Accueil | Claude Lévêque

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    • J’étais pas au courrant et j’avais meme jamais entendu le nom de cet artiste. Là je découvre que cet artiste qui allais jusqu’a utiliser des reference à sa pédosexualité dans ses oeuvre etait le représentant du pays à la biennal de venise ... que les institutions le lessaient faire des interventions en ecole primaire et qu’il etait logé à l’hotel dans une seule chambre à lit double quand il se déplacait pour ses expos... Encore un exemple de violophilie institutionnel. Il y a eu des signalement, des plaintes et rien, pas d’enquète mais il est invité et rémunéré à nos frais...

    • La vague #MeToo atteint l’art contemporain. Plusieurs personnes ont, ces derniers mois, confié à Mediapart des accusations de violences sexuelles sur mineurs visant l’artiste Claude Lévêque. Le sculpteur Laurent Faulon en fait partie. Il a, en mars 2019 à Bobigny, puis en juin 2019 à Nevers, déposé plainte contre le célèbre plasticien français pour des faits de « viols sur mineurs de 15 ans et agressions sexuelles sur mineurs de 15 ans », comme l’a révélé Le Monde dimanche 10 janvier.

      Dans sa plainte de dix pages, que Mediapart a pu consulter, Laurent Faulon évoque, outre sa personne, huit autres mineurs, dont ses deux frères, sur quatre décennies, et jusqu’à une période récente, qui auraient eux aussi subi les agissements présumés de Claude Lévêque (voir notre Boîte noire). Il livre aussi les coordonnées de nombreux témoins potentiels, avec des indications précises de lieux et de dates.

      À la suite de sa plainte, une enquête préliminaire a été ouverte en mai 2019 par le parquet de Bobigny, et confiée à la brigade des mineurs de la Sûreté départementale de Seine-Saint-Denis.

      Sollicité à plusieurs reprises par Mediapart, Claude Lévêque, qui est présumé innocent, n’a pas donné suite. Selon plusieurs sources interrogées par Mediapart, il a indiqué avoir eu une histoire « d’amour » avec Laurent Faulon, à rebours de l’époque actuelle « nauséabonde où tout est amalgamé, où l’amour devient méchant et sale ».

      Son avocat, Emmanuel Pierrat, a diffusé un communiqué dimanche 10 janvier en fin de soirée, dans lequel il annonce avoir déposé deux plaintes contre X dès la fin 2020 pour des faits de « diffamation », ainsi que de « dénonciation calomnieuse et chantage ». En 2015, Claude Lévêque avait déjà été la cible de dénonciations anonymes pour des faits similaires, expose son avocat. « La propagation publique de rumeurs, particulièrement graves, à l’encontre d’homme et de femme accablés a des conséquences irréversibles telles que le suicide », avertit enfin Me Pierrat (on peut lire l’intégralité de son communiqué sous l’onglet Prolonger). Sollicité par Mediapart, l’avocat n’a pas donné suite.

      Né en 1953 à Nevers, dans un milieu modeste, Claude Lévêque est devenu une référence de l’art contemporain français. En 2009, il conçoit le pavillon français de la Biennale de Venise. Il est soutenu par d’importants collectionneurs, en particulier français – à l’instar d’Agnès b., qui expose en ce moment trois de ses photographies dans sa fondation inaugurée en février 2020. Il est représenté par des galeries parisiennes influentes – dont celle de Kamel Mennour, depuis 2007. Celui-ci a annoncé, mardi 12 janvier, dans un communiqué, que « Claude Lévêque a décidé de suspendre sa collaboration avec la galerie Kamel Mennour, qui en prend acte ».

      Ses grandes installations ont été exposées dans la plupart des musées et centres d’art contemporain de France, du Musée d’art moderne de la Ville de Paris en 1982 au Frac de Marseille en 2018, mais aussi à l’étranger (New York, Moscou, Tokyo…). Il a bénéficié en France de nombreuses commandes publiques – ainsi récemment les monumentaux pneus dorés ornant l’escalier du palais Garnier (2019), ou la pluie de fleurs ornant le transept de l’église Saint-Joseph du Havre, intitulée La Tendresse des loups (2020).

      Claude Lévêque à la Biennale de Venise, où il représentait la France, le 4 juin 2009. © Alberto Pizzoli/AFP Claude Lévêque à la Biennale de Venise, où il représentait la France, le 4 juin 2009. © Alberto Pizzoli/AFP
      Mediapart a eu accès à la plainte de Laurent Faulon ainsi qu’à son PV d’audition par les services de police. Le sculpteur nous a également confié son histoire. Depuis février 2020, Mediapart a par ailleurs recueilli plusieurs témoignages détaillés qui font écho au sien.

      Le long récit fait par Laurent Faulon auprès de la justice et de la police est glaçant. Il décrit méthodiquement des mécanismes de séduction et d’emprise qu’aurait mis en œuvre Claude Lévêque sur de jeunes adolescents, dont lui-même, pour obtenir de leur part des relations sexuelles, depuis la fin des années 1970. Laurent Faulon est aujourd’hui âgé de 51ans, et Claude Lévêque de 67 ans.

      Laurent Faulon explique que Claude Lévêque, alors étudiant aux Beaux-Arts de Bourges, et animateur de centre aéré à Varennes-Vauzelles, près de Nevers, se lie d’amitié avec ses parents en 1973. L’apprenti artiste invite souvent chez lui Laurent et ses deux frères. Il passe aussi du temps avec la famille Faulon au complet, comme en attestent des photos d’époque que Mediapart a consultées.

      Premier souvenir marquant, pendant l’hiver 1978-1979, Laurent Faulon, alors âgé de 9 ans, dit avoir assisté chez Claude Lévêque à la projection d’un film, où, selon lui, l’on voyait un garçon de 10 à 12 ans qui se serait masturbé et aurait écarté ses fesses.

      En août 1979, le jour de son dixième anniversaire, alors que ses parents sont au travail, Laurent Faulon est invité chez Lévêque, qui lui aurait alors imposé des caresses sur les cuisses et le ventre, et des baisers dans le cou.

      À l’âge de 13 ans, raconte-t-il, pendant l’hiver 1982-1983, il passe une semaine de vacances dans le nouvel appartement parisien de Claude Lévêque, et aurait subi des attouchements sexuels. À partir des vacances de Pâques 1983, assure le plaignant, il aurait commencé à subir des pénétrations anales.

      De 1983 à 1986, de ses 13 ans à ses 17 ans, Laurent Faulon dit passer la plupart des vacances scolaires chez Lévêque, soit à Paris, soit dans la Nièvre, l’accompagner dans plusieurs expositions à travers la France, et dit avoir subi des pénétrations.

      « Je me suis laissé faire car j’étais tétanisé, sans pouvoir avoir de réaction », explique Laurent Faulon, lors de son audition par un policier de la brigade des mineurs de Seine-Saint-Denis, le 16 janvier 2020. Il dit avoir eu un « sentiment de honte », mais se sentait aussi « flatté » d’avoir été choisi, « d’avoir accédé à une élection ».

      Quant aux rapports sexuels qui auraient suivi pendant plusieurs années, Laurent Faulon a expliqué au policier : « Je n’ai pas exprimé mon refus, je ne me sentais pas autorisé à le faire. Je ne pouvais pas dire non à Lévêque, j’aurais eu le sentiment d’être bête, ringard. J’avais peur qu’il ne s’intéresse pas à moi si je ne me laissais pas faire. »

      Lors de plusieurs expositions, Lévêque le faisait passer pour son assistant, et demandait systématiquement aux organisateurs une chambre d’hôtel et non deux, précise Laurent Faulon lors de son audition. « C’était une autre époque. »

      « Des gens venaient lui rendre visite dans sa maison de campagne, dit Laurent Faulon sur procès-verbal. Il me présentait comme étant le fils d’amis. De mon point de vue, j’avais le sentiment d’être sa petite femme et que tout le monde savait, que ça ne gênait personne. Les gens avaient l’habitude de voir Lévêque entouré de jeunes garçons. »

      À 17 ans, Laurent Faulon a mis un terme à cette relation, explique-t-il. Mais évoluant lui-même dans le milieu de l’art contemporain, il a continué à croiser Claude Lévêque régulièrement.

      Laurent Faulon. © Delphine Reist Laurent Faulon. © Delphine Reist
      Durant de longues années, expose-t-il sur procès-verbal, le sculpteur s’est refusé à mettre des mots sur ce qu’il avait vécu.

      « Pendant longtemps, j’ai pensé que c’était une chance d’avoir rencontré ce type, d’avoir pu changer de classe sociale. Il s’était attaqué à une famille prolétaire, il arrivait avec une promesse de culture, d’évasion […]. À l’époque, je me disais que j’aurais eu une vie de merde si je ne l’avais pas rencontré. »

      C’est progressivement, par étapes, après la mort d’un de ses frères, puis au dixième anniversaire de son fils – âge auquel il assure avoir lui-même été agressé –, et enfin après une dépression, que Laurent Faulon a revisité son passé. Une époque où Claude Lévêque lui faisait lire les textes de Gabriel Matzneff et Tony Duvert.

      « Le processus pour réaliser ce qui m’était arrivé pendant mon enfance a été très long. J’ai pensé m’en sortir pendant longtemps avec la prise de médicaments, avec le fait que l’art était un exutoire », explique-t-il lors de son audition.

      Dans ce qui est devenu son combat depuis deux ans, Laurent Faulon bénéficie de soutiens familiaux. Il est épaulé par sa compagne Delphine Reist, artiste comme lui, par plusieurs personnalités du milieu de l’art contemporain, et par des proches. Dans une attestation destinée aux services de police, dont Mediapart a pris connaissance, sa mère, âgée de 86 ans, exprime ainsi ses remords et son désarroi.

      « Les révélations de Laurent m’ont complètement anéantie. À la suite de cela ma culpabilité est devenue incommensurable. Des mots ont été mis sur mes soupçons, et des mots insupportables à entendre », écrit-elle. « Comment ai-je pu passer à côté de tout cela ? »

      Jusque-là, elle n’avait eu que des doutes sur l’attitude de Claude Lévêque vis-à-vis de ses trois fils. « J’ai eu de nombreuses explications avec lui dès que quelque chose me semblait louche. Toujours il avait de bonnes explications qui balayaient mes doutes et peut-être que dans le fond je voulais peut-être le croire et avoir confiance en lui car j’avais beaucoup d’amitié pour lui », écrit la vieille dame.

      L’un des frères de Laurent Faulon est mort en 1998, à 33 ans, après plusieurs tentatives de suicide. Son autre frère n’a pas donné suite à nos sollicitations.
      Adolescents, Jean et François ont aussi rencontré Claude Lévêque

      Mediapart a pu retrouver la trace de certains des mineurs évoqués dans sa plainte par Laurent Faulon. Parmi eux, Jean et François.

      Jean*, aujourd’hui père de famille, est l’ami d’enfance de Laurent Faulon. « Très vite, c’était en 6e ou en 5e, je crois, Laurent m’a parlé de sa relation avec Claude Lévêque. Je ne connaissais rien au sexe, mais je trouvais ça malsain, raconte-t-il à Mediapart. Laurent n’avait pas l’air d’en souffrir à ce moment-là. Il avait l’air privilégié, Claude Lévêque lui ouvrait un monde merveilleux, la vie d’artiste. Au collège, je me souviens que Laurent faisait des choses bizarres, comme des photos, nu avec Claude Lévêque. »

      Jean affirme aussi qu’il aurait recueilli les confidences verbales du célèbre plasticien quand il l’a, à son tour, rencontré personnellement. « Claude Lévêque se vantait d’avoir réussi à tripoter Laurent presque sous les yeux de ses parents. »

      Jean, qui n’a pas été entendu par les policiers à ce jour, prétend avoir lui-même subi des violences sexuelles de la part de Lévêque, qu’il a rencontré lorsqu’il avait 15 ans. « J’ai été violé par lui plusieurs fois à 17 ans. Je dis viol aujourd’hui, mais à l’époque je me suis laissé faire », poursuit-il. Avec le temps, le regard de Jean sur ces années-là a changé. « J’ai mis 20 ans à me défaire de l’emprise de Lévêque, et plus de 30 ans avant d’en parler », confie-t-il.

      « Claude Lévêque a commencé par me flatter, me complimenter. Si je faisais un petit bricolage, il me disait : “Tu es un artiste, tu es meilleur que moi”, raconte Jean. Il me considérait, il m’écoutait. Lui avait déjà une certaine aura, il commençait à être connu, il avait 30 ans et nous 15. »

      Pour les deux adolescents qu’étaient Laurent et Jean, le morne Nevers des années 1980 est soudain devenu festif. « C’était l’époque du punk, de la provocation. Avec Claude Lévêque, on avait l’impression d’entrer dans un monde privilégié, merveilleux. Il y avait la culture, la musique, les vêtements, il tirait des feux d’artifice la nuit en forêt. J’ai pensé qu’il fallait payer de ma personne, dit Jean. Si on n’était pas comme lui, on était soit facho, soit ringard, soit inculte. Il fallait être à la hauteur. »

      François* explique, quant à lui, sa relation avec Claude Lévêque dans un texte du 25 décembre 2020 remis à Laurent Faulon, et dont Mediapart a pris connaissance. Ce père de famille, qui a lui aussi expressément demandé à rester anonyme, nous en a confirmé le contenu.

      « De l’âge de 15 à 20 ans j’ai été une sorte de faire-valoir de Claude Lévêque.
15 ans c’est l’âge à partir duquel on considère que l’on est capable d’assumer ses choix en matière de sexe. Je ne suis pas homosexuel et je le savais très bien depuis toujours, même si je me suis pris au jeu de le faire croire. Mon histoire est donc difficile à expliquer », écrit François, qui précise que « plusieurs épisodes de cette période ont été complètement effacés de [sa] mémoire ».

      Il y livre sa vision de la personnalité de Claude Lévêque : « Il vous enveloppe dans une chaleur émotionnelle qui, au final, vous emprisonne. À 15 ans, alors que je tentais d’échapper à l’emprise oppressante de ma famille, je suis très facilement tombé sous la sienne. »

      François s’interroge encore aujourd’hui sur sa relation à Claude Lévêque : « Je me suis souvent demandé si je lui en voulais. […]. Je concluais généralement que j’étais l’unique responsable de ma relation avec lui. Je refusais de me voir même comme une demi-victime. Ma souffrance apparente se résume à cette amnésie et au fait que je ne peux parler sereinement de cette période à ma famille. Comment expliquer ma relation pendant cinq ans avec un homme, alors que je ne suis pas homosexuel, et que cet homme était un pédophile… C’est assez difficile à comprendre. […] Cela constitue une sorte de trou noir dans ma vie. »

      En décembre 2018, apprenant que Laurent Faulon se retirait d’une exposition pour ne pas le croiser, Claude Lévêque lui a adressé le courriel suivant, dont Mediapart a pris connaissance : « Ça me désole qu’on soit parvenu à ce point de non retour, tant de temps après une aventure forte à une certaine époque, inavouable aujourd’hui. Les plaisirs se sont transformés en douleur et tristesse. » Puis : « Est-ce un accident de s’être croisé ? D’avoir partagé des moments particuliers et uniques, révélés à ce point haïssables aujourd’hui ? »

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      L’artiste plasticien Jonathan Loppin connaît Claude Lévêque depuis 2004. « C’était un ami proche, et je suis également un ami proche de Laurent Faulon », raconte-t-il à Mediapart. « Début 2019, quand j’ai appris que Laurent avait déposé plainte contre Claude, ça a été un énorme choc. J’ai reconstitué ce à quoi j’avais assisté pendant des années de la part de Claude Lévêque et que je n’avais pas voulu voir. »

      Loppin évoque par exemple un souvenir datant de 2006, lors d’une expo à Château-Thierry, où Lévêque « était tout le temps avec un adolescent de 15 ans qu’il présentait comme son assistant ». Il s’interroge aussi sur l’étrange omerta qui a longtemps prévalu dans le milieu de l’art, à propos de Faulon. « C’est un petit milieu, tout le monde se connaît. Les gens disaient : “Laurent était l’amant de Claude.” Mais personne ne réfléchissait à l’âge qu’avait Laurent Faulon à l’époque ! Il était adolescent. »

      Le 12 mai 2019, Loppin décide de téléphoner à Claude Lévêque, « pour qu’il s’explique ». La conversation aurait duré trois heures. « Claude, visiblement surpris et pris de court, a craqué et s’est mis à sangloter. Il m’a dit que c’était une autre époque, qu’il avait vécu une vraie histoire d’amour avec Laurent, et demandait pourquoi Laurent voulait détruire une si belle histoire. Il m’a dit que si cette “affaire” devait l’empêcher de travailler, il ne lui resterait qu’à en finir. »

      Jonathan Loppin, qui n’a pas non plus été auditionné par les policiers, affirme aussi que Lévêque trouvait « horrible » que Faulon porte plainte, et « détrui[se] une histoire comme ça ». Pendant la conversation, le plasticien a cependant demandé à son ami de « lui proposer une solution pour “réparer” le mal qu’il avait fait ». « Je lui ai dit : “Raconte tout avant que les autres le fassent à ta place. Ne sois pas lâche. Et ça fera du bien à Laurent” », affirme Loppin.

      Les deux hommes échangent ensuite des messages via Facebook, des mails et des SMS que Mediapart a pu consulter. Dans l’un d’eux, via Facebook, Lévêque écrit : « Il y a l’actualité, les retournements, ce que ça déclenche dans les têtes, il y a l’histoire de Laurent, notre histoire, sa version, ce qu’il t’a relaté de l’époque où nous nous étions aimés. Maintenant c’est une autre époque nauséabonde où tout est amalgamé, ou l’amour devient méchant et sale. […] Aide-nous, au lieu d’alimenter tous les prétendants au lynchage qui aboieront anonymement sans rien n’y comprendre du tout. Bien entendu que les merveilleux échanges en un temps peut-être trop idéalisés, transformés ainsi me tueront. »

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      Jonathan Loppin a reçu cet autre message de Lévêque : « Je n’ai jamais agressé personne, j’ai aimé avec mes sentiments, ma tendresse parfois invasive, aussi parce que mes compagnons m’aimaient comme ça. »

      Jonathan Loppin assure par ailleurs avoir prévenu dès le mois de mai 2020 le galeriste Kamel Mennour de la plainte visant Claude Lévêque. Sollicité par Mediapart, Kamel Mennour n’a pas donné suite.

      David*, acteur du milieu de l’art, a rencontré Claude Lévêque dans les années 2000. « Lors d’une de nos premières rencontres, j’avais 19 ans, il m’a dit sur le ton de la blague : “Tu as de la chance, moi qui aime les jeunes, tu as des poils donc tu ne m’intéresses pas.” » Jean nous a tenu des propos similaires : « À 17 ans, les garçons ne l’intéressaient plus. J’étais l’exception. »

      David affirme aussi que Lévêque lui a dit « qu’il avait été très amoureux de Laurent Faulon. Je ne savais pas que Laurent Faulon était adolescent à l’époque ».

      Il indique également qu’il le voyait « souvent avec un pré-ado de 13 ans lors des vernissages ». Là encore, Claude Lévêque l’aurait présenté « comme son collaborateur ». Avant de confier qu’ils avaient eu « des rapports sexuels ». « Pour lui, c’était un trophée, le fantasme absolu. […] Quand le garçon a mis fin à leur relation, à peu près à l’époque de la Biennale de Venise [en 2009 – ndlr], Claude a fait une dépression, ça l’a anéanti », rapporte David. Contacté, ce jeune homme n’a pas donné suite.

      Julie Faitot, directrice d’un centre d’art et compagne de Jonathan Loppin, se remémore un autre épisode troublant, qu’elle a signalé à la justice.

      « Nous avons invité Claude Lévêque dans notre maison le 31 décembre 2013, il devait dormir chez nous, explique la jeune femme à Mediapart. La veille il a appelé en demandant s’il pouvait venir avec son filleul. Il est venu accompagné d’un adolescent qui devait avoir 12 ou 13 ans, il n’avait pas encore mué, et n’avait ni moustache ni barbe. On voulait préparer deux chambres, mais Claude Lévêque a répondu : “De toute façon il a peur, il va dormir avec moi.” Le gamin n’a rien dit. On a mis un matelas d’appoint dans la chambre, où il y avait un grand lit. Je ne sais pas s’ils ont dormi dans le même lit ou pas. »

      Interrogée par Mediapart, une voisine, venue pour le dîner, se souvient avoir trouvé la relation « bizarre ». Julie Faitot : « Le temps a passé, on n’y a plus pensé. »

      C’est cinq ans plus tard, au début de l’année 2019, que l’épisode lui revient quand elle est alertée par la compagne de Laurent Faulon. « Notre fils avait 8 ans. On s’est mis à réaliser. » Le 24 février, Julie Faitot écrit au parquet de Bobigny et au parquet de Nevers – un « signalement de mineur en situation préoccupante » pour lequel elle n’a jamais eu de réponse, et que Mediapart a consulté.

      Elle y décrit la soirée du 31 décembre 2013, et prétend que « Claude Lévêque avait continué à fréquenter cet adolescent pendant plusieurs années, qu’il passait régulièrement ses vacances scolaires chez lui à Montreuil [Seine-Saint-Denis] et dans la Nièvre ».
      Que savait le milieu de l’art ?

      D’autres figures du milieu de l’art nous ont aussi fait part de leurs souvenirs. Certains n’ont rien remarqué, disent-ils. Ainsi le galeriste Éric Fabre, qui expose Lévêque dans les années 1980. Dans un mail du 2 décembre 2020 à Laurent Faulon, dont Mediapart a pris connaissance et dont il nous a confirmé le contenu, le galeriste se remémore cette période : « Claude te présentait à moi, son galeriste. Tu m’avais alors dit que tu faisais avec tes jouets des sculptures. […] Il m’était impossible d’imaginer le drame du viol continu que tu subissais. »

      D’autres proches de Claude Lévêque que nous avons contactés évoquent, quant à eux, une supposée « pédophilie », mais qui n’était alors pas perçue comme « un fait monstrueux ».

      Laure , artiste, raconte : « J’ai connu Claude Lévêque au début des années 1980 dans le milieu de l’art, j’avais une vingtaine d’années. Sa pédophilie était sue mais on ne la considérait pas comme un fait monstrueux, on ne soupçonnait pas de maltraitance. Il n’y avait pas d’obscénité ou de geste de tendresse entre Claude et Laurent, dont je ne connaissais pas l’âge exact, on ne savait pas s’il y avait des rapports sexuels. Claude apparaissait comme un parrain qui lui facilitait sa vie professionnelle. Je comprends aujourd’hui le mal, je ne le voyais pas à l’époque. »

      Claude Lévêque en voyage avec son filleul, à Los Angeles en 2015. © Facebook Claude Lévêque en voyage avec son filleul, à Los Angeles en 2015. © Facebook
      Marie
      a fait la connaissance de Claude Lévêque aux Beaux-Arts de Bourges en 1972 : « Une petite bande d’amis d’environ 10-12 personnes s’est alors formée. Nous sommes restés les uns les autres plus ou moins proches jusqu’à la fin des années 1980. Je connaissais les relations amoureuses successives de Claude, surtout dans les années 1980, avec de grands adolescents, 14-17 ans environ et plus. […] Je ne me suis jamais mêlée de la vie intime de mes amis, même proches. Et aujourd’hui, je suis horrifiée. » Elle se souvient d’avoir vu Laurent Faulon et ses frères, alors adolescents, avec Claude Lévêque.

      Stagiaire au Magasin, centre d’art de Grenoble, en 1997, Romain *, commissaire d’exposition, y a croisé Claude Lévêque, invité pour une résidence. Soulignant la possibilité d’« une complicité institutionnelle », il se remémore : « Il est venu avec un jeune garçon, de 15 ans maximum, un hypothétique assistant. Il n’y avait qu’une seule chambre et un lit pour les deux. Plusieurs personnes ont été choquées mais on a laissé faire. »

      À l’instar de plusieurs personnes qui revisitent leur passé, plusieurs acteurs de la culture s’interrogent désormais sur le sens de certaines œuvres du plasticien et sur la « disparition » des premières, aussi.

      Sur le site internet de l’artiste, la première œuvre répertoriée est une peinture aux accents orientalistes de 1976, montrant un jeune homme nu s’offrant au regard d’un homme en turban. Puis plus rien jusqu’en 1982. À cette période, Claude Lévêque réalisait des courts métrages. C’est l’un d’entre eux que mentionne Laurent Faulon dans sa plainte.

      Peu d’entre eux sont aujourd’hui visibles. L’œuvre la plus récente, Le Marronnier de la garde, a été tournée en 2007 et montre sur un fond musical mêlant rock et ballades d’Adamo et Françoise Hardy, un montage d’images de paysages ruraux, photos de famille et prises de vue d’un jeune garçon, âgé de 13 ans, se léchant le doigt, torse nu ou fumant la pipe.

      Les jeunes modèles, garçons de 10 à 15 ans, peuplent les œuvres des débuts. Ainsi de l’installation Grand Hôtel (1982), souvent présentée comme son œuvre séminale. Présentée à Créteil en 1982, elle a été peu vue depuis. Selon le commissaire d’exposition Éric Troncy, qui connaît Lévêque depuis son enfance, il « la gardait jalousement, un temps, il avait même prétendu l’avoir égarée », écrit-il dans le catalogue de la Biennale de Venise, en 2009. Sollicité par Mediapart, Éric Troncy n’a pas donné suite.

      À gauche, Laurent Faulon dans « Grand Hôte », une œuvre de Claude Lévêque. © DR À gauche, Laurent Faulon dans « Grand Hôte », une œuvre de Claude Lévêque. © DR
      Sur l’un des cadres posés, sur une table recouverte d’un tissu sombre, on peut reconnaître Laurent Faulon, photographié avec un autre adolescent au buste dénudé et le visage peint d’or. D’autres images montrent des « corps nus d’adolescents », selon un article du critique d’art Michel Nuridsany.

      Celui-ci analyse, dans un texte de 1985 paru dans Artpress, une autre œuvre de Claude Lévêque, Anniversaire III (1984), dont l’image a été retirée du site de l’artiste, mais dont subsiste l’URL et que l’on retrouve sur Pinterest. Cette sculpture ornée d’ampoules montre, vraisemblablement d’après une photographie, un garçon nu, le sexe légèrement dressé, devant un château de sable.

      Au fil du temps, son art se fait moins figuratif. Rares sont les enfants qui apparaissent ensuite dans ses œuvres. Seuls exemples : dans Anniversaire (1983), Lévêque ne retient que quatre noms, écrits au néon, surmontant des masses informes, sortes de paysages miniatures : Claude, Laurent, Régis, David.

      L’installation La Nuit, en 1984, montre les bustes auréolés d’enfants nus entourés de tipis. Sur une photo de 1996, on voit un adolescent de 14 ans, le corps recouvert de confiture (Agnès b. en avait alors fait un sac – interrogée par Mediapart, elle n’a pas donné suite). En 2006, il fait intervenir un garçon de 12 ans, dans une performance à Château-Thierry, pour l’exposition « Friandises intérieures ».

      En 2012, à Paris, dans une école élémentaire, il élabore une installation avec des enfants de 6 à 11 ans, et fait notamment poser deux d’entre eux dans l’appartement de fonction du directeur inoccupé, mis à sa disposition et dont il obscurcit les fenêtres. Il y reçoit des enfants par groupes de cinq et va visiter leurs chambres, chez eux. L’un d’eux écrit les mots « J’ai peur », qui seront transposés en néon rouge accroché au-dessus de la porte d’entrée de l’école.

      Petit à petit, dans la « collaboration » de Claude Lévêque avec des enfants, les écritures et dessins transférés de la page au néon vont remplacer leur image, notamment avec des mots qui, si on les associe aux faits supposés dénoncés, glacent le sang : « Je suis venu ici pour me cacher », « J’ris pas, j’pleure pas, j’dis rien », « Je ne regrette rien ».

      Pour Jonathan Loppin, « les écritures qu’utilise Claude Lévêque sont comme des récompenses pour les enfants, dont les gribouillages finissent en œuvres d’art ». La créativité des enfants alimente ainsi non seulement sa production artistique, mais aussi sa renommée et sa cote sur le marché de l’art – sans que l’on sache si les enfants sont rémunérés.

      Une quarantaine d’écritures ont ainsi été réalisées de 2012 à 2020 par un adolescent, entre ses 11 et 19 ans. Dernier en date : le mot Illumination, sur 12 mètres de largeur, a orné le beffroi de Montrouge cet automne.

      Entretenant le mélange entre réel et fiction, Claude Lévêque a ainsi, pour certains, semé des alertes dans son travail plastique : en plus des œuvres des débuts déjà citées, on retient le motif de l’enfermement et de l’emprise dans les cages qu’il a conçues, mobilier ou jouets d’enfants malmenés.

      L’ours Gros Bleu sur la page Facebook de Claude Lévêque. © Facebook L’ours Gros Bleu sur la page Facebook de Claude Lévêque. © Facebook
      Dans certaines œuvres, il montre des peluches qu’il emportait souvent avec lui. « À propos d’elles, il nous racontait : “On s’était échangé des objets’’, comme s’il avait le même âge que les enfants », selon l’artiste Jonathan Loppin.

      Ainsi le hérisson « Boulette », et surtout l’ours « Gros Bleu », qui ont tous deux appartenu à Laurent Faulon. Gros Bleu apparaît dans plusieurs œuvres, comme l’affiche J’ai rien à perdre, je suis déjà mort (1993), mais aussi sur Facebook, dans des posts où Claude Lévêque le montre l’accompagnant lors de ses nombreux voyages. En juin dernier, il a renvoyé les deux peluches à Laurent Faulon, à sa demande. Le colis est arrivé sans un mot.

      Une fois la plainte déposée, la justice a tardé à réagir. Est-ce parce que les faits concernant Laurent Faulon datent de plus de trente ans et seraient a priori prescrits ? Parce qu’il n’avait pas d’avocat à l’époque de son dépôt de plainte ?

      Les auditions de témoins et de victimes potentielles n’ont démarré qu’au compte-gouttes en septembre 2020. Des délais qui s’expliquent par « la charge très importante de la Sûreté territoriale de Seine-Saint-Denis, les urgences qu’elle doit traiter, et un certain nombre d’investigations nécessaires avant de procéder aux auditions », explique à Mediapart la procureure de la République de Bobigny.

      Le ministère de la culture, alerté par la direction de l’École supérieure d’art d’Annecy, où enseigne Laurent Faulon, a quant à lui réagi en novembre 2020, par un signalement écrit au parquet de Bobigny, au titre de l’article 40 du Code de procédure pénale. Le ministère de la culture et le parquet de Bobigny le confirment à Mediapart.

      L’avocate Laure Heinich, qui défend Laurent Faulon depuis juin 2020, estime que sa plainte « est la démonstration de la difficulté de survivre aux agressions sexuelles ». « Il lui aura fallu des années pour déposer une plainte qui est aussi une plainte citoyenne pour protéger d’éventuelles autres victimes. Il fait ce que les pouvoirs publics demandent aux citoyens. Comment expliquer dès lors la quasi-absence d’investigations depuis ? Le parquet s’interroge-t-il sur le message transmis à la société qu’il représente ? », demande Me Heinich.

      Laurent Faulon, quant à lui, milite désormais pour que la notion de consentement soit complètement revisitée – notamment l’idée d’un seuil d’âge pour les mineurs en dessous duquel toute relation sexuelle avec une personne plus âgée serait considérée comme un viol. Il plaide aussi pour l’imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineurs.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/130121/pedocriminalite-plusieurs-temoins-accablent-l-artiste-claude-leveque?ongle

    • Affaire très similaire à celle de #madzneff
      Un pédo-prédateur sexuel qui agit au grand jour et dont l’oeuvre est construite autour de la sexualisation des mineurs et qui reçoit des aides de l’état. On apprend qu’en 2012 il est invité en résidence 4 mois dans l’école primaire de la goute d’or et qu’il est logé dans l’école et que les gosses pouvaient venir « spontanément » lui rendre visite...

    • CLAUDE LEVÊQUE : MÊME PAS PEUR !
      https://inferno-magazine.com/2012/05/07/claude-leveque-meme-pas-peur

      Claude Lévêque « Seasons in the Abyss » / Du 7 mai au 3 juillet 2012 / Ecole Pierre Budin, Paris XVIIIe.

      Claude Lévêque a été invité en résidence à l’école Pierre Budin dans le quartier de la Goutte d’Or, à Paris. Il a développé, en collaboration avec des enfants âgés de 6 à 11 ans, une installation in situ. Une expérience inédite en France dans une école élémentaire.

      L’appartement de fonction du directeur, actuellement inoccupé, a été mis à la disposition de Claude Lévêque pour qu’il y réalise une exposition qui implique l’ensemble des élèves de l’école. Pierre Perrin, le directeur de l’établissement, est aussi le commissaire de cette exposition. Pour la réaliser, l’artiste a mis en place les conditions d’un dialogue avec les enfants pour l’élaboration du projet, et pour sa réalisation. Les traces lumineuses produites par les phares des voitures au plafond, le soir au moment de s’endormir, Une projection inversée de ce qui se passe en temps réel dans la cour de récréation, sont quelques unes des idées émises qui ont donné à l’exposition sa tonalité. Celle-ci explore l’au-delà du mobilier utilitaire de l’école, en le confrontant à des objets « précieux » prêtés par les enfants ou, plus rarement, choisis par eux dans les dépôts d’Emmaüs où ils se sont rendus avec l’artiste. Des jeux de double et de surfaces réfléchissantes démultiplient ces éléments. L’exposition est intitulée Seasons in the Abyss d’après une chanson des Slayer, un groupe américain de trash métal dont la poésie tourmentée, et les sons puissants, s’écoutent à plein volume. Cette évocation des profondeurs abyssales renvoie aussi à des lieux obscurs dans lesquels les repères spatiaux se brouillent. La bande son de l’exposition, en revanche, ajoute un élément céleste, avec des piaillements superposés d’oiseaux stridents et convulsifs .

      Dans l’appartement aménagé de pupitres et de chaises d’écoliers récupérés à la Mairie de Paris, Claude Lévêque a reçu successivement des petits groupes de cinq enfants, lors de séances préparatoires . Il a simultanément mis en place des ateliers d’écriture pour la réalisation de néons, invitant les enfants à écrire de la « main contraire », soit gauche pour les droitiers, et vice et versa. Durant les quatre mois de sa résidence, il a participé à certains repas collectifs à la cantine, pour le plus grand plaisir des enfants qui pouvaient, par ailleurs, lui rendre visite spontanément à l’appartement, selon des horaires définis avec les enseignants . Pour s’imprégner encore davantage de leurs univers, il a visité des chambres d’enfants . Bien que la Goutte d’Or abrite aussi des personnes particulièrement défavorisées, le quartier est classé Zone Urbaine Sensible (ZUS), ce sont les familles les plus aisées qui l’ont reçu. Par contre, les enfants se sont investis dans le projet indifféremment de leurs conditions sociales. Certains d’entre eux manifestant une aptitude particulière à appréhender le travail de Claude Lévêque, qui leur avait été présenté à la galerie Kamel Mennour, lors de l’exposition Basse Tension, et à travers des DVD, et des catalogues. Ils ont également visité le Musée du Louvre avec l’artiste.

      Le parcours qui résulte de ce processus commence déjà dans la rue Pierre Budin. Les mots J’ai peur , en lettres de néon rouge placés sur la partie supérieure vitrée de la porte d’entrée du bâtiment, accueillent le visiteur. Cette écriture manuscrite d’Amine, un élève de CE2, évoque les punitions scolaires (d’autrefois), une violence ordinaire toujours actuelle, tout en rappelant que les enfants aiment aussi les histoires qui font un peu peur. Elle opère aussi comme une clefs d’entrée à l’espace fictif de l’exposition, en conférant un aspect cinématographique à la rue. Cette porte franchie, un couloir étroit aux murs jaunis conduit à la cours de récréation délimitée par les bâtiments scolaires et plongée, ce jour-là, dans un silence provisoire. Sur la gauche, un escalier mène au 1er étage où se trouve l’appartement traversant du directeur. Il est composé de trois chambres côté rue, d’un salon côté cour, d’un réduit et d’une cuisine (non investie), soit six pièces articulées autour d’un couloir. Dotées d’un plafond haut, de parquet en bois, et de fenêtres barbouillées de traces de peinture noire et mate qui filtrent la lumière du jour, elles sont plongées dans une semi-obscurité. Dans le réduit, un château fort miniature posé au sol, baigne sous un puits de lumière naturelle. Dans le salon attenant, une ampoule suspendue par un long fil électrique éclaire les vestiges d’un jouet en plastique de couleur pastel,un château-nuage Barbie caractéristique de ceux réservés aux filles. Les surfaces nacrées forment, en s’entrelaçant, un cercle qui brillent sous la lumière artificielle comme un nid de serpents, ou de guimauves géantes. La présence des enfants, jusque-là suggérée par des traces discrètes, se manifeste plus ouvertement dans les trois chambres côté rue où des pupitres, des bancs et des chaises sont empilés de manière chaotique, à la limite du déséquilibre.

      Des boules à facettes, placées par paires à la hauteur des yeux des adultes, et à celle des enfants, projettent sur les murs, en tournant sur elles-mêmes, des particules de lumière. Des miroirs sans teint réfléchissent, en les démultipliant, d’innombrables petits objets du quotidien confronté au matériel scolaire anonyme. Une étoile de Noël éteinte au sol, un petit piano noir, des coupes de vainqueur, un doudou vert, l’image d’un clown dans un cadre, une voiture jaune posée sur un pied de table jaune, deux wagons de train miniatures, une mappemonde, une minuscule chaise rose à côté d’une grande lampe de chevet, un nounours à la mer, une voiture clignotante… Nichés dans chaque recoin, comme dispersés suite à une douce tempête , ces objets forment des micro fictions, pareilles à celles que l’on trouve dans les chambres d’enfant. Des espaces sensibles et sophistiqués, dans lesquels le vocabulaire enfantin qui fusionne avec celui de Claude Lévêque, aurait pu inspirer à Charles Baudelaire cette phrase : « Le génie, c’est l’enfance retrouvée à volonté »

      Josiane Guilloud-Cavat

      Seasons in the Abyss / Du 7 mai au 3 juillet 2012 / Ecole Pierre Budin 5, rue Pierre Budin 75018 Paris / M° Château Rouge – ligne 4 ou Marcadet Poissonniers