• Vaccins contre le Covid-19 : dans les coulisses des contrats entre l’UE et les groupes pharmaceutiques
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/02/03/vaccins-contre-le-covid-19-dans-les-coulisses-des-contrats-europeens_6068574

    Les négociations entre la Commission et les laboratoires restent opaques, mais leur déroulé suggère que la maturité scientifique des vaccins n’a pas été décisive dans les priorités données aux préachats.

    [...] En réalité, si l’on s’en tient à la chronologie des avancées cliniques, une conclusion s’impose : les vaccins dont les preuves scientifiques sont les plus rapidement convaincantes obtiennent leur contrat de pré-achat en dernier. C’est le cas de Moderna, dont les essais cliniques débutent avant tous les autres concurrents, dès mars 2020. Une première publication sur le singe est disponible dès juillet. Pour autant, son pré-achat n’est signé que le 24 novembre et porte sur le plus petit volume contractualisé à ce jour : 160 millions de doses. Le montant du prépaiement est inconnu.

    Enfin, il y a la question du prix. « Les standards américains tendent à renchérir le prix des vaccins », juge Anne Bucher. D’après les négociateurs, « le prix était un des points les plus complexes à négocier ». Moderna comme Pfizer-BioNTech, les deux derniers contrats de la Commission, sont les vaccins les plus chers du portefeuille européen. Même s’il est délicat de comparer les prix à l’international − il faudrait notamment connaître les prépaiements par vaccin −, l’Europe a négocié des prix globalement inférieurs à ceux des Etats-Unis ou du Royaume-Uni.

    Est-ce la raison de ces négociations interminables ? Est-ce que ces prix plus bas expliquent aussi le peu de clauses contraignantes en cas d’éventuels retards de livraison par exemple ? « Les prix et les volumes ont été fixés bien avant la signature du contrat », dès août dans le cas de Moderna, souligne-t-on au ministère de l’économie et des finances français. « Si les signatures formelles des contrats ont pu être plus tardives, c’est pour des raisons bien éloignés des prix. » Sans pour autant donner davantage de précisions.
    « Je ne crois pas que le prix soit la faiblesse des contrats européens. On retrouve en réalité le même écart que pour les autres médicaments, autour de 30 % moins chers en Europe qu’aux Etats-Unis. Par ailleurs, les volumes des contrats signés par la Commission européenne sont plus importants, ce qui explique aussi les prix plus compétitifs, assure également le lobbyiste Antoine Mialhe. La vraie question est plutôt : pourquoi avons-nous eu besoin de Pfizer-BioNTech et Moderna pour nous sortir de cette situation ? »

    Dans son rapport, Anne Bucher apporte un élément de réponse : « Contrairement aux Etats-Unis, où l’investissement public dans la recherche en vaccins est passé de 13 millions d’euros à 42,2 millions d’euros entre 2002 et 2008, les pouvoirs publics en Europe se sont désengagés de la recherche en vaccins, les subventions passant de 23,2 millions à 1,9 million sur la même période. »

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