• Un an après l’affaire du camion charnier, enquête sur le marché macabre du trafic de migrants
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    Lorsque le réseau outre-Manche arrête une date de départ, eux fixent les points de rendez-vous pour embarquer dans des camions, à Armentières, Calais, Lille, Amiens, Grande-Synthe, Bierne… Plus rarement dans le Calvados, sur la côte normande. Parfois, le lieu de prise en charge se situe en Belgique, à proximité du port de Zeebruges, voire sur le littoral néerlandais. Mais toujours à l’écart des villes, dans une zone industrielle reculée et discrète ou sur une aire d’autoroute. Pour rallier ces lieux, Tony et Hoang sont en contact avec de nombreux chauffeurs, le plus souvent des VTC ou des taxis exerçant illégalement et désireux d’arrondir leurs fins de mois. Selon la distance à parcourir, ces chauffeurs pourront toucher entre 500 et 800 euros par « course ». Entre octobre 2019 et mars 2020, l’un de ceux mis en examen dans l’affaire du camion charnier avait effectué 24 trajets depuis l’Ile-de-France en direction du Nord et de la Belgique.
    C’est ainsi que, le 16 octobre 2019, Nhung, une Vietnamienne tout juste majeure qui arrivait de Grenoble où elle avait une attache familiale avec une personne mise en cause dans l’enquête sur le réseau des restaurants asiatiques, a été accueillie par Hoang, à Créteil, et conduite à l’appartement de l’avenue du général Pierre-Billotte. D’autres rejoindront la planque la veille du départ, qu’ils soient en France depuis des mois – certains n’en sont pas à leur première tentative de traversée – ou qu’ils aient atterri à Roissy quelques jours plus tôt, selon les éléments fournis par l’étude de leurs téléphones. (...)
    Un contact en Angleterre a informé les passeurs en France que la traversée de la Manche aurait lieu dans la nuit du 22 au 23 octobre. Les coordonnées GPS transmises indiquent qu’il faut se rendre dans une zone industrielle à l’écart de la petite ville de Bierne, à trois heures de route de Paris. D’autres Vietnamiens y convergent depuis la région parisienne et la Belgique. Pour la jeune Nhung et ses compatriotes, c’est le moment d’entamer la dernière étape de leur odyssée. Une dizaine d’heures plus tard, la découverte du « camion charnier », ainsi que la presse le désignera très vite, vient contrarier les affaires des trafiquants. Tony part se mettre au vert en Allemagne. Les voyages clandestins qu’il organise cessent pendant plusieurs mois. Grâce aux téléphones retrouvés sur les cadavres, les policiers de l’Ocriest remontent toutefois jusqu’à lui et ses complices, aussitôt placés sous surveillance. Dès le mois de mars, et en dépit de la crise sanitaire mondiale, le réseau recommence à s’activer, convoyant de nouveaux clients, depuis de nouvelles planques, jusqu’à une vaste opération d’interpellations menées en France et en Belgique, le 26 mai.

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