingOut rassemble les personnes qui révèlent leur homosexualité avec un total de 10,1 millards de vues.

    Tiktok, Insta, Snap, le nouveau 20h

    Camille : “ Les grandes chaînes de télévision ne montrent pas tout, je préfère Snap” A 15 ans, Camille, élève de 3ème en Seine-Saint-Denis, s’informe surtout via Snapchat et uniquement grâce aux stories et aux posts des personnes auxquelles elle est abonnée. Les réseaux sociaux lui permettent, dit-elle, d’avoir une plus grande vision plus large sur l’actualité. « Sur Instagram, il y a du positif comme du négatif tandis que sur les grandes chaînes, on ne montre pas tout » explique la collégienne en région parisienne, « on a l’impression de voir plus de choses et de vraiment être au courant de ce qu’il se passe. »

    Ce shift dans la manière de s’informer et de s’engager n’est pas passé aperçu aux yeux des médias traditionnels. Après avoir investi Facebook, Snapchat ou Instagram, Le Monde réalise aujourd’hui de petites vidéos pédagos sur Tiktok. Dans le cas de #BLM, le quotidien a choisi d’expliquer les inégalités de peine de prison aux Etats-Unis… avec un rouleau de scotch. Et ça marche. A peine créé depuis quelques jours, Le Monde comptabilise déjà plusieurs milliers d’abonnés et l’une des vidéos (sur le port du masque) comptabilise même plus de 160.000 vues.

    Et les médias ne sont pas les seuls à s’y mettre. Le tout jeune Hugo Décrypte distille tous les jours les 5 infos à retenir de l’actu sur Insta et ouvre le débat quotidiennement sur une question d’actualité. Preuve que les jeunes adhèrent, le concept fédère plus de 500 000 personnes sur Insta. Hugo a même décliné le concept en version « Pop » pour la culture (100.000 abonnés) et pour le sport (59.000 abonnés). Et bien sûr sur Tiktok avec 175.000 abonnés et plus de 2 millions de like au total sur ses vidéos. Preuve que si les jeunes boudent les médias classiques, comme Camille, ils aiment être informés et exprimer leurs opinions.
    « Il faut que ça se sache »

    Ce combo info/réaction semble d’ailleurs être le moteur de l’expression politique des jeunes. Et le partage de contenus atteste d’une nouvelle forme de mobilisation. C’est d’ailleurs l’avis d’Inès, élève de seconde dans u lycée du sud de Paris, « partager ce genre de contenus est presque un geste politique », qui compense son absence aux manifestations. Même si l’interdiction de ses parents n’est pas un frein, la jeune fille ne se sent pas prête à se rassembler et trouve dans les réseaux sociaux une façon de participer à son échelle.

    Ces médias basés sur le flux et la réactivité font surgir « un sentiment de malaise face à des images sans filtre » qui touche les jeunes utilisateurs. « Ils éprouvent le besoin de les rediffuser [en disant], « il faut que ça se sache », « on ne peut pas le cacher »” explique Anne Cordier, Maîtresse de Conférence HDR en Sciences de l’Information et de la communication à l’Université de Rouen. Et ce relais massif de vidéos, au départ porté par une forte émotion, fait naître une forme de “conscience collective” chez les jeunes.

    #Engagement #Activisme #Tik_Tok #Snapchat #Anne_Cordier