A propos d’une tribune du Monde sur les indicateurs épidémiques.
Covid-19 : « Pour anticiper la progression de l’épidémie, il faut regarder les bons indicateurs »
►https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/02/27/covid-19-pour-anticiper-la-progression-de-l-epidemie-il-faut-regarder-les-bo
En bref : article nul, écrit par des amateurs, médecins dans d’autres spécialités.
Je suis un peu sidéré. Je n’ai aucune formation médicale autre que mes lectures sur l’Internet depuis un an, mais j’ai lu la première moitié de l’article en me disant qu’il ne disait que des trivialités, le B-A-BA de ce qu’il faut avoir compris pour suivre ce qui se passe, et que j’ai intégré il y a 10 mois, en avril dernier. Du coup je me suis dit que les auteurs doivent être (comme moi) des amateurs, et j’ai vérifié. Ces choses n’entrent nullement dans leur spécialité médicale, et je me demande à quel titre ils s’expriment et pour quelle raison le Monde leur ouvre ses colonnes. Je ne suis pas le seul lecteur du Monde à me poser des questions sur l’absence de compétence des auteurs. Peut-être cela fait-il partie de la campagne de comm de la présidence, selon laquelle nous serions dirigés par le nouveau génie des Carpathes (cf Olivier Beaumont dans le Parisien) qui en remontrerait à tout son conseil scientifique. ▻https://seenthis.net/messages/903824
J’aurais pu aussi écrire un tel article, depuis longtemps, sauf que je ne me serais pas aventuré à dire "... contredisant ainsi toutes les hypothèses d’une évolution exponentielle de l’épidémie." Parce que l’on a en fait 2 épidémies, dont la dominante régresse exponentiellement, tandis que l’autre (variants) commence à croître exponentiellement sur une base bien plus forte (et c’est pour cela que la deuxième se substitue à la première). L’efficacité du couvre-feu est limitée, et c’est pour cela que la décroissance de la première épidémie, amorcée en janvier, n’a pas été plus forte. Donc imaginer qu’il pourrait contenir la seconde épidémie relève de la naïveté, pour ne pas dire plus, quoi que puissent en gager les auteurs. Tout au plus peut-on rêver qu’un évènement climatique inattendu viendra à notre secours.
Quant à la saturation des lits, elle est bien réelle, car les politiques ne prennent des mesures que quand les lits se saturent. L’idée semble être que tout est tolérable, tant que l’on a des lits de réa disponibles pour les malades. En conséquence, quel que soit leur nombre, les lits seront saturés. Donc en ajouter ne sert qu’à encourager la procrastination qui laisse croître la contagion, et donc le nombre de malades et de victimes. En France, les lits tuent .
On peut craindre le même effet en ce qui concerne la vaccination des plus vulnérables. Cela ne va pas beaucoup ralentir la circulation du virus, car, cherchant à se protéger, les plus vulnérables contribuent peu à cette circulation. Par contre, cela va libérer de nombreux lits de réa dont les plus vulnérables formaient les trois quarts des occupants. On pourra donc laisser le virus circuler encore plus rapidement, et ainsi augmenter de façon tolérable (c’est-à-dire avec des lits de réanimation disponibles ) le nombre des victimes plus jeunes. Ceci n’est bien sûr pas une critique de la vaccination des plus vulnérables, mais de la façon dont est gérée l’épidémie.
Cette histoire d’indicateurs amont et aval (de quoi donc), bien que principale motivation de l’article, me semble du pipo. Les indicateurs sont des mesures de la contagion qui sont observables, plus ou moins précisément, avec un délai plus ou moins long par rapport à un moment (un état) de la contagion que l’on veut observer. Plus ce délai est long et moins ces indicateurs sont utiles pour la prédiction, puisque les choses ont eu plus de temps pour changer. Mais chacun de ces indicateurs a des biais ou des problèmes de précision qui lui sont propres et qui affectent l’utilité ou la fiabilité de la mesure. Il importe souvent de les utiliser ensemble, car on peut en utiliser certains pour étalonner les autres.