• La Désirade : le médecin qui en savait trop. On a tenté de le tuer alors qu’il attribuait une vague d’appendicites au mauvais état du réseau d’#eau. - Libération
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    Vieille histoire, mais #corruption et #racisme_d’État  ?

    L’ancien maire avait avalisé la construction du pipe-line d’eau qui devait initialement couvrir la Désirade sur toute sa longueur. Situé à la pointe de l’île, seul le hameau des Galets est directement relié à l’eau guadeloupéenne. Le reste de l’île est connecté au réservoir. Aussi, quand survient la rupture du tuyau, tout le monde s’alimente au réservoir... Sauf aux Galets où les habitants, qui vont puiser l’eau dans leurs citernes, seront dix fois moins touchés par la maladie. Les autres Désiradiens souffrent de violentes douleurs intestinales au côté droit. Ils se plaignent de démangeaisons survenues après la douche. Le Dr Le Cabellec a alerté la Ddass dès octobre 1995. En janvier, celle-ci assure que l’eau ne contient « aucun signe de contamination bactériologique ». Une eau nauséabonde. Puis des vers font leur apparition dans l’eau du robinet. « Ces vers sont longs de dix à quinze centimètres, explique le médecin. Une partie est mobile, et l’autre extrémité forme un tire-bouchon. » Un ver est confié au laboratoire de parasitologie du CHU de Pointe-à-Pitre, qui s’affirme incapable de l’identifier. Du coup, plusieurs vers prennent le chemin de la métropole, où ils n’ont pas été encore formellement reconnus. Certains évoquent l’hypothèse de vers marins entrés dans les tuyaux au moment de la rupture sous-marine. Selon des habitants des Galets, la canalisation n’a pas été correctement purgée au moment de la remise en marche du réseau. « J’ai bien trouvé des vers, une quinzaine, en une seule fois, se souvient Irma Contaret, habitante du Souffleur. Il y en avait de toutes sortes de longueurs. Parfois l’eau devenait jaune, et ça sentait. »

    Des spécialistes déconcertés. Le 4 juin, les autorités sanitaires sont encore dans le brouillard. « Deux hypothèses se dégagent, note la Ddass : un problème infectieux d’origine non déterminée ou l’installation d’une "terreur" à partir de quelques cas groupés, dus au hasard. » Quelques habitants sont invités au CHU, ils repartent avec des tranquillisants. De son côté, le médecin, appuyé par une association, SOS Santé Désirade, prohibe la consommation d’eau et conseille à ceux qui l’utilisent d’y ajouter trois gouttes d’eau de Javel par litre. A partir de ce moment, les cas vont sensiblement diminuer.

    Deux épidémiologistes parisiens viennent à la Désirade, fin juillet. On leur présente un ver, mais ils sont dubitatifs. On leur montre aussi des bouteilles remplies de boue, tirées du robinet : « Ce n’est pas parce qu’une eau est turbide qu’elle est toxique », répond l’un d’eux. La Ddass préfère mettre en cause les diagnostics d’appendicites. La Polyclinique de la Guadeloupe, où ont été opérés la plupart des Désiradiens, est implicitement mise en cause. Son chirurgien, le Dr Jérôme Manuceau, s’insurge : « L’appendice est un organe de défense immunitaire, il est en première ligne en cas d’atteinte des intestins ». Les appendices enlevés sont, du reste, toujours entre les mains d’un laboratoire. Selon ses analyses, sur 109 appendices retirés, 76% étaient gravement atteints. Des chiffres contredits par des analyses partielles effectuées à la demande de la Ddass.