Socialter, le média des transitions

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    • Aux origines de cette situation dramatique  : une crise du logement profonde et durable. La crise de 2008 avait fait exploser les inégalités d’accès au logement et, depuis, c’est une longue descente aux enfers. À tel point qu’en 2019, l’ONU a déclaré la France coupable de «  violations des droits humains  »1 dans sa gestion des sans-abri. Si les SDF sont le visage le plus tragique de cet accès de plus en plus limité au logement, plus de 4 millions de personnes sont mal logées2 en France selon la Fondation Abbé-Pierre. Près d’un million de personnes habitent dans des logements en surpeuplement et 3,5 millions ont froid en hiver faute de pouvoir chauffer leur habitat.

      En 2021, 786 000 coupures d’énergie ou réductions de puissance ont été effectuées pour cause d’impayés (soit 22 % de plus en deux ans), et plus d’un million de personnes sont aujourd’hui en situation de loyer impayé. Au total, si on compte toutes les personnes qui vivent dans des habitats en surpeuplement, les propriétaires qui habitent dans des logements dont ils ne peuvent plus payer les charges et les personnes pour qui le coût du logement est si élevé qu’il ne leur reste plus assez d’argent à la fin du mois pour subvenir à leurs besoins, la Fondation estime à 15 millions le nombre de personnes touchées par la crise du logement – un record historique. En France, cette crise est sûrement l’un des plus gros enjeux sociaux de notre époque, et pourtant, on la connaît si mal quand on ne la vit pas.

      Inégalités à tous les étages

      En dehors de la pénibilité évidente liée au mal-logement, les conséquences de mauvaises conditions de vie sur la santé sont gravissimes. Selon l’OMS, au moins 130 000 personnes décèdent chaque année en Europe à cause de conditions de logement inadéquates. Le #mal-logement a un impact majeur sur la santé physique en favorisant la propagation des maladies infectieuses, sans même parler des moisissures qui constituent un risque important pour la #santé. Et ce n’est pas tout  ! Comme le rappelle la dernière enquête de Santé publique France sur le sujet3, le fait d’habiter dans un logement dégradé conduit à un processus de stigmatisation, de dégradation sociale, de perte d’estime de soi  : «  Les effets de la mauvaise qualité du logement et de sa suroccupation sur la santé mentale, l’anxiété, la dépression, l’agressivité ont été scientifiquement démontrés.4  » Et pourtant, si plus d’un sixième de la population française est touché par cette crise du logement, non seulement la situation ne s’améliore pas, mais elle empire d’année en année  ! Pourquoi  ? Car c’est un choix politique.

      Le dernier rapport d’Oxfam sur le sujet ne laisse aucun doute à ce propos5. On y apprend que les prix de l’immobilier ont augmenté de 125,6 % entre 2001 et 2020, alors que dans le même temps, les revenus n’ont progressé que de 29 %. Autrement dit, en vingt ans les prix des biens immobiliers ont augmenté quatre fois plus vite que les revenus  : bonne nouvelle pour ceux qui détiennent un patrimoine immobilier, mauvaise pioche pour les autres. Cette crise survient sur fond d’augmentation des inégalités en France. En vingt ans, le patrimoine des 10 % les mieux dotés a été multiplié par 2,25  ; celui des 10 % les moins bien dotés a été divisé par 2. Ce sont précisément ces moins dotés qui peuvent à tout moment basculer dans la précarité du #logement.

      https://www.socialter.fr/article/salome-saque-crise-logement-inegalites-heritage

    • la suite de l’article cité par @colporteur insiste sur les politiques qui favorisent cette situation :

      Derrière ces chiffres se cache une béante fracture générationnelle, car les mieux dotés sont les plus âgés. Certains bénéficient même de cette crise du logement en louant des biens à prix d’or. En 2021, près de 45 % des multi-propriétaires immobiliers ont plus de 60 ans – et le ratio passe à 70 % lorsqu’on ajoute les cinquantenaires. Leur «  mérite  »  ? Avoir investi dans un contexte favorable entre 1970 et 1995 et s’être enrichis depuis grâce au boom immobilier historique. Depuis, vouloir accéder à la propriété immobilière quand on est jeune équivaut à jouer au Monopoly en arrivant au dixième tour.

      Une situation injuste que l’on doit aux avantages fiscaux de plus en plus nombreux pour les plus aisés, à la flexibilisation du marché du travail et à des politiques globalement façonnées pour favoriser les plus aisés, notamment les générations les plus anciennes, comme le démontre en détail le journaliste François de Closets dans son ouvrage La Parenthèse boomer (Fayard, 2022). Plus le temps passe, plus les inégalités se transmettent, en témoigne un rapport du Conseil d’analyse économique qui affirme qu’à cause, entre autres, de son système fiscal, la France est redevenue «  une société d’héritiers6  ». Bref, la crise du logement n’est que le symptôme de plus d’une politique qui tend à favoriser les favorisés et à pénaliser les plus modestes.

      Salauds de pauvres
      Enfin, les associations qui œuvrent sur le terrain aux côtés des plus précaires (et donc exposés à la crise du logement) déplorent surtout l’action insuffisante de l’État  ! Quelque 14 000 places en hébergement d’urgence ont été supprimées en 2023 et la production de logements sociaux ne cesse de diminuer au plan national (126 000 logements sociaux financés en 2016, contre 96 000 en 2022). De manière générale, la politique d’Emmanuel Macron tend à stigmatiser les plus précaires, via une multitude de lois visant à «  responsabiliser  » les pauvres, sous-entendant qu’ils sont responsables de leur situation, voire qu’ils «  profitent  » de l’argent public. Au menu, réduction des conditions d’accès au chômage, diminution des APL ou encore instauration d’heures d’activité obligatoires pour toucher le RSA… Cette politique horrifie la Défenseure des droits Claire Hédon, qui s’interrogeait dans les colonnes de Libération en octobre dernier  : «  Qu’est-ce que c’est que cette société qui va renforcer les inégalités au lieu de lutter contre  ?  »7

      En attendant que nos dirigeants se décident enfin à «  lutter contre  », la précarité du logement s’intensifie et s’étend à une partie de plus en plus importante de la population, au point de faire partie intégrante du paysage social. On s’habitue collectivement à tolérer l’extrême pauvreté et l’insalubrité des logements, si bien que des «  Élisabeth  » peuvent mourir de froid dans la rue en toute indifférence. 

      Il me semble essentiel de souligner que la politique de Macron est juste la politique de ses électeurs, et que beaucoup de ceux et celles qui subissent cette politique (jeunes, immigrés, pauvres et chomeurs) ne votent pas, parce qu’ils et elles n’en ont pas le droit (étrangers) ou parce qu’ils et elles ne sont pas inscrits, ou d’autres raisons matérielles, ou ne croient pas que leur vote soit important... Mais ça fait une différence quand même

  • Pourquoi il faut abandonner le gazon
    https://www.socialter.fr/article/abandonner-le-gazon-ecologie

    Hier symbole de réussite, aujourd’hui taxé d’aberration écologique, le gazon incarne cette vision passéiste de la nature : ordonnée, uniforme et domestiquée. Une hégémonie qui doit être remise en cause.

    On le voit partout, dans les parcs, les jardins, les stades et les golfs, à tel point qu’on ne le remarque plus vraiment, ou alors, parfois, à la faveur d’un écart à la norme attendue : ici très jaune, là très haut. Alors que les pelouses naturelles déclinent sous l’effet de l’urbanisation et de l’agriculture intensive, leur descendant des villes, le gazon, cette surface plantée d’herbes fines sélectionnées artificiellement, alimente un secteur qui pèse lourd : plus de 17 000 tonnes de semences ont été vendues en France l’an dernier, selon SEMAE.

    En plus, on pourra en finir avec les tondeuses de l’enfer.

  • Inégalités : faut-il manger les riches ?
    https://www.socialter.fr/article/inegalite-manger-les-riches

    En réalité, peu importe que l’on choisisse de s’attarder sur le dernier décile ou le dernier centile des ultra-riches : une telle approche échoue toujours à rendre compte du caractère dynamique de l’accumulation de richesses, et de la tendance en apparence inévitable du capital « à s’accumuler et à se concentrer dans des proportions infinies, sans limite naturelle », ainsi que l’avait identifiée l’économiste Thomas Piketty. Cette course folle ne se rend d’ailleurs visible que par intermittences, grâce aux quelques images qui nous parviennent du monde des riches – super­yachts, jets privés, virées dans l’espace et autres villas de luxe. Attributs grotesques d’une poignée d’individus qui truste une large part des richesses mondiales mais, aussi, attributs utiles pour donner un visage aux nuisances subies. Et rappeler que la lutte des classes n’a jamais cessé. « Il y a une guerre des classes, c’est un fait, concédait le multimilliardaire américain Warren Buffet. Mais c’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre et qui est en train de la gagner. »

    Un élan d’honnêteté assez inhabituel – l’ultra-­richesse se montre, en réalité, bien plus retorse. Pour invisibiliser, voire naturaliser l’origine de ses privilèges, elle émet au quotidien de multiples écrans de fumée. Le discours méritocratique est souvent mis à contribution en ce sens. Le riche mériterait ce qu’il a car sa « réussite » est avant tout le résultat conjoint de ses efforts et de son talent. Dans ce monde où la lutte des classes est escamotée au profit de la lutte des places, nous serions tous « entrepreneurs de nous-mêmes ». Si bien que la biographie de l’ultra-riche, vainqueur ultime de cette compétition de tous contre tous, devient une « saga » qui aura peut-être droit à sa série sur Netflix : à la barbe des autres challengers, il a su triompher des obstacles pour réaliser ses rêves – l’iPhone, le parfum « Sauvage », l’oléoduc Eacop en Ouganda… On en oublierait presque que 80 % des milliardaires français sont avant tout des héritiers.

  • Lecture de : La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique, de Guillaume Pitron

    Une perspective nationaliste navrante, mais une somme d’informations capitales.

    Extraits :

    « Le monde a de plus en plus besoin de terres rares, de « #métaux rares », pour son #développement_numérique, et donc pour ttes les #technologies_de_l’information_et_de_la_communication. Les #voitures_électriques et #voitures_hybrides en nécessitent deux fois plus que les voitures à essence, etc. »

    « Nos aïeux du XIXe siècle connaissaient l’importance du #charbon, & l’honnête homme du XXe siècle n’ignorait rien de la nécessité du pétrole. Au XXIe siècle, nous ne savons même pas qu’un monde + durable dépend en très grande partie de substances rocheuses nommées métaux rares. »

    « #Terres_rares, #graphite, #vanadium, #germanium, #platinoïdes, #tungstène, #antimoine, #béryllium, #fluorine, #rhénium, #prométhium… un sous-ensemble cohérent d’une trentaine de #matières_premières dont le point commun est d’être souvent associées ds la nature aux métaux les + abondants »

    « C’est là la clé du « #capitalisme_vert » : [remplacer] des #ressources qui rejettent des millions de milliards de tonnes de #gaz_carbonique par d’autres qui ne brûlent pas – et ne génèrent donc pas le moindre gramme de CO2. »

    « Avec des réserves d’or noir en déclin, les stratèges doivent anticiper la guerre sans #pétrole. […] ne plus dépendre des énergies fossiles d’ici à 2040. […] En recourant notamment aux #énergies_renouvelables & en levant des légions de robots alimentés à l’électricité. »

    « La Grande-Bretagne a dominé le XIXe s. grâce à son hégémonie sur la production mondiale de charbon ; une grande partie des événements du XXe s. peuvent se lire à travers le prisme de l’ascendant pris par les Etats-Unis et l’Arabie saoudite sur la production et la sécurisation des routes du pétrole ; .. au XXIe siècle, un État est en train d’asseoir sa domina routes du pétrole ; au XXIe siècle, un État est en train d’asseoir sa domination sur l’exportation et la consommation des métaux rares. Cet État, c’est la Chine. »

    La Chine « détient le #monopole d’une kyrielle de métaux rares indispensables aux énergies bas carbone & numérique, ces 2 piliers de la transition énergétique. Il est le fournisseur unique du + stratégique : terres rares — sans substitut connu & dont personne ne peut se passer. »

    « Notre quête d’un modèle de #croissance + écologique a plutôt conduit à l’exploitation intensifiée de l’écorce terrestre pr en extraire le principe actif, à savoir les métaux rares, avec des #impacts_environnementaux encore + importants que cx générés par l’#extraction_pétrolière »

    « Soutenir le changement de notre #modèle_énergétique exige déjà un doublement de la production de métaux rares tous les 15 ans environ, et nécessitera au cours des trente prochaines années d’extraire davantage de minerais que ce que l’humanité a prélevé depuis 70 000 ans. » (25)

    « En voulant nous émanciper des #énergies_fossiles, en basculant d’un ordre ancien vers un monde nouveau, nous sombrons en réalité dans une nouvelle dépendance, plus forte encore. #Robotique, #intelligence_artificielle, #hôpital_numérique, #cybersécurité, #biotechnologies_médicale, objets connectés, nanoélectronique, voitures sans chauffeur… Tous les pans les + stratégiques des économies du futur, toutes les technologies qui décupleront nos capacités de calcul et moderniseront notre façon de consommer de l’énergie, le moindre de nos gestes quotidien… et même nos grands choix collectifs vont se révéler totalement tributaires des métaux rares. Ces ressources vont devenir le socle élémentaire, tangible, palpable, du XXIe siècle. » (26)

    #Metaux_Rares Derrière l’#extraction et le « #raffinage », une immense #catastrophe_écologique : « D’un bout à l’autre de la chaîne de production de métaux rares, quasiment rien en #Chine n’a été fait selon les standards écologiques & sanitaires les plus élémentaires. En même temps qu’ils devenaient omniprésents ds les technologies vertes & numériques les + enthousiasmantes qui soient, les métaux rares ont imprégné de leurs scories hautement toxiques l’eau, la terre, l’atmosphère & jusqu’aux flammes des hauts-fourneaux – les 4 éléments nécessaires à la vie »

    « C’est ici que bat le cœur de la transition énergétique & numérique. Sidérés, ns restons une bonne h à observer immensités lunaires & paysages désagrégés. Mais il vaut mieux déguerpir avant que la maréchaussée alertée par les caméras ne débarque »

    « Nous avons effectué des tests, et notre village a été surnommé “le village du cancer”. Nous savons que nous respirons un air toxique et que nous n’en avons plus pour longtemps à vivre. »

    « La seule production d’un #panneau_solaire, compte tenu en particulier du silicium qu’il contient, génère, avance-t-il, plus de 70 kilos de CO2. Or, avec un nombre de panneaux photovoltaïques qui va augmenter de 23 % par an dans les années à venir, cela signifie que les installations solaires produiront chaque année dix gigawatts d’électricité supplémentaires. Cela représente 2,7 milliards de tonnes de carbone rejetées dans l’atmosphère, soit l’équivalent de la #pollution générée pendant un an par l’activité de près de 600 000 automobiles.

    « Ces mêmes énergies – [dites] « renouvelables » – se fondent sur l’exploitation de matières premières qui, elles, ne sont pas renouvelables. »

    « Ces énergies – [dites] « vertes » ou « décarbonées » – reposent en réalité sur des activités génératrices de #gaz_à_effet_de_serre . »

    « N’y a-t-il pas une ironie tragique à ce que la pollution qui n’est plus émise dans les agglomérations grâce aux voitures électriques soit simplement déplacée dans les zones minières où l’on extrait les ressources indispensables à la fabrication de ces dernières ?

    .. En ce sens, la transition énergétique et numérique est une transition pour les classes les plus aisées : elle dépollue les centres-villes, plus huppés, pour mieux lester de ses impacts réels les zones plus miséreuses et éloignées des regards. »

    « Certaines technologies vertes sur lesquelles se fonde notre idéal de sobriété énergétique nécessitent en réalité, pour leur fabrication, davantage de matières premières que des technologies plus anciennes. »

    .. « Un futur fondé sur les technologies vertes suppose la consommation de beaucoup de matières, et, faute d’une gestion adéquate, celui-ci pourrait ruiner […] les objectifs de développement durable. » (The World Bank Group, juin 2017.)

    « Le #recyclage dont dépend notre monde + vert n’est pas aussi écologique qu’on le dit. Son bilan environnemental risque même de s’alourdir à mesure que nos sociétés produiront des alliages + variés, composés d’un nombre + élevé de matières, ds des proportions tjrs + importantes »

    « Dans le monde des matières premières, ces observations relèvent le + souvent de l’évidence ; pr l’immense majorité d’entre nous, en revanche, elles sont tellement contre-intuitives qu’il va certainement nous falloir de longues années avant de bien les appréhender & faire admettre. Peut-être [dans 30 ans] nous dirons-nous aussi que les énergies nucléaires sont finalement moins néfastes que les technologies que nous avons voulu leur substituer et qu’il est difficile d’en faire l’économie dans nos mix énergétiques. »

    « Devenue productrice prépondérante de certains métaux rares, la Chine [a] désormais l’opportunité inédite d’en refuser l’exportation vers les États qui en [ont] le plus besoin. […] Pékin produit 44 % de l’#indium consommé dans le monde, 55 % du vanadium, près de 65 % du #spath_fluor et du #graphite naturel, 71 % du germanium et 77 % de l’antimoine. La Commission européenne tient sa propre liste et abonde dans le même sens : la Chine produit 61 % du silicium et 67 % du germanium. Les taux atteignent 84 % pour le tungstène et 95 % pour les terres rares. Sobre conclusion de Bruxelles : « La Chine est le pays le plus influent en ce qui concerne l’approvisionnement mondial en maintes matières premières critiques ». »

    « La République démocratique du Congo produit ainsi 64 % du #cobalt, l’Afrique du Sud fournit 83 % du platine, de l’iridium et du #ruthénium, et le Brésil exploite 90 % du #niobium. L’Europe est également dépendante des États-Unis, qui produisent plus de 90 % du #béryllium . »

    « Les 14 pays membres de l’OPEP, capables depuis des décennies d’influencer fortement les cours du baril, ne totalisent « que » 41 % de la prod. mondiale d’or noir… La Chine, elle, s’arroge jusqu’à 99 % de la prod. mondiale de terres rares, le + convoité des métaux rares ! »

    Aimants — « Alors qu’à la fin de la décennie 1990 le Japon, les États-Unis et l’Europe concentraient 90 % du marché des aimants, la Chine contrôle désormais les 3/4 de la production mondiale ! Bref, par le jeu du chantage « technologies contre ressources », le monopole chinois de la production des minerais s’est transposé à l’échelon de leur transformation. La Chine n’a pas trusté une, mais deux étapes de la chaîne industrielle. C’est ce que confirme la Chinoise Vivian Wu : « Je pense même que, dans un avenir proche, la Chine se sera dotée d’une industrie de terres rares totalement intégrée d’un bout à l’autre de la chaîne de valeur. » Vœu déjà en partie réalisé. Il a surtout pris racine dans la ville de #Baotou, en #Mongolie-Intérieure . »

    « Baotou produit chaque année 30 000 tonnes d’aimants de terres rares, soit le tiers de la production mondiale. »

    « Nos besoins en métaux rares se diversifient et s’accroissent de façon exponentielle. […] D’ici à 2040, nous devrons extraire trois fois plus de terres rares, cinq fois plus de tellure, douze fois plus de cobalt et seize fois plus de #lithium qu’aujourd’hui. […] la croissance de ce marché va exiger, d’ici à 2050, « 3 200 millions de tonnes d’acier, 310 millions de tonnes d’aluminium et 40 millions de tonnes de #cuivre 5 », car les éoliennes engloutissent davantage de matières premières que les technologies antérieures.

    .. « À capacité [de production électrique] équivalente, les infrastructures […] éoliennes nécessitent jusqu’à quinze fois davantage de #béton, quatre-vingt-dix fois plus d’aluminium et cinquante fois plus de fer, de cuivre et de verre » que les installations utilisant des #combustibles traditionnels, indique M. Vidal. Selon la Banque mondiale, qui a conduit sa propre étude en 2017, cela vaut également pour le solaire et pour l’hydrogène. […] La conclusion d’ensemble est aberrante : puisque la consommation mondiale de métaux croît à un rythme de 3 à 5 % par an, « pour satisfaire les besoins mondiaux d’ici à 2050, nous devrons extraire du sous-sol plus de métaux que l’humanité n’en a extrait depuis son origine ».

    .. Que le lecteur nous pardonne d’insister : nous allons consommer davantage de #minerais durant la prochaine génération qu’au cours des 70 000 dernières années, c’est-à-dire des cinq cents générations qui nous ont précédés. Nos 7,5 milliards de contemporains vont absorber plus de #ressources_minérales que les 108 milliards d’humains que la Terre a portés jusqu’à ce jour. » (211-214)

    Sans parler des « immenses quantités d’eau consommées par l’industrie minière, [des] rejets de gaz carbonique causés par le transport, [du] #stockage et [de] l’utilisation de l’énergie, [de] l’impact, encore mal connu, du recyclage des technologies vertes [de] toutes les autres formes de pollution des #écosystèmes générées par l’ensemble de ces activités [et] des multiples incidences sur la biodiversité. » (215)

    « D’un côté, les avocats de la transition énergétique nous ont promis que nous pourrions puiser à l’infini aux intarissables sources d’énergie que constituent les marées, les vents et les rayons solaires pour faire fonctionner nos technologies vertes. Mais, de l’autre, les chasseurs de métaux rares nous préviennent que nous allons bientôt manquer d’un nombre considérable de matières premières. Nous avions déjà des listes d’espèces animales et végétales menacées ; nous établirons bientôt des listes rouges de métaux en voie de disparition. » (216)

    « Au rythme actuel de production, les #réserves rentables d’une quinzaine de métaux de base et de métaux rares seront épuisées en moins de cinquante ans ; pour cinq métaux supplémentaires (y compris le fer, pourtant très abondant), ce sera avant la fin de ce siècle. Nous nous dirigeons aussi, à court ou moyen terme, vers une pénurie de vanadium, de #dysprosium, de #terbium, d’#europium & de #néodyme. Le #titane et l’indium sont également en tension, de même que le cobalt. « La prochaine pénurie va concerner ce métal, Personne n’a vu le problème venir. »

    « La #révolution_verte, plus lente qu’espéré, sera emmenée par la Chine, l’un des rares pays à s’être dotés d’une stratégie d’approvisionnement adéquate. Et Pékin ne va pas accroître exagérément sa production de métaux rares pour étancher la soif du reste du monde. Non seulement parce que sa politique commerciale lui permet d’asphyxier les États occidentaux, mais parce qu’il craint à son tour que ses ressources ne s’amenuisent trop rapidement. Le marché noir des terres rares, qui représente un tiers de la demande officielle, accélère l’appauvrissement des mines, et, à ce rythme, certaines réserves pourraient être épuisées dès 2027. »

    De la question « du #taux_de_retour_énergétique (#TRE), c’est-à-dire le ratio entre l’énergie nécessaire à la production des métaux et celle que leur utilisation va générer. […] C’est une fuite en avant dont nous pressentons l’absurdité. Notre modèle de production sera-t-il encore sensé le jour où un baril permettra tt juste de remplir un autre baril ? […] Les limites de notre système productiviste se dessinent aujourd’hui plus nettement : elles seront atteintes le jour où il nous faudra dépenser davantage d’énergie que nous ne pourrons en produire. »

    « Plusieurs vagues de #nationalisme minier ont déjà placé les États importateurs à la merci de pays fournisseurs prtant bien moins puissants qu’eux. En fait de mines, le client ne sera donc plus (toujours) roi. La géopolitique des métaux rares pourrait faire émerger de nouveaux acteurs prépondérants, souvent issus du monde en développement : le #Chili, le #Pérou et la #Bolivie, grâce à leurs fabuleuses réserves de lithium et de cuivre ; l’#Inde, riche de son titane, de son #acier et de son #fer ; la #Guinée et l’#Afrique_australe, dont les sous-sols regorgent de bauxite, de chrome, de manganèse et de platine ; le Brésil, où le bauxite et le fer abondent ; la Nouvelle-Calédonie, grâce à ses prodigieux gisements de #nickel. » (226-227)

    « En engageant l’humanité ds la quête de métaux rares, la transition énergétique & numérique va assurément aggraver dissensions & discordes. Loin de mettre un terme à la géopol. de l’énergie, elle va au contraire l’exacerber. Et la Chine entend façonner ce nouveau monde à sa main. »

    « Les #ONG écologistes font la preuve d’une certaine incohérence, puisqu’elles dénoncent les effets du nouveau monde plus durable qu’elles ont elles-mêmes appelé de leurs vœux. Elles n’admettent pas que la transition énergétique et numérique est aussi une transition des champs de pétrole vers les gisements de métaux rares, et que la lutte contre le réchauffement climatique appelle une réponse minière qu’il faut bien assumer. » (234-235)

    « La bataille des terres rares (et de la transition énergétique et numérique) est bel et bien en train de gagner le fond des mers. Une nouvelle ruée minière se profile. […] La #France est particulièrement bien positionnée dans cette nouvelle course. Paris a en effet mené avec succès, ces dernières années, une politique d’extension de son territoire maritime. […] L’ensemble du #domaine_maritime français [est] le deuxième plus grand au monde après celui des #États-Unis. […] Résumons : alors que, pendant des milliers d’années, 71 % de la surface du globe n’ont appartenu à personne, au cours des six dernières décennies 40 % de la surface des océans ont été rattachés à un pays, et 10 % supplémentaires font l’objet d’une demande d’extension du plateau continental. À terme, les États pourvus d’une côte exerceront leur juridiction sur 57 % des fonds marins. Attirés, en particulier par le pactole des métaux rares, nous avons mené, en un tps record, la + vaste entreprise d’#appropriation_de_territoires de l’histoire. »

    « Le projet, entonné en chœur par tous les avocats de la #transition_énergétique et numérique, de réduire l’impact de l’homme sur les écosystèmes a en réalité conduit à accroître notre mainmise sur la #biodiversité. » (248)

    « N’est-il pas absurde de conduire une mutation écologique qui pourrait tous nous empoisonner aux métaux lourds avant même que nous l’ayons menée à bien ? Peut-on sérieusement prôner l’harmonie confucéenne par le bien-être matériel si c’est pour engendrer de nouveaux maux sanitaires et un #chaos_écologique – soit son exact contraire ? » (252)

    Métaux rares, transition énergétique et capitalisme vert https://mensuel.lutte-ouvriere.org//2023/01/23/metaux-rares-transition-energetique-et-capitalisme-vert_4727 (Lutte de classe, 10 janvier 2023)

    #écologie #capitalisme #impérialisme

  • Réensauvagement : comment nouer de nouvelles alliances ?
    https://www.socialter.fr/article/reensauvagement-alliance-et-protection-nature

    La déprise agricole et les initiatives de réensauvagement ouvrent des conflits entre usages paysans des terres et protection du monde sauvage, au point que cet antagonisme, qui découle directement de la séparation entre nature et culture, paraît parfois insoluble. Une troisième voie est pourtant possible : celle d’un réensauvagement revendiqué depuis les territoires, par des collectifs d’habitant·es, afin de constituer des espaces de vie sauvage dans les interstices d’une campagne paysanne revigorée.

    #terre #monde_paysan #nature

  • Manuel de rhétorique à l’usage du repas de Noël
    https://www.socialter.fr/article/manuel-de-rhetorique-a-l-usage-du-repas-de-noel

    Jean-Michel, c’est ton oncle pas vraiment climato-négationniste, mais un peu écolo-sceptique. Son problème, c’est qu’à force de regarder les talk-shows sur CNews, son intérêt pour l’écologie en a pris un sacré coup. À qui veut l’entendre, il répète qu’il n’a aucune intention d’infléchir son mode de vie. Le repas de Noël est alors devenu pour lui une sorte de tribune annuelle, une occasion sublime pour fracasser la paix familiale en sortant sur un ton bourru quelques énormités. D’habitude, tu te servais un autre verre en soupirant. Cette année, tu as décidé que c’était à ton tour d’aller ferrailler avec Jean-Michel. Mais, aussi, de ne pas tomber dans son jeu : le laisser te hérisser le poil, te faire sortir de tes gonds et abandonner toute argumentation au profit d’anathèmes à réchauffer un marron glacé. L’esprit de Noël, c’estaussi ça : les miracles arrivent… et Jean-Michel peut se laisser convaincre que le combat écologique est l’enjeu du siècle.

  • Lithium loin des yeux mais pourtant devant ta porte

    Attendez les gens... si l’ exploitation de Lithium s’avérait polluant (imaginons), vous ne seriez pas prêt à l’assumer sur le territoire franćais, alors qu’en RDC, pas de problème ?
    Et je suppose que ce refus ne s’accompagnerait pas d’un boycott des voitures et vélos électriques ? Non, ca non, faut continuer à se bercer d’illusions de transitions écologique...

    https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/terre-lithium-france-impact-ecologique-nouvel-or-blanc-101509

  • François Bégaudeau : « Mépriser le mépris » (Socialter, 10/03/2022) https://www.socialter.fr/article/francois-begaudeau-mepriser-le-mepris

    On entend beaucoup parler de mépris de classe, ces temps-ci. On pourrait s’en féliciter, songeant que ce succès verbal participe du retour en force, après des décennies de placard, de la catégorie de classes et de la lecture du réel qu’elle outille. Or, dans ce réjouissant tableau d’une pensée sociale réhabilitée, quelque chose fait tiquer. Le succès, justement. Succès veut dire nombre, et dans le nombre il y a de tout. Le nombre est une auberge espagnole où l’on ne croise pas que des amis. Parmi les fieffés rebelles qui dénoncent le mépris de classe, certains n’ont pas du tout la réputation de croire que les classes structurent la société, et encore moins qu’elles sont le moteur de l’histoire, comme aurait dit Marx qu’ils abhorrent. On pense par exemple à cet essai récent s’émouvant du mépris dont les énarques ont jadis couvert le pauvre Sarkozy, qui a grandi dans un ruisseau de Neuilly, et le malheureux François Pinault parti sans rien de sa Bretagne natale comme Bécassine. Ces passages poignants ne sont pas surprenants dans un livre par ailleurs très remonté contre l’égalitarisme et les privilèges des fonctionnaires. Ils doivent être vus comme parfaitement ajustés à la démonstration libérale d’ensemble. À travers eux on réalise que dans « mépris de classe », « mépris » occulte « classe ».

    Gros dossier que le mépris. Zone affective trouble et subtile. Le mépris est plus subtil que la haine. Le mépris infériorise son objet, alors que la haine est toujours un hommage. Le mépris se nourrit du sentiment que l’individu méprisé s’infériorise lui-même. Dans le film nommé Le Mépris (1963), Paul-Piccoli, scénariste, s’est mis lui-même plus bas que terre en se couchant devant un producteur. Dès lors, Camille-Bardot, sa compagne, le regarde de haut. Puis ne le regarde plus. Pour elle, il n’existe plus. Si tu es chômeur et que tu ne cherches pas de travail, c’est parce que tu te complais dans le chômage alors qu’il suffit de « traverser la rue » pour trouver du boulot. Tu ne crois pas en toi, tu as une piètre estime de toi. Regarde-toi, avec ton survêt. Tu te négliges tellement que tu n’as même pas envie de porter une veste. Comment voudrais-­tu qu’on te regarde, alors que tu te planques ? Dès lors, dans une gare, tu fais partie des gens qu’on ne voit pas. Tu n’existes pas.

    Mais le parallèle entre Emmanuel Macron et Brigitte Bardot s’arrête là, en dépit de leur criante ressemblance physique. Si, à leurs yeux, Paul et le chômeur ont perdu toute valeur, ce n’est pas dans le même sens. Pour Brigitte, son amant perd sa valeur parce qu’il n’est plus vaillant. Pour Emmanuel, n’avoir aucune valeur signifie n’avoir aucune valeur sur le marché. Le boutiquier qu’il demeure rabat la valeur sur la valeur marchande. Les chômeurs ne sont rien au sens où ils comptent pour zéro dans la richesse nationale. Loin de rapporter, ils coûtent – « un pognon de dingue ». Ce qui est tout à fait vrai. 

    Malaise français
    Il ne s’agit donc pas de mépris. La formule macronienne emblématique du mépris de classe n’en procède pas. Parlant « des gens qui ne sont rien », Macron expose un fait objectif pour lui et les start-uppers qui l’écoutent religieusement. Ce n’est pas un jugement, c’est une donnée. Cela ne révèle pas la psychologie de ces winners, mais leur représentation de la société. Ce n’est pas de la psychologie, c’est de l’idéologie. Ce n’est pas du mépris de classe, c’est un point de vue de classe ; la sécrétion idéologique d’une position de classe. Le mépris relève de ce lexique médico-psychologique qui infuse aujourd’hui tous les discours et joue un grand rôle dans la dépolitisation générale. L’agora dépolitisée dit qu’une société est malade plutôt qu’injuste ; que la société doit être réparée plutôt que subvertie. C’est en bon conservateur que Marcel Gauchet parle du « malaise français ». La France fait un malaise, appelons le Samu, réanimons-la par massage cardiaque, gardons-la trois jours en observation chambre 232 et la voilà requinquée. Car la France, n’est-ce pas, est résiliente.

    Si le problème est psychologique, il n’est pas social. Si le problème est le mépris de classe, le problème n’est plus la classe mais le mépris. Si on demande juste à Macron de s’amender du mépris qui suinte de son visage glabre, il peut à loisir continuer à arroser de cadeaux le grand capital. Retirez les quelques saillies méprisantes de son quinquennat et le bilan est globalement positif. Que le riche renonce à sa morgue et nous lui laisserons ses privilèges. Est-ce seulement cela que nous voulons ? Que ces gens ravalent leur mépris ? Qu’ils acquiescent en silence quand on leur fait part de doléances ? Qu’ils prennent un air d’écoute attentive ? Qu’ils affectent l’empathie ? La flat tax, on a admis ; la « réforme nécessaire » de l’assurance-chômage, on admettra, mais de Macron on ne peut plus supporter l’absence d’empathie. Alors que sa femme, l’autre Brigitte, en a des kilos à revendre. Hier encore elle répondait personnellement à la lettre d’une jeune myopathe. Emmanuel, lui, ne répondrait même pas à un dyslexique. Moyennant quoi on se demande si en avril on ne va pas lui préférer Valérie Pécresse, femme et donc empathique.

    Ces gens qui n’existent pas
    Psychologiser la politique, c’est l’individualiser. Indivi­dualiser la politique, c’est se déshabituer à penser politiquement et donc socialement les situations. Macron ne souffre pas d’un déficit d’empathie envers les pauvres, il n’est juste pas en position d’exercer cette empathie. Être sensible à la vie d’un individu suppose qu’on soit en contact avec lui. Fils de médecin, passé directement d’un lycée jésuite de province à un lycée d’excellence parisien, puis de l’ENA aux cabinets ministériels en passant par la banque sous Cloche, Macron n’a jamais été en présence d’un prolo. Il ne saurait être plus sensible au sort des précaires que je ne le suis à son lyrisme de banquet militaire. Pour lui, les gens qui n’existent pas n’existent vraiment pas, ils n’ont pas de réalité tangible. Son défaut n’est pas le mépris mais la classe. Et la place qu’elle lui fait occuper. Et l’étroit point de vue sur le monde auquel elle le contraint. Une malencontreuse distraction au moment de l’acquisition a fait que la maison du Touquet a vue sur la mer et non sur une usine.

    Et quand bien même ce mépris existerait, est-ce vraiment un problème, est-ce vraiment le problème ? Si une telle pente psychologique est repérable chez les dominants, mérite-t-elle notre attention, notre indignation ? De quoi souffre le prolétaire : d’essuyer le mépris de classe ou de subir l’oppression de classe ? S’il était donné à une femme de ménage de choisir entre quatre heures de moins par jour sans baisse de salaire et un bonjour poli du DG de la boîte qu’elle croise à 9 h 15 en sortant du bureau qu’elle vient de nettoyer, elle choisirait quoi ? Peut-être que je minimise l’humiliation du mépris social, et que je la minimise parce que mon sillon petit-­bourgeois me l’a épargnée. Peut-être que je serais moins désinvolte sur le sujet si un regard condescendant de patron me laissait une blessure aussi vive que le sourire de Magalie Barrault pour décliner mon invitation à danser un slow au bal du 14 Juillet 1986. Il n’empêche que notre perfectionnement politico-esthétique passe par l’indifférence au mépris des hautes classes. Nous gagnerons à le mépriser, au sens où un individu noble d’âme méprise les honneurs. Nous gagnerons à trouver ce mépris flatteur, étant entendu qu’il n’est rien de plus gratifiant que le mépris d’un méprisable.

  • François Bégaudeau et l’extrême droite : l’interview « Notre joie »
    https://www.youtube.com/watch?v=o6qITj7AEG8

    Ne pas se braquer sur l’ambiance un peu amateur et sur les gesticulations de Bégaudeau, même je dirais plutôt l’écouter qu’en audio c’est plus pratique, ya des questions vraiment intéressantes et des passages sur l’art, sur le second degré ou pas dans l’art (ça n’existe pas pour lui).

    L’article dont il parle à un moment :
    https://www.socialter.fr/article/francois-begaudeau-dystopie-gauche

    #François_Bégaudeau #interview #politique #extrême_droite #art #Dune #dystopie #libéralisme_autoritaire

  • Jean-Luc Mélenchon : Toutes les batailles politiques sont des conflits d’imaginaires
    https://www.socialter.fr/article/jean-luc-melenchon-toutes-les-batailles-politiques-sont-des-conflits-d-ima

    Comment vous est venue cette passion pour la science-fiction ?

    Je pourrais presque vous en dire l’heure. J’étais professeur de lettres et surveillant d’internat au lycée professionnel du bois à Mouchard, dans le Jura. Je m’endormais littéralement sur certains livres du programme des lectures aux concours que j’envisageais. Ils me tombaient des mains. Ce jour-là, je n’arrivais plus à m’y intéresser. J’étais dans un café, je m’ennuyais mortellement en attendant le bus ou le train (je n’ai jamais conduit une voiture de ma vie). Je vois un tourniquet avec des romans de poche. Un livre au titre bizarre – Le Monde des non-A de Van Vogt – retient mon regard.

    Ce fut un double choc : j’ai à la fois découvert la science-fiction et une manière nouvelle de choisir mes lectures, fondée sur des titres étranges, des couvertures attirantes et des quatrièmes de couvertures accrocheuses. Autant de critères futiles, jusque-là insupportables pour l’intellectuel raffiné que je voulais être. La science-fiction a été une brèche dans le mur de mes préjugés si typiques du petit-bourgeois qui a fait du latin à l’école et adhère aux snobismes de sa caste : la grande littérature et le reste. Depuis cette date, je suis un ami de la littérature de gare, du choix à l’emporte-pièce. J’assume de ne plus lire que par plaisir, sans me soucier des convenances.

  • Accueillir la peur, et aussi colère, dégout, haine, fureur, ...et la révolte
    https://ricochets.cc/Accueillir-la-peur-et-aussi-colere-degout-haine-fureur-et-la-revolte.html

    Présentation du hors-série, et quelques remarques ensuite. L’abîme se peuple - L’écologie ou la mort ? Ciel ! On voit déjà déferler les critiques. « Avec un titre pareil, vous allez faire peur aux gens ! » Si l’on ne ressent ni angoisse ni effroi, comment prendre la mesure de la catastrophe ? Et donc ? La peur n’est-elle pas le reflet du désir de vivre, le moyen d’échapper à la mort lorsque le danger surgit ? Si l’on ne ressent ni angoisse ni effroi, comment prendre la mesure de la catastrophe ? « Si elle est (...) #Les_Articles

    / #Ecologie, #Résistances_au_capitalisme_et_à_la_civilisation_industrielle, Révoltes, insurrections, débordements..., (...)

    #Révoltes,_insurrections,_débordements... #Révolution_
    https://www.socialter.fr/article/hors-serie-ecologie-ou-la-mort-edito
    https://www.socialter.fr/article/l-ecologie-ou-la-mort-par-camille-etienne

  • Legal Teams : Quand la défense contre-attaque
    https://www.socialter.fr/article/legal-teams-quand-la-defense-contre-attaque

    Face à la répression juridique des militants, qu’ils soient gilets jaunes ou activistes antinucléaires, les coordinations antirépression et leurs legal teams s’approprient les enjeux de la défense et font du prétoire un lieu de lutte collective et politique.

    Au 67 rue de Turbigo, une discrète annexe de la Bourse du travail parisienne et sa grande salle de classe aux carreaux vieillis. « Parlons rapidement du programme de samedi », entame l’une des femmes, membre de la coordination antirépression en guise de bonjour. « 12 h 30 : simulation de déplacement collectif ; 14 h 30 : formation juridique sur la garde à vue ; 17 h 30 : discussion sur l’abolitionnisme pénal... » La coordination se réunit ici, chaque mardi, depuis 2016. « Après Nuit debout, il fallait une structure pérenne : les mouvements sociaux s’amplifiaient, la répression s’aggravait... », raconte Amparo au micro deFréquence Paris Plurielle. D’abord assez confidentielles, les sessions comptent de plus en plus de monde. Les chaises finissent par manquer aux réunions hebdomadaires à mesure que la répression croît, notamment à l’encontre des Gilets jaunes, gardés à vue par dizaines chaque week-end. Peu habitués aux tribunaux, ces derniers font dans un premier temps une « confiance aveugle à la police ». L’avocate Alice Becker, proche depuis lors de cette legal team parisienne, se remémore certains, qui, interpellés pour simple possession de sérum physiologique, étaient « tellement abasourdis de se retrouver dans cette position qu’ils voulaient absolument défendre le bien-fondé de leur présence dans la rue. Et qui donc parlaient beaucoup, subissaient un usage détourné de leurs mots qui leur portait préjudice ».

    #défense_collective #défgense_militante #répression

  • En finir avec la tyrannie du parking
    https://www.socialter.fr/article/en-finir-avec-la-tyrannie-du-parking

    Ainsi, en France, depuis les années 1960, la solution la plus classique pour la structure des immeubles de logements est celle de murs ­porteurs implantés perpendiculairement à la façade, selon une trame régulière de 5,4 mètres. «  Cette trame permet de ­placer deux places de stationnement […] et dans les étages, deux chambres contiguës de 2,7 mètres ou un séjour et une cuisine tous deux très étroits (3,6 mètres + 1,8 mètre)  », apprend-on en école d’architecture. Mais pour quelles qualités des espaces à vivre… ? «  En l’assujettissant à des mesures jugées optimales du point de vue de la ­rationalité constructive, le parking en infra­structure contribue au dimensionnement de l’immeuble sans considération des conséquences sur les qualités et l’usage de l’espace  », regrette ­Christian ­Moley. Anne Pezzoni, architecte au sein de l’agence Archi5, dénonce elle aussi cette «  tyrannie du parking  », qui a favorisé la construction d’immeubles épais, peu lumineux.

    #logement

  • Longue vie au long terme !
    https://www.socialter.fr/article/longue-vie-au-long-terme

    Je ne dirais pas que le simple fait d’exister pendant une longue période de temps est intrinsèquement bon. Les choses qui ne changent jamais ont tendance à se dégrader ; tout ne doit pas durer éternellement. Mais la raison pour laquelle nous nous intéressons aux institutions qui durent, la raison pour laquelle nous voulons mieux comprendre ce phénomène, est qu’il y a des choses dans le monde que nous devrons accomplir et qui prendront plus que la durée d’une vie pour être menées à bien. Si nous voulons vraiment nous attaquer au changement climatique ou résoudre le problème de la faim dans le monde, il nous faudra plus que quatre ans, le cycle électoral, et probablement plus de 80 ans, le cycle d’une vie. Apprendre à durer est important, car parfois les actions que nous devons entreprendre s’étalent sur 200 ans.

  • Noctambules de tous les pays, unissez-vous !
    https://www.socialter.fr/article/noctambules-de-tous-les-pays-unissez-vous

    Le sommeil semble ainsi devenir une variable d’ajustement face à la concurrence d’autres activités et injonctions  : être efficace au travail, réussir sa carrière, avoir une vie sociale épanouie, être à jour quant aux dernières séries télé, etc. Les sollicitations sont nombreuses, démultipliées par les nouvelles technologies. Leur incidence néfaste sur le repos a d’ailleurs été soulignée par l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV). En 2016, plus de 36 % des Français utilisaient ordinateurs, tablettes et smartphones dans leur lit. Plus de 26 % y regardaient la télévision. Plus d’un sondé sur deux conservait aussi son téléphone à proximité la nuit. Et 92 % de ceux réveillés par des messages admettaient les lire de temps en temps, 79 % y répondre. Des réflexes problématiques. «  La lumière des écrans envoie un message contradictoire à l’horloge interne et bloque la mélatonine, l’hormone du sommeil  », met en garde Sylvie Royant-Parola, psychiatre et présidente du réseau Morphée, un groupe de professionnels de santé spécialistes du sujet. Par ailleurs, «  ces outils repoussent sans cesse les limites de l’activité en proposant des interactions sans fin, nécessitant une implication émotionnelle, poursuit-elle. Pour laisser venir le sommeil, un individu doit pourtant se retirer dans sa bulle, se couper du monde et de ses sensations  ».

  • Hadrien Klent : « La paresse, c’est prendre enfin le temps de vivre »
    https://www.socialter.fr/article/hadrien-klent-paresse

    Oui, le mot « paresse » est à double tranchant, et Émilien en parle plusieurs fois dans le roman, notamment lorsqu’il doit expliquer à ses enfants pourquoi ils n’ont pas le droit d’être « flemmards » alors que leur père défend la paresse ! J’aime bien ce passage, où la paresse renvoie clairement à une sorte de reprise en main de la vie : ne plus subir (tant les injonctions productives que les assauts de la consommation passive), décider de ce qu’on fait de son temps. La « paresse » pour Émilien Long, c’est prendre enfin le temps de vivre : ne plus être rivé à son travail, à ses écrans, à la consommation. Une forme de temps libre où l’on est obligés de s’interroger sur ce qu’on a envie de faire, ce qu’on aime, ceux qu’on peut aider, et ainsi de suite — tout simplement parce que tous les jours, après trois heures du travail, on est libre ! Cette liberté oblige à se reposer : se reposer la question de ce qui est bon pour nous.

  • De la simplicité à la complexité : un aller-retour
    https://www.socialter.fr/article/de-la-simplicite-a-la-complexite-un-aller-retour


    #transport #territoire

    J’aimerais également aborder pour exemple la façon dont nous menons notre vie quotidienne. Aujourd’hui, les denrées alimentaires sont principalement fournies par les supermarchés et les centres commerciaux et, dans un avenir proche, peut-être aussi par des services de livraison automatisés et par drones. De grands centres logistiques surgis du néant approvisionnent les filiales de grandes chaînes, la bière et les produits laitiers sont transportés par camion de l’extrême nord au sud de la république et vice versa, les produits régionaux sont diffusés par l’intermédiaire de la grande distribution et, de plus, ces paradis des consommateurs ne sont généralement accessibles qu’en voiture. Bien sûr, les produits doivent également être suremballés pour le transport, aucun effort n’est fait pour rendre les systèmes réutilisables pratiques et nous payons donc plusieurs fois pour ce genre de luxe et de gaspillage, entre autres au prix d’avoir des résidus de plastique réapparaissant dans les aliments, d’une terre de plus en plus polluée et bien sûr aussi de produits plus chers qu’à la traditionnelle épicerie du coin. On peut ici objecter à juste titre que le commerce de proximité doit également être approvisionné, mais cela aussi pourrait se faire via les tramways urbains et les véhicules électriques, et à une fraction des coûts actuellement engagés. Les centres commerciaux gigantesques, comparés aux commerces de proximité, loin d’être capables de réduire la production de CO2, sont une erreur de conception urbaine ! Ce système économique mondialisé et complexe a aussi montré ses limites pendant la crise sanitaire que nous vivons : les pénuries de masques et de respirateurs auraient pu être évitées si leur production était restée locale et facilement accessible.

  • En finir avec le temps
    https://www.socialter.fr/article/en-finir-avec-le-temps

    Loin de se limiter aux sphères de la physique et la métaphysique, cette conception du temps a trouvé une traduction matérielle dans le champ socioéconomique et s’est imposée par le perfectionnement de l’horloge mécanique et sa fulgurante entrée dans les usines. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la propagation de l’horloge mécanique est contemporaine aux grandes conquêtes du capitalisme industriel. Dans son opuscule Temps, discipline du travail et capitalisme industriel, Edward Palmer Thompson appréhende «  la révolution industrielle comme une révolution temporelle en étudiant les progrès de l’horlogerie et ses usages  ». Ce faisant, il remarque que «  vers 1790, les montres et horloges sont très répandues  ; c’est aussi à cette époque qu’elles cessent d’être des objets de luxe pour devenir des articles de nécessité. […] De fait, et ce n’est pas surprenant, les horloges et les montres se généralisent au moment précis où la révolution industrielle exige une meilleure synchronisation du travail  ». D’aucuns iront jusqu’à mettre l’horloge au cœur de la transition vers le capitalisme industriel. C’est le cas notamment de Lewis Mumford, qui estime que «  la machine-clé de l’âge industriel moderne, ce n’est pas la machine à vapeur, c’est l’horloge  ».

  • Argentine : face aux crises, l’autogestion
    https://www.socialter.fr/article/argentine-face-aux-crises

    C’est l’histoire d’un fleuron de l’industrie phar­ma­ceutique... ou plutôt de la décadence d’une entre­prise fondée en 1935 par le Français Julien Auguste Roux et conduite à la faillite par son petit-fils argentin, Julián Mariano Roux, en 2016. Après des décennies d’expansion, les derniers chapitres des laboratoires Roux s’écrivent à coups de plans sociaux, de salaires impayés et de dettes. Devant cette situation insoutenable et face à la menace d’une rafle de la machi­nerie par les repreneurs, les travailleurs optent pour la résistance. Ils décident, entre janvier et avril 2017, d’occuper l’une des deux usines du groupe, située dans le quartier de Villa Luro, au sud-ouest de ­Buenos ­Aires. Une longue période d’incertitude s’ensuit. Elle prend fin en mai 2019, quand la justice portègne  autorise l’exploitation des usines par leurs anciens employés : l’entreprise ­Roux-Ocefa est morte, vive Farmacoop ! Le premier laboratoire pharmaceutique récupéré par ses travailleurs voit le jour.

  • Le poison lent de Kanemi
    https://www.socialter.fr/article/le-poison-lent-de-kanemi

    L’affaire remonte aux années 1970. Une huile alimentaire, polluée aux PCB lors de sa phase de fabrication et commercialisée par l’entreprise Kanemi, a été vendue à la population d’îles reculées du sud du Japon, entraînant une crise sanitaire majeure qui perdure aujourd’hui. Les habitants de l’archipel de Goto réclament toujours justice, tandis que l’industriel n’a jamais reconnu sa responsabilité dans ce drame humain.