• Lactalis : évasion fiscale, pollution, négligences sanitaires, syndicalistes traqués… révélations d’une enquête indépendante (La Relève et La Peste)
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    Sur les 38 sites violant le Code de l’environnement, les journalistes de Disclose en ont recensé 34 dépassant les rejets de polluants autorisés, 19 rejetant un volume supérieur à l’autorisation, 17 ayant pollué un cours d’eau, dont 7 ayant entraîné une mortalité avérée de poissons.
    30 octobre 2020 - Augustin Langlade

    Lactalis pollue depuis des années des dizaines de rivières françaises ; Lactalis a élaboré un système d’évasion fiscale de grande envergure ; Lactalis pratique le mouillage du lait, recycle les fromages, dissimule ses négligences sanitaires, traque les syndicalistes… C’est ce que révèle une nouvelle enquête du média d’investigation Disclose. Mené pendant un an par quatre journalistes, Mathias Destal, Marianne Kerfriden, Inès Léraud et Geoffrey Livolsi, qui ont épluché des centaines de documents, recueilli des dizaines de témoignages, entrepris plusieurs analyses sur le terrain, ce reportage saisissant expose au grand jour « l’étendue des dérives impliquant » le géant français des produits laitiers.

    Fondé en 1933 en Mayenne, Lactalis est devenu en moins de cent ans une multinationale tentaculaire, numéro un mondial des produits laitiers, dont le chiffre d’affaires avoisine les 20 milliards d’euros. Aujourd’hui, le groupe possède 266 sites industriels répartis dans une cinquantaine de pays, emploie 85 000 salariés, transforme cinq à six milliards de litres de lait chaque année, fabrique des centaines de millions de fromages, de desserts, de poudres, de beurres, de protéines animales… On le retrouve derrière des marques telles que Lactel, La Laitière, Président, Bridélice, Chaussée aux Moines, Salakis, Société ou La Vache qui Rit. Non coté en bourse malgré sa taille gigantesque, Lactalis se structure en une myriade de filiales et de marques, des centaines d’entreprises locales dont les bénéfices convergent vers le siège, puis disparaissent dans des paradis fiscaux.

    ÉVASION FISCALE D’ENVERGURE

    Entre 2013 et 2018, révèlent les journalistes de Disclose, Lactalis aurait escroqué l’administration fiscale de 220 millions d’euros dus au titre de l’impôt sur les sociétés. Les enquêteurs ont décortiqué trois mécanismes à l’origine de cette évasion massive de capitaux : la création de dettes fictives, de créances entre les sociétés du groupe et d’emprunts entre filiales.

    En quelques mots, le mécanisme de la dette fictive consiste à payer les producteurs quarante jours après la livraison du lait, afin de faire baisser sur le papier les bénéfices de l’entreprise. Basée en Belgique, une holding du groupe, BSA International, rachète la dette de presque toutes les filiales dans lesquelles elle détient des parts, puis déclare aux pouvoirs publics des résultats médiocres, avant de se renflouer, tout naturellement.

    De la même manière, la société BSA International fait remonter vers elle les créances de toutes ses filiales : c’est le second mécanisme. Au lieu d’enregistrer dans le pays de production ou de vente ses bénéfices, la filiale de Lactalis les transfère vers la société belge auprès de laquelle elle a contracté des dettes, ce qui diminue d’autant la proportion d’impôts qu’elle aura à payer. Cette astuce aurait permis à Lactalis de faire circuler 1,2 milliard d’euros vers BSA International rien qu’en 2018.

    Enfin, les emprunts. Une société-écran luxembourgeoise, Nethuns, dont BSA International est actionnaire, accorde des prêts gigantesques aux filiales, qui seront remboursés avec force intérêts, transformés du même coup en autant de bénéfices. Grâce à cette méthode, BSA France aurait réduit ses bénéfices de 19,5 millions d’euros entre 2018 et 2019, s’épargnant 55 % des impôts qu’elle aurait dû régler au Trésor.

    La société-écran Nehtuns, conseillée par la banque Société générale, est détenue à hauteur de 33 % par chaque membre de la fratrie Besnier, propriétaire de Lactalis. Une fois les dettes de BSA International réglées et ses créances récupérées, Nethuns fait disparaître ses bénéfices mirobolants du Luxembourg vers des paradis fiscaux.

    POLLUTION DE DIZAINES DE RIVIÈRES FRANÇAISE

    En enquêtant pour les seules dix dernières années, les journalistes de Disclose ont découvert que 38 usines détenues par le groupe Lactalis (sur les 60 passées en revue) avaient pollué ou polluent toujours des cours d’eau, en parfaite violation du Code de l’environnement.

    Ces 38 usines sont toutes des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Régime dérogatoire, le statut d’ICPE autorise une usine à déverser ses eaux usées dans la nature, à condition qu’elle les épure et procède à des mesures d’auto-surveillance. Autrement dit, les eaux sont censées être drastiquement traitées avant le rejet, et évaluées pour qu’elles ne présentent aucun danger sanitaire ou environnemental. Les auto-surveillances sont transmises à la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), dont les 1 600 agents sont chargés de contrôler quelque 500 000 installations… Trop peu pour empêcher la pollution.

    Sur les 38 sites violant le Code de l’environnement, les journalistes de Disclose en ont recensé 34 dépassant les rejets de polluants autorisés, 19 rejetant un volume supérieur à l’autorisation, 17 ayant pollué un cours d’eau, dont 7 ayant entraîné une mortalité avérée de poissons.

    Disclose cite l’exemple de la fromagerie de la marque L’Étoile du Vercors, produisant du Saint-Marcellin et du Saint-Félicien. Non raccordée à une station d’épuration, cette usine déverserait depuis une dizaine d’années 100 000 mètres cubes d’eaux souillées par an dans l’Isère (40 piscines olympiques), au point que la pollution serait visible depuis l’espace. On est en plein cœur du Parc naturel régional du Vercors, normalement protégé par son statut. Et pourtant, chaque jour, 600 kilos de produits toxiques comme des détergents industriels sont librement rejetés dans la rivière.

    Après maintes investigations, les policiers de l’Office français de la biodiversité (OFB), alertés par une association, s’aperçoivent que les auto-surveillances effectuées par la fromagerie évitent délibérément de rechercher la présence de certaines substances comme le cyanure, le plomb, le cuivre ou le nickel dans leurs eaux usées, à la demande de la direction du groupe elle-même. Pire, une dizaine d’usines sur les 38 en infraction auraient transmis aux services de l’État des rapports d’auto-surveillance falsifiés.

    Pourquoi Lactalis préfère-t-il se passer de contrôle, éviter les traitements, au risque de finir en procès ? La raison est simple : les procédures de traitement des eaux usées sont bien plus chères que les amendes, dix fois plus chères, si l’on en croit les journalistes. Vu la lenteur des procès et le manque d’effectifs de l’OFB, mieux vaut donc empoisonner l’environnement.

    MOUILLAGE DU LAIT ET RÉCUPÉRATION DES EAUX DE LAVAGE

    Selon les journalistes de Disclose, pour augmenter toujours plus ses bénéfices, Lactalis utiliserait de nombreuses techniques strictement interdites sur notre territoire, à commencer par le réemploi de produits souillés. Un fromage tombe au sol. Au lieu de le jeter, la direction du groupe recommande à ses usines de le fondre à nouveau pour en faire du fromage à pizza ou de la Vache qui Rit, au mépris des dangers sanitaires que de tels procédés font peser.

    Le recyclage de matières usées ne s’arrête pas aux accidents de chaîne : il est aussi appliqué systématiquement au lait et aux crèmes desserts. Quand les petits pots de la marque La Laitière sont remplis, témoigne pour Disclose un ancien salarié de Lactalis, les tuyaux de l’usine sont lavés à l’eau claire. Le mélange d’eau et de crème qui en résulte est consigné dans des cuves de recyclage, dont le contenu sera disséminé dans les crèmes desserts du prochain cycle de production.

    De la même manière, les usines de Lactalis pratiquent le mouillage du lait à grande ampleur. En bref, chaque bouteille de lait sortant de ces sites de fabrication contiendrait une part non négligeable d’eaux blanches issues du rinçage des tuyaux et de « perméat », un mélange de protéines et d’eau, de très faible coût. Alors que le groupe Lactalis a été condamné pour avoir trafiqué, en 1997, 684 millions de litres de lait, il procéderait toujours au mouillage. (...)

  • « On n’est pas libre d’avoir une bagnole ou non parce que l’univers suburbain est agencé en fonction d’elle » (La Relève et La Peste)
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    Le vice profond des bagnoles, c’est qu’elles sont comme les châteaux ou les villas sur la Côte : des biens de luxe inventés pour le plaisir exclusif d’une minorité de très riches et que rien, dans leur conception et leur nature, ne destinait au peuple. À la différence de l’aspirateur, de l’appareil de T.S.F. ou de la bicyclette, qui gardent toute leur valeur d’usage quand tout le monde en dispose, la bagnole, comme la villa sur la côte, n’a d’intérêt et d’avantages que dans la mesure où la masse n’en dispose pas.

    C’est que, par sa conception comme par sa destination originelle, la bagnole est un bien de luxe. Et le luxe, par essence, cela ne se démocratise pas : si tout le monde accède au luxe, plus personne n’en tire d’avantages ; au contraire : tout le monde roule, frustre et dépossède les autres et est roulé, frustré et dépossédé par eux.

    La chose est assez communément admise, s’agissant des villas sur la côte. Aucun démagogue n’a encore osé prétendre que démocratiser le droit aux vacances, c’était appliquer le principe : une villa avec plage privée pour chaque famille française. Chacun comprend que si chacune des treize ou quatorze millions de familles devait disposer ne serait-ce que dix mètres de côte, il faudrait 140 000 kilomètres de plages pour que tout le monde soit servi !

    En attribuer à chacun sa portion, c’est découper les plages en bandes si petites — ou serrer les villas si près les unes contre les autres — que leur valeur d’usage en devient nulle et que disparaît leur avantage par rapport à un complexe hôtelier. Bref, la démocratisation de l’accès aux plages n’admet qu’une seule solution : la solution collectiviste. Et cette solution passe obligatoirement par la guerre au luxe que constituent les plages privées, privilèges qu’une petite minorité s’arroge aux dépens de tous.

    Or, ce qui est parfaitement évident pour les plages, pourquoi n’est-ce pas communément admis pour les transports ? Une bagnole, de même qu’une villa avec plage, n’occupe-t-elle pas un espace rare ? Ne spolie-t-elle pas les autres usagers de la chaussée (piétons, cycliste, usagers des trams ou bus) ? Ne perd-elle pas toute valeur d’usage quand tout le monde utilise la sienne ?

    Et pourtant les démagogues abondent, qui affirment que chaque famille a droit à au moins une bagnole et que c’est à l’« État » qu’il appartient de faire en sorte que chacun puisse stationner à son aise, rouler à 150 km/h, sur les routes du week-end ou des vacances.

    La monstruosité de cette démagogie saute aux yeux et pourtant la gauche ne dédaigne pas d’y recourir. Pourquoi la bagnole est-elle traitée en vache sacrée ? Pourquoi, à la différence des autres biens « privatifs », n’est-elle pas reconnue comme un luxe antisocial ? La réponse doit être cherchée dans les deux aspects suivants de l’automobilisme.

    1. L’automobilisme de masse matérialise un triomphe absolu de l’idéologie bourgeoise au niveau de la pratique quotidienne : il fonde et entretient en chacun la croyance illusoire que chaque individu peut prévaloir et s’avantager aux dépens de tous. L’égoïsme agressif et cruel du conducteur qui, à chaque minute, assassine symboliquement « les autres », qu’il ne perçoit plus que comme des gênes matérielles et des obstacles à sa propre vitesse. Cet égoïsme agressif et compétitif est l’avènement, grâce à l’automobilisme quotidien, d’un comportement universellement bourgeois (« On ne fera jamais le socialisme avec ces gens-là », me disait un ami est-allemand, consterné par le spectacle de la circulation parisienne [1]).

    2. L’automobile offre l’exemple contradictoire d’un objet de luxe qui a été dévalorisé par sa propre diffusion. Mais cette dévalorisation pratique n’a pas encore entraîné sa dévalorisation idéologique : le mythe de l’agrément et de l’avantage de la bagnole persiste alors que les transports collectifs, s’ils étaient généralisés, démontreraient une supériorité éclatante. La persistance de ce mythe s’explique aisément : la généralisation de l’automobilisme individuel a évincé les transports collectifs, modifié l’urbanisme et l’habitat et transféré sur la bagnole des fonctions que sa propre diffusion a rendues nécessaires. Il faudra une révolution idéologique (« culturelle ») pour briser ce cercle. Il ne faut évidemment pas l’attendre de la classe dominante (de droite ou de gauche).

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    Si la voiture doit prévaloir, il reste une seule solution : supprimer les villes, c’est-à-dire les étaler sur des centaines de kilomètres, le long de voies monumentales, de banlieues autoroutières. C’est ce qu’on a fait aux États-Unis.

    Ivan Illich en résume le résultat en ces chiffres saisissants : « L’Américain type consacre plus de mille cinq cents heures par an (soit trente heures par semaine, ou encore quatre heures par jour, dimanche compris) à sa voiture : cela comprend les heures qu’il passe derrière le volant, en marche ou à l’arrêt ; les heures de travail nécessaires pour la payer et pour payer l’essence, les pneus, les péages, l’assurance, les contraventions et impôts… À cet Américain, il faut donc mille cinq cents heures pour faire (dans l’année) dix mille kilomètres. Six kilomètres lui prennent une heure. Dans les pays privés d’industrie des transports, les gens se déplacent à exactement cette même vitesse en allant à pied, avec l’avantage supplémentaire qu’ils peuvent aller n’importe où et pas seulement le long des routes asphaltées. »

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  • Un « ISF climatique » pourrait rapporter 4,3 milliards d’euros par an à la France (La Relève et La Peste)
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    Dans un rapport publié mardi 13 octobre, Greenpeace préconise de rétablir l’ISF en l’adaptant à l’impact climatique des plus fortunés afin de concilier justice sociale et environnementale. Cet impôt d’un nouveau genre pourrait ainsi rapporter 4,3 milliards d’euros par an à l’Etat français. Une proposition qui arrive au début de l’examen du projet de loi de finances pour 2021 afin de mettre en avant la responsabilité sociale et environnementale des ménages les plus aisés.

    Avec son rapport nommé « L’argent sale du capital : pour un ISF Climatique », l’ONG Greenpeace est parti d’un constat irréfutable, chiffres clés à l’appui : plus on est riche, plus on pollue. En raison de leur consommation et de leur mode de vie, mais aussi de leur patrimoine financier, les 1 % les plus riches de la planète seraient responsables de deux fois plus d’émissions de CO2 que la moitié la plus pauvre.

    Avec l’aide du cabinet spécialisé Carbone 4 et de Carbon4 Finance, Greenpeace a analysé les données de l’INSEE et de la Banque de France sur la composition du patrimoine financier des ménages, pour les associer à des facteurs d’émissions. Les résultats sont sans appel :
    En France, le patrimoine financier des 1% des ménages les plus riches est associé à une empreinte carbone 66 fois supérieure à celle des 10% les plus pauvres

    D’après le rapport, le patrimoine financier des ménages soumis à l’ISF en 2017, avant sa suppression, était associé à l’émission annuelle de 97 millions de tonnes en équivalent C02 (tCO2eq). En 2017, les recettes issues des déclarations spontanées d’ISF en France s’étaient élevées à 4,2 milliards d’euros.

    Selon les calculs de l’ONG et du cabinet d’experts, rétablir un impôt sur la fortune qui soit directement indexé sur les émissions de gaz à effet de serre (au niveau actuel de la taxe carbone : 44,6 euros / tCO2eq) induites par les produits financiers bancaires des ménages les plus riches rapporterait environ 4,3 milliards d’euros à l’État, une rentrée d’argent légèrement supérieure à 2017.

    « Non seulement cette mesure instituerait un nouveau contrat social ajusté aux défis politiques de notre époque, mais elle inciterait également les ménages les plus fortunés à décarboner leur patrimoine financier en désinvestissant des activités les plus émettrices. Une telle réforme de la fiscalité doit pouvoir trouver sa place dans les lois de finances, si possible dès cette année, où le budget comprend une mission spéciale dédiée à la relance de l’économie qui engage des dépenses supplémentaires et exceptionnelles qui vont nécessiter, inévitablement, de nouvelles recettes. » explique ainsi Clément Sénéchal, chargé de campagne politique climatiques pour Greenpeace France

    En effet, le patrimoine financier détenu par les ménages est investi dans des activités économiques qui ont des conséquences concrètes, et qui vont plus ou moins émettre des gaz à effet de serre, comme détenir des actions BNP Paribas, l’une des banques les plus polluantes à travers ses investissements dans les énergies fossiles.

    Cet impact est tel que l’empreinte carbone associée au patrimoine financier des 10% des ménages les plus aisés (45,7 tCO2eq) est supérieure à l’empreinte carbone associée à leur consommation selon l’OFCE (40,4 tCO2eq).

    C’est pourquoi l’ONG propose de mettre en place cet ISF climatique pour les ménages au patrimoine supérieur à 1,3 million d’euros. « L’impôt verrait son barème renforcé et serait pondéré en fonction non seulement du volume des avoirs financiers détenus par le ménage concerné, mais également de l’empreinte carbone de ces mêmes avoirs. »

    Pour l’heure, ces ménages au patrimoine supérieur à 1,3 million d’euros sont taxés par l’Impôt sur la fortune immobilière, issu de la loi de finances pour 2018, qui n’a rapporté que 1,3 milliard d’euros en 2018. Trois milliards de moins que l’ISF. Tout récemment, un rapport commandé par le gouvernement français lui-même montrait à quel point la suppression de l’ISF et l’instauration de la flat taxe ont aggravé les inégalités dans le pays. La fortune des 0,1 % des Français les plus riches a ainsi augmenté de 25% depuis 2017, tandis que plus de 10 millions de Français.es vivent dans la pauvreté.

    C’est d’ailleurs suite à cette réforme fiscale bénéfique pour les plus aisés que la taxe carbone devait connaître une augmentation significative en 2018 et aurait pesé quatre fois plus lourd sur les ménages les plus pauvres, en pourcentage de leurs revenus, que sur les plus riches. A cause de la réforme de la fiscalité du capital amorcée par Emmanuel Macron, les 5 % de Français·es les plus pauvres devraient voir leur niveau de vie perdre environ 240 euros par an, quand les 5 % les plus riches devraient gagner 2905 euros par an.

  • Fin de l’ISF et flat tax : la politique fiscale de Macron a fait exploser les revenus des 0,1 % les plus riches (La Relève et La Peste)
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    Par rapport à 2017, la fortune des 0,1 % des Français les plus riches a augmenté d’un quart ! Une exacerbation de la concentration du capital incompréhensible alors que la pauvreté continue d’augmenter à un rythme alarmant dans le pays.

    Le verdict est sans appel. Publié le 8 octobre, le deuxième rapport du comité d’évaluation des réformes de la fiscalité a confirmé que les réformes fiscales menées par le gouvernement Macron ont fait exploser les revenus des 0,1% les plus riches de France.

    Mené sous la direction de France stratégie, un organe de prospective rattaché au Premier ministre, le rapport indique que les dividendes ont augmenté de plus de 60% entre 2017 et 2018, passant de 14,3 milliards d’euros à 23,2 milliards d’euros.

    En 2018, « deux tiers des 23 milliards d’euros ont été reçus par 38 000 foyers (0,1 % des foyers), dont un tiers par 3 800 foyers (0,01 % des foyers), alors que l’année précédente la moitié des 14 milliards avaient été reçus par 38 000 foyers, dont un petit quart par 3 800 foyers ».

    En clair : par rapport à 2017, la fortune des 0,1 % des Français les plus riches a augmenté d’un quart ! Une exacerbation de la concentration du capital incompréhensible alors que la pauvreté continue d’augmenter à un rythme alarmant dans le pays.

    « Ce rapport souligne de façon caractérisée et solide : pour les très hauts revenus, le gain est considérable », note le sénateur socialiste Vincent Eblé, ex-président de la commission des finances au Sénat. « Les chiffres sont absolument hallucinants. En une seule année, l’inflexion est énorme. C’est un changement de nature démentiel. »

    Cette tendance en France se vérifie également dans le reste du monde. Un rapport de la banque UBS et du cabinet de conseil PwC, publié mercredi 7 octobre, précise ainsi quela fortune des milliardaires a atteint la somme inédite de 10 200 milliards de dollars durant la crise sanitaire.

    Un accroissement de richesse qui illustre à quel point les marchés financiers jouent un rôle d’accélérateur des inégalités pendant les crises, analyse France24. A la source de cet enrichissement des plus riches dans le territoire français : la sulfureuse suppression de l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune) pour le remplacer par un IFI (impôt sur fortune immobilière), et l’instauration d’une « flat tax » ou prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30% sur les revenus du capital.

    « Contrairement à l’Impôt sur le Revenu (IR), le PFU est un impôt proportionnel. Autrement dit, le PFU avantage les contribuables les plus aisé·e·s puisque les quelques centimes d’intérêts générés par le PEL d’une personne aux revenus modestes sont taxés au même taux que les milliards obtenus sous formes de dividendes par les plus grosses fortunes. Plus grave, le PFU augmente la différence de taxation entre revenus du travail et revenus du capital. » explique l’organisation Attac dans une note de travail

    Résultat, la distribution des richesses fait un véritable retour en arrière en France. Les auteurs précisent ainsi que la « forte progression des dividendes déclarés par les ménages au titre de 2018 (…) est comparable par son ampleur à la chute enregistrée en 2013, au moment où les revenus mobiliers ont été intégrés au barème progressif de l’IR (impôt sur le revenu) ». Plus simplement : les dividendes versés ont retrouvé leur niveau de 2012. L’instauration d’une progressivité de l’imposition des dividendes avait fait chuter la distribution de ces derniers de 22 milliards en 2012 à 13 milliards en 2013.

    Ces mesures avaient été justifiées par Emmanuel Macron comme un moyen d’inciter les plus riches à investir dans l’économie française grâce à l’illusoire théorie du ruissellement. (...)

    Ce rapport hautement subversif intervient à un moment où l’épidémie de Covid-19 a plongé de plus en plus de ménages dans la pauvreté alors que l’exécutif s’entête à accorder la priorité à des mesures pro-entreprises, sans conditions écologiques et sociales, dans son plan de relance pour l’économie et l’emploi.

    Comme l’indique Le Monde : « la crise sanitaire a fait basculer dans la pauvreté un million de Françaises et Français, qui s’ajoutent ainsi aux 9,3 millions de personnes vivant déjà au-dessous du seuil de pauvreté monétaire – à 1 063 euros par mois et par unité de consommation, il concernait 14,8 % des ménages en 2018, selon l’Insee. »

    Conséquence directe de cette pauvreté : les demandes d’aide au Secours Populaire et pour le RSA ont dramatiquement explosé partout dans le pays. Pendant le confinement, 1 270 000 personnes ont sollicité l’aide du Secours populaire tandis que les dépenses liées au RSA ont augmenté de 9,2% en août par rapport à la même période en 2019.

    « Nous n’avons jamais vécu une situation pareille depuis la Seconde Guerre mondiale, et il y a urgence pour aider tous ces gens », témoigne Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours Populaire à FranceInfo. « Beaucoup n’avaient jamais demandé d’aide à personne. Et là, non seulement ils n’ont plus de quoi se nourrir, mais ils ne peuvent plus payer leur loyer ni l’électricité. »

    Malgré cette situation déplorable, un retour sur ces mesures fiscales n’est pas à l’ordre du jour selon le ministère des Finances cité par Le Monde. « Il n’est pas question dans le contexte de crise actuelle de revenir à une instabilité fiscale nuisible ni d’augmenter les impôts, qui ont baissé de 45 milliards d’euros pour les ménages et les entreprises depuis le début du quinquennat. », prévient Bercy.

    (...)