Pourquoi le « slip » de Navalny provoque l’hystérie du Kremlin - Monde

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  • Pourquoi le « slip » de Navalny provoque l’hystérie du Kremlin - Monde - Le Télégramme
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    Le leader de l’opposition russe Alexeï Navalny (à gauche) affirme que ses sous-vêtements ont été empoisonnés au novichok par des agents du Kremlin, commandités par Vladimir Poutine.
    Photos AFP

    Le dernier mythe sur lequel reposait encore le pouvoir de Vladimir Poutine, celui des services spéciaux efficaces et intègres, des chevaliers sans peur et sans reproche et dévoués corps et âme à leur patrie, vient de s’effondrer dans le fracas médiatique provoqué par le slip empoisonné de Navalny…

    Mafieux ordinaire ou défenseur de la patrie ? Qui est Poutine ? C’est avec stupeur que les Russes ont vu, cette semaine, leur chef du pouvoir raconter avec force détails l’empoisonnement de l’opposant Navalny dont plusieurs slips auraient été couverts de poison Novichok afin d’attenter à ses jours. Et le chef du Kremlin d’expliquer les « circonstances qui avaient empêché la réussite de l’entreprise ».

    La Russie dénonce le « délire » de Navalny et sanctionne l’UE
    Le 14 décembre, répondant à deux reprises à des journalistes qui l’interrogeaient lors de sa conférence de presse annuelle sur les commanditaires de l’empoisonnement présumé, Vladimir Poutine avait répondu par une boutade glaçante : « Certes, il faisait l’objet d’une filature… mais je peux vous assurer que si on l’avait voulu, il ne serait plus là ! ».

    La vidéo provoque une onde de choc
    Visionnée 13,5 millions de fois, la dernière vidéo d’Alexeï Navalny qui montre les aveux du tueur présumé, Constantin Koudriavtsev, un agent du FSB (Service fédéral de sécurité de la fédération de Russie), expert en armes chimiques, a provoqué une onde de choc dans l’ensemble de l’establishment, y compris parmi les plus chauds partisans de Vladimir Poutine. Et cela d’autant plus que la contre-attaque a été particulièrement faible. La machine de propagande pourtant bien huilée n’a pas été à la hauteur de l’enjeu, incapable de donner une version plausible des évènements. Le pouvoir s’est contenté de décrédibiliser Navalny : « Le malade souffre manifestement du délire de la persécution et d’une forte dose de mégalomanie », a commenté Dimitri Peskov, porte-parole de Poutine, avant d’annoncer un élargissement des sanctions contre les pays de l’Union européenne… D’un autre côté, le FSB, dans un communiqué, parle de « falsifications des données » et de « provocation grossière organisée par des services spéciaux étrangers ». Sans donner de preuve…

    Une gestion calamiteuse
    Quant aux experts, toutes tendances confondues, ils sont unanimes pour critiquer la gestion de la crise, l’absence criante de professionnalisme des services et les réactions inadéquates des autorités qui n’ont pas accepté d’ouvrir une enquête sous prétexte que l’Allemagne a refusé de remettre le dossier sur l‘utilisation du Novichok…

    Dans un article intitulé « Le démantèlement de l’État », paru sur le site Forum.MSK.ru, le journaliste d’investigation Anatoly Baranov explique que l’attitude irresponsable des élites au plus haut niveau est beaucoup plus dangereuse pour l’avenir du régime que les vidéos de Navalny. Plusieurs jours après l’affaire du « slip de Navalny », Serge Markov, politologue, membre du FSB, pense que les faits et la gestion calamiteuse de la crise sont en grande partie la conséquence des luttes de clans entre les services dans l’optique de l’après-Poutine.