Marketing et capitalisme urbain : « Les villes appliquent toutes les mêmes recettes pour tenter de séduire des investisseurs »

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    Dans Le capital dans la cité. Une encyclopédie critique de la ville , publié aux éditions Amsterdam, trente-trois chercheurs et chercheuses dressent le portrait de la ville capitaliste du XXIème siècle, en abordant la question sous de multiples angles, de l’agriculture urbaine aux zones logistiques. On a demandé à Matthieu Adam, qui a co-dirigé la réalisation de l’ouvrage avec la géographe Emeline Comby, de nous parler du chapitre qu’il consacre au marketing, devenu un élément clé de la concurrence que se livrent les villes pour tenter d’attirer des capitaux.

    Qu’est-ce que le marketing urbain, et quelles sont ses origines ?

    Le marketing urbain est une dimension du gouvernement des villes qui s’attache à améliorer au maximum leur image et leur capital symbolique. Il s’agit pour une ville de construire un récit sur elle-même pour se distinguer sur un marché concurrentiel, pour attirer des populations et surtout des capitaux. Le marketing tire son origine du monde de l’entreprise et de la volonté de producteurs de biens ou de services de développer une offre et un discours propres à séduire des clients ; il s’agit alors de proposer un récit en direction des acheteurs cibles. Pour ce qui nous intéresse, le territoire peut être considéré comme un produit, dans la mesure où il comprend une dimension foncière qui peut faire l’objet d’investissements, mais il intègre aussi d’autres éléments commercialisables : une offre touristique, des grands événements, des projets urbains, des clusters industriels et technologiques…

    Comment le marketing est-il passé du monde de l’entreprise à celui des collectivités et des politiques urbaines ?

    Il faut distinguer le marketing de la publicité et des simples discours promotionnels, qui ont une origine plus ancienne. Dans le livre, je montre comment certaines puissances coloniales ont développé très tôt des discours de promotion visant à attirer certaines franges de leurs populations vers les colonies. L’apparition du marketing urbain correspond au tournant néolibéral et à une évolution de la dynamique capitaliste qui va notamment s’appuyer sur un développement de la concurrence dans toutes les sphères de la société. Cela a transformé la manière dont les collectivités territoriales se pensent. À partir des années 70, on voit progressivement apparaître des élus et des fonctionnaires territoriaux qui investissent un rôle de managers et cherchent à positionner leur territoire dans un marché de l’urbain vu comme concurrentiel ; il s’agit d’assurer l’implantation de capitaux sur son territoire. En France, ces pratiques se développent à partir de la fin des années 80, notamment dans les grandes villes dirigées par le Parti socialiste.

    Élus et fonctionnaires territoriaux investissent un rôle de managers et cherchent à positionner leur territoire sur un marché.

    On passe alors d’un urbanisme de la demande — c’est-à-dire, pour schématiser, un urbanisme keynésien, qui s’appuie sur le développement de grandes infrastructures (de transport, de logement, etc.) répondant aux besoins de la population — à un urbanisme de l’offre, qui vise à séduire de nouveaux investisseurs. Le développement du néolibéralisme urbain dans la plupart des villes grandes et moyennes ne signifie pas nécessairement qu’élus et fonctionnaires territoriaux adhèrent à ce tournant idéologique. Ces acteurs sont pris dans des logiques qui s’imposent à eux. Le contexte d’austérité, qui se traduit notamment par la baisse des dotations aux collectivités, les encourage à aller chercher des investissements à l’extérieur, en appliquant les recettes promues par le néolibéralisme et forgées dans le monde de l’entreprise, et donc en se mettant au service du marché.

    #ville

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    https://larotative.info/marketing-et-capitalisme-urbain-3946.html

    Dans Le capital dans la cité. « Une encyclopédie critique de la ville », publié aux éditions Amsterdam, trente-trois chercheurs et chercheuses dressent le portrait de la ville capitaliste du XXIème siècle, en abordant la question sous de multiples angles, de l’agriculture urbaine aux zones logistiques. On a demandé à Matthieu Adam, qui a co-dirigé la réalisation de l’ouvrage avec la géographe Emeline Comby, de nous parler du chapitre qu’il consacre au marketing, devenu un élément clé de la concurrence que se livrent les villes pour tenter d’attirer des capitaux. Source : La Rotative