• Pour les sans-papiers, le difficile accès à une régularisation
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/17/pour-les-sans-papiers-le-difficile-acces-a-une-regularisation_6056417_3224.h

    Chaque année, quelque 30 000 personnes accèdent à l’« admission exceptionnelle au séjour » – à rapporter aux 275 000 premiers titres de séjour délivrés en 2019 –, une gestion « à bas bruit » alors qu’on estime qu’entre 300 000 et 600 000 personnes se trouvent sans papiers sur le territoire. D’après plusieurs observateurs, le confinement et la suspension de l’activité des préfectures pendant plusieurs mois a compliqué les démarches de régularisation. « Il y a un phénomène d’embouteillage aux guichets des préfectures, estime Marilyne Poulain. Il y a tout le retard à rattraper dû au confinement, qui fait que les nouveaux dossiers n’ont pas forcément pu être déposés. Les gens se sont beaucoup rabattus sur nos permanences pour essayer d’avoir une chance de déposer un dossier. Certains ont des promesses d’embauche depuis janvier dernier. »
    « On n’a jamais vu une telle inaccessibilité des préfectures pour les sans-papiers, appuie Lise Faron, de la Cimade. Il y a globalement un manque de moyens des préfectures et les personnes en demande de régularisation ne sont pas considérées comme prioritaires donc les rendez-vous en préfecture vont être plutôt attribués à d’autres comme les étrangers qui renouvellent leur titre de séjour. »
    Samedi 17 octobre, plusieurs milliers de manifestants ont défilé à Paris aux côtés des sans-papiers, pour réclamer une vague de régularisation et un geste du gouvernement pour les travailleurs étrangers, en première ligne pendant la crise sanitaire. Cette « marche nationale des sans-papiers » réunissant des cortèges partis d’Ile-de-France et de villes comme Marseille, Strasbourg, Lille et Rennes, fait suite à l’appel de quelque 280 organisations, dont les syndicats Solidaires et CGT, les associations RESF, la Cimade, Médecins du monde ou des partis EELV et France insoumise.
    « La crise sanitaire a eu un effet terrible sur les conditions de vie et de travail des sans-papiers, estime l’un des organisateurs. Une grande partie d’entre eux vit dans les foyers de travailleurs et a perdu son emploi dans les secteurs touchés comme la restauration ou le bâtiment. »« Il y a des sans-papiers utilisés comme des variables d’ajustement dans la crise car c’est toujours plus facile de virer quelqu’un sans droit mais d’autres ont pu garder leur emploi et des employeurs nous saisissent pour les accompagner dans leur démarche de régularisation », nuance Marilyne Poulain.
    La diversité des situations se retrouve dans les locaux de la CGT. Ainsi Salif, un Sénégalais de 36 ans établi en France depuis 2013, a pu travailler pendant toute la période du confinement, dans les cuisines d’une maison de retraite. Au contraire, Adama (le prénom a été modifié), sénégalais lui aussi, a été licencié il y a trois mois alors qu’il avait enfin réuni le bon nombre de fiches de paie à force d’ancienneté dans un bistrot du 5e arrondissement de Paris. Daouda, sénégalais également, âgé de 33 ans, vient lui aussi d’être licencié, comme la moitié du personnel de l’hôtel dans lequel il était valet de chambre depuis plus de deux ans, à cause de la baisse de fréquentation de l’établissement. Heureusement, il a trouvé une entreprise de mise à disposition d’espaces de coworking prête à l’embaucher en CDI sur un poste d’assistant.

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