au service de « réa » de l’hôpital Bichat, une seconde vague du Covid-19 bien trop réelle

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  • « C’est la même maladie, les mêmes gens, les mêmes problèmes » : au service de « réa » de l’hôpital Bichat, une seconde vague du Covid-19 bien trop réelle
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/10/27/on-se-demande-si-on-va-tenir-dans-le-temps-au-service-de-rea-de-l-hopital-bi

    RÉCIT Pendant une semaine, « Le Monde » a suivi le quotidien des soignants, des patients et des familles de ce service. Après l’accalmie de l’été, c’est le retour au front, et peut-être, d’ici à quelques semaines, aux choix douloureux d’une « médecine de guerre ».

    #paywall, mais tout est dans le titre, il me semble

    • Selon les modèles épidémiologiques dont [Jean-François Timsit, le chef du service de réanimation médicale, ] dispose, plus de 7 000 patients Covid-19 pourraient être hospitalisés sur l’ensemble du territoire en réanimation au 1er janvier 2021. « Si on étale la courbe, on pourra sauver davantage de monde, mais la prise de conscience collective est difficile » , estime-t-il, en expliquant qu’avec un taux de reproduction – le « R » – de 1,4 le confinement risque d’être le seul moyen de reprendre le contrôle de l’épidémie.

      Dans leur petite salle de repos, avec un matelas aménagé à même le sol dans un recoin, les réanimateurs ne cachent pas leur lassitude. « Les mêmes qui nous applaudissaient au printemps ne mettent pas leur masque » , s’agace Juliette Patrier, en colère contre les flyers antimasque distribués près de l’hôpital. « La lune de miel avec les Français est passée » , abonde sa collègue Lucie Le Fèvre. De l’autre côté du périphérique, l’hôtel Formule 1 est un peu leur baromètre, avec le prix des chambres mis à jour en temps réel : 51 euros aujourd’hui contre 24 euros pendant le confinement. Le signe, selon ces médecins, que la vie continue un peu trop « comme avant ».

      [...]

      La seconde vague, la centaine de soignants de la « réa » l’a vue arriver depuis des semaines, avec son cortège de choix difficiles. « Répondre à la question : qui est prioritaire ? C’est quelque chose qu’on fait tout le temps, ce n’est pas spécifique au Covid , précise Lucie Le Fèvre, mais des plus de 75 ans qui s’en sont sortis, on n’en connaît presque pas. » La réanimation est une telle épreuve physique que chaque admission se décide au cas par cas, en évaluant la probabilité pour un patient de retrouver une vie autonome. Après deux ou trois semaines de soins intensifs, rares sont ceux qui ont les ressources pour se rétablir. « Du coup, les nouveaux qui arrivent à 78 ans, on se dit que ce n’est pas nécessaire de leur infliger ça. »

      Certains sont malgré tout hospitalisés en réanimation, après discussion. « Dans ce cas, on essaie d’éviter l’intubation » , explique Fabrice Sinnah, un autre réanimateur. « On les aide avec un apport d’oxygène et une surveillance rapprochée qui n’est pas possible ailleurs » , précise-t-il, en rappelant que, même pour les personnes en bonne forme physique, il faut six mois à un an de rééducation pour se remettre d’un passage en « réa ». Chaque mercredi, un « staff éthique » permet de faire le point sur les cas difficiles, de poser la question de « l’obstination déraisonnable » quand la prise en charge apporte davantage de souffrance que de bénéfices.

      [...]

      Ce mercredi, l’un des patients, un trentenaire prénommé Emin, vient d’ouvrir les yeux, après trois semaines de coma artificiel, mais il est difficile d’évaluer les éventuelles atteintes cérébrales. Lui aussi a frôlé plusieurs fois la mort : un arrêt cardiaque, une fièvre montée jusqu’à 43 °C, maîtrisée in extremis grâce à une chimiothérapie et à la mise en place d’une circulation extracorporelle destinée à refroidir le sang. Pierre Jaquet refait une nouvelle fois le point avec sa femme et sa sœur, et les réconforte : « Je ne peux pas vous rassurer plus que cela, mais il est jeune, il va pouvoir se battre plus longtemps. Ici on a toutes les machines pour l’aider. »

      Oui, « tout est dit », si ce n’est cette projection sur les effectifs de patients en réanimation, et l’absence de renforts, lue ailleurs, et qui va peser lourd.

      #hôpital #étaler_la_courbe... #crise_sanitaire #soignants