• Tournai : Maya, jeune sans-abri, est morte de froid dans la rue...

    Maya est morte, seule, dans la rue ici à Tournai, en Belgique. Maya était sans-abri, elle est décédée d’hypothermie il y a quelques jours. Nous sommes en 2020, dans un pays riche, et Maya est morte dans la rue. De froid. Seule.

    Maya était sans-abri, elle fréquentait le Braséro - Abri de Jour, lieu de chaleur physique et humaine de cette ville, et aussi L’Albatros, le samu social ambulant de la Croix-Rouge qui, entre autres, distribue des repas. Ma très chère amie Danou , à qui j’ai emprunté cette photo, la connaissait bien et lui venait en aide pour des besoins spécifiques (comme elle le fait pour d’autres sans-abris et précarisés). Pouvoir échanger avec tendresse et douceur avec une autre femme est une ressource ô combien précieuse pour une femme sans-abri.

    Je lis des commentaires disant qu’il y a (avait) de la place à Auxilis, l’abri de nuit. Cela sans doute sous-entend qu’elle aurait pu y aller. Mais pour les femmes, ce lieu est difficile. Plus que pour les hommes encore, le sans-abrisme est pour les femmes un cauchemar éveillé. Faut-il vraiment le rappeler ? Faut-il encore redire que le sans-abrisme aussi est sexiste, en plus d’être violent ? C’est la double peine pour les femmes sans-toit.

    À quand un lieu spécifique pour les femmes sans-abri ? Et, surtout, à quand des politiques dignes qui auraient à cœur et la longueur de vue sociale de mettre en place ce qui permettrait à des sans-abri de se loger dignement dans un chez-soi, condition indispensable pour repartir dans une nouvelle vie. D’autres pays l’ont compris. Pourquoi pas ici ? Qu’est prête à faire cette Ville pour changer, et pour changer cette situation ? C’est d’une réorientation à 180° dont elle a besoin et non, comme dans un passé récent, de mesures sociales ostracisantes à l’instar de l’arrêté mendicité contre lequel il a fallu que les associations de terrain se mobilisent jusqu’au Conseil d’État pour le faire disparaître.

    Chaque type de société relève de choix et de décisions politiques et révèle les intérêts de ceux qui gouvernent. Ils en sont responsables ; oui, responsables. La covid-19 aurait enfin dû leur apprendre à quel point il est urgent de développer une société du care, du soin, et non une bureaucratie du soin avilissante de papiers, encore moins un marché du soin avilissant de rentabilité et d’ordre comptable. Une société qui prend soin de sa jeunesse, de ses âgé.e.s, des personnes seules, précarisées, sans-emploi, étrangères, sans-toit, porteuses de handicap, exilées, malades, racisées, lgbtq, etc., c’est une société qui a un avenir, parce qu’elle sait prendre soin de chacun.e et apprend à tou.tes à le faire. Toute autre option est mortifère.

    Hommage
    Repose enfin en paix, Maya.
    Je t’embrasse fort, ma Danou
    Respect pour les travailleurs sociaux.

    Dom Moreau

    Source : https://www.facebook.com/moreaudom/posts/10159088353414548?__cft__[0]=AZVD3DOkdrp6d5CT9WIvUwcYsJIULdbkoalSNgapI4Mdq