les Afro-Américains plus touchés, moins vaccinés

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  • Covid-19 : les Afro-Américains plus touchés, moins vaccinés
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/02/06/covid-19-les-afro-americains-plus-touches-moins-vaccines_6069034_3244.html

    Selon les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies, la population noire a reçu 5,4 % des doses, alors qu’elle représente 13 % de la population, mais surtout 16 % des personnels de santé et 14 % des employés des maisons de retraite.Comment améliorer le taux de vaccination chez les Afro-Américains aux Etats-Unis ? La question taraude la nouvelle administration, qui s’est engagée à réduire les inégalités raciales, y compris dans la gestion de la crise sanitaire. Car un mois et demi après le lancement de la campagne de vaccination à travers le pays, les premiers chiffres portant sur 13 millions de vaccinés sont édifiants : selon les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), la population noire a reçu 5,4 % des doses, alors qu’elle représente 13 % de la population, mais surtout 16 % des personnels de santé et 14 % des employés des maisons de retraite, deux catégories prioritaires à travers le pays. La population blanche a reçu 60 % des vaccins, un chiffre correspondant à sa part dans les personnels de santé.A New York, la mairie a indiqué que les Afro-Américains n’ont reçu que 11 % des doses, alors qu’ils représentent 24 % de la population de la ville. Un même constat est dressé à Philadelphie (12 % d’Afro-Américains vaccinés pour une population noire à 44 %) ou à Chicago (15 % de vaccinés pour 30 % des habitants) et dans d’autres grandes villes. Marcella Nunez-Smith, responsable du groupe de travail sur l’égalité dans la lutte contre le Covid-19 au sein de l’administration Biden, a reconnu le 1er février que « les Noirs n’étaient pas vaccinés au même rythme que les Blancs » et que les chiffres plus complets ne feraient que confirmer ce déséquilibre. Début février, quelque 28 millions de personnes ont reçu une ou deux doses.
    Le constat est d’autant plus inquiétant que les Afro-Américains sont proportionnellement beaucoup plus affectés que les Blancs par le Covid-19. En novembre, une étude de l’American Heart Association montrait que les patients noirs et hispaniques représentaient 60 % des personnes hospitalisées. Au niveau national, les Afro-Américains ont 1,5 fois plus de risque de mourir du Covid-19 que les Blancs, selon les statistiques collectées par le Covid Tracking Project et l’université de Boston.
    Dans le district de Columbia, les morts du Covid-19 sont issus de la communauté noire à 75 %, alors qu’ils ne constituent que 46 % de la population. Dans le Michigan, ils représentent 14 % des habitants, mais 24 % des morts. Des raisons socio-économiques et une inégalité chronique dans l’accès aux soins expliquent cette disparité. Les Afro-Américains sont en outre plus susceptibles d’occuper des emplois de travailleurs essentiels exposés et de vivre dans des conditions ne favorisant pas la distanciation physique.
    Dans ce contexte, l’accès à la vaccination pour les populations noires est considéré comme un enjeu de santé publique. Le gouvernement vient d’annoncer la mise à disposition de vaccins dans des pharmacies de certains quartiers ciblés. Dans la ville de Washington, des opérations de porte-à-porte ont débuté ces derniers jours pour toucher les populations les plus isolées ou les plus réfractaires. Car les campagnes de vaccination se heurtent aussi à une méfiance des Afro-Américains envers le vaccin. Plus d’un tiers d’entre eux n’envisagent pas de se faire vacciner, contre quelque 20 % des Blancs et des Hispaniques. Les femmes se montrent plus encore plus sceptiques que les hommes, et les jeunes plus réticents que les plus de 60 ans. Seuls 38 % des 18-44 ans envisagent la vaccination (contre 68 % des plus de 60 ans). Les Afro-Américains citent la peur des effets secondaires, mais aussi une méfiance traditionnelle envers les vaccins. Leur taux de participation aux essais cliniques est proportionnellement inférieur à celui des Blancs.
    Cette réticence est ancrée dans l’histoire. La communauté noire reste marquée par l’étude sur la syphilis menée durant quarante ans dans la ville de Tuskegee (Alabama). Entre les années 1930 et les années 1970, plusieurs centaines d’hommes noirs atteints de cette maladie sexuellement transmissible sont restés sans traitement, à titre expérimental. Nombre de familles noires ont aussi en mémoire les stérilisations forcées effectuées sur des milliers de femmes noires jusque dans les années 1970. Face à ces décennies de méfiance, des médecins et infirmiers afro-américains ont publié une « Lettre d’amour à l’Amérique noire », dans laquelle ils invitent leurs compatriotes à participer aux essais cliniques et à se faire vacciner. En décembre 2020, devant les caméras de télévision, la première dose de vaccin avait été administrée à une infirmière afro-américaine de New York par une de ses collègues également afro-américaine. Un choix qui ne devait rien au hasard.

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