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  • Covid-19 en Amérique latine : « Des coups d’État sont dans le domaine du possible » - regards.fr
    http://www.regards.fr/monde/article/interview-de-pierre-salama-l-amerique-latine-et-la-pandemie

    Pierre Salama. La première catastrophe est effectivement le nombre de décès. Que ce soit au Brésil, au Mexique, au Pérou et maintenant au Chili. Ceci d’autant plus que les chiffres réels sont très supérieurs aux données officielles. Selon le Financial Times lui-même il faudrait les multiplier par 2 ou 3. Tout simplement parce qu’on ne comptabilise pas ceux qui meurent chez eux, notamment et surtout dans les bidonvilles. C’est-à-dire ceux qui n’ont pas accès ou pas facilement accès à la médecine. La discrimination par l’origine sociale de ceux qui sont atteints par la pandémie est particulièrement forte du fait notamment des phénomènes de clusters. Les pauvres sont les premiers atteints par ce type de diffusion de la pandémie. Pas seulement parce qu’ils ont moins accès à la médecine et aux hôpitaux. Mais parce qu’ils ont le plus de comorbidité. Ils sont ceux qui souffrent le plus de malbouffe, d’obésité, de cholestérol, de problèmes cardiaques. Il est plus difficile pour eux de respecter les mesures de précautions recommandées comme se laver les mains, porter un masque, ou respecter les distances sociales. La densité de la population dans les bidonvilles est très grande. L’accès à l’eau courante est limité. Pour les plus pauvres qui vivent dans l’informalité, travailler est une question de survie. Rester confiné et ne pas travailler est une façon de mourir de faim, eux et leur famille. C’est une situation dangereuse. Compte tenu de leur plus grande vulnérabilité, les pauvres sont en attente de réponses immédiates voire miraculeuses. Nombre d’entre eux les trouvent notamment dans les enseignements des églises évangéliques auxquelles leur appartenance est assez massive. Les pauvres ont aussi besoin d’espoir. Il passe par la croyance plutôt que par la raison. Ils peuvent être particulièrement sensibles aux discours d’hommes politiques – souvent d’extrême droite – désignant des boucs émissaires. Par exemple au Brésil, Jair Bolsonaro dénonce tous ceux qui les empêchent d’aller travailler, c’est-à-dire ceux qui proposent le confinement. Ces discours trouvent une résonnance parce qu’ils renvoient à des nécessités vécues. Et effectivement malgré l’ampleur du désastre sanitaire et tous ses propos racistes ou homophobes, Bolsonaro conserve un appui populaire assez important un peu comme Donald Trump aux États Unis. Il conserve un socle de soutien parmi les exclus.