24 février 2021, mort cette nuit de Philippe Jaccottet.
depuis tellement longtemps lu, lecture décisive je m’en serai rendu compte, remercié silencieusement, évoqué, le vaste unilivers découvert par lui ; dans l’article du Temps ▻https://www.letemps.ch/culture/philippe-jaccottet-sen-alle-chemins-terre-mots touché aussi d’y lire le nom d’Anne Perrier).
ici en hommage, tiré de dès les débuts de L’Effraie , premier lu :
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Je sais maintenant que je ne possède rien,
pas même ce bel or qui est feuilles pourries,
encore moins ces jours volant d’hier à demain
à grands coups d’ailes vers une heureuse patrie.
Elle fut avec eux, l’émigrante fanée,
la beauté faible, avec ses secrets décevants,
vêtue de brume. On l’aura sans doute emmenée
ailleurs, par ces forêts pluvieuses. Comme avant,
je me retrouve au seuil d’un hiver irréel
où chante le bouvreuil obstiné, seul appel
qui ne cesse pas, comme le lierre. Mais qui peut dire
quel est son sens ? Je vois ma santé se réduire,
pareille au feu bref au-devant du brouillard
qu’un vent glacial avive, efface... Il se fait tard.
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ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞPortovenere
La mer est de nouveau obscure. Tu comprends,
c’est la dernière nuit. Mais qui vais-je appelant ?
Hors l’écho, je ne parle à personne, à personne
Où s’écroulent les rocs, la mer est noire, et tonne
dans sa cloche de pluie. Une chauve-souris
cogne aux barreaux de l’air d’un vol comme surpris,
tous ces jours sont perdus, déchirés par ses ailes
noires, la majesté de ces eaux trop fidèles
me laisse froid, puisque je ne parle toujours
ni à toi, ni à rien. Qu’ils sombrent, ces « beaux jours » !
Je pars, je continue à vieillir, peu m’importe,
sur qui s’en va la mer saura claquer la porte.
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et puis juste après lu, lu dans L’Ignorant ,
La patience, La voix,
et ce poème
..
ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞL’inattendu
Je ne fais pas grand-chose contre le démon :
je travaille, et levant les yeux parfois de mon
travail, je vois la lune avant qu’il fasse clair.
Que reste-t-il ainsi qui brille d’un hiver ?
A la plus petite heure du matin je sors,
la neige emplit l’espace jusqu’aux plus fins bords,
l’herbe s’incline devant ce muet salut,
là se révèle ce que nul n’espérait plus.
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